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        <title>Le Mary sans femme. Comédie</title>
        <author key="Montfleury, Antoine Jacob (1639-1685)">Antoine Jacob Montfleury</author>
        <editor>Gwendolyn Kergoulay</editor>
        <principal>Georges Forestier</principal>
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      <editionStmt>
        <edition>Édition critique établie par Gwendolyn Kergoulay dans le cadre d'un mémoire de
          master 1 sous la direction de Georges Forestier (2010)</edition>
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          <name>Amélie Canu</name>
          <resp>Édition XML/TEI</resp>
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          <name>Frédéric Glorieux</name>
          <resp>Informatique éditoriale</resp>
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      <publicationStmt>
        <publisher>CELLF 16-18 (CNRS &amp; université Paris-Sorbonne)</publisher>
        <date when="2014"/>
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        <bibl><title>Le Mary sans femme</title>, par <author>M. de Montfleury</author>dans <title>Les Oeuvres de Monsieur Montfleury, contenant ses pièces de théâtre, représentées par la Troupe des Comédiens du Roy à Paris,</title> tome second, À Paris, chez Christophe David, Quay des Augustins, à l'Image S. Christophe. M. DCC. V. <hi rend="i">Avec privilège du Roy</hi></bibl>
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          <term subtype="comedy" type="genre">Comédie</term>
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      <titlePage>
        <docTitle>
          <titlePart type="main">LES ŒUVRES <lb/>DE MONSIEUR MONTFLEURY, <lb/>CONTENANT <lb/>SES PIECES DE THEATRE.<hi rend="i">Représentées par la Troupe des Comediens <lb/>du Roy à Paris.</hi>TOME SECOND.</titlePart>
          <titlePart type="main">Le Mary sans femme</titlePart>
          <titlePart type="sub">Comédie</titlePart>
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        <docImprint>A PARIS, <lb/>Chez CHRISTOPHE DAVID, Quay <lb/>des Augustins, à l’Image S. Christophe. <lb/>M. DCCV <hi rend="i">AVEC PRIVILEGE DU ROY.</hi></docImprint>
        <docAuthor>PAR M. DE MONTFLEURY.</docAuthor>
      </titlePage>
      <div>
        <head>Avant-propos</head>
        <p>Notre recherche a pour sujet <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> d’Antoine Jacob de Montfleury. A priori, nous sommes en présence d’une pièce oubliée, d’un auteur qui l’est tout autant... En effet, le nom de Montfleury a disparu des anthologies littéraires modernes et il faut chercher dans les ouvrages spécialisés sur le théâtre du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle pour voir apparaître son nom…</p>
        <p>On se rend alors compte qu’Antoine Jacob de Montfleury fut un illustre dramaturge comique de son temps, grand rival de Molière, et que <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, première comédie en cinq actes de l’auteur, remporta un franc succès au XVII<hi rend="sup">e</hi> et même au XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle.</p>
        <p>Il est donc intéressant de s’attacher à la pièce : retracer son histoire, de la scène à l’édition ; étudier ses sources, mais aussi ses originalités, à l’aune des critères de l’époque ; pour essayer enfin de comprendre ce qui entraîna son succès, et son oubli aujourd’hui...</p>
      </div>
      <div>
        <head>Antoine Jacob Montfleury (1639-1685)</head>
        <div>
          <head>Un dramaturge oublié</head>
          <p>Antoine Jacob de Montfleury fut un grand dramaturge de la seconde moitié du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. Bien que la postérité n’ait retenu que le nom de Molière, les deux écrivains furent contemporains et les dates de leurs productions se superposent : de 1660 à 1678, Antoine Jacob de Montfleury écrivit à peu près une pièce par an<note place="bottom">Voir la liste chronologique des pièces de théâtre de Montfleury en annexe.</note>, alors que la production théâtrale de Molière se concentra autour des années 1655 et 1673. La carrière de deux auteurs présente de curieuses ressemblances<note place="bottom">Lancaster note à propos de Montfleury : « His career as a dramatist bears a curious resemblance to Moliere’s, for he made his début at Paris with a one-act farce ; he wrote two <hi rend="i">Ecole</hi>-plays ; he once attempted a tragi-comedy as Moliere did a <hi rend="i">comédie héroïque</hi> ; his <hi rend="i">Impromptu de l’Hôtel de Condé</hi> was a reply to <hi rend="i">l’Impromptu de Versailles</hi> ; the <hi rend="i">Procès de la Femme juge</hi> resembles <hi rend="i">la Critique</hi> ; <hi rend="i">le Gentilhomme de la Beauce</hi> and an <hi rend="i">intermède</hi> of <hi rend="i">l’Ambigu comique, Pourceaugnac</hi> ; while characters in <hi rend="i">l’Ecole des Jaloux</hi> and <hi rend="i">la Fille capitaine</hi> recall, respectively, Sganarelle of <hi rend="i">le Cocu imaginaire</hi> and the protagonists of <hi rend="i">le Bourgeois Gentilhomme</hi>. » <hi rend="sc">Lancaster</hi>, H. C.,<hi rend="i"> A History of French dramatic Literature in the Seventeenth Century</hi>, Baltimore, the Johns Hopkins Press, 1929-1942, part III, vol. 1, p. 271-272. Traduction : Sa carrière de dramaturge ressemble étrangement à celle de Molière car il fit ses débuts à Paris en écrivant une farce en un acte : il écrivit deux pièces-<hi rend="i">École</hi> ; à une seule reprise il tenta une tragi-comédie tout comme Molière écrivit une <hi rend="i">comédie héroïque</hi> ; son <hi rend="i">Impromptu de l’Hôtel de Condé</hi> fut une réponse à <hi rend="i">l’Impromptu de Versailles</hi> ; le <hi rend="i">Procès de la Femme juge</hi> ressemble à <hi rend="i">la Critique</hi> ; de la même manière <hi rend="i">le Gentilhomme de la Beauce</hi> et l’<hi rend="i">intermède</hi> de <hi rend="i">l’Ambigu comique</hi>, ressemblent à <hi rend="i">Pourceaugnac</hi> ; tandis que les personnages de <hi rend="i">l’Ecole des Jaloux</hi> et de <hi rend="i">la Fille capitaine</hi> rappellent, respectivement, Sganarelle dans <hi rend="i">le Cocu imaginaire</hi> et les protagonistes du<hi rend="i"> Bourgeois Gentilhomme</hi>.</note>, allant de pair avec de fortes rivalités.</p>
          <p>Fils de Zacharie Jacob, célèbre comédien de la troupe de l’hôtel de Bourgogne, et mari de Marie-Marguerite Soulas, fille de Floridor, comédien non moins illustre de la troupe, Antoine Jacob de Montfleury fut intimement lié à la vie de l’hôtel de Bourgogne. En 1663, lorsque Molière se moque de Montfleury père dans <hi rend="i">l’Impromptu de Versailles</hi>, le raillant d’être « gros et gras comme quatre » et se moquant de sa déclamation boursouflée, c’est Antoine Jacob qui répond avec l’<hi rend="i">Impromptu de l’hôtel de Condé</hi>. Au-delà des rivalités personnelles, ce sont deux troupes qui s’affrontent, celle du Palais-Royal et celle de l’Hôtel de Bourgogne, cherchant à s’attirer les faveurs du public et créant l’émulation dans la vie théâtrale de l’époque.</p>
          <p>Au regard de la postérité, Molière sort vainqueur de cette concurrence. Lancaster met en avant l’infériorité de Montfleury fils :</p>
          <quote>
            <p><hi rend="i">Lacking Molière’s genius, he had dramatic talent and he seems to have watched his rival closely in the hope of supplying the troupe of the Hôtel with comic material that might enable it to hold its own against its most successful competitor</hi><note place="bottom"><hi rend="sc">Lancaster</hi>, H. C.,<hi rend="i"> op. cit.</hi>, part III, vol. 1, p. 272. Traduction : Dépourvu du génie de Molière, il avait un don théâtral et semble avoir observé attentivement son rival dans l’espoir de procurer à la troupe de l’Hôtel les outils comiques nécessaires à son maintien face à son taluentueux concurrent.</note>.</p>
          </quote>
          <p>Mais, c’est peut-être trop comparer le travail des deux dramaturges, quand l’un<note place="bottom">Molière.</note> excelle dans la comédie de mœurs et de « caractère », l’autre<note place="bottom">Montfleury.</note> est davantage tourné vers la comédie d’intrigue. L’œuvre d’Antoine Jacob de Montfleury ne doit donc pas être sous-estimée, et fit d’ailleurs l’objet de nombreuses études<note place="bottom">Outre les critiques que nous avons cités, Rohr a consacré des recherches importantes à Antoine Jacob de Montfleury.</note>.</p>
        </div>
        <div>
          <head>Éléments biographiques</head>
          <p>L’avertissement aux lecteurs de l’édition collective de 1739<note place="bottom"><hi rend="i">Théâtre de Messieurs de Montfleury Père et fils, nouvelle éd. augmentée de trois Comédies, avec des Mémoires sur la vie et les Ouvrages de ces deux Auteurs, Tome Premier</hi>, Paris, La Compagnie des Libraires, 1739.</note> rassemble des informations sur Montfleury, père et fils. L’éditeur a fondé ses propos sur des témoignages de la fille<note place="bottom">Mademoiselle du Plessis.</note> et de la petite-nièce<note place="bottom">Christine-Antoinette-Charlotte Desmares.</note> d’Antoine Jacob de Montfleury<note place="bottom">Voir arbre généalogique de l’auteur en annexe.</note>.</p>
          <p>Antoine fut baptisé le 22 septembre 1639<note place="bottom">Auguste Jal aurait retrouvé l’acte de naissance suivant : « Le jeudy 22<hi rend="sup">e</hi> septembre 1639 (fut baptisé) <hi rend="i">Antoine</hi>, fils de Zacharie Jacob, comédien du Roy, et de Jehanne de La Chappe, sa femme ; parrain « Anthoine Jomin, comédien du Roy, de la paroisse de St-Nicolas des Champs » ; marraine « Gabrielle Messier, femme d’Adam » (<hi rend="i">sic</hi>, p<hi rend="sup">r</hi> Hardouin) « de s<hi rend="sup">r</hi> Jacques, de la paroisse de St-Sauveur. » Je ne sais qui était cet Antoine Jomin. » <hi rend="sc">Jal</hi>, A., <hi rend="i">Dictionnaire critique de biographie et d’histoire</hi>, Genève, Slatkine Reprints (Réimpression de l’édition de Paris, 1872), 1970, vol. 2, p. 889.</note>. Aîné des six enfants que Zacharie Jacob eut avec Jeanne de La Chappe, « actrice, veuve et fille de comédiens<note place="bottom"><hi rend="sc">Jal</hi>, A., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 889.</note> », Antoine baigna très jeune dans l’univers théâtral, le pseudonyme qu’il emprunta à son père entraînant par la suite de nombreuses confusions : on en vint à attribuer à Montfleury père des pièces écrites par son fils<note place="bottom">L’éditeur de leurs œuvres en deux volumes in-12 (Paris, Christophe David, 1705) n’en fait plus qu’une seule et même personne, présentant le recueil ainsi : <hi rend="i">Œuvres de M. Montfleury, contenant ses pièces de théâtre</hi>.</note>, et Antoine Jacob fut crédité d’une carrière de comédien, alors qu’il ne monta vraisemblablement jamais sur les planches<note place="bottom">Victor Fournel revient longuement sur cette confusion : « L’absence du nom de Montfleury dans la liste des acteurs vivant de l’hôtel de Bourgogne et des autres théâtres, donnée par Chappuzeau en 1674, et dans toutes celles qui sont contemporaines ou postérieures, est déjà une raison sans réplique. Plus loin, Chappuzeau marque le nom de Montfleury parmi ceux des acteurs « qui ne sont plus, » et il veut parler du père qui était mort en 1667, mais nulle part il n’est question du fils dans son livre. Une fois Zacharie Jacob passé de vie à trépas, le nom de Montfleury disparaît des catalogues d’acteurs. » <hi rend="sc">Fournel, V.</hi>, <hi rend="i">Les Contemporains de Molière, Recueil de comédies, rares ou peu connues, jouées de 1650 à 1680, avec l’histoire de chaque théâtre, des notes et notices biographiques, bibliographiques et critiques</hi>, Genève, Slatkine Reprints, 1967, vol. 1, p. 213-214. Seule M<hi rend="sup">me</hi> Deierkauf-Holsboer se met en porte-à-faux avec la publication, dans son ouvrage, d’une gravure représentant Antoine Jacob Montfleury dans une scène tragique (<hi rend="i">Collection Rondel)</hi>. <hi rend="sc">Deierkauf-Holsboer</hi>, S. W., <hi rend="i">Le Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne</hi>, Paris, Nizet, 1970, vol. 2, planche VII.</note>. Le mariage d’Antoine perpétua la tradition familiale puisque, le 5 février 1666, il épousa à son tour une jeune fille liée à la troupe de l’hôtel de Bourgogne, Marie-Marguerite Soulas, dont il aurait eu « au moins deux enfants »<note place="bottom">Auguste Jal rapporte les dates de deux actes de naissance découverts à Saint-Sauveur : 9 juillet 1669 et 14 mars 1672. <hi rend="sc">Jal</hi>, A., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 889. L’avertissement au lecteur de 1739 révèle l’existence d’un seul enfant : M<hi rend="sup">lle</hi> du Plessis.</note>.</p>
          <p>Auguste Jal rapporte aussi qu’Antoine Jacob « demeurait rue des Deux-Portes et se disait « avocat » »<note place="bottom"><hi rend="sc">Jal</hi>, A., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 889.</note>. En effet, il fut licencié en droit et reçu avocat au Parlement en 1660. Mais, la même année, il écrivit sa première comédie en un acte, <hi rend="i">Le Mariage de Rien</hi>, qu’il signa de son nom : « Antoine Jacob, advocat au parlement ». Il en écrivit une autre l’année suivante, <hi rend="i">Les Bestes raisonnables</hi>, et sembla alors définitivement abandonner le Barreau en faveur de l’écriture.</p>
          <p>En 1674, l’échec de <hi rend="i">Trigaudin ou Martin Braillart</hi> annonça la fin de sa carrière dramaturgique. Il n’écrivit plus que deux pièces, en 1677 et 1678, <hi rend="i">Crispin Gentilhomme</hi> et <hi rend="i">La Dame médecin</hi> préférant se tourner vers une autre activité, la finance. En 1678, Colbert le chargea d’une mission diplomatique : recouvrir certains revenus que le Parlement de Provence devait au roi ; tâche dont il s’acquitta fort bien et qui lui aurait valu de recevoir une place dans les Fermes Générales si l’hydropisie ne l’avait pas emporté le 11 octobre 1685 à Aix.</p>
        </div>
        <div>
          <head>Un auteur comique décrié</head>
          <p>Le théâtre d’Antoine Jacob de Montfleury est connu au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle et plusieurs de ses pièces rencontrèrent un vif succès. En 1669, <hi rend="i">La Femme juge et partie</hi> serait même venue contrebalancer le succès de <hi rend="i">Tartuffe</hi>, dont la troisième version venait enfin d’être autorisée<note place="bottom">« Qui croiroit que le succès de cette admirable Pièce (<hi rend="i">le Tartuffe</hi>) eût été balancé par celui de <hi rend="i">la Femme Juge &amp; Partie</hi>, qui fut jouée à l’Hôtel de Bourgogne, aussi longtemps que <hi rend="i">le Tartuffe</hi> au Palais Royal ? » <hi rend="i">Vie de Moliere, avec des jugemens sur ses Ouvrages</hi> in <hi rend="sc">Parfaict, C.</hi> et F., <hi rend="i">Histoire du théâtre françois depuis son origine jusqu’à présent</hi>, 15 vol., Paris, 1735-49, vol. 10, p. 405.</note>.</p>
          <p>Les critiques littéraires, qui se sont attachés à l’œuvre de Montfleury, lui reconnaissent tous de grands talents comiques, une vivacité de style, des personnages plaisants et bien tracés... Mais, concernant la vraisemblance et la licence de son théâtre, les reproches fusent : « des crudités de langage, un malheureux penchant aux plaisanteries inconvenantes et d’un goût équivoque, une prédilection marquée pour les personnages qui, au fond, sont de francs coquins, une raillerie systématique des sentiments et des devoirs les plus respectables, enfin une rage de bouffonnerie qui ne s’arrête point à la limite où elle devient du cynisme, et qui n’a même pas l’air de soupçonner que cette limite existe. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Fournel, V.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 215-216.</note>  Malgré l’accueil favorable des ses contemporains<note place="bottom">On notera tout de même que beaucoup de commentateurs de Boileau ont vu, dans les derniers vers du Chant III de son <hi rend="i">Art Poétique</hi>, une allusion à Montfleury fils : v. 424-428, « Mais pour un faux Plaisant, à grossiere équivoque, / Qui, pour me divertir, n’a que la saleté ; / Qu’il s’en aille, s’il veut sur deux tréteaux monté, / Amusant le Pont-Neuf de ses sornettes fades, / Aux Laquais assemblez, joüer ses Mascarades. » <hi rend="sc">Boileau</hi>, <hi rend="i">Œuvres complètes</hi>, intro. Antoine Adam, éd. Françoise Escal, Bibliothèque de la Pléiade, Bruges, 1966.</note>, Montfleury fils pâtit de la mauvaise presse des critiques du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle, choqués par la moralité douteuse de la « vieille comédie »<note place="bottom"><hi rend="sc">Fournel, V.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 220. Plusieurs comédies de Montfleury furent malgré tout jouées jusqu’à la fin du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle.</note>. Pourtant, il semble bien que le spectateur du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle prenait plaisir à assister aux représentations du théâtre de Montfleury, retrouvant des anecdotes de son temps ou des emprunts à la comédie espagnole.</p>
          <p>La pièce que nous étudions, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, n’échappe pas à ces critiques : « Cette Comédie est écrite avec beaucoup de feu, bien conduite, et les scènes dialoguées dans le bon ton comique. Le sujet est riant mais il pêche du côté des bonnes mœurs, un homme qu’on démarie, et dont on donne la femme à celui qui l’a enlevée , n’est pas un tableau à présenter au Théâtre. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Parfaict, C.</hi> et F., <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 9, p. 200.</note> </p>
          <p>Pour juger par nous-mêmes de l’intérêt de la pièce, rappelons d’abord l’intrigue.</p>
        </div>
      </div>
      <div>
        <head>Argument du Mary sans femme</head>
        <div>
          <head>Acte I</head>
          <p>La scène se passe à Alger. Zaïre, la servante de Célime, demande à des esclaves de venir divertir sa maîtresse (Scène 1). Les esclaves en question, Julie et Carlos, se lamentent, ainsi que leurs valets respectifs, Marine et Tomire, chacun trouvant un responsable à l’issue tragique de leur fuite d’Espagne. Finalement, Marine apprend à tous la possibilité d’être sauvés par Dom Brusquin, le mari trompé de Julie, grâce à une lettre qu’elle lui a adressée (Scène 2). Zaïre reparaît pour annoncer la venue imminente de Célime et les met en garde contre l’humeur maussade de sa maîtresse (Scène 3). Restée seule, Zaïre souhaite le mariage de Célime et Fatiman, le gouverneur d’Alger, union qui lui rendrait la liberté (Scène 4). Avant de voir les esclaves, Célime interroge sa servante sur le comportement des deux amants, Julie et Carlos (Scène 5). Julie et Carlos concertent sur la manière d’aimer des européens. Célime demande à Carlos de rester et lui apprend qu’elle l’aime et entend partager cet amour (Scène 6). Carlos est fort embarrassé (Scène 7). Tomire informe son maître que Dom Brusquin vient de débarquer au port d’Alger avec l’intention de récupérer sa femme. Carlos est désespéré et entraîne Tomire pour s’assurer des dires de son valet (Scène 8).</p>
        </div>
        <div>
          <head>Acte II</head>
          <p>Dom Brusquin, maussade, lit la lettre de Marine. Son valet, Gusman, lui demande d’expliquer son humeur : Dom Brusquin fait alors part de ses peurs de cocuage, mais avoue aussi sa passion pour Julie qu’il veut récupérer contre rançon. Il souhaite tout de même s’assurer de la fidélité de sa femme auprès de Marine (Scène 1). Tomire amène Marine (Scène 2). Cette dernière éclate de joie devant Dom Brusquin qui lui promet une récompense. Il veut d’abord une explication de l’enlèvement et une assurance de la fidélité de Julie. Fatiman arrive et Marine se retire (Scène 3). Fatiman, accompagné de Stamorat, réclame 5000 ducats pour rendre Julie. Marchandage infructueux de Dom Brusquin. Fatiman sort voir Célime, avec des souhaits de mariage (Scène 4). Célime déclare à Fatiman qu’elle souhaite se marier : les chants de Carlos l’ont rendu amoureuse et pour remercier l’esclave elle demande à Fatiman de lui rendre la liberté. Zaïre est chargée d’annoncer la bonne nouvelle à Carlos (Scène 5). Restée seule avec Fatiman, Zaïre avoue la trahison de Célime : cette dernière aime Carlos bien que l’esclave soit insensible à ses avances. Zaïre doit dorénavant surveiller Célime et voit sa liberté d’autant mieux assurée (Scène 6). Julie cherche Carlos pour le prévenir de l’arrivée de Dom Brusquin et lui demander d’intercéder auprès de Célime. Carlos annonce à Julie qu’ils sont perdus puisque Célime est amoureuse de lui (Scène 7). L’arrivée de Dom Brusquin fait partir Carlos (Scène 8). Julie part aussi (Scène 9). Dom Brusquin se repent de son amour (Scène 10).</p>
        </div>
        <div>
          <head>Acte III</head>
          <p>Stamorat prévient Fatiman que Dom Brusquin, en possession de la rançon, désire le voir pour récupérer sa femme. Fatiman diffère la rencontre et avertit Zaïre qu’il souhaite démarier Julie en faveur de Carlos et punir Célime par des chants qui la blessent (Scène 1). Célime, impatiente, vient à la rencontre de sa servante et apprend que Carlos a montré stupeur et tristesse à l’annonce de sa libération et qu’il semble bien amoureux de Julie. Elle demande à Zaïre d’aller chercher Tomire, qui est en vue, pour s’éclaircir sur cet amour (Scène 2). Alors qu’il allait annoncer la venue de Dom Brusquin à Fatiman, Tomire est interrogé sur son maître. Célime lui donne une bague et se dit au fait des aventures de Carlos que Tomire développe alors longuement : la qualité de noble de Carlos en Espagne, héritier d’un riche oncle avare et à la santé solide ; son amour pour Julie et l’enlèvement raté qu’il entreprit pour la sauver des bras de son nouveau mari... En contradiction avec le précédent discours de Zaïre, Tomire conte la joie récente de Carlos, due à la promesse de sa libération. Tomire veut informer son maître du contentement de Célime, mais elle s’y oppose, assurant qu’elle s’en chargera elle-même (Scène 3). Célime se fâche, soupçonnant Zaïre de la tromper (Scène 4). Stamorat se présente et offre un coffret de pierreries à Célime de la part de son maître. Cette dernière reçoit le cadeau froidement mais s’enchante à l’annonce d’un prochain concert des amants (Scène 5). Stamorat rapporte à son maître les réactions de Célime et Fatiman fait venir Dom Brusquin (Scène 6). Dom Brusquin demande sa femme contre son argent mais Fatiman lui annonce que leur marché a changé : Julie est libre et va prendre un nouvel époux ; la rançon de Dom Brusquin servira pour la noce. Jérémiades de Dom Brusquin qui finit par s’en aller. Stamorat est chargé par Fatiman de le surveiller (Scène 7). Célime arrive et s’inquiète de ne rien voir installé pour le concert promis. Fatiman l’informe de la venue des chanteurs (Scène 8). Le concert déplaît fortement à Célime qui veut s’en venger. Fatiman feint de s’inquièter de la réaction de Célime et promet de châtier les personnes qui l’offensent : ce sont Julie et Carlos, qu’elle veut voir séparés et punis (Scène 9). Julie implore la grâce de Fatiman. Celui-ci propose la mise en place d’un stratagème mais Zaïre doit continuer à duper sa maîtresse (Scène 10).</p>
        </div>
        <div>
          <head>Acte IV</head>
          <p>Zaïre assure à sa maîtresse son entière fidélité et demande des éclaircissements sur ses agissements : Célime souhaite mettre Carlos dans une situation si inconfortable, qu’en désespoir de cause, il cèdera à son amour ; suffisamment dupe, Fatiman rompra ensuite ses fers (Scène 1). Fatiman se félicite, en présence de Célime, de voir enfin leur mariage se conclure mais cette dernière veut d’abord savoir si sa vengeance a été exécutée : Fatiman lui apprend l’emprisonnement de Carlos et avoue qu’il n’a pas eu la même rigueur pour Julie, voyant en elle un double de Célime. Cette dernière feint alors la jalousie et accuse Fatiman d’aimer l’esclave. Pour prouver son innocence, Fatiman devra chasser Julie en la rendant à son époux et bannir Carlos d’Alger en lui faisant prendre la mer. Avant toute exécution, Célime demande un entretien particulier avec l’esclave. Sceptique, Fatiman se cache pour comprendre les manigances de Célime. Restée avec Zaïre, elle l’avise qu’un navire anglais est prêt à leur faire quitter le port d’Alger le soir même et que, dans la situation à venir, Carlos finira bien par répondre à son amour (Scène 2). Carlos est amené à Célime : celle-ci lui démontre sa toute-puissance, lui fait un présent et lui demande, avant de partir, de suivre dorénavant les ordres de Zaïre s’il veut être sauvé (Scène 3). Seul avec Zaïre, Carlos s’inquiète de l’aide que celle-ci offre à Célime. C’est alors que Fatiman sort de sa cachette et promet de se venger. De plus, il voit que Célime a offert à Carlos le coffret de pierreries... Sa fureur augmente et le cadeau lui inspire un stratagème... Pour le moment, Zaïre doit donner toute espérance à Célime quant à l’amour de Carlos (Scène 4). Tomire arrive pour raconter les malheurs de Dom Brusquin qui s’est fait battre par la suite de Turcs et avertit de sa venue. Fatiman prévient Carlos qu’il doit rester caché (Scène 5). Dom Brusquin, amené par Stamorat à Fatiman. ne cesse de se plaindre. Il refuse toujours d’être présent au mariage de sa femme. Fatiman envisage son absence à condition qu’il signe un contrat de divorce dont il serait l’instigateur. Dom Brusquin refuse. Fatiman lui laisse alors une heure pour se résoudre, au-delà de ce délai, il sera condamné à l’esclavage et aux galères (Scène 6). Dom Brusquin se plaint toujours, en présence de Stamorat (Scène 7).</p>
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          <head>Acte V</head>
          <p>Retrouvailles de Marine et Tomire qui, pour mener à bien le plan de Fatiman, attendent Célime. Tomire a appris à Marine que l’oncle de Carlos est mort et que le frère  de ce dernier vient payer leur rançon. Tomire profite aussi de l’attente pour conter fleurette. Marine le rabroue, arguant qu’elle n’a plus reçu de marques de tendresse depuis leur esclavage. Carlos explique son insensibilité par ses rudes conditions de vie mais ses sentiments n’ont jamais changé et Julie a même consenti au mariage des deux valets... Célime apparaît, conversant avec Zaïre (Scène 1). Célime s’inquiète des préparatifs du départ auprès de Zaïre qui la rassure. Elle voit Marine et Tomire qui feignent de se disputer au sujet de l’avenir de leurs maîtres : Carlos se verrait libre alors que Julie serait à nouveau livrée à Dom Brusquin. Célime jubile et s’emporte à la demande de Marine de la voir intervenir en faveur de sa maîtresse (Scène 2). Fatiman arrête Carlos devant Célime, dans son appartement (Scène 3). Fatiman menace Carlos de mort et Célime en demande la raison : l’esclave a été retrouvé en possession du coffret de pierreries, présent du gouverneur à Célime. La Dame prend sa servante à témoin pour expliquer qu’elle avait confié les diamants à Carlos afin qu’il les remette à un lapidaire pour les mettre en œuvre. Elle voulait ainsi faire une surprise à Fatiman en ne passant pas par son intermédiaire. Fatiman gracie donc l’esclave et Célime court le délivrer (Scène 4). Fatiman est au comble de l’agacement. Il entend venir Dom Brusquin (Scène 5). Dom Brusquin accepte de signer mais Stamorat lui apprend que sa résolution vient trop tard car l’heure est passée. Dom Brusquin parlemente et Stamorat se résout à aller voir son maître (Scène 6). Dom Brusquin se repent de sa conduite (Scène 7). En présence de Fatiman, Dom Brusquin s’engage à signer ce qu’on lui demande, à régler les frais du mariage, à être présent à la noce et à offrir, de sa main, sa femme à son futur époux (Scène 8). Fatiman engage Julie à présenter ses remerciements à Dom Brusquin et s’apprête à présenter le futur mari de Julie (Scène 9). Célime amène Carlos et invite Fatiman à rendre son époux à Julie avant qu’ils ne partent. Fatiman offre alors la main de Julie à Carlos. Fatiman accuse Célime de traîtrise et la condamne à paraître devant le Divan (Scène 10). Dom Brusquin s’étonne du mari que l’on donne à Julie mais Fatiman rappelle leur amour fidèle. Concert final et dernières jérémiades de Dom Brusquin (Scène dernière).</p>
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        <head>Représentation de la pièce</head>
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          <head>Première représentation</head>
          <p>Nous n’avons pas plus d’informations sur la première représentation de la pièce que nous n’en avons sur la première édition<note place="bottom">Voir <hi rend="sc">Note sur la présente édition.</hi></note>... Encore une fois, l’avertissement au lecteur de l’édition de 1739<note place="bottom"><hi rend="i">Théâtre de Messieurs de Montfleury Père et fils, nouvelle éd. augmentée de trois Comédies, avec des Mémoires sur la vie et les Ouvrages de ces deux Auteurs</hi>, Tome Premier, Paris, La Compagnie des Libraires, 1739.</note> est la principale source d’informations : selon l’ordre chronologique proposé, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> aurait été représentée la première fois sur la scène du théâtre de l’hôtel de Bourgogne, après <hi rend="i">Les Bestes raisonnables</hi> mais avant <hi rend="i">Trasibule</hi>, ce qui fixerait la date de la première représentation entre les années 1661 et 1663.</p>
          <p>Au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, la représentation précédait toujours la publication de la pièce<note place="bottom">Chappuzeau nous apprend qu’« une pièce, quelqu’excellente qu’elle puisse estre, n’ayant pas été représentée, ne trouvera point de librairie qui se veuille charger de l’impression ; et la moindre bagatelle qui sera fade sur le papier, et que l’action aura fait goûter sur le théâtre, trouvera d’abord marchand dans la Sale du Palais. » <hi rend="i">Le Théâtre François</hi>, 3<hi rend="sup">e</hi> p., ch. I, in <hi rend="sc">P. Mélèse</hi>, <hi rend="i">Le Théâtre et le public à Paris sous Louis XIV : 1659-1715</hi>, Droz, Paris, 1934, p. 297.</note>. <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> ayant été publiée en 1663, selon les sources disponibles aujourd’hui, nous pouvons supposer que la pièce a été représentée, au plus tard, cette année-là. Si la représentation de la pièce ne peut être réellement mise en cause dans la mesure où elle a été éditée, nous pouvons cependant nous demander si elle remporta le succès suggéré par certains commentateurs<note place="bottom">« <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, comédie d’Anthoine Montfleury, a été représentée avec succès à l’Hôtel de Bourgogne et a eu quarante-neuf reprises à la Comédie Française. » <hi rend="sc">Deierkauf-Holsboer</hi>, S. W., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 124. Sophie Wilma Deierkauf-Holsboer situe la première représentation de la pièce en 1664, sans davantage d’explications.</note>. En effet, nul journal, gazette ou autre répertoire consultable de nos jours, ne fait mention de la pièce avant 1695<note place="bottom">Première année où la pièce apparaît au répertoire de la Comédie-Française.</note>. Cependant, la gazette de Loret rendait rarement compte des spectacles avant 1663-64 ; ce sont ses successeurs, à partir de 1665, en particulier Robinet, qui se montreront plus attentifs à la vie théâtrale. La critique de l’époque était aussi, pour une large part, orale avec les salons mondains. L’absence d’analyse concernant <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> dans les moyens d’informations écrits de l’époque<note place="bottom">Pierre Mélèze, dans son <hi rend="i">Répertoire analytique des documents contemporains d’information et de critique concernant le théâtre à Paris sous Louis XIV : 1659-1715</hi>, ne relève aucune information sur <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>. <hi rend="sc">P. Mélèse</hi>, <hi rend="i">Répertoire analytique des documents contemporains d’information et de critique concernant le théâtre à Paris sous Louis XIV : 1659-1715</hi>, Droz, Paris, 1934.</note> n’est donc pas gage d’échec.</p>
          <p>Ce qui témoigne de la bonne réception de la pièce, c’est que, trente ans après sa création, Champmeslé eut l’idée de « raccommoder » la pièce et de l’ajouter au répertoire de la Comédie Française. D’ailleurs, grand bien en prit à l’acteur car, entre 1695 et 1761, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> fut représentée soixante et onze fois<note place="bottom"><hi rend="sc">Joannides</hi>, A., <hi rend="i">La Comédie-Française de 1680 à 1900, Dictionnaire général des pièces et des auteurs</hi>, avec une préface de Jules Claretie, New-York, Burt Franklin, 1971. Nous ne reprenons pas ici le nombre de quarante-neuf donné par Lancaster et Deierkauf-Holsboer.</note>, ce qui est un succès appréciable.</p>
          <p>La date de la première représentation du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> sera donc plus ou moins éloignée de l’année 1663, date de sa première édition, en fonction du succès que nous lui attribuons<note place="bottom">Plus la pièce était appréciée du public, plus elle était jouée et plus tard elle tombait aux mains des éditeurs ; à l’inverse, si la pièce avait un succès mitigé, elle partait rapidement à l’imprimerie.</note>. Cependant, il est peu probable que la pièce éditée en 1663, fut représentée en 1661<note place="bottom">Ce qui signifierait deux années de représentations et un succès inégalé... Hypothèse improbable dans la mesure où le nom de la pièce n’apparaît pas dans la critique écrite de l’époque.</note>, et nous réduirons les dates possibles de sa première représentation aux années 1662 et 1663.</p>
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          <head>Propositions scénographiques</head>
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            <head>Le Mémoire de Mahelot</head>
            <p>Nous n’avons pas de traces de la première représentation mais nous pouvons faire des hypothèses sur la scénographie de la pièce grâce au <hi rend="i">Mémoire de Mahelot</hi>.<note place="bottom">Le mémoire a en fait plusieurs rédacteurs mais le nom de Mahelot est celui qui est communément retenu pour se référer à l’ouvrage.</note>. Ce document rapportait les pièces jouées par la Troupe Royale en précisant « dans une notice les décors et les accessoires nécessaires à leur représentation et en conservant un croquis du dispositif scénographique dans lequel elles pouvaient être données. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Pasquier</hi>, P., (éd.),<hi rend="i"> Le Mémoire de Mahelot, Mémoire pour la décoration des pièces qui se représentent par les Comédiens du Roi</hi>, Paris, Honoré Champion, 2005, p. 17.</note> Il donnait aussi aux peintres, chargés de brosser les décors, les indications nécessaires pour réaliser les toiles. Pour résumer, le <hi rend="i">Mémoire de Mahelot</hi> était une « pièce d’archives à l’usage du décorateur, du comédien et du peintre, il servait à consigner et à conserver tous les éléments techniques nécessaires à la représentation des œuvres figurant au répertoire de la troupe lors de leur création ou de leur reprise. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 27.</note> Il faut ajouter que ce document doit être envisagé comme un aide-mémoire à usage interne à la troupe, et non comme une archive fournissant des indications scrupuleusement respectées...</p>
            <p><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> n’est pas mentionnée dans le <hi rend="i">Mémoire</hi>. Cette absence peut s’expliquer par les périodes théâtrales traitées par l’ouvrage. Lancaster et Deierkauf-Holsboer<note place="bottom"><hi rend="sc">Deierkauf-Holsboer</hi>, S. W., <hi rend="i">L’Histoire de la mise en scène dans le théâtre français à Paris de 1600 à 1673</hi>, Paris, Nizet, 1960, p. 39-44.</note> ne donnent pas les mêmes dates pour les diverses parties du <hi rend="i">Mémoire de Mahelot</hi>. Cependant, comme le met en avant Pierre Pasquier, il paraît plus intéressant de délimiter les périodes où la Troupe Royale avait pour répertoire la liste des pièces que de connaître les dates de rédaction du <hi rend="i">Mémoire</hi> : la première liste correspondrait à la fin de la saison 1633-1634 ou à une partie de la saison 1634-1635 ; la deuxième liste restituerait les pièces jouées par la troupe de 1673 à 1685. Quel que soit le degré d’incertitude accordée à ces dates, les premières représentations du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> seraient suffisamment éloignées des deux périodes pour ne point y figurer.</p>
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            <head>Le choix du décor</head>
            <p>Le <hi rend="i">Mémoire de Mahelot</hi> présente deux scénographies bien distinctes, celle des années 1630 et celle de l’époque classique, et nous pouvons nous demander laquelle fut adoptée pour <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>.</p>
            <p>Dans les années 1630, le décor de l’Hôtel de Bourgogne était agencé autour de cinq chambres : « deux côtés jardin, deux côté cour et une au centre du dispositif. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Pasquier</hi>, P., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 104.</note> Une typologie des chambres se fait jour à l’étude des croquis de Mahelot. « Sept chambres [...] apparaissent fréquemment : la grotte, la maison, le palais, la pièce décorée (appelée par Mahelot « belle chambre »), le jardin et le bois (pas toujours nettement distincts), les rochers. Sept autres chambres sont moins fréquemment utilisées : la fontaine et la source (souvent confondues), la prison, le temple, le tombeau, la rivière et la mer (pas toujours distinctes), la tour (qui se fait quelquefois prison), l’arche de verdure. Enfin, Mahelot produit beaucoup plus rarement quelques autres chambres : la forteresse, la ruine, l’ermitage, l’échoppe et la tente. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Pasquier</hi>, P., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 106.</note></p>
            <p>Mais, en 1663, le décor unique et uni, décrit par Michel Laurent à l’Hôtel de Bourgogne dans les années 1670-1680, s’était déjà imposé au théâtre. Aux chambres multiples détaillées par Mahelot, s’est substitué le « palais à volonté » ou « salle de palais » pour la tragédie, et le carrefour urbain ou la pièce bourgeoise pour la comédie<note place="bottom">Les décors sont assez peu caractérisés, l’alternative marquant soit une action extérieure, soit une action intérieure, selon la localisation imposée par le dramaturge.</note>.</p>
            <p>Avec <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, Montfleury semble influencé par la règle de l’unité de lieu recommandée par le modèle classique, mais il ne la respecte pas scrupuleusement. En effet, si <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> se déroule principalement dans un lieu, la salle principale de l’appartement de Célime, le décor est aussi obligé de prendre en compte le cabinet, lieu important pour l’intrigue de la pièce.</p>
            <p>Le dictionnaire Furetière peut nous éclairer quant à la composition de l’« apartement » : « Portion d’un grand logis où une personne loge, ou peut loger separément. Un <hi rend="i">apartement</hi> Royal est composé de chambre, antichambre, cabinet, &amp; galerie. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Furetiere</hi>, <hi rend="i">Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots françois tant vieux que modernes et les termes de toutes les sciences et les arts</hi>, La Haye et Rotterdam, Arnout et Reinier Leers ; rééd. Paris, SNL-Le Robert, 1978 (3 vol.).</note></p>
            <p>Trois appartements sont mentionnés dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>  : au vers 235, Célime autorise les amants à retourner dans leur appartement<note place="bottom">v. 235 « Vous m’avez plû : rentrez dans vôtre Appartement, »</note> ; aux vers 653-654, Fatiman demande à Zaïre de venir dans son appartement, et non dans celui de Célime, l’instruire du complot de sa maîtresse<note place="bottom">v. 653-654 « De peur d’être surpris dans cet Appartement,/ Tu viendras dans le mien m’instruire promptement, »</note> ; aux vers 1414 et 1431, Célime est outrée par ce qui se passe dans le sien<note place="bottom">v. 1414 « Mais qui vous fait venir, dans mon Appartement ». v. 1431 « Dans mon Appartement ? devant moy ? »</note>.</p>
            <p>D’autres lieux sont évoqués dans la pièce mais n’ont pas besoin de figurer sur scène : le port d’Alger<note place="bottom">Vers 55-320-479-1114-1171.</note> où débarquent Julie, Carlos, Marine et Tomire, après leur enlèvement sur mer ; la mer<note place="bottom">Vers 48-363-394-468-469-485-498-545-682-913-1122-1173-1286-1643.</note>, lieu de tous les dangers et de l’isolement favorable à l’intimité amoureuse ; la prison<note place="bottom">Vers 1006 et 1430.</note> où Julie et Carlos doivent d’abord être enfermés suivant la volonté de Célime, puis Carlos y est envoyé seul par Fatiman, accusé de vol de pierreries.</p>
            <p>L’appartement de Célime est cependant le lieu unique où se déroule la pièce, et ce dernier pourrait être agencé comme le décrit Furetière : d’abord composé d’une salle qui sert de carrefour à toutes les rencontres, il comporte aussi un cabinet où Zaïre, puis Fatiman, se cachent pour espionner Célime<note place="bottom">v. 242 « Au Cabinet prochain, cachons-nous pour l’entendre. » v. 638 « Tantôt cachée au Cabinet prochain, » v. 1147 « Au Cabinet prochain ; étonné, confondu, ».</note> ; une chambre est mentionnée par Zaïre au vers 122<note place="bottom">v. 122 « Celime va passer dans la chambre prochaine, »</note> ; l’antichambre et la galerie ne sont pas évoquées.</p>
            <p>On reconnaît dans l’usage du cabinet, une influence de la comédie à l’espagnole. Utilisé à l’origine pour des raisons d’ordre moral<note place="bottom">Interrompue par un importun, la jeune fille, ou le jeune homme, ne devait être vu en compagnie de son double et se réfugiait alors dans le cabinet.</note>, le cabinet séduit ensuite les adaptateurs français des <hi rend="i">comedias</hi> espagnoles, qui y voient un moyen idéal de bouleverser rapidement l’intrigue. Les décorateurs durent aménager « des chambres ouvrantes munies de portes commodément ouvrables, percées dans la cloison du fond du compartiment, voire dans certains cas, dans la cloison latérale. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Pasquier</hi>, P., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 195.</note></p>
            <p>Nous pouvons imaginer un décor assez simple pour <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> : une « salle de palais »<note place="bottom">Bien que nous ayons affaire à une comédie, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> se déroule sûrement dans le palais de Fatiman et le décor, normalement réservé aux tragédies, conviendrait.</note> peu caractérisée, agrémentée de trois portes : deux portes latérales figurant, d’un côté, une galerie qui communique avec le reste du palais, de l’autre côté, la chambre de Célime ; et une porte, au fond du compartiment, pour représenter le cabinet.</p>
            <p>L’indication, « La scène est dans Alger », n’est pas gage d’un décor oriental. Le décor unique du théâtre classique avait tendance à gommer toute couleur locale<note place="bottom">On note cependant dans le <hi rend="i">Mémoire de Mahelot</hi> « un sallon a la turque » qui pourrait servir de décor à notre pièce. Folio 82 recto du <hi rend="i">Mémoire de Mahelot</hi>, description de « <hi rend="i">Baiazet ».</hi></note>. De plus, le texte du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> ne fait jamais mention de quelque exotisme du lieu<note place="bottom">L’exotisme se révèle davantage dans la description des coutumes de chaque population, l’utilisation de la <hi rend="i">lingua franca</hi>...</note>.</p>
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            <head>Les objets</head>
            <p>La présence d’objets scéniques n’est pas davantage précisée dans les didascalies du<hi rend="i"> Mary sans femme</hi><note place="bottom">Cette carence didascalique, dans le théâtre de la seconde moitié du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, peut être imputée à l’abbé d’Aubignac qui critique fortement l’usage au profit du texte dialogué : « toutes les pensées du Poète, soit pour les décorations du Théâtre, soit pour les mouvements de ses Personnages, habillements et gestes nécessaires à l’intelligence du sujet, doivent être exprimées par les vers qu’il fait réciter » <hi rend="sc">Aubignac</hi> (<hi rend="sc">Abbé d’</hi>), <hi rend="i">La Pratique du Théâtre</hi>, éd. Hélène <hi rend="sc">Baby</hi>, Paris, Champion, 2001, p. 98.</note>. Pourtant, la représentation de la pièce en nécessite un certain nombre<note place="bottom">Marc Vuillermoz constate que « dans la deuxième moitié du siècle, [la] fréquence [d’objets scéniques par pièce] connaît une baisse relative, du fait de la disparition progressive de la tragi-comédie (terre d’élection privilégiée des objets), et de l’assujettissement de la tragédie aux règles de la bienséance [...]. Toutefois, le véritable changement qui se manifeste dès le début de la période classique concerne moins la quantité des objets théâtraux (toujours aussi nombreux dans la comédie) que leur traitement dans les deux grands genres dramatiques. » <hi rend="sc">M. Vuillermoz</hi>, <hi rend="i">Le Système des objets dans le théâtre français des années 1625-1650, Corneille, Mairet, Rotrou, Scudéry</hi>, Genève, Droz, 2000, p. 9.</note> : le billet envoyé par Marine et lu par Dom Brusquin à la scène 1 de l’acte II ; le coffret de pierreries offert dans un premier temps par Fatiman à Célime à la scène 5 de l’acte III, puis par Célime à Carlos à la scène 3 de l’acte IV, et qui réapparaît finalement à la scène 4 de l’acte V pour confondre Célime ; le blanc-signé<note place="bottom">Vers 1539.</note> (blanc-seing) que donne Dom Brusquin à Fatiman pour recouvrer sa liberté.</p>
            <p>Ces objets scéniques sont porteurs d’une fonction dramatique et ont une incidence notable sur le cours de l’action. Suivant la typologie de Marc Vuillermoz<note place="bottom"><hi rend="sc">M. Vuillermoz</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 188-189.</note>, le billet de Marine et le coffret de pierreries ont une « fonction motrice », le blanc-seing de Dom-Brusquin une « fonction résolutive ». Si le blanc-seing a une fonction « périphérique » dans la mesure où il apparaît à la fin de la pièce et ne résout que partiellement le sort de Dom Brusquin, le billet et le coffret ont une fonction fondamentale. En effet, le billet envoyé par Marine explique l’arrivée de Dom Brusquin à l’acte II de la pièce, décidé à récupérer sa femme en payant la rançon des corsaires. Ce billet va être source de malentendus pour Dom Brusquin : il est surpris par les explications rocambolesques de Marine<note place="bottom">Scène 3 de l’acte II.</note>, ne comprend pas la froideur de Julie alors qu’il vient la libérer<note place="bottom">Scène 9 de l’acte III.</note>, ni les négociations de Fatiman quand il lui offre l’argent<note place="bottom">Scène 7 de l’acte IV.</note>. Le coffret de pierreries est aussi propice à des situations fausses. Il passe du statut de présent amoureux (offert par Fatiman à Célime, puis par Célime à Carlos) à celui d’objet de vengeance : quand Fatiman s’aperçoit de la tromperie de Célime, il la tourmente en associant le coffret à la perte de Carlos<note place="bottom">Scène 4 de l’acte V.</note>. Le retournement de situation dans la pièce s’accompagne donc du renversement de rôle de l’objet qui, d’« adjuvant », se transforme en « opposant » à l’encontre de Célime, pour reprendre une terminologie empruntée à l’analyse actancielle.</p>
            <p>Il est fait allusion à des objets extra-scéniques dans la pièce : les fers<note place="bottom">Le mot a son sens concret d’objet qui sert à enchaîner, à immobiliser un prisonnier, aux vers 1006-1045-1088-1127.</note>, le casaquin<note place="bottom">Vers 1198.</note>, le gourdin<note place="bottom">Vers 82-1199.</note>. L’éviction de ces objets de la scène peut être expliquée par les règles de bienséance en rigueur dans la deuxième moitié du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle : la simple référence aux fers est suffisante pour faire surgir dans l’imaginaire collectif la figure des esclaves enchaînés ; l’évocation du gourdin, quant à elle, rappelle déjà trop le registre de la farce pour permettre sa présence sur scène.</p>
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            <head>Les costumes</head>
            <p>La pièce demanderait aussi une certaine recherche vestimentaire... Mais, d’une part, Montfleury ne donne aucune indication quant aux costumes dans son texte, et, d’autre part, ses exigences n’auraient sûrement pas été respectées à une époque où les produits manufacturés étaient fort chers et entraînaient de grosses dépenses, parfois impossibles pour les comédiens. Les acteurs étaient donc souvent habillés à la mode de l’époque et la richesse, ou la pauvreté, de leur costume dépendait avant tout de leur bourse... Un turban sur la tête et une robe à la turque pouvaient démarquer les turcs des autres personnages. L’acteur jouant le rôle de Dom Brusquin devait être vêtu de manière plus outrancière pour expliquer la description de Tomire à la scène 8 de l’acte I<note place="bottom">v. 320-324 : « Tout à l’heure, Monsieur, en allant vers le Port,/ Je l’ay vû d’assez loin descendre d’une Barque ;/ Et comme sa figure est assez de remarque, Les Turcs railleurs aprés l’avoir examiné,/ En luy riant au nez l’ont tous environné, ».</note>.</p>
            <p>Nous avons déjà noté dans la scénographie du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> des particularités qui marquent l’influence espagnole de la pièce. Une partie des personnages vient d’Espagne et la pièce se déroule sur le rivage de la Méditerranée opposé, à Alger. Quels autres éléments tendent à classer <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> dans les comédies à l’espagnole ?</p>
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        <head>Des influences multiples</head>
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          <head>Une influence espagnole</head>
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            <head>Absence d’une source identifiée</head>
            <p>Dans l’avis au lecteur de <hi rend="i">L’Ambigu comique</hi><note place="bottom">« &amp; comme [mêler des intermèdes comiques à une tragédie] est un usage établi de tout temps chez les Espagnols, je veux bien avouer que leurs Poëmes dramatiques m’ont servi de modèle ; que le plaisir que m’ont donné la lecture que j’en ai faite, &amp; les représentations que j’en ai vûes, m’ont persuadé qu’un pareil mélange pourroit avoir autant d’agrémens sur notre Scene, que de beautés sur leur Théatre » <hi rend="i">Préface de l’auteur</hi> de <hi rend="i">L’Ambigu comique</hi>, in <hi rend="sc">Parfaict, C.</hi> et F., <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 11, p. 277-278.</note>, Montfleury avoue avoir étudié des pièces espagnoles et avoir assisté à leurs représentations. L’avertissement aux lecteurs de 1739 ajoute qu’« il savoit &amp; parloit si parfaitement l’Espagnol, que la feue Reine, dont il avoit l’honneur d’être connu, disoit que ceux mêmes du pays ne le parloient pas si bien que lui ; aussi a-t’il pris dans leurs auteurs quelques-uns des sujets qu’il a traités. »</p>
            <p>En effet, dans les années 1640-1650, les œuvres de l’éclatant Siècle d’Or espagnol sont en vogue en France, chez le public cultivé, et les romanciers et poètes de l’époque connaissent la production littéraire de leurs voisins, au-delà des Pyrénées. Dans le domaine théâtral, Rotrou semble s’être le premier inspiré d’un dramaturge espagnol, Lope de Vega, avec <hi rend="i">La Bague de l’oubli</hi> qui serait une adaptation de <hi rend="i">Sortija del Olvido</hi>. À sa suite, les frères Le Métel, les frères Corneille et Scarron prirent leur inspiration dans beaucoup de pièces espagnoles.</p>
            <p>Il est probable qu’Antoine Jacob de Montfleury se soit inspiré d’une pièce espagnole pour construire son intrigue mais ni Puibusque, ni Rohr n’ont pu identifier clairement cette pièce<note place="bottom">« Puibusque supposed that he had a Spanish source, but was unable to name it. Rohr detected vague resemblances to Lope, but nothing to establish a source. » <hi rend="sc">Lancaster</hi>, H. C.,<hi rend="i"> op. cit.</hi>, part III, vol. 2, p. 697. Traduction : Puibusque fit l’hypothèse qu’il avait une source espagnole, mais fut incapable de la nommer. Rohr détecta de vagues ressemblances avec Lope, mais rien qui puisse établir une source.</note>. L’<hi rend="i">École des jaloux</hi>, où l’on retrouve le même personnage de mari jaloux, sous les traits de Santilanne, serait inspirée de l’<hi rend="i">Argel fingido</hi> de Lope de Vega. Victor Fournel ajoute que plusieurs autres pièces de Montfleury, dont <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, « sont également tirées de l’espagnol, mais avec beaucoup de liberté, car Montfleury, esprit vif et souple, mettait le sceau de sa propre originalité sur ses imitations. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Fournel, V.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 220.</note> Nous n’avons pas fait davantage de recherches quant à l’hypothétique pièce espagnole qui aurait inspiré <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>. De plus, la production des <hi rend="i">comedias</hi> espagnoles a été particulièrement riche et toutes ces pièces ne sont pas arrivées jusqu’à nous. Enfin, il paraît plus pertinent de déterminer quelles sont les conventions d’écriture espagnoles présentes dans la pièce de Montfleury.</p>
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            <head>Présence des conventions d’écriture de la <hi rend="i">comedia</hi></head>
            <p>Nous reconnaissons dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> les principaux ressorts de la comédie espagnole<note place="bottom">Au temps de Lope de Vega, le terme <hi rend="i">comedia</hi> désignait toute pièce de théâtre, que les effets en soient comiques ou tragiques.</note> : une intrigue romanesque, relativement simple comparée à la comédie italienne<note place="bottom">Si les deux types de comédies sont romanesques, la comédie italienne est davantage marquée par des événements extérieurs (substitutions d’enfants, enlèvements, fausses morts, reconnaissances) qui compliquent l’intrigue à loisir, alors que les situations traitées par la comédie espagnole se rapprochent de celles de la tragi-comédie.</note>, lie des personnages passionnés, pour qui l’amour et l’honneur sont des valeurs fondamentales. Le comique est lié au personnage du valet, le « gracioso » espagnol, ou bien à un personnage de rustre, que ses habits, et ses discours désignés d’emblée comme un ridicule.</p>
            <p>Ainsi, la situation du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> n’est pas intrinsèquement comique et les personnages sont avant tout au service de l’action<note place="bottom">Christophe Couderc ajoute : « Parce qu’il est subordonné à l’action, le personnage est donc avant tout fonctionnel. Bien souvent dépourvus d’une intériorité subjective, ces personnages peuvent nous sembler à juste titre interchangeables, superficiels et dénués de psychologie. » <hi rend="sc">C. Couderc</hi>, <hi rend="i">Le Théâtre espagnol du Siècle d’Or (1580-1680)</hi>, Paris, PUF, 2007, p. 273. Cette particularité du personnage est notable chez Fatiman qui, témoin de la trahison de Célime, renie immédiatement son amour (scène 4 de l’acte IV).</note>. Les deux amants Carlos et Julie, réduits en esclavage chez les Turcs, sont persécutés par des êtres qui cherchent leur amour : Julie par Dom Brusquin, le mari trompé qu’elle a fui en quittant l’Espagne, Carlos par Célime, dame que le gouverneur d’Alger, Fatiman, souhaite épouser. On retrouve, avec quelques divergences, le schéma relationnel pentagonal de la <hi rend="i">comedia</hi><note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 280.</note>.</p>
            <p>La pièce du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> ne décrit d’ailleurs pas la formation des couples : Julie et Carlos s’aiment avant le lever du rideau et nous assistons aux dangers que court leur amour. Ces risques tiennent plus aux valeurs que prônent les personnages qu’à des péripéties extérieures : l’amour des deux amants leur a fait fuir l’Espagne de manière précipitée, les menant à l’esclavage ; une passion aveugle anime Célime et lui fait entreprendre toutes sortes de manigances ; Dom Brusquin, quant à lui, est mu par un amour irraisonné pour Julie, et son honneur l’oblige à tenter de la récupérer ; l’honneur guide aussi Fatiman dans son désir de vengeance... Tout le romanesque et les grands sentiments de la comédie espagnole sont ici présents, bien que les grands sentiments de Dom Brusquin soient tournés en ridicule.</p>
            <p>Ainsi, la comédie se caractérise non pas en fonction d’un critère thématique, mais « par la perspective de libération dans laquelle se trouve placé le spectateur. L’angoisse qui étreint celui-ci devant des actions éveillant la terreur et la pitié se mue dans la comédie en un sentiment de victoire jubilatoire résultant de l’évitement des situations anxiogènes. Il y a comédie, autrement dit, quand la transgression [...] débouche sur une issue positive ; [...] l’ordre des pères est renversé, les tabous sont brisés pour pouvoir laisser la place à un ordre nouveau, au printemps que célèbre joyeusement la comédie. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 218.</note><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> illustre bien ce renversement des rapports de forces : initialement, Julie et Carlos sont amoureux, mais ne peuvent jouir librement de leur amour en Espagne où Julie a été mariée par sa mère à Dom Brusquin, homme plus âgé et jaloux ; les amants tentent d’échapper à l’ordre social en fuyant mais ils sont rattrapés par l’esclavage des turcs, situation qui n’est pas davantage propice à leur amour ; pourtant, à la fin de la pièce, l’ordre initial est dépassé puisque Julie est démariée et épouse Carlos. Dans une certaine mesure donc<note place="bottom">On note que ce renversement social n’a pas lieu pour Célime qui reste enchaînée aux lois de son pays et devra comparaître devant le Divan.</note>, la pièce « célèbre la victoire de l’audace contre les tabous et les interdits sociaux, [...] promesse d’un renouvellement salutaire. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 219.</note></p>
            <p>C’est aussi sur le valet que retombe une partie de la charge comique, à travers le personnage de Tomire qui n’hésite pas à glorifier les bas plaisirs terrestres à la scène 2 de l’acte I<note place="bottom">v. 62-66 « Que ne me laissois-tu vivre en paix en Espagne ;/ Je me vois sans Amis, là j’en avois un cent,/ J’y mangeois tous les jours comme un convalescent,/ J’y riois comme un fou, j’étois gras comme un Moine,/ J’y dormois en Abbé, j’y bûvois en Chanoine ; ».</note>. Mais Tomire n’est pas le seul à déclencher le rire et sur ce point encore, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> se rapproche de la <hi rend="i">comedia</hi> comique. En effet, l’homogénéité sociale des personnages, qui appartiennent à une noblesse moyenne et anonyme, dénués de charge politique, permet une extension maximale du rire : tous peuvent faire rire à leurs dépens<note place="bottom">Malgré leurs conditions sociales, Dom Brusquin, Célime ou Fatiman, et même les deux amants Julie et Carlos, ne sont pas épargnés par la moquerie.</note>.</p>
            <p>Dans la comédie à l’espagnole, le spectateur est « moins [appelé] à rire qu’à sourire aux situations frivoles dans lesquelles sont pris les personnages. Pour son plus grand plaisir, il ne lui est pas demandé de succomber à l’illusion, mais bien plutôt d’apprécier le degré de sophistication avec lequel le code est manipulé par le spirituel auteur. »<note place="bottom"><hi rend="sc">C. Couderc</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 228.</note> On retrouve ce même souci de connivence avec le public dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, et Montfleury n’hésite pas à lui faire des clins d’œil : Dom Brusquin craint d’inspirer des auteurs de comédie<note place="bottom">Vers 381-384 : « Certain instinc fondé sur beaucoup de raison,/ Me dit que ce sera grand hazard si mon nom,/ Occupant d’un Railleur le papier &amp; la plume,/ Des Maris baffoüez ne grossit le Volume. »</note>.</p>
            <p>Mais le rire est bien présent dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> et certaines <hi rend="i">comedias</hi> pouvaient en effet être tournées vers le burlesque. Pourtant, à l’exemple de Molière, Montfleury semble s’être beaucoup inspiré des modes de son temps...</p>
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          <head>Thèmes en vogue dans la société galante de l’époque</head>
          <p>Nous ne pouvons nier à Montfleury la place de choix qu’il tient dans le retour de la « grande comédie » au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> est la première pièce en cinq actes du dramaturge, régulière et matière à représentation... En effet, depuis les années 1630, s’est amorcée une véritable réflexion sur le théâtre et des règles sont apparues dans un souci de vraisemblance et de pratique. L’anarchie qui régnait sur la scène française au début des années 1630 impose, par réaction, de fixer des limites spatiales, temporelles et dramaturgiques à des spectacles qui en étaient jusque-là dépourvus. D’où l’émergence de la règle des trois unités...</p>
          <p>Au-delà de ces règles, la comédie de l’époque subit l’influence voisine des comédies à l’italienne et à l’espagnole d’une part, avec une forte place accordée au romanesque, et, d’autre part, la tradition du théâtre antérieur et de sa tragi-comédie. Mais Montfleury a souvent été accusé de s’inspirer de la farce et de flatter le goût du public de l’époque<note place="bottom">Pierre Mélèse insiste sur cette tendance de Montfleury : « le gros comique et l’actualité satirique, que savaient si bien exploiter [...] les Montfleury, dont la seule préoccupation était de « faire de l’argent » en flattant le goût du parterre. » <hi rend="sc">P. Mélèse</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 411.</note>.</p>
          <p>Le schéma des forces en jeu dans ce type de comédie, comme le présente Michel Corvin dans <hi rend="i">Lire la Comédie</hi><note place="bottom"><hi rend="sc">M. Corvin</hi>,<hi rend="i">Lire la Comédie</hi>, dir. Daniel Bergez, Paris, Dunod, 1994, p. 50.</note>, est à l’œuvre dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> à plusieurs reprises : un sujet (Dom Brusquin) désire un objet (Julie) ; il rencontre des opposants (Fatiman) et bénéficie parfois de quelques soutiens (son valet Gusman, et Marine) ; si on se place du point de vue de Célime, un sujet (Célime) désire un objet (Carlos) ; il rencontre des opposants (Fatiman et Carlos) et bénéficie parfois de quelques soutiens (absents pour Célime). « Mais le sujet désirant est d’ordinaire en position de faiblesse (c’est un intrus) ; la tromperie va être son arme préférée pour arriver à ses fins. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 50.</note> Dom Brusquin et Célime sont en effet tous deux en position de faiblesse, lui en tant qu’étranger, elle en tant que femme, et la tromperie est la tactique que Célime emploie pour arriver à ses fins face à Fatiman.</p>
          <p>Les thèmes principaux du<hi rend="i"> Mary sans femme</hi> semblent être « la comédie du désir amoureux »<note place="bottom">Dom Brusquin, épris de Julie, semble l’avoir épousée dans le seul but de « consommer » le mariage (v. 507 à 514) et le désir amoureux apparaît impétueux et trivial.</note>, thème premier et principal de la farce selon Pierre Voltz<note place="bottom"><hi rend="sc">P. Voltz</hi>, <hi rend="i">La Comédie</hi>, Paris, Armand Colin, 1964, p. 21.</note> et le cocuage, « motif central de la vieille farce française »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Notice de Sganarelle ou Le Cocu imaginaire, Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. 1231.</note>. Ce thème central apparaît dès le titre de la pièce, et ne cesse de revenir dans le discours de Dom Brusquin<note place="bottom">Ainsi, dans la scène 3 de l’acte II, Dom Brusquin demande à Marine de lui assurer la fidélité de Julie, assurance que la servante lui donne mais, dès l’apparition de Fatiman à la scène suivante, Dom Brusquin se sent à nouveau en danger.</note>, telle la passion d’Arnolphe dans <hi rend="i">L’École des femmes</hi><note place="bottom">Ne pas être cocu.</note>. Pourtant, au-delà d’un classement péremptoire du côté de la farce<note place="bottom">Classement hérité du « XIX<hi rend="sup">e</hi> siècle républicain et nationaliste – en quête d’une tradition ininterrompue de la farce <hi rend="i">populaire</hi> et <hi rend="i">française</hi> depuis le Moyen Âge jusqu’au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle et ravide trouver dans Boileau de quoi y enrôler Molière – qui n’a eu de cesse de le présenter comme un auteur « populaire » ». </note>, on peut reconnaître, dans les choix thématiques de Molière et Montfleury, le goût du public de l’époque, composé de mondains et de lettrés.</p>
          <p>À l’instar des pièces de Molière<note place="bottom"><hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Sganarelle ou Le Cocu imaginaire, L’École des Maris, L’École des femmes, Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010.</note>, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> de Montfleury « met en jeu les rapports entre l’amour et le mariage, question qui, avec son corollaire obligé, la jalousie, faisait l’objet de conversations et de « questions galantes » dans les salons comme dans les grands romans contemporains, du <hi rend="i">Grand Cyrus</hi> (1649-1653) à la <hi rend="i">Clélie</hi> (1654-1660) des Scudéry en passant par <hi rend="i">La Prétieuse</hi> (1656-1658) de l’abbé de Pure. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Notice de Sganarelle ou Le Cocu imaginaire, Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. 1232.</note> Il est en effet question, dans la pièce de Montfleury, du mariage forcé de Julie, jeune fille espagnole, avec un « fâcheux », Dom Brusquin, et des péripéties qui la conduisent, avec son amant Carlos, à échapper au sort que leur imposent les valeurs rétrogrades de la société de l’époque. « Les Espagnols – dans le sillage du <hi rend="i">Curieux impertinent</hi> et du <hi rend="i">Jaloux d’Estrémadure</hi> de Cervantès – avaient développé, dans leurs nouvelles et dans leurs comédies, des histoires mettant en question l’éducation des filles et la vertu féminine, la jalousie et le soupçon masculins, et l’inutilité de l’enfermement des femmes, illustrant sans relâche le postulat d’Ovide : une femme n’est jamais mieux gardée que par sa vertu même ; l’enfermer, c’est la pousser à faillir. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Notice de L’École des Maris, Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. 1253.</note> Montfleury fait preuve d’une certaine libéralité dans l’adaptation de l’intrigue à la bienséance française : en effet, Julie est une femme mariée et la morale semble épargnée par le fait que le mariage n’a pas été consommé… Le dénouement du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> recoupe aussi celui de <hi rend="i">L’École des Maris</hi> dans la mesure où Dom Brusquin se trouve dans la même situation ridicule que Sganarelle, signer le contrat de mariage de la jeune fille<note place="bottom">Vers 1568-1569 : « Ouy, c’est beaucoup pour moy que d’abaisser mon ame, / A signer le Contrat du Mary de ma Femme, »</note>, et se rend compte, mais trop tard, de son aveuglement sur lui-même et le monde<note place="bottom">Vers 1514-1517 : « Helas ! à mes dépens je connois, mais trop tard, / Qu’un Homme est un grand Sot quand un coup du hazard, / Le défait d’une Femme un peu Coquette &amp; belle, / D’aller passer les Mers pour courir aprés elle. »</note>. On voit percer alors « la philosophie sceptique d’un La Mothe Le Vayer pour qui, le monde étant fait d’équivoques et les perceptions nous trompant, la qualité essentielle de l’individu gît dans le discernement et son défaut principal dans l’aveuglement. Pour procéder à ce discernement, il est nécessaire d’accepter les limitations de nos perceptions et de notre compréhension du monde, d’adopter en tout une perspective mesurée en se gardant avec soin de « l’opiniâtreté » et des idées arrêtées, et de faire modestement confiance (quoique sans excès) à ce qui nous entoure (sans quoi la vie ne serait plus possible) : on perçoit combien cette philosophie, lorsqu’elle touche à des questions aussi concrètes que la mode, l’éducation des filles ou la vie conjugale, s’adapte aisément aux idées et aux comportements privilégiés par la sociabilité mondaine. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Notice de L’École des Maris, Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. 1257.</note> Tout comme Molière, Montfleury s’inspire donc des questions en vogue dans la société galante de l’époque, et place « au centre de l’intrigue un personnage ridicule du fait de son refus des codes de conduite galants »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Notice de L’École des femmes, Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. 1334.</note>. Mais si Molière semble rompre clairement avec la tradition comique de l’époque, Montfleury y reste attaché avec une écriture marquée par la comédie espagnole, comme nous l’avons souligné précédemment.</p>
          <p>On retrouve encore dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> le thème de la médecine, dénoncée comme imposture<note place="bottom">V. 768-772 : Selon Tomire, l’oncle de Carlos, qui n’a jamais fréquenté les médecins, risque justement de voir son espérance de vie augmentée…</note>, thème qui prend « appui sur une tradition substantielle – illustrée par Cornelius Agrippa (<hi rend="i">De incertudine et vantate scientiarum et artium</hi>, 1531), Montaigne (<hi rend="i">Essais</hi>, II, <num>xxxvii</num>, « De la ressemblance des enfants aux pères », et III, <num>xiii</num>, « De l’expérience ») et La Mothe Le Vayer (entre autres, la <hi rend="i">Prose chagrine</hi>, 1661, et le vingtième des <hi rend="i">Problèmes sceptiques</hi>, 1666) –, qui avait dénoncé la médecine comme une imposture, analogue à celle des sciences occultes dont tout le crédit repose sur la « faiblesse humaine ». »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Introduction aux Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. LVI-LVII.</note></p>
          <p>Enfin, Montfleury suit de près Molière dans l’art des jeux de mots et des paroles à double sens, confinant parfois à la vulgarité : le niveau de langue des valets est volontiers imagé et familier ; les insultes fusent<note place="bottom">Sept occurrences de « chien », « malepeste » au vers 362, « peste » aux vers 537 et 567...</note> ; les protagonistes ne finissent pas toujours leurs phrases, permettant à l’ambiguïté de se révéler<note place="bottom">Vers 514-517.</note> ; les sous-entendus sexuels sont présents<note place="bottom">Vers 226 à 228 dans le premier concert de la scène 6 de l’acte I.</note> ; les mots ou les phrases se répètent<note place="bottom">Répétition de « En galere » à la scène 8 de l’acte V.</note> ; des « ballets de paroles »<note place="bottom"><hi rend="sc">Garapon, R.</hi>, <hi rend="i">La Fantaisie verbale et le comique dans le théâtre français du Moyen Age à la fin du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Paris, Armand Colin, 1957, p. 288.</note> se mettent en place<note place="bottom">Vers 5 à 8.</note> ; les accumulations et les énumérations se rencontrent souvent<note place="bottom">Vers 63 à 66 ; vers 133 à 140.</note>... Là encore, plus que des emprunts à la farce, nous pouvons y reconnaître des choix dramaturgiques liés au sujet traité, et le goût de la société mondaine de l’époque pour « une littérature de couleur médiévale »<note place="bottom">« […] dans la lignée de la réédition du <hi rend="i">Tiers livre</hi> de Rabelais (1659), on redécouvrit ainsi les fabliaux qui mirentau goût du jour les bastonnades conjugales et les apostrophes hautes en couleur (« carogne » « truande » et autres « pendardes »). » <hi rend="sc">Forestier G., Bourqui C.</hi>, in <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">Introduction aux Œuvres complètes</hi>, t. I, Paris, Gallimard, 2010, p. XLII.</note>.</p>
          <p>Mais la pièce présente d’autres originalités, telle la place accordée à la Turquie, à la musique, et à la morale...</p>
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        <head>Originalités de la pièce</head>
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          <head>Turqueries et <hi rend="i">Lingua Franca</hi></head>
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            <head>Goût littéraire pour l’Orient au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</head>
            <p>L’intrigue de notre pièce se déroule, dans son intégralité, à Alger, qui fait partie de l’empire Ottoman au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle.</p>
            <p><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> n’est pas la première pièce de théâtre à se situer dans un pays oriental. Pierre Martino retrace la naissance de ce goût littéraire au XVII<hi rend="sup">e</hi> : « Ce fut [...] dans le dernier tiers du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle que le goût pour l’Orient, déjà apparu par quelques échappées<note place="bottom">La plupart des textes littéraires, qualifiés de turqueries, furent en fait publiés entre 1621 et 1656, exceptions faites de <hi rend="i">Bajazet</hi> (1672) et <hi rend="i">Soliman</hi> de La Tuillerie (1681). Comme le note Sylvie Requemora, « non sans paradoxe, une mode se voit assigner dans la société une date largement postérieure à la publication effective des textes littéraires qui lui sont liés ». <hi rend="sc">Requemora, S.</hi>, « Les « turqueries » : problèmes de définition d’une vogue théâtrale en mode mineur », <hi rend="i">Littératures classiques</hi>, nº 51, juin 2004, p. 134.</note>, se développa brusquement ; les voyages, le mouvement colonial, la propagande évangélique, les disputes des missions, l’intervention française dans la guerre austro-turque, tout cela fit, vers 1660, un concours remarquable de circonstances [...]. La mode fut d’abord à la Turquie. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Martino</hi>, P., <hi rend="i">L’Orient dans la littérature française au XVII<hi rend="sup">e</hi> et au XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Paris, Hachette, 1906, p. 173.</note> On s’extasie devant l’accroissement fabuleux de l’empire turc et l’heure n’est pas à la raillerie<note place="bottom">D’après Pierre, Martino, les auteurs attendront plutôt la fin du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle et le déclin de l’empire, pour ridiculiser les us et coutumes de ces pays.</note>. Les dramaturges trouvent alors dans l’histoire turque des ingrédients propices à la tragédie<note place="bottom">« L’histoire turque, telle qu’on la connaissait, avait des catastrophes, des drames de passion, de jalousie et de mort qui, parfois, bouleversaient brusquement l’oisiveté des sérails : le sultan condamnait à mort son frère ; une sultane faisait disparaître une rivale : des janissaires, envahissant le palais, détrônaient et tuaient le souverain : c’étaient là pour la tragédie classique d’admirables sujets, puisque l’action, sans que le poète eût besoin de la resserrer, était d’elle-même violente à souhait, et qu’elle s’achevait en quelques heures, entre les murs d’une même maison. » <hi rend="sc">Martino</hi>, P., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 190.</note>, et des péripéties<note place="bottom">Telle la disparition d’une personne, enlevée sur mer par des corsaires turcs, et qui réapparaît à point nommé dans sa famille quelques années plus tard. Voir <hi rend="sc">Molière</hi>, <hi rend="i">L’Étourdi ou les Contretemps</hi>, IV, 1, v. 1335-1339.</note> dont les Italiens et les Espagnols s’inspirent pour leurs comédies. Montfleury apparaît donc comme précurseur dans la mesure où, avant Molière, il exploite l’univers turc dans une comédie.</p>
            <p>Toujours est-il qu’en 1660, les spectateurs avaient reçu l’éducation théâtrale nécessaire pour comprendre les allusions aux mœurs orientales, et ils étaient habitués à l’utilisation de noms étranges tels Fatiman, Célime, Zaïre, Stamorat<note place="bottom">Ce type de noms était déjà apparu dans diverses tragédies et tragi-comédies, antérieures à 1660, inspirées de l’histoire des sultans, telles<hi rend="i"> La Soltane</hi> de Bounin en 1561,<hi rend="i"> La Rhodienne ou la Cruauté de Solyman</hi> de Mainfray (1621), <hi rend="i">Solimano</hi>, tragédie de Bonarelli, en 1636, suivi du <hi rend="i">Soliman</hi> de Vionn d’Alibray (1637), du <hi rend="i">Grand et Dernier Solyman ou La Mort de Mustapha</hi> de Mairet (1639), <hi rend="i">Roxelane</hi> de Desmares et <hi rend="i">Ibrahim ou L’Illustre Bassa</hi> de Scudéry en 1643, <hi rend="i">Perside ou la suite d’Ibrahim</hi> Bassa de Desfontaines (1644) , <hi rend="i">Soliman ou l’esclave généreuse</hi> de Jacquelin (1653), <hi rend="i">Osman</hi> de Trisatn l’Hermite en 1656...</note>... Montfleury ne traite pas des enjeux politiques souvent présents dans les tragédies antérieures, mais s’inspire tout de même d’une démesure dont l’Orient est le symbole : Célime est le stéréotype de la femme forte qui souhaite maîtriser sa destinée, Fatiman le représentant d’un pouvoir despotique pouvant démarier et marier qui bon lui semble.</p>
            <p>Pourtant, l’exotisme de la pièce, qui affleure à travers les noms et quelques « mots turquesques »<note place="bottom">Expression empruntée à Georges de Scudéry dans la préface de son roman <hi rend="i">Ibrahim</hi>. <hi rend="sc">Scudéry (de), G.</hi>, <hi rend="i">Ibrahim ou l’Illustre Bassa</hi>, éd. Éveline Dutertre, Paris, Société des Textes Français Modernes, 1998, p. 37. Allusion au « Serail » vers 505, « Divan » vers 1054, « Marabous » vers 929, « Prophete » vers 1145.</note>, est stéréotypé et limité<note place="bottom">Cela est souvent le cas dans les romans et pièces de théâtre du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle : « Absence complète de couleur locale, manque absolu de sentiment exotique, telle est l’impression que donnent ces quelques productions romanesques, d’ailleurs si dépourvues d’intérêt ; il est évident que, vers 1650, et assez longtemps après, la grande majorité des lecteurs ne se sentaient aucune curiosité véritable vers les pays lointains, dont ils connaissaient à peine les noms ; ils n’avaient d’autre désir que de se voir peints eux-mêmes et reproduits sous une forme idéalisée, dans le roman comme au théâtre. » <hi rend="sc">Martino</hi>, P., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 32-33. Ainsi, le personnage de Célime, qui jouit d’une liberté totale dans le sérail et ne pâtit d’aucune autre rivalité féminine, paraît peu conforme au statut de la femme en Orient à cette époque.</note> : si Montfleury s’inspire d’une réalité de l’époque, les Corsaires qui sillonnaient la Méditerranée et faisaient esclavages des voyageurs ou commerçants européens<note place="bottom">Voir <hi rend="i">Les Tyrans de la mer, Pirates, corsaires et flibustiers</hi>, dir. Sylvie Requemora et Sophie Linon-Chipon, Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2002.</note>, les turcs ne sont pas le sujet central de la pièce<note place="bottom">Dans <hi rend="i">LeBourgeois gentilhomme</hi> (1670), les coutumes turques sont davantage ridiculisées à travers « la cérémonie turque », écrite par Molière à l’aide des informations du chevalier d’Arvieux.</note>. Ce ne sont donc pas les turcs qui font rire mais les situations de décalage où les européens sont empêtrés...</p>
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            <head>Les situations de décalage</head>
            <p>En effet, une vision négative de la Turquie, teintée d’un certain moralisme religieux, transparaît dans les discours des personnages : Marine parle de « Renegat » vers 100 ; Tomire s’emporte contre « ces chiens de Turcs » vers 114, la polygamie est souvent évoquée à travers le « Serail »<note place="bottom">Vers 505, comprendre : harem.</note> et l’allusion à des comportements grossiers<note place="bottom">Vers 111 « Quelques Turcs, comme on sçait qu’ils n’en font pas façon » ; vers 378 « ce sont gens amis de la conclusion » ; vers 413 à 416 « ce Turc [...]/ Se soit fait de son chef icy mon Substitut/ Qu’il se soit par ses mains, enfin, de quelque sorte/ Payé de l’interêt de l’argent que j’apporte » ; vers 433 et 434 « C’est à dire, entre nous, parlant de bonne foy ;/ Qu’à son défaut, ces Turcs se sont passez de toy. »...</note>. Le statut du mariage est au cœur de la pièce de Montfleury<note place="bottom">Comme il est au cœur des pièces de Molière, <hi rend="i">Sganarelle, L’École des Maris, L’École des femmes</hi>.</note>, et Pierre Martino nous aide à retrouver l’idée que les français avaient de cette union en Orient : « La contrée était vraiment bénie : on y mariait les enfants à neuf ou dix ans, quelquefois à cinq ou six ! les parents étaient les premiers à chercher une concubine à leur fils, dès que celui-ci avait atteint sa seizième année ! Les hommes ne connaissaient pas avant la nuit du mariage la femme qu’ils épousaient ; mais la polygamie, loi religieuse, était là pour les consoler des désillusions possibles ; ils pouvaient recommencer plusieurs fois et renouveler, selon leurs désirs changeants, la recherche de leur idéal amoureux ; d’ailleurs les danseuses et les bayadères s’offraient pour les distraire de leurs amertumes matrimoniales. Si ces tristesses devenaient trop âpres, il leur était facile d’y mettre fin : le mariage n’avait rien de sérieux, n’étant « autre chose qu’un contrat civil que les parties peuvent rompre  » Aussi que de divorces ! mais la loi avait prévu les repentirs, et il était parfaitement admis qu’on renvoyât et qu’on reprit sa femme sous le contrôle bienveillant du cadi, jusqu’à trois fois ; alors seulement le mariage devenait indissoluble. Les Français, au temps de la Régence, durent estimer que les hommes d’Orient jouissaient d’un bonheur bien enviable. Mais le principal de leurs imaginations exotiques alla vers les harems privés et les sérails royaux, dont on leur avait permis de gâter l’intimité par de hardis regards. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Martino</hi>, P., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 68-69.</note></p>
            <p>Dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, le personnage de Dom Brusquin semble bien avoir envisagé l’image du harem, moins la possibilité du divorce...</p>
            <p>Si Dom Brusquin est celui qui exprime le plus violemment les stéréotypes orientaux, il est aussi, dans la pièce, le représentant du conservatisme social européen. Fort de son argent et de sa puissance en Espagne, Dom Brusquin est persuadé de pouvoir récupérer sa femme. Or, en se confrontant aux mœurs turques, il ne rachète pas sa femme, pire encore, celle-ci est démariée pour en épouser un autre ! Les normes sociales de l’Europe d’alors sont donc bafouées au profit d’une utopie barbaresque ! Paradoxalement, les amants peuvent réaliser leur amour grâce à l’esclavage, retournement de situation où l’on peut déceler l’empreinte baroque, mais aussi une orientation satirique qui sera très en vogue au XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle. C’est l’amour barbare qui est déçu dans la pièce : Célime est condamnée car elle ne respecte pas les règles de bienséance imposées par sa condition de femme turque...</p>
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            <head>La Lingua Franca</head>
            <p>La <hi rend="i">lingua franca</hi> intervient à deux moments dans la pièce : à la scène 2 de l’acte II, quand Tomire fait part de sa situation actuelle, et lors du concert final, à la scène dernière de l’acte V. Dans sa première apparition, l’usage de la <hi rend="i">lingua franca</hi> révèle une situation de décalage : Tomire, valet épanoui en Espagne, se trouve dépourvu de ses facultés quand il est confronté à la langue étrangère. Une fois encore, la confrontation avec l’étranger entraîne une perte de repères qui anéantit le pouvoir du personnage.</p>
            <p>L’utilisation du turc de fantaisie est réapparue dans la dramaturgie comique française avec <hi rend="i">la Sœur</hi><note place="bottom">En 1645.</note> de Rotrou, pièce elle-même imitée de <hi rend="i">La Sorella</hi> de Della Porta. Inspirée de la farce et de l’esthétique burlesque, la fantaisie verbale connaît un renouveau que Montfleury, ainsi que Molière, feront perdurer dans la seconde moitié du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. Si Montfleury n’est pas l’initiateur de ces jeux verbaux, il en donne de très beaux exemples à travers ses pièces<note place="bottom">Voir <hi rend="sc">Garapon, R.</hi>,<hi rend="i"> op. cit.</hi>, p. 286-290.</note> et précède même Molière dans l’utilisation du sabir turc<note place="bottom">Molière utilisera aussi la <hi rend="i">lingua franca</hi> dans <hi rend="i">Le Sicilien</hi> en 1667.</note>. Dans <hi rend="i">La Fantaisie verbale et le comique dans le théâtre français du Moyen Age à la fin du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Robert Garapon caractérise la fantaisie verbale « par une allure gratuite, dégagée des servitudes utilitaires de la signification et de la communication. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 12.</note> Cette définition convient bien aux occurrences de la scène 2 de l’acte I : « Carachou », au vers 81, et « sursa cauvé sursa », au vers 85, ne faisaient sûrement pas plus sens pour le public français du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, qu’il n’en fait aujourd’hui... La pièce est donc un bel exemple de la virtuosité avec laquelle Montfleury fait « jargonner ses personnages »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 286.</note> , preuve aussi de l’habileté du dramaturge à manier le texte exotique.</p>
            <p>Il est un autre domaine où Montfleury fait figure de pionnier par rapport à Molière : la place qu’il accorde à l’élément musical.</p>
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          <head>Place de la musique</head>
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            <head>La musique jouée au théâtre au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle<note place="bottom">Voir <hi rend="sc">Louvat-Molozay B.</hi>, <hi rend="i">Théâtre et musique, Dramaturgie de l’insertion musicale dans le théâtre français (1550-1680)</hi>, Paris, Champion, 2002.</note></head>
            <p>L’usage d’épisodes musicaux n’est pas une originalité au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, mais il adopte une place marginale. Tradition théâtrale héritée de l’Antiquité<note place="bottom">Les chœurs des tragédies antiques.</note>, les théoriciens de l’époque avancent le même constat : « la suppression des chœurs a eu pour conséquence la disparition de la musique au théâtre, ou plus exactement sa relégation dans les seuls intervalles d’actes »<note place="bottom"><hi rend="sc">Louvat-Molozay B.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 9.</note>. La musique, bien qu’enchâssée dans la pièce, avait alors une action dramatique autonome<note place="bottom">Cf. les structures chorales, prologales ou à intermèdes.</note>. Ainsi, « les danses et chansons que l’on trouve dans maintes <hi rend="i">comedias</hi>, comiques ou tragiques, sont comme des pauses ou des parenthèses, et peuvent ne présenter aucun rapport de contenu avec l’action principale. »<note place="bottom"><hi rend="sc">C. Couderc</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 254.</note> Cette « marginalisation » du <hi rend="i">medium</hi> musical est revendiquée par Corneille dans l’argument d’<hi rend="i">Andromède</hi> : « chaque Acte aussi bien que le Prologue a sa décoration particulière, et du moins une machine volante avec un concert de Musique, que je n’ai employée qu’à satisfaire les oreilles des spectateurs, tandis que leurs yeux sont arrêtés à voir descendre ou remonter une machine, ou s’attachent à quelque chose qui leur empêche de prêter attention à ce que pourraient dire les Acteurs, comme fait le combat de Persée contre le Monstre : mais je me suis gardé de faire rien chanter qui fût nécessaire à l’intelligence de la Pièce, parce que communément les paroles qui se chantent étant mal entendues des auditeurs, pour la confusion qu’y apporte la diversité des voix qui les prononcent ensemble, elles auraient fait une grande obscurité dans le corps de l’ouvrage, si elles avaient eu à instruire l’Auditeur de quelque chose d’important. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Corneille, P.</hi>, <hi rend="i">Andromède</hi>, éd. Ch. Delmas, Didier, Paris, 1974, p. 11-12.</note></p>
            <p>Si la musique a toujours fait partie de la représentation, avec des comédiens traditionnellement instruits à danser et à chanter<note place="bottom">Charles Mazouer note que « vers 1650, à la faveur des pièces à grand spectacle et autres pièces à machines dont le théâtre du Marais se fera une spécialité ; les dépenses pour la musique, le chant et la danse deviendront beaucoup plus considérables. » <hi rend="sc">Mazouer, C., «</hi> Théâtre et musique au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle », <hi rend="i">Littératures classiques</hi>, nº 21, printemps 1994, p. 8.</note>, son esthétique a été assez peu étudiée. Charles Mazouer donne un aperçu du lien qui unissait la parole poétique, la musique et la danse dans le théâtre musical, autour du personnage : « Le langage chorégraphique des pas, des postures et des mouvements s’ajuste au style et au rythme des airs musicaux (parfois évoqués par nos pièces) qui engendrent et soutiennent les danses. [...] Les formes musicales présentent une variété extrême, cherchant à produire leur effet par le seul prestige des instruments – dans les ouvertures, les ritournelles et autres « symphonies » –, prêtant leurs airs aux danseurs qui, en retour, complètent ou modifient la signification de la danse, s’alliant enfin, en une merveilleuse alchimie, avec les mots et les voix humaines pour produire la palette des chants et chansons, des récitatifs et des airs, duos, trios, des dialogues en musique, des petits et grands chœurs. Éléments orchestraux et éléments vocaux aident à décrire une situation, à peindre le personnage qui fait sien le chant, et sont capables de faire rire ou d’émouvoir puissamment. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Mazouer, C.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 20.</note></p>
            <p>L’originalité de Montfleury ne tient donc pas à l’utilisation d’ornements musicaux mais à la fonction accordée à ces épisodes. Nous envisagerons <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> dans une perspective musicologique avant d’étudier l’insertion des morceaux à l’intrigue. Nous rapprocherons cette dernière particularité à la technique dramatique du « théâtre dans le théâtre »<note place="bottom">Voir <hi rend="sc">Forestier</hi>, G., <hi rend="i">Le Théâtre dans le théâtre sur la scène française du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Genève, Droz, 1996.</note>, procédé dramatique omniprésent à l’âge baroque<note place="bottom">La technique apparaîtra plus tard incompatible avec la règle de l’unité d’action édictée par les doctes, conduisant à la disparition du procédé à la fin du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle.</note>.</p>
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            <head>Perspective musicologique</head>
            <p>Edward Forman<note place="bottom"><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, A.-J. de Montfleury, édition critique par Edward Forman, Textes littéraires, collection dirigée par Keith Cameron, University of Exeter, 1985.</note> et John S. Powell<note place="bottom"><hi rend="sc">Powell</hi>, J. S., <hi rend="i">Music and Theatre in France 1600-1680</hi>, New York, Oxford University Press, 2000.</note> ont privilégié la perspective musicologique dans l’étude des éléments musicaux du <hi rend="i">Mary sans femme</hi>.</p>
            <p>L’édition de la pièce de 1705, texte sur lequel nous avons travaillé, ne contient pas d’informations quant à l’orchestration des éléments musicaux. L’usage était alors de faire jouer les musiciens sur scène. Edward Forman avance l’hypothèse selon laquelle « la troupe [de l’Hôtel de Bourgogne] disposait à cette époque de deux comédiens et de deux comédiennes, capables d’interpréter des rôles importants et de chanter sur scène. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Forman, E.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. XV.</note> Les acteurs représentant Julie et Carlos étaient donc capables de jouer eux-mêmes « des instruments portatifs – des luths, des théorbes ou des guitares »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. XV.</note>. L’exotisme du dernier divertissement pouvait être rendu par « des instruments de percussion, des tambours, des tambourins et des castagnettes : il s’agit d’un exotisme tout à fait conventionnel, qui ajoute à des structures et des mélodies normales des effets périphériques, pris à la musique espagnole et bohémienne plutôt qu’arabe ou turque. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. XVI.</note> Concernant le concert final, Edward Forman propose une analogie avec un épisode du <hi rend="i">Jaloux invisible</hi> de Brécourt. Cette comparaison lui permet de présenter Robert Cambert comme le compositeur des éléments musicaux du <hi rend="i">Mary sans femme</hi>.</p>
            <p>John S. Powell maintient la même hypothèse dans <hi rend="i">Music and Theatre in France 1600-1680</hi>, et offre davantage de précisions musicales puisqu’il a retrouvé deux partitions de la pièce<note place="bottom">« A 12-page printed score found in the Paris Bibliothèque Nationale, entitled <hi rend="i">Airs de la comédie du Mary sans femme</hi> (n.p., n.d.), preserves the vocal parts alone without <hi rend="i">basse-continue</hi> ; this source may well be contemporaneous with the first production of the play. An 18th-cent. MS found in the archives of the Comédie-Française (entitled <hi rend="i">Theatre François, Tome II</hi>) preserves the same vocal numbers with <hi rend="i">basse-continue</hi> and obbligato instrumental parts, as well as the last <hi rend="i">intermède</hi>. The latter appears to be a revision of the music preserved, in part, by the undated printed source, and was perhaps used in the 1695 revival at the Comédie-Française. » <hi rend="sc">Powell</hi>, J. S., <hi rend="i">op. cit.</hi>, note p. 93. Traduction : Une partition de 12 pages trouvée à la Bibliothèque Nationale de Paris, intitulée <hi rend="i">Airs de la comédie du Mary sans femme</hi> (n.p., n.d.), ne conserve que les parties vocales sans <hi rend="i">basse-continue</hi> ; cette source peut bien être contemporaine à la première création de la pièce. Un manuscrit du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle trouvé dans les archives de la Comédie-Française (intitulé <hi rend="i">Theatre François, Tome II</hi>) conserve le même nombre de voix avec la <hi rend="i">basse continue</hi> et les parties instrumentales, comme dans le dernier <hi rend="i">intermède</hi>. Ce dernier semble être une révision de la musique conservée, en partie, par la source imprimée non datée, et fut peut-être utilisé pour la reprise de 1695 à la Comédie-Française.</note> :</p>
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              <p>The first song (‘O Giornata Fortunata’) appears notated in F4 bass clef and, judging by the words, it was probably sung by Fatiman. This is an <hi rend="i">air de mouvement</hi> accompanied by two obbligato parts notated in G1 clefs, in which the bassline appears to double as the vocal line and the <hi rend="i">basse continue</hi> [...]. There is nothing intrinsically exotic about this music, although obbligato oboes combined with tambourines, bells, and plucked lutes could invest it with an exotic flavour. The printed text reproduced above shows no line-break between the lyrics ‘Hà, hà, &amp;c.’ and ‘Libertà’ : yet both musical sources show that ‘Libertà’ is the start of another song, sung by a soprano (C1), the lyrics of which are clearly intended for Julie. An ‘Air pour les Turcs’ follows (a gigue), and again imaginative instrumentation could convey a Turkish character. The lyrics change to French for the third song (‘O le bon pays que la Turquie’), and its music, notated in tenor clef (C4), seems intended for Carlos. Two dances, a ‘Gavotte’ and an ‘Entrée des Pantalons’, are followed by another French song for soprano (‘S’il ne falloit que passer la mer’), and a ‘Contredanse’ <hi rend="i">en rondeau</hi> concludes the finale.<note place="bottom"><hi rend="sc">Powell</hi>, J. S., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 93. Traduction : La première chanson (‘O Giornata Fortunata’) apparaît notée en clé de fa quatrième ligne et, d’après les paroles, était sûrement chantée par Fatiman. C’est un <hi rend="i">air de mouvement</hi> accompagné par deux parties notées en clé de sol, dans lesquelles la ligne de basse apparaît répéter comme la ligne vocale et la <hi rend="i">basse continue</hi> […]. Il n’y a rien d’intrinsèquement exotique dans cette musique, bien que les parties de hautbois combinées avec les tambourins, les cloches, et les luths aux cordes pincées pouvaient lui conférer un charme exotique. Le texte imprimé reproduit au-dessus ne montre aucun saut de ligne entre les paroles ‘Hà, hà, &amp;c.’ et ‘Libertà’ :  cependant les deux sources musicales montrent que ‘Libertà’ est le début d’une autre chanson, chantée par une soprano (do<hi rend="sup">-1</hi>), les paroles de celle-ci sont clairement à l’intention de Julie. Un ‘Air pour les Turcs’ suit (une gigue), et de nouveau une instrumentation imaginative pouvait évoquer un style turc. Les paroles passent en français pour la troisième chanson (‘O le bon pays que la Turquie’), et sa musique, notée en en clé d’ut (do<hi rend="sup">3</hi>), semble destinée à Carlos. Deux danses, une ‘Gavotte’ et une ‘Entrée des Pantalons’, sont suivies d’une autre chanson française pour soprano (‘S’il ne falloit que passer la mer’), et une ‘Contredanse’ <hi rend="i">en rondeau</hi> conclut le final.</note></p>
            </quote>
            <p>Cependant, au-delà de cette exploration musicologique, il est intéressant d’étudier comment les éléments musicaux sont intégrés à l’intrigue.</p>
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            <head>Une forme du théâtre dans le théâtre</head>
            <p>La pièce du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> est jalonnée de trois concerts<note place="bottom">Scène 6 de l’acte I, scène 9 de l’acte III et scène dernière de l’acte V.</note>, joués par Julie et Carlos, esclaves des turcs, dans le palais du gouverneur d’Alger<note place="bottom"><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> est à classer dans la catégorie des « comédies au château » car ces spectacles peuvent être vus comme la transposition d’une réalité de l’époque. En effet, au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, « de Versailles au plus obscur château de province, on brise la monotonie de la vie en regardant ou en jouant la comédie, ou, du moins, qu’on en rêve. » <hi rend="sc">Forestier</hi>, G., <hi rend="i">op. cit</hi>., p. 80.</note>.</p>
            <p>Outre leur structure d’intervention dans la pièce<note place="bottom">La structure du <hi rend="i">Mary sans femme</hi>, à enchâssement multiple, repose « sur la théâtralisation de certaines scènes conçues à l’origine comme des intermèdes », intervenant de manière irrégulière dans la pièce. <hi rend="sc">Forestier</hi>, G., <hi rend="i">op. cit</hi>., p. 92.</note>, les épisodes musicaux ont une portée dramatique qui ne met pas en péril l’unité d’action. Au contraire, les liens entre les spectacles et l’intrigue de la pièce sont étroits : le premier divertissement musical expose les habitudes amoureuses des différents peuples européens et permet à Célime d’avouer son amour à Carlos<note place="bottom">On retrouve dans ce concert des thèmes en vogue au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle : la valeur thérapeutique de la musique (vers 168) qui pourrait sortir Célime de son état maussade ; la possibilité de tomber amoureux d’une personne à travers sa voix. Voir <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, A.-J. de Montfleury, éd. cit., p. XIX-XX.</note> ; le deuxième concert, offert par Fatiman à Célime, présente le refus de Carlos d’aimer Célime, tout en indiquant que Fatiman est au courant de l’infidélité de sa maîtresse. Le concert va donc modifier l’action principale en entraînant la fureur de Célime et ses souhaits de vengeance. On se retrouve là dans un cas de mise en abyme discursive : l’opéra chanté par Carlos et Julie est en parfaite adéquation avec ce que vivent les personnages dans la pièce ; la chanson reflète le refus amoureux de Carlos à l’égard de Célime, mais aussi celui de Julie à l’encontre de Dom Brusquin<note place="bottom">Pour une étude plus approfondie, voir <hi rend="sc">Forestier</hi>, G., <hi rend="i">op. cit</hi>., p. 152-153, p. 238-239.</note>. D’autre part, le rôle donné à la musique est intéressant<note place="bottom">« La musique constituait un « voile » des plus respectables derrière lequel les amants pouvaient se hasarder, même devant les rivaux ou les obstacles les plus autoritaires ou soupçonneux, à faire des déclarations d’une clarté parfois déconcertante, arguant la certitude qu’on accepterait tout ce qu’ils disaient comme des fictions. » <hi rend="sc">Forman, E.</hi>, « Musique et quiproquo : l’ironie dans les intermèdes musicaux », <hi rend="i">Littératures classiques</hi>, nº 21, printemps 1994, p. 46.</note> puisque, conformément aux remarques de Corneille, le sens du concert est percé par Célime, et non par Fatiman qui est surpris de la vive réaction de sa maîtresse<note place="bottom">Vers 990-991-995-996.</note>. Comme le note Edward Forman, la « complication de l’intrigue aurait pu survenir autrement que par une scène musicale [...], mais la musique donne à Carlos la possibilité de menacer et de troubler Célime de façon quasi publique, et souligne la complexité des rapports entre Célime, Carlos et Fatiman – qui offre à Célime la belle voix de Carlos, qui lui appartient en quelque sorte. »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 52.</note></p>
            <p>À cette fonction instrumentale des concerts, il faut ajouter la fonction décorative qui paraît particulièrement prégnante dans la scène finale. En effet, c’est dans cette pièce finale que l’orientalisme est le plus présent : « tous ces dramaturges comptent sur la musique pour installer le spectateur dans une euphorie qui n’est pas dépourvue de sens : les vices des hommes et leurs violences, transformés déjà en spectacle comique, sont emportés dans un grand mouvement de folie et de gaieté qui en estompe singulièrement la gravité morale. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Mazouer, C., «</hi> Théâtre et musique au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle », <hi rend="i">Littératures classiques</hi>, nº 21, printemps 1994, p. 19.</note></p>
            <p>Au delà de la survivance du procédé du théâtre dans le théâtre, on peut donc voir dans l’utilisation de la musique une manière de plaire au public<note place="bottom">« Le procédé ne sert plus guère qu’à introduire des divertissements, au sens large du terme. » <hi rend="sc">Forestier</hi>, G., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 76.</note> dans un souci décoratif autorisé par les règles classiques. Cette attirance pour le spectaculaire révèle le goût particulier du XVII<hi rend="sup">e</hi> pour ces comédies à insertions musicales, qui rivalisent souvent avec les comédies-ballets...</p>
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          <head>Influence du travail de Montfleury</head>
          <p>Dans son introduction à l’édition critique du <hi rend="i">Mary sans femme</hi>, Edward Forman met en avant le rôle important de Montfleury dans l’apparition de la comédie-ballet, lui accordant une place de précurseur dans le domaine. Bénédicte Louvat-Molozay partage la même opinion : « Il n’est pas impossible que Molière se soit inspiré de ce divertissement final pour écrire la turquerie du <hi rend="i">Bourgeois gentilhomme</hi> : le sabir est déjà présent dans le premier air et la pièce de Montfleury associe le chant à l’exotisme. De la même manière, c’est peut-être chez Montfleury que Molière trouve le modèle de l’opéra impromptu qu’interprètent les deux jeunes amants dans <hi rend="i">Le Malade imaginaire</hi>, et qu’Argan, à l’instar de Célime, interrompt lorsqu’il a compris le sens des paroles chantées. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Louvat-Molozay B.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 526.</note> John S. Powell révèle cette même influence de Montfleury chez Molière dans <hi rend="i">Le Sicilien, ou l’Amour peintre</hi><note place="bottom">« The pseudo-Turkish music of <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> (1663) by Antoine Jacob (dit Montfleury), probably influenced that composed by Lully for Moliere’s <hi rend="i">Le Sicilien, ou l’Amour peintre</hi> (1667) and <hi rend="i">Le Bourgeois Gentilhomme</hi> (1670). » <hi rend="sc">Powell</hi>, J. S., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 92. Traduction : La musique pseudo-turque du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> (1663) d’Antoine Jacob (dit Montfleury), a probablement influencé celle que composa Lully pour <hi rend="i">Le Sicilien, ou l’Amour peintre</hi> (1667) et <hi rend="i">Le Bourgeois Gentilhomme</hi> (1670) de Molière.</note> et <hi rend="i">Le Mariage forcé</hi><note place="bottom">« […] another possible influence on both the design and content of <hi rend="i">Le Mariage forcé</hi> may derive from a musical comedy by one of Moliere’s rivals, Antoine Montfleury. » <hi rend="sc">Powell</hi>, J. S., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 355. Traduction : […] une autre influence possible sur l’esthétique et le contenu du <hi rend="i">Mariage forcé</hi> peut venir d’une comédie musicale d’un des concurrents de Molière, Antoine Montfleury.</note>.</p>
          <p>Outre cette influence musicale, rappelons aussi la place de pionnier qu’a eue Montfleury dans l’utilisation de la <hi rend="i">lingua franca</hi>, frayant la voie à Molière et Lully pour l’écriture du <hi rend="i">Bourgeois gentilhomme</hi>. Ainsi, d’après Edward Forman, Montfleury « est non seulement le premier auteur à mettre cet élément au premier plan en y consacrant la scène culminante de son œuvre, il est non seulement le premier à l’associer à la musique, mais encore il est le premier à manier si habilement le texte exotique que le sens s’en dégage très clairement. »<note place="bottom"><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, A.-J. de Montfleury, éd. cit., p. XVIII.</note></p>
          <p>Outre ces originalités, l’auteur sut s’attacher aux idées de son époque avec des thématiques qui parcourent les œuvres de ses contemporains : Thomas Corneille avait déjà traité du lien entre la voix et l’amour dans <hi rend="i">Le Charme de la voix</hi> ; la valeur thérapeutique de la musique est étudiée dans <hi rend="i">La Folle Gageure</hi> de Boisrobert et Molière revient aussi sur ce thème dans <hi rend="i">Le Malade imaginaire</hi>.</p>
          <p>Au regard de l’influence de Montfleury sur le théâtre du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, et surtout chez Molière, considéré comme le plus grand dramaturge comique de son temps, nous pouvons nous étonner du peu de place que la postérité a laissée à l’auteur... Les critiques formulées à son égard tournent souvent autour de la moralité. Aussi, nous paraît-il important de revenir sur ce point.</p>
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          <head>Discrédit de la pièce lié à la morale</head>
          <p>Si <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> ne peut être assimilée à une farce, la moralité de la pièce reste cependant douteuse puisque c’est un amour extraconjugal qui triomphe... Rappelons la condamnation des frères Parfaict pour qui le sujet du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> « pêche du côté des bonnes mœurs ». On comprend alors que Montfleury ait été assez mal considéré par les critiques, et ce dès le XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle<note place="bottom">Cf. propos de Boileau.</note>. Plus qu’un discrédit individuel, l’auteur a pâti de la réputation de la farce dont il était censé s’inspirer, et plus largement du discrédit de la comédie, genre dans lequel il excellait.</p>
          <p>En effet, « dès le XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, une comédie est une œuvre mineure. [...] Presque ignorée et souvent méprisée par les doctes dans leur réflexion sur les règles du théâtre, la comédie se voit privée de l’accession au statut de genre « régulier » [...]. Le genre [...] est presque toujours défini « en creux », par opposition à la tragédie, ou se voit assigner les mêmes buts : peindre la nature, instruire et plaire, respecter la bienséance. »<note place="bottom"><hi rend="sc">Sternberg, V.</hi>, « La comédie des contemporains de Molière : une production mineure ? », <hi rend="i">Littératures classiques</hi>, nº 51, juin 2004, p. 172.</note>. Si Montfleury a structuré sa pièce de telle sorte qu’elle soit régulière<note place="bottom">La règle des trois unités est respectée dans <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, voir développement d’Edward Forman à ce sujet. <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, A.-J. de Montfleury, éd. cit., p. XXI-XXII.</note>, son utilité morale ne fut pas concluante pour beaucoup de critiques qui l’étudièrent. Alors qu’il faut « peindre d’après nature » et que Molière fût justement apprécié dans son aptitude à peindre les « caractères », la portée psychologique des personnages de Montfleury paraîtra plus faible...</p>
          <p>Pourtant, toutes ces condamnations sont liées à un regard normatif hérité du classicisme : la comédie est jugée à l’aune de sa vraisemblance et non de sa fonction première, divertir. Or, à l’épreuve de la scène, <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> rencontra un véritable succès de 1695 à 1761. Il paraît donc important de mettre en lumière le manuscrit qui servit de support aux comédiens de cette époque.</p>
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        <head>Le manuscrit</head>
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          <head>Les variantes au niveau de l’intrigue</head>
          <p>Comme nous le verrons dans la « Note sur la présente édition », les textes du manuscrit découvert dans la collection Soleinne, et celui de l’édition collective de 1705, présentent des différences : l’orthographe et la ponctuation ne sont pas les mêmes, mais surtout, certains éléments de l’intrigue sont changés. Afin que ces modifications apparaissent plus clairement à la lecture du manuscrit, nous les avons soulignées, puis mises en évidence dans un tableau comparatif entre les deux textes<note place="bottom">Voir annexes.</note>.</p>
          <p>Une première remarque s’impose : alors que le texte de l’édition de 1705 présente cinq actes équilibrés<note place="bottom">344 vers pour l’acte I, 345 pour l’acte II, 326 pour l’acte III, 285 pour l’acte IV et 348 pour l’acte V ; l’acte IV, un peu plus court que les autres, accélère l’action pour conserver toute l’attention du public.</note>, le manuscrit développe des parties plus inégales<note place="bottom">388 vers pour l’acte I, 439 pour l’acte II, 355 pour l’acte III, 331 pour l’acte IV et 263 pour l’acte V.</note>. En effet, si les premiers actes sont similaires dans les deux versions, des différences apparaissent rapidement : dans le manuscrit, à la scène 3 de l’acte II, Dom Brusquin présente la récompense qu’il accorde à Marine pour sa loyauté ; à la scène dernière de l’acte V, la mariage des valets, Marine et Tomire, est célébré… Mais la principale source de changements entre les deux intrigues est due à la présence du coffret dans le texte de l’édition de 1705<note place="bottom">À la scène 5 de l’acte III, Fatiman offre, comme preuve de son amour, un coffret de pierreries à Célime ; ce coffret est ensuite donné par Célime à Carlos, à la scène 3 de l’acte IV, pour réapparaître, à la scène 4 de l’acte V, comme preuve de la trahison de Carlos.</note>, alors qu’il n’en est pas question dans le manuscrit. La disparition de cette péripétie remodèle l’histoire puisque l’objet ne sera plus preuve de la trahison de Célime et ne permettra pas de la confondre et de l’accuser. Dans le manuscrit, le discours est davantage présent : à la scène 7 de l’acte II, Zaïre avoue à Fatiman l’amour de sa maîtresse quand ce dernier l’interroge sur l’humeur chagrine de Célime<note place="bottom">Contrairement au texte de l’édition de 1705, où Zaïre est poussée à la trahison par l’effronterie de Célime, qui demande la libération de Carlos à la scène précédente, sous prétexte que ses chants auraient ouvert son cœur à l’amour.</note> ; le deuxième concert apparaît plus tôt dans la pièce<note place="bottom">À la scène 4 de l’acte III, alors qu’il survient à la scène 9 de l’acte III dans l’édition de 1705.</note> et le sujet, moins offensant pour Célime, anticipe clairement la suite avec l’annonce de la séparation avortée des amants ; Dom Brusquin se montre plus bavard, surprenant les amants à la scène 11 de l’acte II, puis à la scène 5 de l’acte III,  et renouvelant à chaque fois son intention de récupérer Julie ; la scène de jalousie<note place="bottom">À la scène 1 de l’acte IV.</note> de Célime à Fatiman, au sujet de Julie, n’est pas motivée par la colère, comme dans le texte de l’édition de 1705<note place="bottom">À la scène 2 de l’acte IV.</note>, mais elle intervient en réponse au questionnement de Fatiman sur les raisons qui lui font différer son mariage ; à la scène 5 de l’acte IV, Carlos rapporte à Julie le discours qui a fait fléchir Fatiman en leur faveur.</p>
          <p>Le remaniement de la pièce est important. Si le manuscrit date de la fin du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle<note place="bottom">Ce manuscrit serait peut-être le texte « raccommodé » par Champsmelé pour la reprise de la pièce à la Comédie Française en 1695.</note>, comme nous l’avons avancé dans la « Note sur la présente édition », et le texte de l’édition de 1705 est bien celui de l’auteur<note place="bottom">Nous entendons par là que l’éditeur de 1705 travailla sûrement d’après la première édition de la pièce, datant de 1663.</note>, la comparaison de deux versions pourrait mettre en lumière une évolution de la dramaturgie entre 1663 et 1695.</p>
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          <head>Témoin de l’évolution des codes dramaturgiques</head>
          <p>Tout d’abord, nous tenons à rappeler que le texte de théâtre n’est pas stable : « il évolue en permanence au gré d’actualisations scéniques successives, au contact des exigences dictées par les conditions de production et de réception du spectacle. Forme contingente stabilisant parfois arbitrairement un certain état de la représentation, historiquement daté, la pièce imprimée est certes une mémoire du spectacle, mais une mémoire tronquée, biaisée, sélective, qui tend à apostasier, sous la bannière unique de l’intention de l’auteur, la multiplicité d’influences qui concourent à l’établissement d’un texte dramatique composite et collectif. »<note place="bottom">Poirson, M., « Le plateau à l’œuvre : du manuscrit de souffleur au relevé de mise en scène (XVII<hi rend="sup">e</hi>-XXI<hi rend="sup">e</hi> siècles) », <hi rend="i">Revue d’histoire du théâtre</hi>, nº 237, janvier-mars 2008, p. 51.</note> Ainsi, dans un article sur « Les Manuscrits de théâtre »<note place="bottom"><hi rend="sc">Thomasseau, J.-M.</hi>, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », <hi rend="i">Littérature</hi>, nº 138, juin 2005, p. 98.</note>, Jean-Marie Thomasseau distingue treize états des écrits de théâtre. Le manuscrit que nous avons retranscrit serait à identifier comme « texte « jouet » [<hi rend="i">sic</hi>] et rejoué »<note place="bottom"><hi rend="i">Ibid.</hi>, p. 116.</note>, ou « texte tiers » d’après la terminologie de Martial Poirson<note place="bottom">Poirson, M., art. cit., p. 54.</note>. Un tel document nous permet d’évaluer les modifications apportées au texte à l’épreuve de la représentation, en fonction des exigences et des possibilités de la scène, du travail des interprètes, de la réaction du public, de la censure…</p>
          <p>Un souci de simplification de l’intrigue transparaît à la lecture du manuscrit : les péripéties sont limitées au profit du discours qui éclaircit les faits et gestes de chacun des personnages<note place="bottom">Telle la réplique de Marine, aux vers 150 à 154, qui explique la confiance que lui accorde Dom Brusquin.</note>. Cette tendance peut être imputée à l’esthétique classique, qui cherche à unifier davantage l’action dramatique dans sa recherche de vraisemblance<note place="bottom">Le discours tenu par certains personnages à l’acte IV confine à la justification théorique : la versatilité amoureuse de Fatiman est pointée du doigt et explicitée à la scène 2 ; à la scène 5, Julie s’inquiète d’un mariage qui ne respecte pas la bienséance ; au vers 1370, Tomire revendique le caractère burlesque de la pièce.</note>, mais aussi à l’impératif pratique de la représentation.</p>
          <p>Cette simplification se lit dans la description des lieux : alors que le cabinet était présent dans le texte de l’édition de 1705, il disparaît dans le manuscrit, marquant une épuration du décor.</p>
          <p>Le goût pour le composite est moins prégnant : la <hi rend="i">lingua franca</hi> disparaît du divertissement final ; l’usage des pièces musicales est plus conformiste<note place="bottom">Les pièces musicales du manuscrit décrivent invariablement l’état amoureux des deux amants et ne laissent pas de place à la fantaisie comme dans les chansons de l’édition de 1705.</note>…</p>
          <p>Ce choix d’unification se manifeste aussi dans le dénouement : le mariage des deux amants, Julie et Carlos, est doublé de celui de leurs valets, comme il est d’usage dans de nombreuses comédies ; le personnage de Célime n’apparaît pas à l’avant-dernière scène de la pièce, évitant d’apporter une touche sombre à la conclusion heureuse de la comédie<note place="bottom">Dans le texte de l’édition de 1705, Célime est condamnée à comparaître devant le divan.</note>.</p>
          <p>De manière générale<note place="bottom">Exceptions faites de la scène 4 de l’acte II, où les didascalies présentes dans le texte de l’édition de 1705 n’apparaissent pas dans le manuscrit, et de la scène 2 de l’acte III, où il n’est pas spécifié que Célime offre une bague à Tomire.</note>, on remarque une recrudescence d’indications scéniques<note place="bottom">En conformité avec l’essor des indications scéniques à la fin du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle.</note> : dans le manuscrit, des détails sont donnés sur l’instrumentation<note place="bottom">À la scène 1 de l’acte I : « six violons esclaves ».</note>, sur les protagonistes du divertissement final<note place="bottom">« Six esclaves turcs, six lutteurs mores et six gladiateurs feront leurs entrées, puis chantera Julie ».</note>, sur la façon de parler des personnages<note place="bottom">À la scène 2 de l’acte II : « bas » ; scène 6 de l’acte IV : « en riant ».</note> ou sur leur manière d’agir<note place="bottom">À la scène 1 de l’acte II : « il lit » ; scène 2 de l’acte III : « aprez avoir resvé » ; scène dernière de l’acte IV : « le chassant ».</note>…</p>
          <p>Plus qu’une nouvelle écriture, ce manuscrit est une ré-écriture, une re-création, qui permet d’éclairer différemment l’œuvre initiale du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> en apportant des modifications issues de la scène et du parti pris de certains comédiens<note place="bottom">Il est intéressant de noter que Champmeslé avait un goût prononcé pour les divertissements musicaux, eu égard à la comédie en un acte, qu’il écrivit avec La Fontaine, <hi rend="i">Je vous prends sans vert.</hi></note>.</p>
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        <head>Note sur la présente édition</head>
        <p>Il nous a été impossible de retrouver un exemplaire de l’édition originale du <hi rend="i">Mary sans femme</hi>. Edward Forman, qui a déjà publié une édition critique de la pièce<note place="bottom"><hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, A.-J. de Montfleury, éd. cit.</note>, a rencontré la même difficulté. Pourtant, la pièce aurait été représentée et imprimée entre 1660 et 1664. En effet, l’avertissement tiré de l’édition de 1739 du <hi rend="i">Théâtre de Messieurs de Montfleury</hi><note place="bottom"><hi rend="i">Théâtre de Messieurs de Montfleury Père et fils, nouvelle éd. augmentée de trois Comédies, avec des Mémoires sur la vie et les Ouvrages de ces deux Auteurs, Tome Premier</hi>, Paris, La Compagnie des Libraires, 1739.</note> propose une liste chronologique des pièces d’Antoine Jacob Montfleury : <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> serait la première comédie en cinq actes en vers de l’auteur, et aurait été imprimée à la suite des <hi rend="i">Bestes raisonnables</hi><note place="bottom">Selon la même source, <hi rend="i">Les Bestes raisonnables</hi> fut achevée d’imprimer le 15 mai 1661.</note> mais avant <hi rend="i">Thrasibule</hi><note place="bottom">Toujours selon la même source, <hi rend="i">Thrasibule</hi> fut achevée d’imprimer le 17 avril 1664.</note>. Il paraît donc vraisemblable que <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi> fut publiée en 1663 comme le rapporte de nombreux ouvrages, et non pas en 1666 chez Pépingué, comme le note Lancaster<note place="bottom">Henry Carrington Lancaster, <hi rend="i">A History of French dramatic Literature in the Seventeenth Century</hi>, Baltimore, the Johns Hopkins Press, 1929-1942, p. 697.</note>. La date de 1663 apparaît aussi dans le <hi rend="i">Répertoire du Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne, depuis 1620 jusqu’à sa fermeture en 1680</hi><note place="bottom">« Environ 372 pièces in-4, in-8 et in-12, non-rel., en 40 portef. (La plupart des pièces petit in-8 et in-12 sont montées in-8 ; cinq ou six imparf. du titre) », <hi rend="i">Bibliothèque Dramatique de Monsieur de Soleinne</hi>, catalogue rédigé par P. L. Jacob, Bibliophile, Dernière partie, Livres doubles et livres omis, Austria, Alliance des Arts, 1969, p. 44.</note> figurant dans la Bibliothèque Dramatique de Monsieur Soleinne. Enfin, Sophie Wilma Deierkauf-Holsboer<note place="bottom"><hi rend="sc">Deierkauf-Holsboer</hi>, S. W., <hi rend="i">Le Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne, op. cit.</hi>, p. 124.</note> situe la représentation du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> durant l’année 1664, mentionnant quarante-neuf reprises à la Comédie Française<note place="bottom">Selon les sources d’Alexandre Joannidès, ce nombre s’élèverait plutôt à soixante et onze entre 1695 et 1761. <hi rend="sc">Joannides</hi>, A., <hi rend="i">La Comédie-Française de 1680 à 1900, Dictionnaire général des pièces et des auteurs</hi>, avec une préface de Jules Claretie, New-York, Burt Franklin, 1971.</note>.</p>
        <p>Nous n’expliquons pas la disparition des exemplaires de l’édition originale de la pièce. Victor Fournel note, concernant <hi rend="i">Le Mari sans femme</hi> de Montfleury, « l’une de ses pièces les plus rares en édition originale. Beauchamps ne l’indique pas dans la liste qu’il a donnée des productions de l’auteur, et ni La Vallière, ni le catalogue Soleinne ne décrivent la première édition. Elle a été recueillie dans les <hi rend="i">Œuvres de M. Montfleury</hi>, 1705, 2 vol. in-12<note place="bottom"><hi rend="sc">Fournel, V.</hi>, <hi rend="i">Les Contemporains de Molière, Recueil de comédies, rares ou peu connues, jouées de 1650 à 1680, avec l’histoire de chaque théâtre, des notes et notices biographiques, bibliographiques et critiques</hi>, 3 vol., Genève, Slatkine reprints, 1967, vol. 1, p. 216.</note> ». Le rédacteur de la collection Soleinne, Paul Louis Jacob, précise dans la présentation du Théâtre d’Antoine Jacob de Montfleury<note place="bottom">Numéro 1343,<hi rend="i"> op. cit.</hi>, t. I, p. 312.</note> : « Ces éditions originales sont aussi rares que celles de Corneille et de Molière. Pont-de-Vesle n’avait pu en découvrir que deux. « Ces pièces étant devenues extrêmement rares, dit l’éditeur de 1698, parce que les éditions qui en ont été faites en France ont été entièrement vendues, de sorte qu’on n’en a pu trouver des exemplaires qu’entre les mains des personnes les plus curieuses auxquelles il a fallu recourir. » La rareté de ces éditions vient de ce que les comédies de Montfleury furent jouées en France aussi souvent que celles de Molière, quoique, ou plutôt, parce qu’elles étaient fort libres. Les pièces les plus rares de son théâtre sont <hi rend="i">le Mari sans femme, Thrasibule, l’Escole des filles</hi> (Par., N. Pépingué, 1666), et <hi rend="i">le Gentilhomme de la Beauce</hi> (Paris, Ribou, 1670). » Cependant, cette démonstration ne paraît pas convaincante dans la mesure où d’autres pièces de théâtre du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle ont eu beaucoup de succès et des exemplaires de leur édition originale restent consultables aujourd’hui...</p>
        <p>Cette absence rend difficile l’établissement du texte du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> puisqu’on ne peut confronter les éditions disponibles à la première édition. Or, il faut rappeler que c’est souvent cette première édition qui fait l’objet d’une relecture et de corrections de la part de l’auteur.</p>
        <p>La collection Soleinne contient un manuscrit de la pièce (neuvième portefeuille, numéro 3068) consultable à la Bibliothèque Richelieu (cote Manuscrits Français 9268). Dans le catalogue de la collection, le manuscrit est ainsi présenté : « Le Mari sans femme, com. 5. v. (écrit du dix septième siècle). » Cette pièce est environnée de manuscrits du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle mais aucune date ne figure sur le manuscrit et ne permet de le dater. Les conservateurs du département manuscrits de la Bibliothèque Nationale de France à Richelieu, s’accordent tout de même pour dater le manuscrit du XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècle, après étude de la calligraphie.</p>
        <p>Nous avons donc décidé de travailler à partir de ce manuscrit et d’un exemplaire du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> provenant d’une édition française, qui est le premier recueil de l’ensemble des pièces de Montfleury<note place="bottom">Les éditions collectives précédentes ne contiennent pas <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>.</note>. Ce dernier ouvrage se trouve à la Bibliothèque Richelieu, département des arts du spectacle (cote 8-RF-6552) et a fait l’objet d’une reprographie.</p>
        <p>Le choix de ces deux textes a été dicté par les divergences qu’ils présentent. Alors que les textes des différentes éditions du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> sont similaires, celui du manuscrit de la collection Soleinne présente des scènes sensiblement distinctes.</p>
        <p>Pourquoi ces différences ? La remarque d’Alexandre Joannidès, dans la table alphabétique des pièces<note place="bottom"><hi rend="sc">Joannides</hi>, A., <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 54.</note> de la Comédie Française, peut nous éclairer : « <hi rend="i">Mari sans femme (le)</hi>, comédie en cinq actes, en vers, par <hi rend="sc">Montfleury</hi>. – 3 octobre 1695. – Th. de l’Hôtel de Bourgogne, 1663. (« Raccommodée » par <hi rend="sc">Champsmeslé</hi> pour la reprise à la Comédie-Française). » Champsmeslé aurait donc retravaillé la pièce de Montfleury et donné une autre version de la pièce qui pourrait être celle du manuscrit de la collection Soleinne.</p>
        <p>Il est aussi intéressant de noter, avec Lancaster<note place="bottom"><hi rend="sc">Lancaster</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>, que la Bibliothèque Dramatique de Monsieur Soleinne contenait un second manuscrit de la pièce : «  MS. [...] <hi rend="i">Dom Brusquin, ou le mari sans femme</hi>. Comédie (de Montfleury, réduite à 3 personnages), en 3 actes et en vers. Le tout en un vol. in-8, sur pap., écrit du 18<hi rend="sup">e</hi> siècle, v. br. »<note place="bottom">Manuscrit qui apparaît au numéro 1348 de la Bibliothèque Dramatique Soleinne,<hi rend="i"> op. cit.</hi>, t. I, p. 313.</note> Le texte manuscrit, sur lequel nous avons travaillé, pourrait être aussi une première étape au remaniement de la pièce de Montfleury en trois actes.</p>
        <p>Nous ne partageons donc pas l’hypothèse d’Edward Forman, selon laquelle « la version préparée par Champmeslé pour la reprise de 1695, et imprimée dans les <hi rend="i">Œuvres</hi> de Montfleury, [...] correspondait suffisamment à la version originale de la pièce pour justifier la décision de la publier sous le nom de l’auteur<note place="bottom"><hi rend="sc">Forman, E.</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, IX.</note>. »</p>
        <p>À la première lecture, outre des divergences d’intrigue, les deux exemplaires présentent une orthographe et une ponctuation très différentes. En effet, l’orthographe varie beaucoup au XVII<hi rend="sup">e</hi> et au XVIII<hi rend="sup">e</hi> siècles au gré des « modes » et des nouvelles éditions de l’Académie. Ces modifications orthographiques ne portent pas de préjudice au texte dans la mesure où elles signalent la même lexie ou le même son. En revanche, il est plus délicat de toucher à la ponctuation d’un auteur car elle fait davantage partie de son style. Force est de constater ici que la ponctuation du <hi rend="i">Mary sans femme</hi> est très différente entre le manuscrit et l’exemplaire de l’édition collective, le manuscrit ne portant que très peu de marques de ponctuation. Ces variations de ponctuation sont donc d’autant plus préoccupantes qu’aucun exemplaire de l’édition originale ne permet de trancher. De plus, la ponctuation du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle a une fonction essentiellement orale, surtout au théâtre, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui<note place="bottom">« La ponctuation des siècles classiques était beaucoup plus sobre que la nôtre. Mais elle n’était ni inexistante, ni arbitraire. Au contraire : plus proche des groupes de souffle et de sens de la parole naturelle, elle était moins formelle, moins mécanique. » Nina Catach, <hi rend="i">La Ponctuation</hi>, Paris, PUF, 1994.</note>. Devant cette difficulté, nous ne corrigerons, dans l’exemplaire de 1705, que les ponctuations manifestement fautives. Quant au manuscrit, nous avons choisi de ne modifier ni la ponctuation, ni l’orthographe, dont l’usage est différent de celui utilisé dans le monde de l’édition. Nous avons seulement mis en avant les modifications significatives qui existent avec l’édition de 1705, en les soulignant. Afin que la lecture soit plus aisée, nous avons aussi mis en italique quelques didascalies, comme l’exigent les normes éditoriales.</p>
        <p>L’exemplaire de l’édition française du recueil de l’ensemble des pièces de Montfleury dans lequel apparaît <hi rend="i">Le Mary sans femme</hi>, se présente dans un format in-12 en deux volumes. La pièce se trouve dans le deuxième volume.</p>
        <p>La page de titre se présente de la manière suivante :</p>
        <p>LES/ ŒUVRES/ DE MONSIEUR/ MONTFLEURY,/ <hi rend="i">CONTENANT</hi>/ SES PIECES DE THEATRE./ <hi rend="i">Représentées par la Troupe des Comediens</hi>/ <hi rend="i">du Roy à Paris.</hi>/ TOME SECOND./ [fleuron du libraire]/ A PARIS,/ Chez CHRISTOPHE DAVID, Quay/ des Augustins, à l’Image S. Christophe./ [filet]/ M. DCCV./ <hi rend="i">AVEC PRIVILEGE DU ROI.</hi></p>
        <p>Nous avons corrigé les erreurs d’impression suivantes :</p>
        <p>v. 28 « ou » : où</p>
        <p>v. 56 vers manquant :</p>
        <p>éd. 1696 : « Mais plûtôt c’est sur toi qu’il faudroit se vanger, »</p>
        <p>éd. 1739 : « Mais plûtôt c’est sur toy qu’il s’en faudroit venger, »</p>
        <p>v. 105 « . » remplacé par « , »</p>
        <p>v. 123 « &amp; vous y concerter » : &amp; vous y concerter,</p>
        <p>v. 158 « Q ’a-t’elle » : Qu’a-t’elle</p>
        <p>v. 163 « vousattendoient » : vous attendoient</p>
        <p>v. 182 « Ils se taisent » : « Ils se taisent, »</p>
        <p>v. 192 « aidät » : aidât</p>
        <p>v. 204 « . » remplacé par « ? »</p>
        <p>v. 206 « De ce qu’en ces climats l’Amour met en usage, Madame. » : Madame au vers suivant</p>
        <p>v. 221 « aillerus » : ailleurs</p>
        <p>v. 240-241 point rétabli après ZAIRE</p>
        <p>v. 292 « Vous me rendrez tantôt réponce . adieu, Carlos. » : Adieu</p>
        <p>v. 303 « Qu’es-ce encore » : Qu’est-ce encore</p>
        <p>v. 309 « . » remplacé par « ... »</p>
        <p>v. 337 « faite » : faire</p>
        <p>v. 398 « demangaison » : demangeaison</p>
        <p>v. 405-412-519 point rétabli après DOM BRUSQUIN</p>
        <p>v. 421 « ? » remplacé par « ... »</p>
        <p>v. 440 « Venir jusqu’icy ! » : Venir jusques icy !</p>
        <p>v. 453 « dequoy » : de quoy</p>
        <p>v. 485 « eût t’on » : eût-on</p>
        <p>v. 497 « d Alger » : d’Alger</p>
        <p>v. 513 « l’un a l’autre » : l’un à l’autre</p>
        <p>v. 547 « C’à » : Çà</p>
        <p>v. 556 « . » remplacé par « , »</p>
        <p>v. 564 « tu l’aime » : tu l’aimes</p>
        <p>v. 571 vers manquant : Ainsi, nous ne pouvons trop exiger pour rendre.</p>
        <p>v. 587 « me ures » : mesures</p>
        <p>v. 607 « vals » : vais</p>
        <p>v. 645 « tu las » : tu l’as</p>
        <p>v. 650 « elle ta » : elle t’a</p>
        <p>v. 659 « en vainCarlos » : en vain Carlos</p>
        <p>v. 689 « front » : fronts</p>
        <p>v. 729-728 suppression « D’une »</p>
        <p>v. 779 « Ainsi, si vous voulez bien me dispenser, Madame » : Ainsi, vous voulez bien me dispenser, Madame</p>
        <p>v. 785 « hazard ; » : nazard</p>
        <p>v. 813 « Julie. » : Julie,</p>
        <p>v. 879 « Ca » : Ça</p>
        <p>v. 931 « sçait ; » : sçait,</p>
        <p>v. 968 « De deux Amans heureux une Scène » : De deux Amans heureux, une Scéne</p>
        <p>v. 1097 « là » : la</p>
        <p>v. 1101 « bonc » : bon</p>
        <p>v. 1128 « Restez-vous. » : Restez, vous.</p>
        <p>v. 1181 « le Mary tres-indigne. » : le Mary tres-indigne,</p>
        <p>v. 1189 « suisje » : suis je</p>
        <p>v. 1238 « gardez-là » : gardez-la</p>
        <p>v. 1243 vers manquant : Et pour ne le pas voir, il n’en sera pas moins.</p>
        <p>v. 1284 « Qui conque » : Quiconque</p>
        <p>v. 1306 « Faman » : Fatiman</p>
        <p>v. 1370 « ! » remplacé par « ... »</p>
        <p>v. 1375 « j’en ay vû tout l’apprêt ? » : j’en ay vû tout l’apprêt.</p>
        <p>v. 1396 « qu’es ce » : qu’est ce</p>
        <p>v. 1461 « tu n’ignore » : tu n’ignores</p>
        <p>v. 1522 L’édition de 1739 rétablit ce vers ; STAMORAT <hi rend="i">à Fatiman</hi> : « Il est prêt à signer tout ce que l’on voudra. ».</p>
        <p>v. 1556 « ? » remplacé par « ... »</p>
        <p>v. 1557 « En Galere » attribué à Dom Brusquin rétabli dans la bouche de Fatiman</p>
        <p>v. 1622 « Rin grasciar » : Ringrasciar</p>
        <p>Nous avons relevé les diérèses suivantes :</p>
        <p>[ia] : vv. 508-819-912-928-936-1446-1465-1541</p>
        <p>[ie] : vv. 151-152-684-700-812-825-909-910-914-926-930-1018-1184-1185-1277-1398-1426-1427-1490-1553-1563</p>
        <p>[iœ] : vv. 134-237-238-745-993-1014-1086-1593</p>
        <p>[io] : vv. 419-942-1300-1463</p>
        <p>[iã] : vv. 114-195-604-631-694-695-712-751-876-1020-1053-1601</p>
        <p>[ie˜] : vv. 95-512</p>
        <p>[iõ] : vv. 14-110-145-233-253-267-268-377-378-517-518-554-644-789-790-909-1077-1231-1248-1332</p>
        <p>[wi] : v. 658</p>
      </div>
    </front>
    <body>
      <head>Le Mary sans femme. Comédie.</head>
      <div type="set" xml:id="acteurs">
        <pb n="M"/>
        <head>ACTEURS.</head>
        <castList>
          <castItem>
            <role xml:id="brusquin" rend="male">DOM BRUSQUIN D’ALVARADE,</role>
            <roleDesc>Gentilhomme Espagnol.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="julie" rend="female">JULIE,</role>
            <roleDesc>Dame Espagnole.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="carlos" rend="male">CARLOS,</role>
            <roleDesc>Amant de Julie.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="fatiman" rend="male">FATIMAN,</role>
            <roleDesc>Gouverneur d’Alger.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="celime" rend="female">CELIME,</role>
            <roleDesc>Dame Turque.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="zaire" rend="female inferior">ZAIRE,</role>
            <roleDesc>Naine Esclave de Celime.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="marine" rend="female inferior">MARINE,</role>
            <roleDesc>Suivante de Julie.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="tomire" rend="male inferior">TOMIRE,</role>
            <roleDesc>Valet de Carlos.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="gusman" rend="male inferior">GUSMAN,</role>
            <roleDesc>Valet de Dom Brusquin.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="stamorat" rend="male">STAMORAT,</role>
            <roleDesc>Turc.</roleDesc>
          </castItem>
          <castItem>
            <role xml:id="suite">SUITE de Turcs<note place="bottom">« Peuples de la Turquie [...]. <hi rend="sc">Turquie</hi>, ou empire du Turc, comprend plusieurs provinces dans l’Europe, dans l’Asie &amp; dans l’Afrique. Il est un des souverains qui possédent le plus de terre. On remarque que du levant au couchant, depuis Belis de la Gomere ou de l’extrémité occidentale du royaume d’Alger, qui lui est tributaire, jusqu’à Balsor, qui est au bout du golfe Persique, il regne sur un espace de huit cents lieues pour le moins. [...] Les états de Tunis, d’Alger &amp; de Tripoli sont sous sa protection. » <hi rend="sc">L. Moreri</hi>, <hi rend="i">Le grand dictionnaire historique ou Le mélange curieux de l’histoire sacrée et profane</hi>, Paris, Libraires Associés, 1759 (10 vol.).</note>.</role>
          </castItem>
        </castList>
        <stage>La scène est dans Alger<note place="bottom">« Capitale du royaume de ce nom [...]. L’on compte environ cent milles habitans dans Alger, entre lesquels sont douze mille soldats Turcs, un grand nombre d’esclaves Maures ou chrétiens, &amp; plus de cinq mille familles Juives. » <hi rend="sc">L. Moreri</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</stage><pb n="Mij"/>
      </div>
      <div xml:id="I" type="act">
        <head>ACTE PREMIER.</head>
        <div type="scene" xml:id="I01">
          <head>SCENE PREMIERE.</head>
          <stage>JULIE, CARLOS, ZAIRE, MARINE, TOMIRE.</stage>
          <sp xml:id="I01-1" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1" xml:id="l1">Entrez, je vais <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>, si Celime est visible,</l>
            <l n="2" xml:id="l2">Elle est depuis huit jours dans un <ref target="#chagrin">chagrin*</ref><note place="bottom">« Le terme <hi rend="i">chagrin</hi> [...] évoque le mouvement d’insatisfaction, de mécontentement. En aucun cas il ne marque la souffrance ou l’affliction. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">Introduction à la langue française du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Paris, Nathan, 1993 (2 vol.), vol. 1, p. 87.</note> <ref target="#horrible">horrible*</ref>,</l>
            <l n="3" xml:id="l3">Pour la bien <ref target="#divertir">divertir*</ref>, &amp; faire vôtre<note place="bottom">« On sait que le clivage entre déterminant et pronom s’est opéré à partir du système d’opposition formes atones/formes toniques. Aux premières correspondent les déterminants qui, placés avant le substantif, ne portent aucun accent et font corps avec lui ; aux secondes correspondent les formes pronominales. La langue du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle témoigne parfois d’une incertitude dans cette répartition [...]. La forme tonique est assez couramment employé au XVI<hi rend="sup">e</hi> siècle devant un substantif, et on rencontre encore au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle des traces de cet usage. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 25.</note> <ref target="#cour">cour*</ref>,</l>
            <l n="4" xml:id="l4">Préparez-vous, dans peu je seray de retour.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I02">
          <head>SCENE II.</head>
          <stage>JULIE, CARLOS, MARINE, TOMIRE.</stage>
          <sp xml:id="I02-1" who="julie">
            <speaker>JULIE</speaker>
            <l n="5" xml:id="l5" part="I">Ah Carlos !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-2" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="M">Ah Julie !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-3" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="M">Ah Marine!</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-4" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Ah Tomire!</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-5" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="6" xml:id="l6" part="I">Quels <ref target="#ennui">ennuis*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">ennui</hi> est courant pour désigner la douleur insupportable. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 55.</note>!</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-6" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="M">Quels <ref target="#chagrin">chagrins*</ref> !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-7" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="M">J’en <ref target="#crever">créve*</ref><note place="bottom">« Le verbe <hi rend="i">crever</hi> ne marque pas un niveau de langue familier ou populaire, comme de nos jours, s’il est employé avec un sujet humain et désigne le fait de mourir. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 118.</note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-8" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">J’en soûpire !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-9" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="7" xml:id="l7" part="I">Helas ! que nôtre sort.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-10" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l part="F">Helas ! que nos malheurs !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-11" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="8" xml:id="l8" part="I">Me va causer d’<ref target="#ennui">ennuis*</ref> !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-12" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l part="F">Me vont coûter de pleurs !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-13" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="9" xml:id="l9">Si vous pouviez sçavoir, Julie, à quoy m’<ref target="#exposer">expose*</ref></l>
            <l n="10" xml:id="l10">Le cruel desespoir d’en avoir été cause<note place="bottom"><p>« Quelquefois l’infinitif passif est employé à la place de l’actif. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">Syntaxe française du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Paris, Delagrave, 1975, p. 200. « En français moderne, le déterminant zéro s’est fixé dans une valeur non référentielle (intensionnelle) : il construit une saisie purement notionnelle, qualitative du nom, qui est pris pour ses seules propriétés sémantiques. » <hi rend="sc">N. Fournier</hi>, <hi rend="i">Grammaire du français classique</hi>, Paris, Belin, 1998, p. 154.</p></note> :</l>
            <l n="11" xml:id="l11">Car, enfin, c’est moy seul que j’en dois accuser,<pb n="Miij"/></l>
            <l n="12" xml:id="l12">C’est moy de qui<note place="bottom">« <hi rend="i">Dont</hi> peut-être concurrencé par <hi rend="i">de</hi> + <hi rend="i">qui</hi> ou <hi rend="i">duquel</hi> » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 60.</note> l’orgueil crut pouvoir tout oser.</l>
            <l n="13" xml:id="l13">De vos <ref target="#ressentiment">ressentimens*</ref> rien ne me<note place="bottom">« L’infinitif régime fait corps au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle avec le verbe régent et le pronom régime précède le plus souvent le syntagme verbal. [...] Vaugelas trouve « plus de grâce » à cette transposition « autorisée par l’usage », mais reconnaît que la construction moderne qui place le pronom devant l’infinitif peut être perçue comme « plus nette et plus régulière » » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 121.</note> peut défendre ;</l>
            <l n="14" xml:id="l14">Ma forte <ref target="#passion">passion*</ref> me fit tout entreprendre,</l>
            <l n="15" xml:id="l15">C’est moy seul ; c’est, enfin, ce trop <ref target="#sensible">sensible*</ref> <ref target="#amant">Amant*</ref><note place="bottom">« L’être touché par la passion est décrit comme <hi rend="i">sensible</hi>, c’est-à-dire accessible à l’amour. » (<hi rend="i">ibid.</hi>, vol. 1, p. 42). « L’être qui aime est dit <hi rend="i">amoureux</hi>. Si son amour est payé de retour, il se pare du titre d’<hi rend="i">amant</hi>. » (<hi rend="i">ibid.</hi>, p. 44).</note>,</l>
            <l n="16" xml:id="l16">Que l’amour fit résoudre à vôtre enlevement,</l>
            <l n="17" xml:id="l17">Pour finir mon malheur, j’ay seul causé le vôtre ;</l>
            <l n="18" xml:id="l18">Mais, enfin, vous veniez d’en épouser un autre,</l>
            <l n="19" xml:id="l19">On vous avoit forcée à prendre cet Epoux,</l>
            <l n="20" xml:id="l20">Vous m’aimiez tendrement, je n’<ref target="#adorer">adorois*</ref> que vous,</l>
            <l n="21" xml:id="l21">Malgré ce que l’Amour m’avoit semblé promettre,</l>
            <l n="22" xml:id="l22">Dans son lit, dans ses bras l’<ref target="#hymen">hymen*</ref><note place="bottom">« Le mariage [est] évoqué souvent en langue soutenue par le mot <hi rend="i">hymen</hi> tout au long du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 50.</note> vous alloit mettre,</l>
            <l n="23" xml:id="l23">Je voyois vos <ref target="#chagrin">chagrins*</ref>, vous entendiez mes cris,</l>
            <l n="24" xml:id="l24">Quel autre en cet <ref target="#estat">état*</ref> n’eût pas tout entrepris ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-14" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="25" xml:id="l25">Dans toutes ces raisons ne cherchez point d’excuse.</l>
            <l n="26" xml:id="l26">Ce n’est que mon malheur, Carlos, que j’en accuse.</l>
            <l n="27" xml:id="l27">Oüy, c’est moy, qui depuis cette <ref target="#funeste">funeste*</ref> nuit,</l>
            <l n="28" xml:id="l28">Où <ref target="#premice">prémices*</ref><note place="bottom">Le mot est présenté comme un substantif féminin pluriel par les dictionnaires de l’époque. Cependant, pour des raisons de versification, l’auteur a opté pour le masculin.</note> cruels du malheur qui me suit,</l>
            <l n="29" xml:id="l29">Sans égard pour mes pleurs une Mere inhumaine,</l>
            <l n="30" xml:id="l30">Me venoit de livrer à l’<ref target="#objet">objet*</ref><note place="bottom">« Dans son acception première, proche de la valeur étymologique, le mot désigne ce qui est opposé à la vue, ce qui se présente au regard ou à l’imagination. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op.cit.</hi>, vol. 1, p. 35.</note> de ma haine,</l>
            <l n="31" xml:id="l31">Je sortois de l’Autel troublée, &amp; dans mon <ref target="#coeur">cœur*</ref>,</l>
            <l n="32" xml:id="l32">Cet <ref target="#hymen">hymen*</ref> avoit mis tant de crainte, &amp; d’<ref target="#horreur">horreur*</ref> ;</l>
            <l n="33" xml:id="l33">Que sans considerer quelle en seroit la suite,</l>
            <l n="34" xml:id="l34">Je crus que mon bonheur dépendoit de ma fuite.</l>
            <l n="35" xml:id="l35">Marine m’en <ref target="#presser">pressa*</ref>, même elle me fit voir,</l>
            <l n="36" xml:id="l36">Que fuïr ses Ennemis est le premier devoir,</l>
            <l n="37" xml:id="l37" part="I">Et ses conseils…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-15" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Allons, mettons tout sur Marine,</l>
            <l n="38" xml:id="l38">Voyons, qu’ay-je tant fait ? <ref target="#ca">ça*</ref> que je m’<ref target="#examiner">examine*</ref>,</l>
            <l n="39" xml:id="l39">Je vous voyois tous deux desesperez, mourans,</l>
            <l n="40" xml:id="l40">L’un <ref target="#enrager">enrageoit*</ref> <ref target="#dehors">dehors*</ref>, l’autre <ref target="#pester">pestoit*</ref> <ref target="#dedans">dedans*</ref>,</l>
            <l n="41" xml:id="l41">L’un souhaitoit sa mort, l’autre juroit la sienne ;</l>
            <l n="42" xml:id="l42">Vous me fîtes pitié ; car je suis trop humaine.</l>
            <l n="43" xml:id="l43">Vous fûtes enlevée, il est vray, je <ref target="#convenir">conviens*</ref></l>
            <l n="44" xml:id="l44">Que j’en facilitay, de<note place="bottom">« <hi rend="i">De</hi> causal. Dans cette ancienne construction : <hi rend="i">mout est grans cose de preudome</hi>, on retrouve le sens primitif de cette préposition marquant au figuré la provenance (=<hi rend="i"> venant de, tenant de</hi>). » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 271.</note> ma part les <ref target="#moyen">moyens*</ref>,</l>
            <l n="45" xml:id="l45">Que je vous conseillay d’aller pour cette affaire</l>
            <l n="46" xml:id="l46">A Cadix<note place="bottom">Ville au sud de l’Espagne qui se situe sur la côte Atlantique.</note>, où Carlos disoit avoir sa Mere ;</l>
            <l n="47" xml:id="l47">Et que sans moy l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> alloit se <ref target="#consommer">consommer*</ref> ;</l>
            <l n="48" xml:id="l48">Mais, quoy, sçavois-je moy que l’on iroit par<note place="bottom">« Valeur locale ; du latin <hi rend="i">per</hi> ; n’appartient plus qu’au style soutenu. » <hi rend="sc">Spillebout</hi> Gabriel, <hi rend="i">Grammaire de la langue française du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Paris, Picard, 1985, p. 242.</note> Mer ?</l>
            <stage>à Tomire.</stage>
            <l n="49" xml:id="l49">Et c’est ta faute, à toy, que le malheur engraisse<note place="bottom">« On dit proverbialement, qu’un homme <hi rend="i">engraisse</hi> de maledictions, qu’il <hi rend="i">engraisse</hi> de mal avoir, pour dire, qu’un homme ne laisse pas de profiter, quoy qu’on le haïsse, &amp; qu’il souffre beaucoup de travail. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots françois tant vieux que modernes et les termes de toutes les sciences et les arts</hi>, La Haye et Rotterdam, Arnout et Reinier Leers ; rééd. Paris, SNL-Le Robert, 1978 (3 vol.).</note>,</l>
            <l n="50" xml:id="l50"><ref target="#chien">Chien*</ref> de <ref target="#guignon">porteguignon*</ref><note place="bottom">« On dit aussi, qu’un homme est un <hi rend="i">porte-malheur</hi>, un <hi rend="i">porte-guignon</hi><hi rend="sup"></hi>, quand on croit qu’il est cause de quelque malheur qui nous est arrivé. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>,<hi rend="i"> op. cit.</hi></note>, tu n’eus jamais de <ref target="#cesse">cesse*</ref>,</l>
            <l n="51" xml:id="l51">Que nous ne fussions tous embarquez, car enfin…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-16" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="52" xml:id="l52">Eh ! devinois-je, moy, qu’au milieu du chemin,</l>
            <l n="53" xml:id="l53">Lors que<note place="bottom">« <hi rend="i">Lors</hi> peut être séparé de <hi rend="i">que</hi> » et signifie <hi rend="i">quand</hi>. <hi rend="sc">G. Gougenheim</hi>, <hi rend="i">Grammaire de la langue française du seizième siècle</hi>, Paris, Picard, 1974, p. 197.</note> l’on se croyoit le mieux dans ses affaires,</l>
            <l n="54" xml:id="l54">Le Vaisseau seroit pris par ces <ref target="#chien">Chiens*</ref> de Corsaires,</l>
            <l n="55" xml:id="l55">Et qu’ils nous meneroient captifs au port d’Alger ?</l>
            <l n="56" xml:id="l56">..............................................................................<note place="bottom">Le vers manque dans notre édition. L’édition de 1696 propose : « Mais plûtôt c’est sur toi qu’il faudroit se vanger ». L’édition de 1739 rétablit le vers mais avec une tournure différente : « Mais plûtôt c’est sur toy qu’il s’en faudroit venger ».</note></l>
            <l n="57" xml:id="l57">Doüaigne<note place="bottom">Ce mot espagnol (dueña) n’est pas attesté dans les dictionnaires de l’époque mais on retrouve l’expression dans <hi rend="i">Le Roman comique</hi> de Scarron « Devant que d’aller plus avant, il faut que j’apprenne, à ceux qui ne le savent pas, que les dames en Espagne ont des duègnes auprès d’elles ; et ces duègnas sont à peu près la même chose que les gouvernantes ou dames d’honneur que nous voyons auprès des femmes de grande condition. Il faut que je dise encore que ces duègnas ou duègnes sont animaux rigides et fâcheux, aussi redoutés pour le moins que des belles-mères. » p. 136-137</note> <ref target="#interesse">interessée*</ref>, <ref target="#intrigant">intriguante*</ref> <ref target="#courtier">Courtiere*</ref>,</l>
            <l n="58" xml:id="l58">Il t’a toûjours falu quelque amoureux <ref target="#mystere">mystere*</ref>,</l>
            <l n="59" xml:id="l59">Quelque <ref target="#intrigue">intrigue*</ref>, &amp; pour toy c’est un faire il le faut<note place="bottom">« On dit communément, <hi rend="i">C’est un faire le faut</hi>, pour dire, C’est une necessité absoluë. <hi rend="i">Nous mourrons tous, c’est un faire le faut</hi>. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">Dictionnaire</hi>, Paris, J.-B. Coignard, 1694 (2 vol.).</note> ?</l>
            <l n="60" xml:id="l60">Car, enfin, on le sçait, on te pendroit plûtôt,</l>
            <l n="61" xml:id="l61">Que tu n’eusses toûjours quelque <ref target="#intrigue">intrigue*</ref> en campagne<note place="bottom">« On dit encore, qu’on a mis tous ses amis en <hi rend="i">campagne</hi> pour faire une telle affaire ; pour dire, qu’on a employé tous ses amis, qu’on les a envoyez deçà &amp; delà pour la faire reüssir : qu’on a mis des Sergens en <hi rend="i">campagne</hi> pour prendre un criminel, &amp;c. qu’on a mis bien des gens en <hi rend="i">campagne</hi>, des espions en <hi rend="i">campagne</hi>, pour decouvrir des nouvelles de quelque chose. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
            <l n="62" xml:id="l62">Que<note place="bottom"><hi rend="i">Que</hi> peut être analysé ici comme un adverbe exclamatif.</note> ne me laissois-tu vivre en paix en Espagne ;</l>
            <l n="63" xml:id="l63">Je me vois sans Amis, là j’en avois un cent<note place="bottom">« On se sert souvent de ce nombre certain, pour designer un nombre incertain. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>,<hi rend="i"> op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="64" xml:id="l64">J’y mangeois tous les jours comme un convalescent,</l>
            <l n="65" xml:id="l65">J’y riois comme un fou, j’étois gras comme un Moine,</l>
            <l n="66" xml:id="l66">J’y dormois en Abbé, j’y bûvois en Chanoine<note place="bottom">On retrouve ces expressions dans les dictionnaires de l’époque : « Les <hi rend="i">convalescents</hi> ont bon appetit, mais ils doivent manger sobrement. » ; « Il est gras comme un <hi rend="i">Moine</hi>. » (Fur.).</note> ;</l>
            <l n="67" xml:id="l67">Que ne m’y laissois-tu, Traitresse, car c’est toy,</l>
            <l n="68" xml:id="l68">Qui m’a<note place="bottom">« Souvent, au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, le verbe d’une proposition relative, bien qu’ayant pour antécédent un pronom de la 1<hi rend="sup">re</hi> ou de la 2<hi rend="sup">e</hi> personne, se met à la 3<hi rend="sup">e</hi> personne. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 149.</note> mis en l’<ref target="#estat">état*</ref> fâcheux où je me voy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-17" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="69" xml:id="l69">Laisse-nous en <ref target="#repos">repos*</ref>, &amp; te<note place="bottom">« Lorsque deux impératifs sont coordonnés, il est constant, tout au long du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle et au-delà, que le régime direct (à la forme atone) vienne se placer devant le second impératif. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 120.</note> tais , va Tomire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-18" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="70" xml:id="l70">Cela vous est facile à vous autres à dire,</l>
            <l n="71" xml:id="l71">Qui par bonheur pour vous instruits à bien chanter,</l>
            <l n="72" xml:id="l72">Sçavez dire des Airs qu’on se plaît d’écouter ;</l>
            <l n="73" xml:id="l73">Nôtre Patron chez luy s’en <ref target="#divertir">divertit*</ref>, &amp; même</l>
            <l n="74" xml:id="l74">Tous les jours au lever de la <ref target="#beaute">beauté*</ref> qu’il aime,<pb n="Miiij"/></l>
            <l n="75" xml:id="l75">Depuis que le <ref target="#destin">destin*</ref> sçût nous <ref target="#assujettir">assujettir*</ref>,</l>
            <l n="76" xml:id="l76">Vous venez par son ordre icy le <ref target="#divertir">divertir*</ref>.</l>
            <l n="77" xml:id="l77">Vous ne manquez de rien, vous vivez à vôtre aise,</l>
            <l n="78" xml:id="l78">Mais pour moy qui ne sçait rien faire qui leur plaise,</l>
            <l n="79" xml:id="l79">Dés qu’un leger sommeil fait place à ma douleur,</l>
            <l n="80" xml:id="l80">Un gros <ref target="#coquin">Coquin*</ref> de Turc dont le diable auroit peur,</l>
            <l n="81" xml:id="l81">Disant cent Carachou<note place="bottom">Ces paroles, données pour turques, ne correspondent pas forcément à une réalité linguistisque. Cependant, elles rendent peut-être compte de la <hi rend="i">lingua franca</hi> qui était parlée sur le pourtour méditerrannéen à cette époque, comme l’atteste Furetière : « La <hi rend="i">Langue franche</hi>, ou <hi rend="i">Langue Franc</hi>, est un jargon qu’on parle sur la Mer Mediterranée, composé du François, Italien, Espagnol &amp; autres langues, qui s’entend par tous les Matelots &amp; Marchands de quelque nation qu’ils soient. »</note>, se montrant à ma vûë,</l>
            <l n="82" xml:id="l82">De dix coups de <ref target="#gourdin">Gourdin*</ref> sans <ref target="#facon">façon*</ref> me saluë.</l>
            <l n="83" xml:id="l83">Moy j’ouvre de grands yeux, n’entendant<note place="bottom">« Le verbe <hi rend="i">entendre</hi> désigne le simple fait de comprendre. C’est l’acception la plus courante tout au long du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 64.</note> pas ces mots ;</l>
            <l n="84" xml:id="l84">Luy de vingt autres coups me chamarre<note place="bottom">Le sens figuré n’est pas attesté. « Orner un habit, un meuble de passements, de dentelles, de galons, de bandes de velours, &amp;c. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> le dos ;</l>
            <l n="85" xml:id="l85">Disant sursa cauvé sursa<note place="bottom">Lancaster traduit ces paroles par « Get up, captive, get up ». <hi rend="sc">H. C. Lancaster</hi>, <hi rend="i">A History of French dramatic Literature in the Seventeenth Century</hi>, Baltimore, the Johns Hopkins Press, 1929-1942, part III, vol. II, p. 698.</note>, de son ton grave,</l>
            <l n="86" xml:id="l86">Comme si devinant<note place="bottom">« Souvent le gérondif est employé dans un sens absolu, le sujet auquel il se rapporte se trouvant dans une proposition précédente ou ne résultant que d’une manière générale de l’ensemble de la phrase. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 224.</note> qu’on me feroit Esclave,</l>
            <l n="87" xml:id="l87">J’avois dû par avance exprés avoir appris,</l>
            <l n="88" xml:id="l88">A parler Turc, avant que le traître m’eût pris.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-19" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="89" xml:id="l89">Pour moy je ne sçaurois perdre encor l’<ref target="#esperance">esperance*</ref></l>
            <l n="90" xml:id="l90" part="I">De revoir mon Païs.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-20" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l part="F">Et sur quelle <ref target="#assurance">assurance*</ref> ?</l>
            <l n="91" xml:id="l91" part="I">Sur quoy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-21" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Je ne sçaurois croire que vôtre Epoux,</l>
            <l n="92" xml:id="l92">Ou vôtre Mere n’ait quelque pitié de vous,</l>
            <l n="93" xml:id="l93">Vôtre Mere vous aime, &amp; je me persuade</l>
            <l n="94" xml:id="l94">Que vôtre digne Epoux D. Brusquin d’Alvarade,</l>
            <l n="95" xml:id="l95">Etant fort amoureux avec le <ref target="#bien">bien*</ref> qu’il a…</l>
            <l n="96" xml:id="l96">Enfin le <ref target="#coeur">cœur*</ref> me dit qu’il vous rachetera.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-22" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="97" xml:id="l97">C’est se vouloir <ref target="#flatter1">flater*</ref> d’un espoir chimerique,</l>
            <l n="98" xml:id="l98">Qui leur auroit appris que je suis en Afrique ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-23" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="99" xml:id="l99">Je ne puis plus vous rien cacher en cet <ref target="#estat">état*</ref>,</l>
            <l n="100" xml:id="l100">Lors que nous fûmes pris, un certain <ref target="#renegat">Renegat*</ref>,</l>
            <l n="101" xml:id="l101">Touché de ma douleur voulut bien me promettre,</l>
            <l n="102" xml:id="l102">Que si je luy voulois donner un mot de Lettre<note place="bottom">« Se dit aussi d’un discours qui a quelque estenduë. [...] Je vous escris ce <hi rend="i">mot</hi> de lettre. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="103" xml:id="l103">Il trouveroit <ref target="#moyen">moyen*</ref> de le faire <ref target="#tenir">tenir*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-24" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="104" xml:id="l104" part="I">L’as-tu fait !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-25" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">La réponce en<note place="bottom">« Le pronom <hi rend="i">en</hi> se rapporte à une phrase entière et marque une cause. Cette tournure est très fréquente dans l’ancienne langue. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 20.</note> est prête à venir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-26" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="105" xml:id="l105">Quel <ref target="#demon">Demon*</ref> ennemy du bonheur de ma vie,</l>
            <l n="106" xml:id="l106">Pour me combler de maux t’inspira cette <ref target="#envie">envie*</ref> ?</l>
            <l n="107" xml:id="l107">Tu te devois sur moy remettre du <ref target="#soucy">soucy*</ref>…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-27" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="108" xml:id="l108">Ma foy, sauve qui peut, que <ref target="#diantre">diantre*</ref> faire icy ?</l>
            <l n="109" xml:id="l109">Et de plus, franchement, puis qu’il vous faut tout dire,</l>
            <l n="110" xml:id="l110">Je craignois qu’en perdant l’occasion d’écrire,</l>
            <l n="111" xml:id="l111">Quelques Turcs, comme on sçait qu’ils n’en<note place="bottom">« <hi rend="i">En</hi>, d’adverbe qu’il était, devenu pronom (dans l’acception du pronom de la 3<hi rend="sup">e</hi> pers. avec <hi rend="i">de</hi>), s’emploie dans l’ancienne langue d’une manière très vague, sans rapport précis et n’indiquant que de loin un résultat ou une manière d’être. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 19.</note> font pas <ref target="#facon">façon*</ref>,</l>
            <l n="112" xml:id="l112">Ne voulût<note place="bottom">« Au XVI<hi rend="sup">e</hi> siècle la syllepse du nombre est usuelle. Au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, l’accord en nombre va continuer à jouir d’une grande liberté, tout en étant un des points les plus débattus parr les grammairiens, dans un sens qui va vers la fixation du principe de l’accord grammatical et la réglementation des cas autorisés de syllepse. » <hi rend="sc">N. Fournier</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 25.</note> à la fin quelque jour… que sçait-on</l>
            <l n="113" xml:id="l113" part="I">Ce qu’il auroit voulu<note place="bottom">On retrouve dans cette question l’emploi lexicalisé de <hi rend="i">que</hi>, ancien interrogatif : « <hi rend="i">QUE SAIT-ON... SI</hi> fr. mod. « est-ce qu’on sait si ». » <hi rend="sc">Spillebout</hi> Gabriel, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 176. On comprendra donc : est-ce qu’on sait ce qu’il aurait voulu ?</note> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-28" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Elle a raison, je pense</l>
            <l n="114" xml:id="l114">Tenez, ces <ref target="#chien">chiens*</ref> de Turcs n’ont point de <ref target="#conscience">conscience*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-29" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="115" xml:id="l115">Où ta fausse pitié nous va-t-elle <ref target="#engager">engager*</ref> ?</l>
            <l n="116" xml:id="l116">Fatiman mon Patron est <ref target="#gouverneur">Gouverneur*</ref> d’Alger,</l>
            <l n="117" xml:id="l117">Pour m’en faire estimer j’ay tout mis en usage,</l>
            <l n="118" xml:id="l118">J’esperois par mes <ref target="#soin1">soins*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">soin</hi> [...] peut renvoyer, pour rendre compte du jeu des relations sociales, à l’effort que l’on fait pour obtenir ce que l’on souhaite. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 73.</note> finir nôtre Esclavage,</l>
            <l n="119" xml:id="l119" part="I">Mon Oncle…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-30" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Tout cela n’auroit rien fait pour nous,</l>
            <l n="120" xml:id="l120">Vôtre Oncle tout au plus n’eût racheté que vous.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-31" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="121" xml:id="l121" part="I">Ah !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I02-32" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Zaïre paroît, cachez-luy vôtre peine.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I03">
          <head>SCENE III.</head>
          <stage>ZAIRE, JULIE, CARLOS, MARINE, TOMIRE.</stage>
          <sp xml:id="I03-1" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="122" xml:id="l122">Celime va passer dans la chambre <ref target="#prochain">prochaine*</ref>,</l>
            <l n="123" xml:id="l123">Vous l’y pouvez attendre, &amp; vous y concerter<note place="bottom">Cf. v. 707 et 1070 « Estudier &amp; repeter ensemble une piece de musique, pour la bien executer quand il en sera temps. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="124" xml:id="l124">Dépêchez, écoutez, n’allez pas luy chanter</l>
            <l n="125" xml:id="l125">De ces Airs <ref target="#indolent">indolens*</ref> qui font dormir le monde,</l>
            <l n="126" xml:id="l126">Sa tristesse est déja si grande &amp; si profonde,</l>
            <l n="127" xml:id="l127">Que pour peu que vôtre Air soit grave &amp; <ref target="#langoureux">langoureux*</ref>,</l>
            <l n="128" xml:id="l128">Son <ref target="#chagrin">chagrin*</ref> se pourroit répandre sur vous deux.</l>
            <l n="129" xml:id="l129" part="I">Je vous en avertis.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I03-2" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l part="F">Nous vous en rendons <ref target="#grace1">grace*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I03-3" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="130" xml:id="l130">Elle est depuis huit jours d’un <ref target="#bourru">bourru*</ref> qui me passe,</l>
            <l n="131" xml:id="l131">Je ne la connois plus, tout luy déplaît ; Enfin</l>
            <l n="132" xml:id="l132">Je me vois tous les jours en <ref target="#butte">butte*</ref> à son <ref target="#chagrin">chagrin*</ref>.</l>
            <l n="133" xml:id="l133">Si j’ay de l’<ref target="#enjouement">enjouëment*</ref>, elle m’appelle folle :</l>
            <l n="134" xml:id="l134">Si je suis sérieuse, elle m’appelle idole<note place="bottom">Cf. v. 173 « Se dit figurément d’une personne qui n’a point d’esprit, qui est niaise, qui paroît insensible comme une statuë » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> ;</l>
            <l n="135" xml:id="l135">Si je la suis partout, je la mets en <ref target="#courroux">courroux*</ref>,</l>
            <l n="136" xml:id="l136">Si je ne la suis point, j’ay quelque rendez-vous ;</l>
            <l n="137" xml:id="l137">Si je la veux servir, je fais la <ref target="#necessaire">necessaire*</ref><note place="bottom">« On dit aussi d’un domestique, qu’il fait le <hi rend="i">necessaire</hi>, qu’il s’est rendu <hi rend="i">necessaire</hi>, quand il s’est mis en tel estat, qu’on a de la peine à se passer de luy. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>,</l>
            <l n="138" xml:id="l138">Si je ne la sers pas, on ne me voit rien faire ;</l>
            <l n="139" xml:id="l139">Si je dis qu’elle est bien, je me plais à <ref target="#flatter2">flatter*</ref>,</l>
            <l n="140" xml:id="l140">Si je dis qu’elle est mal, je cherche à <ref target="#contester">contester*</ref> ;</l>
            <l n="141" xml:id="l141">Prompte, j’ay trop de <ref target="#feu">feu*</ref> ; Lente, mon <ref target="#froid">froid*</ref><note place="bottom">Adjectif substantivé. « L’adjectif <hi rend="i">froid</hi> et le substantif <hi rend="i">froideur</hi> [...] caractérisent l’être qui ne s’émeut de rien, impassible. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 87.</note> la <ref target="#geler">gele*</ref> ;</l>
            <l n="142" xml:id="l142">Enfin je ne sçay point comment vivre avec elle,</l>
            <l n="143" xml:id="l143">Son <ref target="#chagrin">chagrin*</ref> se répand jusques<note place="bottom">Les dictionnaires de l’époque attestent les deux orthographes, <hi rend="i">jusque</hi> ou <hi rend="i">jusques</hi>. Mais, selon Vaugelas, « jamais on n’écrit <hi rend="i">jusque</hi>, sans <hi rend="i">s</hi> à la fin. » <hi rend="sc">C. F. de Vaugelas</hi>, <hi rend="i">Remarques sur la langue française utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire</hi>, Paris, Champ Libre, 1981, p. 51.</note> sur ses amours,</l>
            <l n="144" xml:id="l144">Fatiman esperoit l’épouser dans deux jours,</l>
            <l n="145" xml:id="l145">Il avoit son <ref target="#aveu">aveu*</ref>, sa <ref target="#passion">passion*</ref> est grande,</l>
            <l n="146" xml:id="l146">Maintenant elle dit, qu’elle veut qu’il attende,</l>
            <l n="147" xml:id="l147">Et que pour bien juger de ses <ref target="#empressement">empressemens*</ref>,</l>
            <l n="148" xml:id="l148">Elle veut éprouver son amour quelque temps.</l>
            <l n="149" xml:id="l149">Dés qu’il la veut presser, son <ref target="#chagrin">chagrin*</ref> renouvelle.</l>
            <l n="150" xml:id="l150">Ah ! que si j’étois belle &amp; bien faite<note place="bottom">« On dit, qu’une femme est bien <hi rend="i">faite</hi>, quand elle est belle et de grande taille ; mal <hi rend="i">faite</hi>, quand elle est laide &amp; petite, ou bossuë, &amp; on l’appelle aussi <hi rend="i">contre-faite</hi>. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> comme elle,</l>
            <l n="151" xml:id="l151">Et qu’avec moy quelqu’un voulût se marier,</l>
            <l n="152" xml:id="l152">Je me <ref target="#garder">garderois*</ref> bien de me faire prier.</l>
            <l n="153" xml:id="l153">Mais à propos, entrez, elle pourroit attendre.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I04">
          <head>SCENE IV.</head>
          <sp xml:id="I04-1" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE<hi rend="i">seule.</hi></speaker>
            <l n="154" xml:id="l154">Fasse le juste Ciel qu’elle se puisse rendre</l>
            <l n="155" xml:id="l155">Aux <ref target="#feu">feux*</ref> de Fatiman ; si l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> <ref target="#concerter">concerté*</ref></l>
            <l n="156" xml:id="l156">Se <ref target="#conclure">conclut*</ref>, il me doit donner la liberté.</l>
            <l n="157" xml:id="l157">Quand il donne parole, il la tient sans reserve.</l>
            <l n="158" xml:id="l158">Qu’a-t’elle à <ref target="#differer">differer*</ref>, il faut que je l’observe,</l>
            <l n="159" xml:id="l159">Pour <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>… Elle vient, son <ref target="#chagrin">chagrin*</ref> me fait peur.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I05">
          <head>SCENE V.</head>
          <stage>CELIME, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="I05-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="160" xml:id="l160">Ah ! qu’un nouvel amour<note place="bottom">« Au pluriel le féminin est unanimement adopté. [...] Au singulier, la forme du possessif devant le mot, est nécessairement masculine (le mot commence par une voyelle). On trouve donc constamment : « Mon amour », etc. ; d’où l’hésitation entre le masculin et le féminin au singulier. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 37.</note> met de <ref target="#trouble">trouble*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">trouble</hi> [...] est employé quand l’agitation, le mouvement de l’âme affleure, mais ne se traduit pas comme tel. » <hi rend="i">ibid.</hi>, vol.1, p. 39.</note> en un <ref target="#coeur">cœur*</ref>,</l>
            <l n="161" xml:id="l161">Sur tout lors que l’on craint d’avoir une Rivale !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-2" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="162" xml:id="l162">Vous alliez, disiez-vous, passer dans l’autre Salle,</l>
            <l n="163" xml:id="l163">Ces Gens vous attendoient pour vous y <ref target="#divertir">divertir*</ref>,</l>
            <l n="164" xml:id="l164">Mais puis que vous voilà, je vais les avertir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="165" xml:id="l165" part="I">Non, demeure.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-4" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Eh ! souffrez que je les avertisse,</l>
            <l n="166" xml:id="l166">De <ref target="#grace2">grace*</ref>, &amp; trouvez bon que l’on vous <ref target="#divertir">divertisse*</ref>,</l>
            <l n="167" xml:id="l167">Vous avez du <ref target="#chagrin">chagrin*</ref>, il ne sert qu’à <ref target="#laidir">laidir*</ref>,</l>
            <l n="168" xml:id="l168">Tenez, un petit Air vous va ragaillardir,</l>
            <l n="169" xml:id="l169" part="I">Laissez-moy faire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Non, avant qu’on les appelle,</l>
            <l n="170" xml:id="l170" part="I">Je veux t’<ref target="#entretenir">entretenir*</ref>, Zaire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-6" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE <hi rend="i">à part.</hi></speaker>
            <l part="F">Que veut-elle ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-7" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="171" xml:id="l171">Tu vois icy Julie, &amp; Carlos tous les jours,</l>
            <l n="172" xml:id="l172">De quel <ref target="#air">air*</ref><note place="bottom">« Les apparences sont souvent évoquées par le mot <hi rend="i">air</hi>, qui désigne « la manière », « la façon » de se comporter et de vivre, telle qu’elle est immédiatement perceptible. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 78.</note> la voit-il, &amp; quels sont leurs <ref target="#discours">discours*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">discours</hi> a un champ sémantique plus large qu’aujourd’hui. Il ne renvoie pas seulement aux propos formés, élaborés, mais aux seules paroles, au récit, à l’exposé. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 64.</note> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-8" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="173" xml:id="l173">Leurs discours ? Jamais Gens autres que des Idoles</l>
            <l n="174" xml:id="l174">Ne se sont <ref target="#expliquer">expliquez*</ref> avec moins de paroles :</l>
            <l n="175" xml:id="l175">Tenez, voulez-vous voir, ce qui se passe entr’eux ;</l>
            <l n="176" xml:id="l176">De temps en temps Julie un mouchoir sur les yeux,</l>
            <l n="177" xml:id="l177">Pleure en <ref target="#gesticuler">gesticulant*</ref>, ensuite elle est rêveuse.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-9" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="178" xml:id="l178">Elle pleure, gémit, rêve, elle est amoureuse,</l>
            <l n="179" xml:id="l179">Et que répond Carlos à cet <ref target="#ennui">ennuy*</ref> profond ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-10" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="180" xml:id="l180">Luy ? tenez. Ah ! voilà tout ce qu’il luy répond.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-11" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="181" xml:id="l181">Sans doute, ils s’aiment ; mais quand leurs douleurs s’appaisent,</l>
            <l n="182" xml:id="l182" part="I">A quoy s’occuppent-ils ? que font-ils ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I05-12" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Ils se taisent,</l>
            <l n="183" xml:id="l183">Jusqu’à vôtre réveil ils sont en cet <ref target="#estat">état*</ref>,</l>
            <l n="184" xml:id="l184">Non jamais <ref target="#entretien">entretien*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">entretien</hi> renvoie aussi bien aux propos tenus dans une assemblée [...] que le fait même de s’entretenir, de converser. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 64.</note> de gens ne fut si plat,</l>
            <l n="185" xml:id="l185">Et je ne croirois point, sans le<note place="bottom">« Un aspect particulier de l’emploi pléonastique du pronom complément est présenté par l’utilisation de la forme neutre <hi rend="i">le</hi> à valeur cataphorique : elle annonce et représente le complément qui suit. Cette construction se rencontre rarement aujourd’hui, mais elle est fréquente tout au long du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. » <hi rend="i">ibid.</hi>, vol. 2, p. 48.</note> voir d’ordinaire,</l>
            <l n="186" xml:id="l186">Qu’une Femme jamais pût si long-temps se taire ;</l>
            <l n="187" xml:id="l187">Il faut les avertir, je vais prendre ce <ref target="#soin1">soin*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">soin</hi> [...] a en effet l’acception « d’attention portée aux choses, d’application » d’une part, et celle « d’effort, de peine, de charge » d’autre part. » <hi rend="i">ibid.</hi>, vol. 1, p. 94.</note>,</l>
            <l n="188" xml:id="l188">Ils vous réjoüiront, vous en avez besoin.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I06">
          <head>SCENE VI.</head>
          <sp xml:id="I06-1" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">seule</hi>.</speaker>
            <l n="189" xml:id="l189">N’étoit ce pas assez du <ref target="#destin">destin*</ref> qui me <ref target="#braver">brave*</ref>,</l>
            <l n="190" xml:id="l190">D’avoir soûmis mon <ref target="#coeur">cœur*</ref> à l’amour d’un Esclave,</l>
            <l n="191" xml:id="l191">Sans que par un malheur que je ne puis <ref target="#domter">dompter*</ref></l>
            <l n="192" xml:id="l192">La jalousie aidât à me persecuter ?</l>
            <l n="193" xml:id="l193">Si j’en crois leurs regards &amp; ce qu’ils ont de <ref target="#tendre">tendre*</ref>,</l>
            <l n="194" xml:id="l194">Carlos… Mais cependant j’ay pû les mal entendre,</l>
            <l n="195" xml:id="l195">Ma <ref target="#deffiance">défiance*</ref> peut avoir trompé mes yeux,</l>
            <l n="196" xml:id="l196">Et le temps &amp; mes <ref target="#soin1">soins*</ref> m’en <ref target="#eclaircir">éclairciront*</ref> mieux.</l>
            <l n="197" xml:id="l197">Les voicy ; Pour <ref target="#savoir">sçavoir*</ref> ce que je crains d’apprendre</l>
            <l n="198" xml:id="l198">Avec des yeux perçans je m’en vais les entendre.</l>
            <l n="199" xml:id="l199">Approchez, venez-vous, suivant mes volontez</l>
            <l n="200" xml:id="l200">Sur les Européens me donner des clartez,</l>
            <l n="201" xml:id="l201">De ces Peuples heureux révérez<note place="bottom">Cette terminaison correspond, entre autres, à celle du participe passé masculin pluriel.</note> dans l’Afrique,</l>
            <l n="202" xml:id="l202">Dont on ne sçait que trop la valeur heroïque ;</l>
            <l n="203" xml:id="l203">Allez-vous me chanter par des tons animez</l>
            <l n="204" xml:id="l204">Les diverses façons d’aimer &amp; d’être aimez ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-2" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="205" xml:id="l205">Nous allons vous tracer une legere image</l>
            <l n="206" xml:id="l206">De ce qu’en ces climats l’Amour met en usage,</l>
            <l n="207" xml:id="l207" part="I">Madame<note place="bottom">« L’appellation <hi rend="i">Madame</hi> n’est pas réservée à la femme mariée. [...] Le dictionnaire de l’Académie note que le mot « est un titre qu’on donne aux femmes ou aux filles des bourgeois en parlant d’elles ou à elles ». Il reste que son usage est social ; dans la conversation, il témoigne d’une volonté explicite de montrer des marques de respect. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 95.</note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Commencez, je vais vous écoutez.</l>
            <stage>à part.</stage>
            <l n="208" xml:id="l208">De ce qu’ils vont chanter, tâchons de profiter.</l>
            <stage>On chante.</stage>
            <lg>
              <l n="209" xml:id="l209">Dans ce vaste Univers sur tout ce qui respire,</l>
              <l n="210" xml:id="l210">L’Amour étend son empire :</l>
              <l n="211" xml:id="l211">Par des <ref target="#ardeur">ardeurs*</ref> toûjours nouvelles</l>
              <l n="212" xml:id="l212">Le François se laisse enflâmer,</l>
              <l n="213" xml:id="l213">Il ne <ref target="#mesnager">ménage*</ref> point les Belles ;</l>
              <l n="214" xml:id="l214">Mais il sçait s’en faire aimer.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="215" xml:id="l215">Il signor<note place="bottom">Mot italien, signifie<hi rend="i"> seigneur</hi>. « La signora » signifie <hi rend="i">la dame</hi>.</note> Italien</l>
              <l n="216" xml:id="l216">Aime assez bien,</l>
              <l n="217" xml:id="l217">N’attrape rien.</l>
              <l n="218" xml:id="l218">Il cherche les exploits qui sont de longue haleine,</l>
              <l n="219" xml:id="l219">Et quand sous la fenêtre il va chanter sa peine,</l>
              <l n="220" xml:id="l220">La signora</l>
              <l n="221" xml:id="l221">Est ailleurs impedita<note place="bottom">Mot italien qui signifie « empêchée, retenue ».</note>.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="222" xml:id="l222">Pour tout secret de l’amoureux <ref target="#mystere">mistere*</ref></l>
              <l n="223" xml:id="l223">L’Alemand sçait donner : C’est l’<ref target="#art">art*</ref> de plaire.</l>
              <l n="224" xml:id="l224">Et de ne pas aimer en vain,</l>
              <l n="225" xml:id="l225">Il est constant toute sa vie</l>
              <l n="226" xml:id="l226">Et traite une Silvie<note place="bottom">Le choix de ce prénom semble dicté par la rime.</note></l>
              <l n="227" xml:id="l227">Comme un <ref target="#muid">muid*</ref> de Vin,</l>
              <l n="228" xml:id="l228">Il en boit, il en boit jusqu’à la <ref target="#lie">lie*</ref>.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="229" xml:id="l229">Aussi fidele qu’amoureux,</l>
              <l n="230" xml:id="l230">Aussi <ref target="#tendre">tendre*</ref><note place="bottom">« L’adjectif, appliqué à des êtres humains, caractérise la personne accessible à l’amour, sensible à ses forces. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 49.</note> que l’Amour même</l>
              <l n="231" xml:id="l231">L’Espagnol sçait seul comme on aime</l>
              <l n="232" xml:id="l232">Et merite seul d’être heureux.</l>
            </lg>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-4" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">aprés qu’on a chanté.</hi></speaker>
            <l n="233" xml:id="l233">Cette diversité de <ref target="#passion">passions*</ref> m’<ref target="#enchanter">enchante*</ref>,</l>
            <l n="234" xml:id="l234">Je suis de ce concert extrêmement contente.</l>
            <l n="235" xml:id="l235">Vous m’avez plû : rentrez dans vôtre Appartement,</l>
            <l n="236" xml:id="l236">Je veux demeurer seule en ces lieux un moment.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-5" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="237" xml:id="l237">A vouloir s’<ref target="#ennuyer">ennuïer*</ref> c’est être <ref target="#industrieux">industrieuse*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-6" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="238" xml:id="l238">Revenez, je me sens aujourd’huy curieuse</l>
            <l n="239" xml:id="l239">Ce que je veux apprendre <ref target="#importer">importe*</ref> à mon <ref target="#repos">repos*</ref>,</l>
            <l n="240" xml:id="l240">Que chacun se retire, il suffit de Carlos.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-7" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="241" xml:id="l241">Il suffit de Carlos ! que peut-elle <ref target="#pretendre">prétendre*</ref> ?</l>
            <l n="242" xml:id="l242">Au <ref target="#cabinet">Cabinet*</ref> <ref target="#prochain">prochain*</ref>, cachons-nous pour l’entendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-8" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="243" xml:id="l243">Carlos vous nous venez apprendre par vos chants</l>
            <l n="244" xml:id="l244">Combien dans vos Amours vos cœurs ont de penchans :</l>
            <l n="245" xml:id="l245">Mais vous ne m’avez point exprimé ceux des Femmes,</l>
            <l n="246" xml:id="l246">Vous êtes connoisseur, vôtre Espagne a des Dames.</l>
            <l n="247" xml:id="l247">De <ref target="#grace2">grace*</ref>, apprenez-moy quand quelqu’une à son tour,</l>
            <l n="248" xml:id="l248">Abandonne son <ref target="#ame">ame*</ref> aux <ref target="#charme">charmes*</ref><note place="bottom">« <hi rend="i">Charme</hi> renvoie à la puissance occulte et mystérieuse qu’exercent certains êtres sur les autres. Dans le champ notionnel de l’amour, il évoque l’attrait irrésistible, analogue à quelque pouvoir magique. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 36.</note> de l’Amour,</l>
            <l n="249" xml:id="l249">Comment à son Vainqueur dans son <ref target="#ardeur">ardeur*</ref> extrême,</l>
            <l n="250" xml:id="l250">Pour la premiére fois, elle dit, je vous aime.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-9" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="251" xml:id="l251">Madame, cet <ref target="#aveu">aveu*</ref>, si <ref target="#charmant">charmant*</ref><note place="bottom">« L’adjectif <hi rend="i">charmant</hi>, lui-même dérivé du verbe <hi rend="i">charmer</hi> [...] signifie « qui exerce une puissance fascinante, ensorcelante », en conformité avec le sens étymologique du mot <hi rend="i">charme</hi>, lui-même formé sur le mot latin <hi rend="i">carmen</hi> qui désigne la formule d’incantation magique. » <hi rend="i">ibid.</hi></note> en effet</l>
            <l n="252" xml:id="l252">Qui coûte tant à faire, &amp; qui pourtant se fait</l>
            <l n="253" xml:id="l253">Dans les occasions diversement s’exprime,</l>
            <l n="254" xml:id="l254">Selon la qualité de celle qu’il anime.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-10" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="255" xml:id="l255">J’entens de ces <ref target="#beaute">beautez*</ref> illustres par le Sang<note place="bottom">C’est la valeur métaphorique de <hi rend="i">sang</hi> qui apparaît ici, au sens de famille.</note>,</l>
            <l n="256" xml:id="l256">De mon âge à peu prés, Carlos, &amp; de mon rang.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-11" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="257" xml:id="l257">S’il se trouve en son choix plus ou moins de <ref target="#distance">distances*</ref>,</l>
            <l n="258" xml:id="l258">Il faut ou qu’elle attende ou fasse les <ref target="#avance">avances*</ref>,</l>
            <l n="259" xml:id="l259" part="I">Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-12" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">C’est à dire, en ces <ref target="#transport">transports*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">transport</hi> [...] suggère que l’élan du sentiment se manifeste ». <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 39.</note> si doux,</l>
            <l n="260" xml:id="l260">Que si celuy qu’elle aime est d’un rang au dessous,</l>
            <l n="261" xml:id="l261">C’est elle qui se doit <ref target="#expliquer">expliquer*</ref> la premiere ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-13" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="262" xml:id="l262" part="I">Oüy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-14" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Mais de s’<ref target="#enoncer">énoncer*</ref>, comment<note place="bottom">L’emploi de l’adverbe interrogatif à la place de l’adjectif semble dicté par la métrique.</note> est la maniere ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-15" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="263" xml:id="l263">D’<ref target="#abord">abord*</ref><note place="bottom">« Il signifie « aussitôt », « immédiatement ». » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 100.</note> par ses regards, <ref target="#truchement">truchemens*</ref> de son <ref target="#coeur">cœur*</ref>,</l>
            <l n="264" xml:id="l264">Elle le fait sçavant de son <ref target="#prochain">prochain*</ref> bonheur,</l>
            <l n="265" xml:id="l265">Invente des bienfaits, se plaît à les répandre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-16" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="266" xml:id="l266">Et si le <ref target="#cavalier">Cavalier*</ref> ne veut pas les entendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-17" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="267" xml:id="l267">Personne n’est aveugle à cette <ref target="#passion">passion*</ref>,</l>
            <l n="268" xml:id="l268">L’Amour voit clair, &amp; plus encor l’ambition,</l>
            <l n="269" xml:id="l269">Si le respect oblige à quelque retenuë,</l>
            <l n="270" xml:id="l270">La Dame ouvre son <ref target="#coeur">cœur*</ref> ; parle, elle est entenduë.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-18" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="271" xml:id="l271">Mais (car je prétens tout <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>) si par malheur,</l>
            <l n="272" xml:id="l272">Le <ref target="#cavalier">Cavalier*</ref> ailleurs avoit donné son <ref target="#coeur">cœur*</ref>.</l>
            <l n="273" xml:id="l273">A son premier amour s’il veut être fidelle,</l>
            <l n="274" xml:id="l274">Que dit à ce mépris la Dame, que fait-elle ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-19" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="275" xml:id="l275">Malheur au <ref target="#cavalier">Cavalier*</ref> qui méprise ses <ref target="#voeu">vœux*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">vœu</hi> traduit le désir tendu vers un objet. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 69.</note>,</l>
            <l n="276" xml:id="l276">Et plus encor malheur à l’<ref target="#objet">objet*</ref><note place="bottom">« Le mot est constamment employé, « poétiquement » selon Furetière, pour parler « de belles personnes qui donnent de l’amour ». » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 35.</note> de ses <ref target="#feu">feux*</ref>.</l>
            <l n="277" xml:id="l277">Qu’en ce <ref target="#funeste">funeste*</ref> <ref target="#estat">état*</ref> ces <ref target="#amant">Amans*</ref> sont à plaindre !</l>
            <l n="278" xml:id="l278">Dans sa <ref target="#fureur">fureur*</ref> la Dame offensée est à craindre,</l>
            <l n="279" xml:id="l279">Pouvant tout dans sa haine, elle n’épargne rien.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-20" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="280" xml:id="l280">Regardez-moy, Carlos, <ref target="#envisager">envisagez*</ref>-moy bien.</l>
            <l n="281" xml:id="l281">Sur mon <ref target="#front">front*</ref>, dans mes yeux, lisez vôtre <ref target="#avantage">avantage*</ref>,</l>
            <l n="282" xml:id="l282">Je vous permets, Carlos, d’<ref target="#expliquer">expliquer*</ref> leur langage,</l>
            <l n="283" xml:id="l283">Et de prendre pour vous ce qu’ils ont de douceur :</l>
            <l n="284" xml:id="l284">Comptez sur mes bienfaits, comptez sur ma <ref target="#faveur">faveur*</ref>.</l>
            <l n="285" xml:id="l285">Vivre en sa liberté, dans ce climat <ref target="#barbare">barbare*</ref>,</l>
            <l n="286" xml:id="l286">Est le moindre des biens, que ma <ref target="#main">main*</ref> vous prépare.</l>
            <l n="287" xml:id="l287">Portez donc jusqu’à moy vos regards &amp; vos <ref target="#voeu">vœux*</ref>,</l>
            <l n="288" xml:id="l288">Ma bouche vous l’ordonne ; Aimez-moy, je le veux ;</l>
            <l n="289" xml:id="l289">Obeïssez, craignez d’irriter ma <ref target="#tendresse">tendresse*</ref>,</l>
            <l n="290" xml:id="l290">Je puis tout en ces lieux, pensez-y, je vous laisse,</l>
            <l n="291" xml:id="l291">Songez que vôtre sort dépend de mon <ref target="#repos">repos*</ref>,</l>
            <l n="292" xml:id="l292">Vous me rendrez tantôt<note place="bottom">« Il a le sens de <hi rend="i">bientôt</hi>. » <hi rend="i">ibid.</hi>, vol. 2, p. 93.</note> réponce. Adieu, Carlos.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I06-21" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE <hi rend="i">cachée</hi>.</speaker>
            <l n="293" xml:id="l293">Elle aime cet Esclave ! Ah ! quelle <ref target="#extravagance">extravagance*</ref> !</l>
            <l n="294" xml:id="l294">Mais il faut la rejoindre, &amp; garder le silence.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I07">
          <head>SCENE VII.</head>
          <sp xml:id="I07-1" who="carlos">
            <speaker>CARLOS <hi rend="i">seul</hi>.</speaker>
            <l n="295" xml:id="l295">L’ay-je bien entenduë, ou me suis-je abusé,</l>
            <l n="296" xml:id="l296">A quel plus grand malheur pouvois-je être <ref target="#exposer">exposé*</ref> ?</l>
            <l n="297" xml:id="l297">Puis-je jusqu’à l’aimer, sans <ref target="#horreur">horreur*</ref> me contraindre ?</l>
            <l n="298" xml:id="l298">Et puis-je mépriser son <ref target="#ardeur">ardeur*</ref> sans la craindre.</l>
            <l n="299" xml:id="l299">Helas ! mille dangers m’allarment tour à tour,</l>
            <l n="300" xml:id="l300">Je crains également sa haine &amp; son amour.</l>
            <l n="301" xml:id="l301">Je me pers, &amp; n’osant resister ny me rendre…</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="I08">
          <head>SCENE VIII.</head>
          <stage>TOMIRE, CARLOS.</stage>
          <sp xml:id="I08-1" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="302" xml:id="l302">Monsieur aprés cecy vous n’avez qu’à vous pendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-2" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="303" xml:id="l303" part="I">Qu’est-ce encore, que viens-tu m’annoncer ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-3" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker><pb n="N"/>
            <l part="F">Un malheur</l>
            <l n="304" xml:id="l304">A se desespérer, à mourir de douleur,</l>
            <l n="305" xml:id="l305">Et, comme je vous l’ay déja dit, à se pendre,</l>
            <l n="306" xml:id="l306">Et si vous m’en croyez, vous irez sans m’entendre…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-4" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="307" xml:id="l307">Julie est-elle morte, &amp; le <ref target="#destin">destin*</ref> jaloux…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-5" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="308" xml:id="l308" part="I">Non.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-6" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="M">Que me dis-tu donc ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-7" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Qu’elle est morte pour vous.</l>
            <l n="309" xml:id="l309">Qu’elle vit pour un autre, &amp; que jamais <ref target="#oeillade">œillade*</ref>...</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-8" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="310" xml:id="l310" part="I">Comment !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-9" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Vous connoissez Dom Brusquin d’Alvarade,</l>
            <l n="311" xml:id="l311">Ce <ref target="#brave">brave*</ref> Dom Brusquin, cet obstacle à vos <ref target="#feu">feux*</ref>,</l>
            <l n="312" xml:id="l312"><ref target="#fantasque">Fantasque*</ref> comme un diable, &amp; jaloux comme deux,</l>
            <l n="313" xml:id="l313">Maussade comme trois, avare comme quatre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-10" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="314" xml:id="l314" part="I">Et bien ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-11" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="M">Il est icy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-12" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Que d’<ref target="#ennui">ennuis*</ref> à combattre ?</l>
            <l n="315" xml:id="l315" part="I">Ah Ciel ! il est icy, qui te l’a dit ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-13" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Mes yeux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-14" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="316" xml:id="l316" part="I">Ne t’ont-ils point trompé ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-15" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Non, je vous répons d’eux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-16" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="317" xml:id="l317" part="I">Il est icy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-17" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="M">Luy-même.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-18" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Où le Ciel me <ref target="#destiner">destine*</ref> !</l>
            <l n="318" xml:id="l318">Voilà ce qu’ont produit les Lettres de Marine :</l>
            <l n="319" xml:id="l319">Mais où l’as-tu trouvé ; comment sur son <ref target="#rapport">rapport*</ref> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-19" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="320" xml:id="l320">Tout à l’heure<note place="bottom">« L’adverbe <hi rend="i">tout à l’heure</hi> signifie « immédiatement », « sur-le-champ » » <hi rend="i">ibid.</hi>, vol. 1, p. 100.</note>, Monsieur, en allant vers le Port,</l>
            <l n="321" xml:id="l321">Je l’ay vû d’assez loin descendre d’une Barque ;</l>
            <l n="322" xml:id="l322">Et comme sa figure est assez de remarque<note place="bottom">« On appelle aussi un homme de <hi rend="i">Remarque</hi>, celuy qui est fort distingué des autres par sa naissance, sa qualité, son courage, ou son sçavoir. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> Ici, l’emploi est donc ironique.</note>,</l>
            <l n="323" xml:id="l323">Les Turcs railleurs aprés l’avoir <ref target="#examiner">examiné*</ref>,</l>
            <l n="324" xml:id="l324">En luy riant au nez l’ont tous <ref target="#environner">environné*</ref>,</l>
            <l n="325" xml:id="l325">J’ay fait comme eux, voulant m’<ref target="#eclaircir">éclaircir*</ref> davantage ;</l>
            <l n="326" xml:id="l326">Mais dés que de plus prés j’ay pû voir son visage,</l>
            <l n="327" xml:id="l327">J’ay vû que c’étoit luy, je ne puis vous <ref target="#flatter1">flater*</ref> ;</l>
            <l n="328" xml:id="l328">Sur tout quand il a dit, qu’il venoit racheter</l>
            <l n="329" xml:id="l329">Sa Femme, qui depuis six mois en <ref target="#barbarie">Barbarie*</ref>,</l>
            <l n="330" xml:id="l330">Etoit chez Fatiman sous le nom de Julie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-20" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="331" xml:id="l331" part="I">Juste Ciel !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-21" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Vous sçavez qu’il ne vous connoît point ;</l>
            <l n="332" xml:id="l332">Venez vous <ref target="#eclaircir">éclaircir*</ref> vous-même sur ce point.</l>
            <l n="333" xml:id="l333" part="I">Venez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-22" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Et bien ! allons nous montrer à sa vûë,</l>
            <l n="334" xml:id="l334">Il mourra de ma main si la chose est <ref target="#conclure">concluë*</ref> ;</l>
            <l n="335" xml:id="l335">Ou si Julie enfin doit partir de ces lieux,</l>
            <l n="336" xml:id="l336">Je ne le verray point sans mourir à ses yeux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-23" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="337" xml:id="l337">Si vous voulez, Monsieur, faire quelque folie,</l>
            <l n="338" xml:id="l338">Ne m’allez pas mener avec vous, je vous prie,</l>
            <l n="339" xml:id="l339">On met à la raison les <ref target="#mutin">mutins*</ref> en ces lieux,</l>
            <l n="340" xml:id="l340">Séparons-nous plûtôt ; car, enfin, j’aime mieux,<pb n="Nij"/></l>
            <l n="341" xml:id="l341">Quoy que je sçache bien qu’il faudra que je meure,</l>
            <l n="342" xml:id="l342">Etre Esclave cent ans, que pendu demi-heure,</l>
            <l n="343" xml:id="l343">Je vous en avertis, <ref target="#examiner">examinez*</ref>-vous bien.</l>
            <l n="344" xml:id="l344" part="I">Autrement…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="I08-24" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Vien, suis moy, Tomire, &amp; ne crains rien.</l>
            <p rend="center">Fin du premier Acte.</p>
          </sp>
        </div>
      </div>
      <div xml:id="II" type="act">
        <head>ACTE II.</head>
        <div type="scene" xml:id="II01">
          <head>SCENE PREMIERE.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, GUSMAN.</stage>
          <sp xml:id="II01-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN <hi rend="i">lisant</hi>.</speaker>
            <l n="345" xml:id="l345">Si Julie encore vous est chere,</l>
            <l n="346" xml:id="l346">Ne pensez point à la chercher</l>
            <l n="347" xml:id="l347">Autre part que dans Alger.</l>
            <l n="348" xml:id="l348">Son malheur en a fait le butin d’un Corsaire.</l>
            <l n="349" xml:id="l349">Ah, morbleu !… Fatiman <ref target="#gouverneur">Gouverneur*</ref> dans ces lieux</l>
            <l n="350" xml:id="l350">Nous tient Esclaves toutes deux.</l>
            <l n="351" xml:id="l351">En payant nos rançons, nôtre <ref target="#ennui">ennuy*</ref> se termine,</l>
            <l n="352" xml:id="l352">Ne perdez point de temps, secondez nos souhaits,</l>
            <l n="353" xml:id="l353">Elle est plus belle que jamais,</l>
            <l n="354" xml:id="l354">Et moy plus que jamais, &amp; caetera, Marine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-2" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l n="355" xml:id="l355">Quoy, Monsieur, sur le point de revoir en Julie,</l>
            <l n="356" xml:id="l356">Aprés six mois d’absence, une Femme cherie,</l>
            <l n="357" xml:id="l357">Quand à terre à couvert de l’orage, &amp; du vent,</l>
            <l n="358" xml:id="l358">Dont le bruit &amp; la peur vous menaçoient souvent ;</l>
            <l n="359" xml:id="l359">Je me flatois de voir Dom Brusquin d’Alvarade,</l>
            <l n="360" xml:id="l360">Ne songer qu’à la joye &amp; qu’à faire <ref target="#gambade">gambade*</ref>,</l>
            <l n="361" xml:id="l361">Vous êtes tout chagrin, &amp; malgré tous mes <ref target="#soin1">soins*</ref><note place="bottom">« <hi rend="i">Tout</hi> renforçant l’idée exprimée par l’attribut et construit avec un adjectif, soit avec un substantif, était adjectif dans l’ancienne langue et l’est encore au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle dans toutes les constructions où la langue actuelle en fait un adverbe. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 99. « Le mot <hi rend="i">soin</hi> désigne, dans une acception large, la sollicitude que l’on manifeste à quelqu’un. Au pluriel, il traduit les marques d’attention que l’on prodigue par affection, amitié ou intérêt. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 47.</note>,</l>
            <l n="362" xml:id="l362" part="I">Je vous vois…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F"><ref target="#malepeste">Malepeste*</ref> ! on le seroit à moins,</l>
            <l n="363" xml:id="l363">Tant qu’avec toy sur Mer a duré le voyage,</l>
            <l n="364" xml:id="l364">Je n’avois dans l’esprit que la peur du nauffrage.</l>
            <l n="365" xml:id="l365">La crainte du peril me donnoit des frissons,</l>
            <l n="366" xml:id="l366">Et maintenant tout plein de mes jaloux soupçons,</l>
            <l n="367" xml:id="l367">J’ay, quand je vois ces Turcs, leur port &amp; leur allure,</l>
            <l n="368" xml:id="l368">Des frayeurs pour mon <ref target="#front">front*</ref><note place="bottom">« On dit qu’on plante les <hi rend="i">cornes</hi> à un homme, quand on le deshonore par le moyen de sa femme qu’on suborne, quand on le fait cocu. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> Les cornes se portant sur le front, Dom Brusquin fait part ici de sa peur du cocuage.</note> de fort mauvais augure.</l>
            <l n="369" xml:id="l369">Oüy, quand je me <ref target="#remettre">remets*</ref><note place="bottom">« On dit encore, <hi rend="i">Se remettre quelque chose</hi>, pour dire, En rappeller l’idée, le souvenir. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> que presque entre mes bras,</l>
            <l n="370" xml:id="l370">Par un coup de <ref target="#demon">Demon*</ref> que je ne comprens pas,</l>
            <l n="371" xml:id="l371">On m’a ravy Julie, &amp; que je me rappelle,</l>
            <l n="372" xml:id="l372">Le <ref target="#chagrin">chagrin*</ref> qu’elle avoit quand j’étois auprés d’elle,</l>
            <l n="373" xml:id="l373">Les pleurs qu’elle versa, que j’étois son Epoux,</l>
            <l n="374" xml:id="l374">La peine qu’eut sa Mere, à la fléchir pour nous,</l>
            <l n="375" xml:id="l375">Et que de bonne foy, tout de bon j’<ref target="#examiner">examine*</ref>,</l>
            <l n="376" xml:id="l376">Que j’ay l’humeur <ref target="#bourru">bouruë*</ref>, &amp; que je <ref target="#pecher">péche*</ref> en mine<note place="bottom">« L’air qui resulte de la conformation exterieure de la personne, &amp; principalement du visage. » <hi rend="i">ibid.</hi> L’expression « Pécher en mine » n’est pas attestée dans les dictionnaires, mais <hi rend="i">pécher</hi> « au figuré veut dire manquer. » <hi rend="sc">Richelet</hi>, P., <hi rend="i">Dictionnaire françois contenant les mots et les choses, plusieurs nouvelles remarques sur la langue françoise.... avec les termes les plus connus des arts et des sciences</hi>, Genève, J.-H. Widerhold, 1680 (2 vol.). On comprendra donc que Dom Brusquin n’est pas beau.</note>,</l>
            <l n="377" xml:id="l377">Que chez un Turc la belle est à <ref target="#discretion">discretion*</ref><note place="bottom">« On dit en termes de Guerre, qu’une place se rend à <hi rend="i">discretion</hi>, pour dire, à la mercy du vainqueur, par la confiance qu’on a qu’il usera bien de sa victoire. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> Comprendre : chez un Turc la belle est à sa merci.</note>,</l>
            <l n="378" xml:id="l378">Que ce sont gens amis de la conclusion,</l>
            <l n="379" xml:id="l379">Contre qui, sans miracle, une Belle captive,</l>
            <l n="380" xml:id="l380">Soûtient mal-aisément six mois de <ref target="#negative">négative*</ref>,</l>
            <l n="381" xml:id="l381">Certain instinc fondé sur beaucoup de raison,</l>
            <l n="382" xml:id="l382">Me dit que ce sera grand hazard si mon nom,</l>
            <l n="383" xml:id="l383">Occupant d’un Railleur le papier &amp; la plume,</l>
            <l n="384" xml:id="l384">Des Maris baffoüez ne<note place="bottom">« Le jeu de la négation est complexe au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, où le système du français moderne se met en place. On retiendra les principes directeurs suivants : <hi rend="i">ne</hi> s’emploie fréquemment sans le renfort de <hi rend="i">pas</hi> et <hi rend="i">point</hi>, conformément à sa valeur originelle ; <hi rend="i">pas</hi> et <hi rend="i">point</hi> voient leur valeur négative se renforcer et, comme tels, ils peuvent figurer sans <hi rend="i">ne</hi>. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 96.</note> grossit le Volume.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-4" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l n="385" xml:id="l385">C’est d’un pareil scrupule être trop combattu,</l>
            <l n="386" xml:id="l386">Monsieur, Julie est sage, elle a de la vertu,<pb n="Niij"/></l>
            <l n="387" xml:id="l387">Et vous devez enfin mieux juger en vôtre <ref target="#ame">ame*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="388" xml:id="l388">Elle est sage, il est vray ; mais enfin elle est Femme,</l>
            <l n="389" xml:id="l389">Et cette qualité seule peut là-dessus</l>
            <l n="390" xml:id="l390">Servir de contre-poids à toutes les vertus.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-6" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l n="391" xml:id="l391">Mais si pour vôtre honneur vous aviez tant d’allarmes,</l>
            <l n="392" xml:id="l392">Pourquoy venir si loin la chercher, par quels <ref target="#charme">charmes*</ref>,</l>
            <l n="393" xml:id="l393">Craignant pour vôtre sort le fruit de ses Amours,</l>
            <l n="394" xml:id="l394">Hazarder sur la Mer vôtre argent, &amp; vos jours ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="395" xml:id="l395">Ah ! j’ay pour mes pechez, pour elle un chien de <ref target="#tendre">tendre*</ref><note place="bottom">L’expression n’est pas attestée dans les dictionnaires de l’époque mais signifie « penchant amoureux ». On la retrouve, par exemple, dans une réplique de Crispin à la scène 3 du<hi rend="i"> Zigzag</hi>, comédie en un acte de Poisson : « Me voilà par mon chien de tendre / Résolu de me faire pendre. »</note>,</l>
            <l n="396" xml:id="l396">Qui n’a jamais voulu me rien laisser entendre :</l>
            <l n="397" xml:id="l397">Et mon penchant plus fort que toute ma raison,</l>
            <l n="398" xml:id="l398">N’a pü faire avorter cette demangeaison.</l>
            <l n="399" xml:id="l399">A peine un Matelot, que le Ciel extermine,</l>
            <l n="400" xml:id="l400">M’eut confirmé l’avis que me donnoit Marine,</l>
            <l n="401" xml:id="l401">Que le Diable ennemy juré de mon <ref target="#repos">repos*</ref>,</l>
            <l n="402" xml:id="l402">Me fit mettre ma vie à la mercy des flots ;</l>
            <l n="403" xml:id="l403">Comme si pour ces flots, ou pour Dame Fortune<note place="bottom">« <hi rend="i">Fortune</hi>, selon Les payens, estoient une Déesse qui faisoit le bonheur et le malheur, tous les bons &amp; les mauvais succés. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="404" xml:id="l404">J’avois un <ref target="#sauf-conduit">sauf-conduit*</ref> signé du Dieu Neptune<note place="bottom">Dieu romain des Mers.</note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-8" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l n="405" xml:id="l405" part="I">Vous en repentez-vous ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-9" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Je ne sçay ; mais je crois</l>
            <l n="406" xml:id="l406">Que si j’étois chez moy, j’y songerois deux fois,</l>
            <l n="407" xml:id="l407">Ce noir pressentiment où ma raison s’obstine,</l>
            <l n="408" xml:id="l408" part="I">Me fait…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-10" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l part="F">Mais il faut bien que cecy se termine.</l>
            <l n="409" xml:id="l409">Vous en avez trop fait, pour ne pas achever,</l>
            <l n="410" xml:id="l410">On sçait à<note place="bottom">« <hi rend="i">A</hi> marquant un rapport de cause ne s’emploie plus aujourd’hui avec la même liberté qu’au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, où cette préposition servait souvent à indiquer le motif dirigeant une action ou déterminant un jugement. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 324.</note> quel dessein vous venez d’arriver,</l>
            <l n="411" xml:id="l411">Et vôtre Femme, enfin, ou coquette, ou fidelle,</l>
            <l n="412" xml:id="l412" part="I">En payant sa Rançon vous sera…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-11" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Bagatelle,</l>
            <l n="413" xml:id="l413">Si je puis découvrir que ce Turc pour<note place="bottom">La préposition a ici une valeur temporelle, emploi qu’on ne retrouve plus en français moderne mais attesté par Gabriel Spillebout dans sa <hi rend="i">Grammaire de la langue française du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, p. 242.</note> début</l>
            <l n="414" xml:id="l414">Se soit fait de son chef icy mon Substitut,</l>
            <l n="415" xml:id="l415">Qu’il se soit par ses mains, enfin, de quelque sorte</l>
            <l n="416" xml:id="l416">Payé de l’interêt de l’argent que j’apporte ;</l>
            <l n="417" xml:id="l417">Et que ma Femme enfin avec ce Fatiman,</l>
            <l n="418" xml:id="l418">Ait mis son <ref target="#coeur">cœur*</ref> à prix, &amp; mon <ref target="#front">front*</ref> à l’<ref target="#encan">encan*</ref><note place="bottom">« Vente publique de meubles qui se fait par autorité de Justice, &amp; par un Sergent qui les adjuge au plus offrant &amp; dernier encherisseur. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> La formule renvoie là encore à la peur du cocuage de Dom Brusquin.</note>,</l>
            <l n="419" xml:id="l419">Je dis, <hi rend="i">nescio vos</hi><note place="bottom">Expression latine qui signifie « je ne vous connais pas ».</note>, &amp; m’en vais sans replique,</l>
            <l n="420" xml:id="l420">Et l’affaire entre nous est fort problematique.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-12" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l n="421" xml:id="l421">Et qui sçaura cela chez vous, quand par vos <ref target="#soin1">soins*</ref>...</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-13" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="422" xml:id="l422">Pour n’être pas crû sot, un Homme l’est-il moins,</l>
            <l n="423" xml:id="l423" part="I">Dis, <ref target="#maraud">Maraut*</ref> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-14" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l part="F">Mais pourquoy jusques en sa demeure?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-15" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="424" xml:id="l424">On me doit faire voir Marine tout à l’heure,</l>
            <l n="425" xml:id="l425">Un Esclave en entrant me l’a promis ainsi,</l>
            <l n="426" xml:id="l426" part="I">Moyennant…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-16" who="gusman">
            <speaker>GUSMAN.</speaker>
            <l part="M">J’entens bien.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II01-17" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Et je l’attens icy.</l>
            <l n="427" xml:id="l427">Vois-tu, je veux <ref target="#savoir">sçavoir*</ref> avant que de <ref target="#conclure">conclure*</ref>,</l>
            <l n="428" xml:id="l428">Sur quoy, par qui, comment, &amp; par quelle avanture</l>
            <l n="429" xml:id="l429">Julie est en<note place="bottom">« Comme en ancien français, <hi rend="i">en</hi> se construit souvent avec les noms de ville. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 340.</note> Alger ? Car à te parler net,</l>
            <l n="430" xml:id="l430">Je crains fort dans cecy quelque complot secret ;</l>
            <l n="431" xml:id="l431">Je n’ay pû jusqu’icy penétrer ce mistere,</l>
            <l n="432" xml:id="l432">Marine avecque<note place="bottom">« <hi rend="i">Avec</hi> et <hi rend="i">avecque</hi> sont tous deux bons, et ne sont pas seulement commodes aux poètes pour allonger ou accourcir leurs vers d’une syllabe selon la nécessité qu’ils en ont, mais encore à ceux qui écrivent en prose avec quelque soin de satisfaire l’oreille, soit pour former la juste mesure d’une période, soit pour les joindre aux mots avec lesquels ils rendent le son plus doux et la prononciation plus aisée, soit enfin pour empêcher dans la prose la mesure des vers. » <hi rend="sc">C. F. de Vaugelas</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 182.</note> moy n’est pas Fille à se taire,</l>
            <l n="433" xml:id="l433">En la <ref target="#flatter2">flattant*</ref> un peu je puis être éclaircy</l>
            <l n="434" xml:id="l434">De tout ce que je crains d’apprendre ; La voicy.<pb n="Niiij"/></l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II02">
          <head>SCENE II.</head>
          <stage>DOM BRUSQUIN, TOMIRE, GUSMAN, MARINE.</stage>
          <sp xml:id="II02-1" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="435" xml:id="l435" part="I">Prens bien garde…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II02-2" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="M">Suffit.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II02-3" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE <hi rend="i">à D. Brusquin</hi>.</speaker>
            <l part="F">Vous voyez, je m’acquitte,</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II02-4" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="436" xml:id="l436" part="I">Je vous suis obligé, Serviteur<note place="bottom">« On se sert aussi de cette formule pour clorre toutes les lettres, ou pour faire des complimens &amp; des adieux » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II02-5" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Je vous quitte.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II03">
          <head>SCENE III.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, MARINE.</stage>
          <sp xml:id="II03-1" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="437" xml:id="l437">C’est luy-même, &amp; d’<ref target="#abord">abord*</ref> je l’ay bien reconnu.</l>
            <l n="438" xml:id="l438" part="I">Ah ! Monsieur.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-2" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="M">Dieu te gard.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-3" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Soyez le bien venu.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-4" who="brusquin">
            <speaker>D.BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="439" xml:id="l439" part="I">Bien ou mal, me voilà. <ref target="#conclure">Concluons*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-5" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Quoy ! vous-même</l>
            <l n="440" xml:id="l440" part="I">Venir jusques icy !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-6" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Que veux-tu, quand on aime</l>
            <l n="441" xml:id="l441">On est sot, on est fou de mettre tous ses <ref target="#soin1">soins*</ref>…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-7" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="442" xml:id="l442">On seroit bien fâché que vous le fussiez moins.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-8" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="443" xml:id="l443" part="I">Passons.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-9" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="M">Julie aura…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-10" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Comment se porte-t’elle ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-11" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="444" xml:id="l444" part="I">Bien.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-12" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Comme de tous temps j’ay reconnu ton zele,</l>
            <l n="445" xml:id="l445">Et que jamais pour moy tu n’eus rien de caché,</l>
            <l n="446" xml:id="l446">Avant que<note place="bottom">« <hi rend="i">Que</hi> sert à construire un certain nombre de locutions dont quelques-unes, très courantes au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, sont archaïques aujourd’hui : [...] <hi rend="i">Avant que</hi> et <hi rend="i">devant que</hi> se rencontrent dans la même construction. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 378-379.</note> de <ref target="#conclure">conclure*</ref> icy nôtre marché,</l>
            <l n="447" xml:id="l447">J’ay voulu te parler un peu sur cette affaire ;</l>
            <l n="448" xml:id="l448">Sûr qu’avec ta franchise &amp; ton zele ordinaire,</l>
            <l n="449" xml:id="l449">Par amitié pour moy mettant la feinte au croc<note place="bottom">« On dit aussi fig. qu’<hi rend="i">Un procés est au croc</hi>, qu’<hi rend="i">on l’a pendu au croc</hi>, pour dire, qu’On ne le poursuit plus, qu’on en a suspendu le jugement. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="450" xml:id="l450" part="I">Tu vas à <ref target="#coeur">cœur*</ref> ouvert…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-13" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Oh ! cela vous est hoc<note place="bottom">« Sorte de jeu de cartes <hi rend="i">Joüer au hoc</hi>. Au jeu du <hi rend="i">hoc</hi>, les quatre Roys, la Dame de pique, le Valet de carreau, &amp; toutes les cartes au-dessus desquelles il ne s’en trouve point d’autres, comme les six quand tous les sept sont joüez, sont <hi rend="i">hoc</hi> : Et parce qu’en joüant ces sortes de cartes on a accoustumé de dire <hi rend="i">Hoc</hi>, Delà vient, que dans le discours familier, pour dire, qu’une chose est asseurée à quelqu’un, on dit, <hi rend="i">Cela luy est hoc</hi>. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>.</l>
            <l n="451" xml:id="l451" part="I">Parlez, je suis pour vous tout <ref target="#coeur">cœur*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-14" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ta récompence</l>
            <l n="452" xml:id="l452">Au reste passera de loin ton espérance,</l>
            <l n="453" xml:id="l453">Et je t’ay préparé de quoy te voir un jour,</l>
            <l n="454" xml:id="l454">Au dessus…. tu sçauras le reste à mon retour.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-15" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="455" xml:id="l455" part="I">Ah ! Monsieur, parlez donc.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-16" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker><pb n="Nw"/>
            <l part="F">Dis-moy, je te conjure,</l>
            <l n="456" xml:id="l456">Comment, à quel dessein, &amp; par quelle avanture</l>
            <l n="457" xml:id="l457">Vous êtes toutes deux icy depuis ce soir<note place="bottom">La phrase est suspendue ; Comprendre : ce soir où vous avez disparu.</note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-17" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="458" xml:id="l458">L’avanture, Monsieur, est aisée à <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>.</l>
            <l n="459" xml:id="l459">On venoit de souper, la soirée étoit belle,</l>
            <l n="460" xml:id="l460">Julie étoit chagrine, &amp; je fus avec elle</l>
            <l n="461" xml:id="l461">Faire un tour de Jardin, en attendant la nuit,</l>
            <l n="462" xml:id="l462">Tout d’un coup regardant que l’on faisoit du bruit,</l>
            <l n="463" xml:id="l463">Je vis des gens masquez, qui d’abord qu’ils<note place="bottom"><hi rend="i">D’abord que</hi> est une locution temporelle « très usité[e] » d’après Haase. Elle signifie <hi rend="i">aussitôt que</hi>.</note> nous virent,</l>
            <l n="464" xml:id="l464">Sans être épouvantez de nos cris, nous saisirent,</l>
            <l n="465" xml:id="l465">La porte du Jardin s’ouvrit en même temps,</l>
            <l n="466" xml:id="l466">Un Carosse étoit là; l’on nous jetta <ref target="#dedans">dedans*</ref> ;</l>
            <l n="467" xml:id="l467">Touche<note place="bottom">« Signifie aussi l’action de frapper, de faire impression violente sur quelque chose… Un cheval avance, quand il entend claquer le foüet, car il craint la <hi rend="i">touche</hi>. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> Cocher, dit-on, l’embarras de la Nôce…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-18" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="468" xml:id="l468">Et vous êtes venus sur la Mer en Carosse ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-19" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="469" xml:id="l469">Sur la Mer en Carosse ! Eh qui vous dit cela ?</l>
            <l n="470" xml:id="l470" part="I">Ecoutez jusqu’au bout.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-20" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Lors qu’on vous enleva,</l>
            <l n="471" xml:id="l471" part="I">Vous criâtes bien fort ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-21" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Bien fort ? A pleine tête<note place="bottom">« On dit figur. <hi rend="i">Crier à pleine teste, crier à tuë teste</hi>, pour dire, Crier de toute sa force. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="472" xml:id="l472">Au voleur, au secours, au meurtre, arrête, arrête.</l>
            <l n="473" xml:id="l473">Non, pour du bruit, jamais Femme n’en a tant fait.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-22" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="474" xml:id="l474">Il falloit que ces gens eussent quelque secret</l>
            <l n="475" xml:id="l475">Pour avoir rendu sourds, pendant tout ce <ref target="#ravage">ravage*</ref></l>
            <l n="476" xml:id="l476">Tous les gens du Logis, &amp; tout le Voisinage,</l>
            <l n="477" xml:id="l477">Car <ref target="#dedans">dedans*</ref> ny <ref target="#dehors">dehors*</ref> pas un n’entendit rien<note place="bottom">« <hi rend="i">Rien</hi> construit avec la particule <hi rend="i">ne</hi> a l’acception d’un adverbe, latinisme qui s’est conservé dans quelques locutions comme : <hi rend="i">rien ne sert</hi>. Il a cette acception dans des propositions logiquement négatives. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 108.</note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-23" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="478" xml:id="l478" part="I">Enfin, il est pourtant très assuré…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-24" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Fort bien.</l>
            <l n="479" xml:id="l479" part="I">Passons.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-25" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Nous arrivons au Port, où cette Trouppe</l>
            <l n="480" xml:id="l480">Du Carrosse nous mit <ref target="#dedans">dedans*</ref><note place="bottom">« Jusqu’aux années 1630, les grammairiens comme Maupas et Oudin donnent encore <hi rend="i">dedans</hi> et<hi rend="i"> dehors</hi> comme prépositions. [...] Cette confusion a été pourtant dénoncée par Vaugelas en 1647 mais, ce faisant, il souligne le caractère très vivant du tour. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 91.</note> une Chalouppe,</l>
            <l n="481" xml:id="l481">De là dans un Vaisseau qui n’attendant plus rien…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-26" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="482" xml:id="l482">Et que se passa t’il ? Car, enfin, l’on sçait bien</l>
            <l n="483" xml:id="l483">Que quand pour s’exposer à diverses <ref target="#fortune">fortunes*</ref>,</l>
            <l n="484" xml:id="l484">On enleve les Gens, ce n’est pas pour des prunes.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-27" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="485" xml:id="l485">A peine eût-on été quelques heures en Mer</l>
            <l n="486" xml:id="l486">Qu’on vit avec le jour les Corsaires d’Alger</l>
            <l n="487" xml:id="l487">Prêts à nous attaquer, on voulut se défendre,</l>
            <l n="488" xml:id="l488">On se battit long-temps ; mais il falut se rendre,</l>
            <l n="489" xml:id="l489">On nous prit, &amp; pour nous le Corsaire adoucy,</l>
            <l n="490" xml:id="l490">Nous prit dans son Vaisseau, pour nous conduire icy,</l>
            <l n="491" xml:id="l491" part="I">Où depuis…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-28" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Franchement je trouve cette histoire</l>
            <l n="492" xml:id="l492">Peu possible ; mais<note place="bottom">« Mais même, bien plus, mieux encore, que dis-je ? servant à enchérir sur ce qui précède. » <hi rend="sc">G. Cayrou</hi>, <hi rend="i">Le Français classique. Lexique de la langue du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle</hi>, Paris, Didier, 1948.</note> bien tres difficile à croire,</l>
            <l n="493" xml:id="l493">Que devinrent ces Gens masquez dont les efforts</l>
            <l n="494" xml:id="l494" part="I">Avoient…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-29" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Apparemment ils sont captifs, ou morts,</l>
            <l n="495" xml:id="l495">Mais comme pas-un d’eux ne montra son visage,</l>
            <l n="496" xml:id="l496">Je ne vous en puis pas apprendre davantage.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-30" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="497" xml:id="l497">Fatiman étoit donc ce Corsaire d’Alger.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-31" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="498" xml:id="l498">Il en est <ref target="#gouverneur">Gouverneur*</ref>, &amp; ne va guere en Mer.</l>
            <l n="499" xml:id="l499" part="I">Ce fut un autre Turc.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-32" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Comment, en sa puissance.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-33" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker><pb n="Nvj"/>
            <l n="500" xml:id="l500" part="I">C’est qu’il est <ref target="#gouverneur">Gouverneur*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-34" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Et quelle consequence ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-35" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="501" xml:id="l501">En cette qualité par un droit peu commun,</l>
            <l n="502" xml:id="l502">Des Esclaves qu’on fait, de huit<note place="bottom">« On appelle <hi rend="i">Droit de huitiesme</hi>, un certain droit d’Ayde qui se prend sur celuy qui vend du vin au détail. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> il en prend un,</l>
            <l n="503" xml:id="l503">Il nous vit, &amp; d’<ref target="#abord">abord*</ref> nous prit pour son partage.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-36" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="504" xml:id="l504">Sans doute que ce Turc, comme c’est leur usage</l>
            <l n="505" xml:id="l505">Avoit quelque <ref target="#serrail">Serail*</ref> à meubler, sur ma foy…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-37" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="506" xml:id="l506" part="I">Toûjours prêt d’<ref target="#expliquer">expliquer*</ref><note place="bottom">« La langue actuelle, envisageant le complément de certains verbes comme un résultat à atteindre, le construit avec <hi rend="i">à</hi>, tandis que le XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, l’envisageant comme une cause, le construisait avec <hi rend="i">de</hi> : ainsi [...] après <hi rend="i">prêt</hi>, équivalant aux deux expressions <hi rend="i">prêt de</hi> et<hi rend="i"> prêt à</hi>. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 287-288.</note>…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-38" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Tout doucement dis moy ;</l>
            <l n="507" xml:id="l507">Tu sçay bien qu’il manquoit, lors que l’on prit Julie,</l>
            <l n="508" xml:id="l508">A nôtre Mariage une Cerémonie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-39" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="509" xml:id="l509" part="I">Quelle Cerémonie ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-40" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Eh ! celle que l’Amour</l>
            <l n="510" xml:id="l510">Ordonne à frais communs<note place="bottom">« Se dit aussi d’une societé que l’on contracte ensemble par quelque interest d’honneur, ou de gain. Les Commissaires, les Huissiers, font bourse <hi rend="i">commune</hi> pour éviter la jalousie de leur employ. Ils se sont associez en une telle affaire pour la poursuivre à frais <hi rend="i">communs</hi>, &amp; en partager le profit. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> Cette périphrase juridique, qui renvoie aux ébats amoureux dans la bouche de Dom Brusquin, révèle une conception matérielle et triviale du mariage, fortement critiquée par l’idéologie précieuse.</note> la nuit de ce grand jour.</l>
            <l n="511" xml:id="l511">Celle chez qui des gens que l’on marie ensemble</l>
            <l n="512" xml:id="l512">Fait un <ref target="#noeud-gordien">nœud gordien*</ref> du nœud qui les assemble.</l>
            <l n="513" xml:id="l513">Qui lors que l’on nous eut l’un à l’autre conjoint,</l>
            <l n="514" xml:id="l514">Devoit le soir… Enfin, celle qu’on ne fit point.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-41" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="515" xml:id="l515" part="I">Eh bien ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-42" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Je voudrois bien avant que de <ref target="#conclure">conclure*</ref>,</l>
            <l n="516" xml:id="l516"><ref target="#savoir">Sçavoir*</ref> si quelque Turc épris de sa figure</l>
            <l n="517" xml:id="l517" part="I">Ne s’est point….</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-43" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="M">Quoy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-44" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Chargé de la commission</l>
            <l n="518" xml:id="l518">De mettre nôtre <ref target="#hymen">Hymen*</ref> dans sa perfection.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-45" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="519" xml:id="l519" part="I">Quels contes ! Par ma foy, c’est grand dommage.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-46" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ecoute,</l>
            <l n="520" xml:id="l520" part="I">Tu crois donc qu’il ne s’est rien passé ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-47" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Le beau doute !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-48" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="521" xml:id="l521">Qu’auprés d’elle ce Turc n’a jamais entrepris</l>
            <l n="522" xml:id="l522">De mettre sur mon <ref target="#front">frond*</ref> les Armes du Pays<note place="bottom">Dom Brusquin désigne par les <hi rend="i">Armes du Pays</hi> les cornes de cocu. En effet, un croissant, emblème de l’empire turc et de la religion musulmane, décore le blason armorial de l’Algérie.</note>,</l>
            <l n="523" xml:id="l523">Que de force ou de gré pas un n’a rien eu d’elle ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-49" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="524" xml:id="l524" part="I">Pas un.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-50" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Et qu’elle soit aussi sage que belle.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-51" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="525" xml:id="l525">Vous n’en sçauriez douter sans luy faire un affront.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-52" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="526" xml:id="l526"><ref target="#vivat">Vivat*</ref>, je trouve icy sûreté pour mon <ref target="#front">front*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-53" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="527" xml:id="l527">Croyez-en mon <ref target="#rapport">rapport*</ref>, &amp; vous<note place="bottom">« Lorsque deux impératifs étaient coordonnés par <hi rend="i">et, ou, mais</hi>, le pronom précédait le second. Cette construction, très courante encore après le XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, est archaïque aujourd’hui. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 417.</note> mettez en tête</l>
            <l n="528" xml:id="l528">Qu’elle a toûjours trouvé Fatiman fort honnête,</l>
            <l n="529" xml:id="l529">Fort civil, obligeant, même respectueux ;</l>
            <l n="530" xml:id="l530">Outre que quand pour elle il eût senty des <ref target="#feu">feux*</ref>,</l>
            <l n="531" xml:id="l531">Il eût perdu son temps, puis qu’enfin ma Maîtresse</l>
            <l n="532" xml:id="l532">Sur ce chapitre là n’en doit rien à Lucrece<note place="bottom">Fille de Spurius Lucretius Tricipitinus et épouse de Lucius Tarquinius Collatinus, elle est renommée pour sa beauté et sa vertu : violée par Sextus Tarquin, l’un des fils de Tarquin le Superbe, venu en hôte chez Tarquin Collatin, elle se donne la mort après son départ devant son père, Publius Valerius Publicola, son mari, et Lucius Junius Brutus.</note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-54" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="533" xml:id="l533">C’est à dire, entre nous, parlant de bonne foy ;</l>
            <l n="534" xml:id="l534">Qu’à son défaut, ces Turcs se sont <ref target="#passer">passez*</ref> de toy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-55" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="535" xml:id="l535">Quels <ref target="#discours">discours*</ref> ! N’avez-vous rien de meilleur à dire ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-56" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="536" xml:id="l536">Va, je n’en diray rien, cecy me peut suffire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II03-57" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="537" xml:id="l537" part="I">Fatiman vient, je sors…</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II04">
          <head>SCENE IV.</head>
          <stage>DOM BRUSQUIN, FATIMAN, STAMORAT. Suite.</stage>
          <sp xml:id="II04-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN <hi rend="i">à part</hi>.</speaker>
            <l part="F"><ref target="#peste">Peste*</ref> ! quel <ref target="#egrillard">égrillard*</ref> !</l>
            <l n="538" xml:id="l538">A son <ref target="#air">air*</ref> je crains bien d’être venu trop tard ;</l>
            <l n="539" xml:id="l539">Et que sur mon honneur, enfin, étant à même,</l>
            <l n="540" xml:id="l540">Comme sur la capture il n’ait pris le <ref target="#huitieme">huitiéme</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-2" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT <hi rend="i">salüant Fatiman</hi>.</speaker>
            <l n="541" xml:id="l541">Voilà cet Espagnol dont on vous a parlé.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN <hi rend="i">salüe Fatiman à sa mode, &amp; les Turcs l’examinent</hi>.</speaker>
            <l n="542" xml:id="l542">Salut, suis-je venu pour être <ref target="#controler">contrôllé*</ref> ?</l>
            <l n="543" xml:id="l543">Messieurs, afin qu’icy personne ne l’ignore,</l>
            <l n="544" xml:id="l544">Je <ref target="#pretendre">prétend*</ref> avec vous traiter de Turc à Maure<note place="bottom">« On dit prov. <hi rend="i">Traiter quelqu’un de Turc à More</hi>, pour dire, Le traiter avec toute la rigueur possible. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
            <l n="545" xml:id="l545">Vous avez pris sur Mer ma Femme sans <ref target="#facon">façon*</ref>,</l>
            <l n="546" xml:id="l546">Rendez-la moy de même, en payant sa rançon :</l>
            <l n="547" xml:id="l547">Çà répondez-moy juste au <ref target="#discours">discours*</ref> que j’entame.</l>
            <l n="548" xml:id="l548">J’ay de l’argent, de plus j’ay besoin de ma Femme.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="549" xml:id="l549">Ta<note place="bottom">Dans ce premier passage, Fatiman s’adresse à Dom Brusquin en le tutoyant alors que Dom Brusquin le vouvoie. Fatiman utilise le vouvoiement au vers 900 pour reprendre le tutoiement à partir du vers 915.</note> Femme, ce n’est pas Julie, apparemment ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="550" xml:id="l550">Comment ? Est-ce la vôtre ? Hem ! parlez franchement.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="551" xml:id="l551">Non. Mais pour une Femme aussi bien-faite qu’elle,</l>
            <l n="552" xml:id="l552">Franchement, je te trouve un Mary sans modelle,</l>
            <l n="553" xml:id="l553">A ne te pas <ref target="#flatter1">flater*</ref>, car la beauté qu’elle a…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="554" xml:id="l554">Il n’est pas à present question de cela ;</l>
            <l n="555" xml:id="l555">Pour ne pas chamarrer le dessus de ma lévre</l>
            <l n="556" xml:id="l556">Comme l’on fait icy, d’une barbe de Chévre<note place="bottom">« Une <hi rend="i">barbe</hi> à l’Espagnole, à la Turque, c’est une <hi rend="i">barbe</hi>, dont le poil de dessus les levres est retroussé en crocs, ou en garde de poignard. » « On appelle <hi rend="i">barbe de chevre</hi>, un homme qui n’a de la barbe que sous le menton &amp; par bouquets. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> La proposition de Dom Brusquin semble en contradiction avec les modes citées ci-dessus.</note>,</l>
            <l n="557" xml:id="l557">Sçachez qu’étant un jour <ref target="#teste-a-teste">tête à tête*</ref> au Pays,</l>
            <l n="558" xml:id="l558">Nous ne manquerions pas… Bref chacun vaut son prix,</l>
            <l n="559" xml:id="l559">Elle est pourtant ma Femme, ou peu s’en faut, je n’ose…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="560" xml:id="l560" part="I">C’est un malheur pour elle.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-9" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ah ! parlons d’autre chose,</l>
            <l n="561" xml:id="l561" part="I">S’il vous plaît.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-10" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">J’y consens, je voy bien que tes <ref target="#voeu">vœux*</ref></l>
            <l n="562" xml:id="l562">Vont à vous voir chez vous bien réünis tous deux.</l>
            <l n="563" xml:id="l563">Tu meurs de la revoir, car je lis dans ton <ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="564" xml:id="l564">Elle a de la beauté, tu l’aimes, c’est ta Femme ;</l>
            <l n="565" xml:id="l565">C’est pourquoy je ne veux que six mille Ducats,</l>
            <l n="566" xml:id="l566" part="I">Pour la mettre en tes mains.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-11" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Quoy ! vous n’y songez pas.</l>
            <l n="567" xml:id="l567" part="I">Comment, pour une Femme ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-12" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Ouy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-13" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F"><ref target="#peste">Peste*</ref>, quelle Somme</l>
            <l n="568" xml:id="l568">Combien faudroit-il donc vous donner pour un Homme ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-14" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="569" xml:id="l569">A bien meilleur marché je vendrois leurs maris,</l>
            <l n="570" xml:id="l570">Ce beau Sexe chez nous est un tresor sans prix.</l>
            <l n="571" xml:id="l571">...........................................................................<note place="bottom">L’édition de 1739 rétablit ce vers : « Ainsi, nous ne pouvons trop exiger pour rendre ».</note></l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-15" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="572" xml:id="l572">Je vous conseille fort, pourtant, de n’en plus prendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-16" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="573" xml:id="l573" part="I">De Femmes ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-17" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="M">Ouy, sur tout des environs.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-18" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Pourquoy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-19" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="574" xml:id="l574">C’est que pour vous parler franc, &amp; de bonne foy,</l>
            <l n="575" xml:id="l575">Je vois force Maris qui passent pour tres-sages,</l>
            <l n="576" xml:id="l576">Qui vous les laisseroient sûrement pour les gages,</l>
            <l n="577" xml:id="l577">Et je vous suis garant qu’ils en seroient <ref target="#ravir">ravis*</ref>.</l>
            <l n="578" xml:id="l578">Faites-nous bon marché pour nôtre droit d’avis<note place="bottom">« On appelle, <hi rend="i">Droit d’avis</hi>, Ce que l’on donne à un homme qui a donné l’avis d’une affaire avantageuse. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
            <l n="579" xml:id="l579">Contentez-vous du tiers pour elle &amp; pour Marine,</l>
            <l n="580" xml:id="l580">C’est beaucoup. Il ne faut point tant faire la mine<note place="bottom">« Se dit aussi du bon ou mauvais accueil qu’on fait à quelqu’un, du bon ou mauvais visage qu’on luy tesmoigne. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-20" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="581" xml:id="l581" part="I">Tu les veux toutes deux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-21" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ouy, je l’avouë aussi,</l>
            <l n="582" xml:id="l582">Si l’on vendoit chez nous les Femmes, comme icy,</l>
            <l n="583" xml:id="l583">Pour moitié de l’Argent que j’offre pour la mienne,</l>
            <l n="584" xml:id="l584">J’en aurois, à choisir, du moins une douzaine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-22" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="585" xml:id="l585">Finissons, je suis las d’un pareil <ref target="#entretien">entretien*</ref>,</l>
            <l n="586" xml:id="l586">Tu perds icy ton temps, j’en veux cinq mil, ou rien,</l>
            <l n="587" xml:id="l587">Regle-toy là-dessus, &amp; prens bien tes mesures,</l>
            <l n="588" xml:id="l588">J’en demeure d’accord, ces Loix sont un peu dures ;</l>
            <l n="589" xml:id="l589">Mais cependant il faut ne me voir desormais,</l>
            <l n="590" xml:id="l590">Que l’Argent à la main, &amp; me laisser en paix.</l>
            <l n="591" xml:id="l591" part="I">Allez…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-23" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Quelle Somme ! Ah ! j’en ay la mort dans l’<ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="592" xml:id="l592">J’aimerois presqu’autant qu’ils gardassent ma Femme.</l>
            <l n="593" xml:id="l593">Ils pourroient s’en dédire, il faut se dépêcher.</l>
            <l n="594" xml:id="l594" part="I">Ah, <ref target="#chien">Chien*</ref> de Turc !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-24" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Plaît-il ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-25" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Je m’en vais vous chercher</l>
            <l n="595" xml:id="l595" part="I">Les cinq mille Ducats.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II04-26" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Cette affaire est <ref target="#conclure">concluë*</ref>.</l>
            <l n="596" xml:id="l596">Allons voir si Celime est enfin résoluë</l>
            <l n="597" xml:id="l597">A terminer l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> qui me doit rendre heureux.</l>
            <l n="598" xml:id="l598" part="I">La voicy.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II05">
          <head>SCENE V.</head>
          <stage>FATIMAN, CELIME, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="II05-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Quel bonheur vous présente à mes yeux ?</l>
            <l n="599" xml:id="l599" part="I">Qui vous ameine icy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-2" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="M">Vous-même.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-3" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Moy, Madame.</l>
            <l n="600" xml:id="l600" part="I">O Ciel! à quel dessein?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-4" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">De vous ouvrir mon <ref target="#ame">ame*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-5" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="601" xml:id="l601">Qui vous cause ce <ref target="#soin1">soin*</ref>, Madame, est-ce l’Amour ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-6" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="602" xml:id="l602">Je l’avouë, il me fait vous chercher à mon tour.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-7" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="603" xml:id="l603">Et l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> suivra-t’il ce <ref target="#feu">feu*</ref> qui le devance ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-8" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="604" xml:id="l604">Oüy, luy seul à present fait mon impatience.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-9" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="605" xml:id="l605">O trop heureux mortel ! O fortuné moment !</l>
            <l n="606" xml:id="l606">A qui dois-je, Madame, un si grand changement ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-10" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="607" xml:id="l607">Je ne suis pas ingrate, &amp; je vais vous l’apprendre.</l>
            <l n="608" xml:id="l608">Tout ce que dans mes yeux vous remarquez de <ref target="#tendre">tendre*</ref>,</l>
            <l n="609" xml:id="l609">Ces <ref target="#feu">feux*</ref> qu’heureusement vous comprenez si bien,</l>
            <l n="610" xml:id="l610">Me viennent d’avoir vû cet Esclave Chrétien.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-11" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="611" xml:id="l611" part="I">Quoy, Madame…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-12" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Jamais ; croyez, s’il est possible,</l>
            <l n="612" xml:id="l612">Vous ne me pouvez faire un plaisir plus sensible,</l>
            <l n="613" xml:id="l613">Que d’en avoir fait choix pour me dés-<ref target="#ennuyer">ennuyer*</ref>,</l>
            <l n="614" xml:id="l614">Dans ses Chants que jamais je ne veux oublier,</l>
            <l n="615" xml:id="l615">Il a tant fait sentir à mon <ref target="#ame">ame*</ref> charmée,</l>
            <l n="616" xml:id="l616">L’agréable douceur d’aimer &amp; d’être aimée,</l>
            <l n="617" xml:id="l617">Que mon <ref target="#coeur">cœur*</ref> se dévouë à l’Amour desormais,</l>
            <l n="618" xml:id="l618">Et d’un heureux <ref target="#hymen">Hymen*</ref> je fais tous mes souhaits.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-13" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN</speaker>
            <l n="619" xml:id="l619">Que ne luy dois-je point ? que ma surprise est grande.</l>
            <l n="620" xml:id="l620" part="I">O Ciel !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-14" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Puis-je pour luy vous faire une demande,</l>
            <l n="621" xml:id="l621">C’est de sa liberté ; me l’accorderez-vous ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-15" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="622" xml:id="l622">Moy, Madame, je vais luy rendre un bien si doux.</l>
            <l n="623" xml:id="l623" part="I">J’y cours.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-16" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Non, laissez-moi ce petit <ref target="#soin1">soin*</ref>. Zaïre,</l>
            <l n="624" xml:id="l624">Vous l’entendez, Carlos est libre ; allez luy dire,</l>
            <l n="625" xml:id="l625">Et par vôtre <ref target="#discours">discours*</ref> faites-luy concevoir,</l>
            <l n="626" xml:id="l626">Qu’aprés ce grand bien-fait, il songe à son devoir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-17" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="627" xml:id="l627" part="I">J’y vais, Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-18" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Aprés ce que je viens de faire,</l>
            <l n="628" xml:id="l628">Je puis donc me flater de l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> que j’espere ?</l>
            <l n="629" xml:id="l629" part="I">Je puis…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II05-19" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Si le <ref target="#destin">destin*</ref> favorise mes pas,</l>
            <l n="630" xml:id="l630">Vous verrez des <ref target="#transport">transports*</ref> que vous n’attendez pas,</l>
            <l n="631" xml:id="l631" part="I">Adieu.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II06">
          <head>SCENE VI.</head>
          <stage>FATIMAN, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="II06-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">De mon amour la confiance fidelle,</l>
            <l n="632" xml:id="l632" part="I">Enfin va remporter…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-2" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">O la fine Femelle !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-3" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="633" xml:id="l633" part="I">Qui, Celime ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-4" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="M">Oüy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-5" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Comment, au lieu de la loüer…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-6" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="634" xml:id="l634">Quoy, vous ne voyez pas qu’elle veut vous joüer ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-7" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="635" xml:id="l635" part="I">Elle ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-8" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="M">Elle aime Carlos.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-9" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Ah ! quelle perfidie !</l>
            <l n="636" xml:id="l636" part="I">Ciel ! elle aime, dis-tu, Carlos ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-10" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">A la folie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-11" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="637" xml:id="l637">D’où sçais-tu cet amour dont elle brûle en vain,</l>
            <l n="638" xml:id="l638" part="I">Dis-moy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-12" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Tantôt cachée au <ref target="#cabinet">Cabinet*</ref> <ref target="#prochain">prochain*</ref>,</l>
            <l n="639" xml:id="l639">J’ay de ses <ref target="#feu">feux*</ref> naissans, entendu le mistere,</l>
            <l n="640" xml:id="l640">Dans l’<ref target="#aveu">aveu*</ref> qu’à Carlos, sa bouche en a sçu faire,</l>
            <l n="641" xml:id="l641">Elle luy promettoit des biens en quantité,</l>
            <l n="642" xml:id="l642">Dont le moindre à ses yeux étoit la liberté,</l>
            <l n="643" xml:id="l643">Et c’est pour ce sujet qu’elle l’a demandée.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-13" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="644" xml:id="l644">De quelle <ref target="#passion">passion*</ref> est-elle possédée !</l>
            <l n="645" xml:id="l645">Et Carlos qu’a t’il dit ? tu l’as bien entendu ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-14" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="646" xml:id="l646"><ref target="#interdire">Interdit*</ref> &amp; confus il n’a rien répondu.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-15" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="647" xml:id="l647">De ce complot maudit je veux <ref target="#savoir">sçavoir*</ref> la suite,</l>
            <l n="648" xml:id="l648">Zaire, j’en <ref target="#commettre">commets*</ref> le <ref target="#soin1">soin*</ref> à ta <ref target="#conduite">conduite*</ref>.</l>
            <l n="649" xml:id="l649">Va trouver Dom Carlos, comme elle te l’a dit.</l>
            <l n="650" xml:id="l650">Acheve exactement ce qu’elle t’a prescrit.</l>
            <l n="651" xml:id="l651">Observe adroitement ses yeux, sa contenance</l>
            <l n="652" xml:id="l652">Ses gestes, ses <ref target="#discours">discours*</ref>, &amp; même son silence ;</l>
            <l n="653" xml:id="l653">De peur d’être surpris dans cet Appartement,</l>
            <l n="654" xml:id="l654">Tu viendras dans le mien m’instruire promptement,</l>
            <l n="655" xml:id="l655">Vole, ta liberté que ma bouche a jurée,</l>
            <l n="656" xml:id="l656">Sera par ce service encor plus assurée.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II06-16" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="657" xml:id="l657">Pour redevenir libre, allons trouver Carlos.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II07">
          <head>SCENE VII.</head>
          <stage>JULIE, CARLOS.</stage>
          <sp xml:id="II07-1" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="658" xml:id="l658">Zaire ?… Elle me fuit, tout nuit à mon <ref target="#repos">repos*</ref>,</l>
            <l n="659" xml:id="l659">Je cherche en vain Carlos pour adoucir ma peine.</l>
            <l n="660" xml:id="l660">En vain… Mais le voicy, mon bonheur me l’ameine.</l>
            <l n="661" xml:id="l661">Carlos me laissez-vous en proye à mes douleurs ?</l>
            <l n="662" xml:id="l662">Venez avecque moy détourner mes malheurs ;</l>
            <l n="663" xml:id="l663">Pour empêcher ma mort, allons trouver Celime.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-2" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="664" xml:id="l664">Ah ! quel <ref target="#empressement">empressement*</ref> de la voir, vous anime ?</l>
            <l n="665" xml:id="l665" part="I">Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-3" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l part="F">Dom Brusquin est icy dés ce jour,</l>
            <l n="666" xml:id="l666">Avecque Fatiman il traite mon retour.</l>
            <l n="667" xml:id="l667">Par ce rachat cruel livrée à ce <ref target="#barbare">barbare*</ref>,</l>
            <l n="668" xml:id="l668">Demain nôtre malheur pour jamais nous separe,</l>
            <l n="669" xml:id="l669">Et Celime pourroit auprés de Fatiman…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-4" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="670" xml:id="l670">Ah ! nous sommes perdus, s’il faut son <ref target="#agrement">agrément*</ref>.</l>
            <l n="671" xml:id="l671">Et plus que Dom Brusquin, elle est nôtre Ennemie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-5" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="672" xml:id="l672" part="I">Comment ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-6" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Vous le diray-je, helas ! belle Julie,</l>
            <l n="673" xml:id="l673">Pour cet infortuné, par un instinc jaloux,</l>
            <l n="674" xml:id="l674">Elle a le même <ref target="#coeur">cœur*</ref>, les mêmes yeux que vous.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-7" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="675" xml:id="l675" part="I">Elle vous aime ? helas !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-8" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Elle a sçû me le dire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-9" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="676" xml:id="l676" part="I">L’aimez-vous ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II07-10" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Moy ! Madame, ah ! plûtôt que j’expire</l>
            <l n="677" xml:id="l677" part="I">A vos genoux…</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II08">
          <head>SCENE VIII.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, JULIE, CARLOS.</stage>
          <sp xml:id="II08-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Allons pour consommer cela…</l>
            <l n="678" xml:id="l678" part="I">Que voy-je icy ? ma Femme !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II08-2" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l part="M">Ah !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II08-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Que faites-vous là ?</l>
            <l n="679" xml:id="l679">Parlez, travaillez-vous tous deux pour nôtre honte.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II08-4" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="680" xml:id="l680">Je ne suis pas icy pour vous en rendre compte.</l>
            <stage>Il s’en va.</stage>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II09">
          <head>SCENE IX.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, JULIE.</stage>
          <sp xml:id="II09-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="681" xml:id="l681">Me voilà, quel accüeil ! Quoy sans sçavoir nâger,</l>
            <l n="682" xml:id="l682">Quand de la Mer pour vous je <ref target="#braver">brave*</ref> le danger,</l>
            <l n="683" xml:id="l683">Je ne vous vois pour moy remüer pié ny patte<note place="bottom">« On dit prov. d’Un homme qui demeure immobile, ou comme immobile, qu’<hi rend="i">Il ne remue ny pied ny patte.</hi> » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> « Les grammairiens blâmaient et blâment encore des phrases où <hi rend="i">ni</hi> n’est pas répété devant chacun des sujets ou des compléments coordonnés [...]. Cependant l’usage ne suit pas les exigences des grammairiens, et l’on trouve souvent au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, comme encore à l’époque actuelle, des phrases telles que : <hi rend="i">L’envie, la malignité</hi>, <hi rend="b"><hi rend="i">ni</hi></hi><hi rend="i"> la cabale n’avoient de voix parmi eux.</hi> (La Font., <hi rend="i">Psy</hi>, I, p. 26.) – <hi rend="i">Je ne connois Priam, Hélène</hi> <hi rend="b"><hi rend="i">ni</hi></hi><hi rend="i"> Pâris.</hi> (Rac., <hi rend="i">Iph.</hi>, IV, 6, 1399.) » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 386.</note>.</l>
            <l n="684" xml:id="l684">Vous ne pouvez, du moins me dénier ingrate,</l>
            <l n="685" xml:id="l685">Que vous voyez en moy vôtre Liberateur.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="II09-2" who="julie">
            <speaker>JULIE <hi rend="i">en s’en allant</hi>.</speaker>
            <l n="686" xml:id="l686">Je ne puis voir en vous, que mon Persecuteur.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="II10">
          <head>SCENE X.</head>
          <sp xml:id="II10-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN <hi rend="i">seul</hi>.</speaker>
            <l n="687" xml:id="l687">Suis-je pas un grand Sot d’aimer cette Traîtresse ?</l>
            <l n="688" xml:id="l688">Mais puis que rien ne peut guerir tant de foiblesse,</l>
            <l n="689" xml:id="l689">Et que le Diable épargne enfin si peu de <ref target="#front">fronts*</ref>,</l>
            <l n="690" xml:id="l690">Hazard<note place="bottom">« On dit aussi adverbialement, <hi rend="i">A tout hazard</hi>, pour dire, A tout evenement, quoy qu’il puisse arriver : Et dans le mesme sens, on dit proverbialementt &amp; bassement. <hi rend="i">Hazard à la banque</hi>. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> à mon marché, <ref target="#conclure">concluons*</ref> &amp; partons.</l>
            <p rend="center">Fin du second Acte.</p>
          </sp>
        </div>
      </div>
      <div xml:id="III" type="act">
        <head>ACTE III.</head>
        <div type="scene" xml:id="III01">
          <head>SCENE PREMIERE.</head>
          <stage>STAMORAT, FATIMAN, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="III01-1" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="691" xml:id="l691">D’un <ref target="#air">air*</ref> brusque, augmenté par sa mélancolie,</l>
            <l n="692" xml:id="l692">Le <ref target="#brave">brave*</ref> Dom Brusquin pour rachetter Julie,</l>
            <l n="693" xml:id="l693">Vient de nous délivrer les cinq mille Ducats.</l>
            <l n="694" xml:id="l694">Impatient de voir sa Femme entre ses bras,</l>
            <l n="695" xml:id="l695">Pour partir promptement il demande Audiance,</l>
            <l n="696" xml:id="l696">Il est proche d’icy ; vous plaît-il qu’il avance ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III01-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="697" xml:id="l697">Non, lors que je voudray le voir, il entrera.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III01-3" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="698" xml:id="l698" part="I">Luy diray-je le temps, quand…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III01-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Quand il me plaira,</l>
            <l n="699" xml:id="l699">En faveur de Carlos, je <ref target="#pretendre">prétens*</ref>, quoy qu’il die,</l>
            <l n="700" xml:id="l700">D’avec ce Dom <ref target="#bourru">Bouru*</ref> démarier Julie.</l>
            <l n="701" xml:id="l701">La remettre, Zaire, à cet heureux <ref target="#amant">Amant*</ref>,</l>
            <l n="702" xml:id="l702">Pour prix d’avoir été sincere à Fatiman.</l>
            <l n="703" xml:id="l703">Oüy, ce qu’il m’a fait voir pour moy contre Celime,</l>
            <l n="704" xml:id="l704">L’assure pour jamais de toute mon estime.</l>
            <l n="705" xml:id="l705">Quant à l’Ingrate, enfin, je veux jusques au bout</l>
            <l n="706" xml:id="l706">La suivre, la surprendre, &amp; la confondre en tout.</l>
            <l n="707" xml:id="l707">Par des Airs concertez &amp; chantez devant elle,</l>
            <l n="708" xml:id="l708">Insulter, irriter son <ref target="#ardeur">ardeur*</ref> criminelle ;</l>
            <l n="709" xml:id="l709">Toy, comme je l’ay dit, agis de ton côté,</l>
            <l n="710" xml:id="l710">Sûre que mes bienfaits suivront ta liberté.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III02">
          <head>SCENE II.</head>
          <stage>CELIME, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="III02-1" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="711" xml:id="l711">Pour me voir libre, allons trouver… Elle s’avance.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-2" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="712" xml:id="l712">Je ne puis resister à mon impatience ;</l>
            <l n="713" xml:id="l713">J’ignore si Carlos a remply son devoir,</l>
            <l n="714" xml:id="l714">Je brûle de l’apprendre, &amp; crains de le <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>,</l>
            <l n="715" xml:id="l715">Zaïre est paresseuse &amp;… La voicy. Zaïre,</l>
            <l n="716" xml:id="l716">De la part de Carlos que venez-vous me dire,</l>
            <l n="717" xml:id="l717">A-t’il avec <ref target="#transport">transport*</ref> reçû sa liberté,</l>
            <l n="718" xml:id="l718">De quels regards, Zaïre, a-t’il vû ma bonté ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-3" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="719" xml:id="l719">Je voudrois, dans l’<ref target="#estat">état*</ref> où j’ay trouvé son <ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="720" xml:id="l720">Que de vos propres yeux vous l’eussiez vû, Madame.</l>
            <l n="721" xml:id="l721">Pour en être surprise autant que je la<note place="bottom">« Le pronom <hi rend="i">le</hi>, attribut du verbe <hi rend="i">être</hi>, s’accorde avec son sujet au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, et les formes <hi rend="i">la, les</hi> remplacent le neutre <hi rend="i">le</hi> de la langue actuelle. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 11.</note> suis.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-4" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="722" xml:id="l722">La joye est éclatante aprés de longs <ref target="#ennui">ennuis*</ref>.</l>
            <l n="723" xml:id="l723">Il t’a, je m’imagine, avec peu de <ref target="#conduite">conduite*</ref>,</l>
            <l n="724" xml:id="l724">Fait des remercimens par des <ref target="#discours">discours*</ref> sans suite,</l>
            <l n="725" xml:id="l725">Et qu’il<note place="bottom">« <hi rend="i">Que</hi> consécutif s’emploie parfois sans être précédé d’un antécédent comme <hi rend="i">tel, tellement</hi>, etc. » <hi rend="i">ibid.</hi>, p. 370.</note> viendroit bien-tôt redevable à mes <ref target="#soin1">soins*</ref></l>
            <l n="726" xml:id="l726" part="I">Embrasser mes genoux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-5" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Luy ! Madame, rien moins.</l>
            <l n="727" xml:id="l727">A le voir <ref target="#interdire">interdit*</ref>, rêveur, muet, <ref target="#stupide">stupide*</ref>,</l>
            <l n="728" xml:id="l728">Le regard égaré, le visage <ref target="#insipide">insipide*</ref>,</l>
            <l n="729" xml:id="l729">D’une froide sueür il a paru trempé,<pb n="O"/></l>
            <l n="730" xml:id="l730">Comme si du Tonnerre il eût été frappé.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-6" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="731" xml:id="l731">Un <ref target="#bien">bien*</ref> qu’on n’attend pas surprend &amp; saisit l’ame,</l>
            <l n="732" xml:id="l732" part="I">Enfin il a parlé ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-7" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Rien moins encor, Madame :</l>
            <l n="733" xml:id="l733">De rompre le silence en vain je l’ay <ref target="#presser">pressé*</ref>,</l>
            <l n="734" xml:id="l734">Plus je montrois d’<ref target="#ardeur">ardeur*</ref>, plus il étoit glacé,</l>
            <l n="735" xml:id="l735">Et sur son teint, du Rouge ayant perdu les <ref target="#charme">charmes*</ref>,</l>
            <l n="736" xml:id="l736">Grosses comme des poix j’ay vû couler ses larmes.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-8" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="737" xml:id="l737">On pâlit de surprise, &amp; la joye a ses pleurs.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-9" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="738" xml:id="l738">Non, si je m’en rapporte au langage des cœurs,</l>
            <l n="739" xml:id="l739">Les siennes à Julie exprimoient le contraire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-10" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="740" xml:id="l740">Quoy, Julie… Au récit que tu luy viens de faire</l>
            <l n="741" xml:id="l741" part="I">Elle était donc présente ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-11" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Ils ne se quittent pas,</l>
            <l n="742" xml:id="l742" part="I">Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-12" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Le crois-tu <ref target="#charmer">charmé*</ref> de ses appas ?</l>
            <l n="743" xml:id="l743">Seroit-il aimé d’elle, est-ce un plaisir qu’il goûte ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-13" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="744" xml:id="l744">Il ne m’en a jamais parlé, mais je m’en doute.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-14" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="745" xml:id="l745">Un desir curieux me porte à le <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>,</l>
            <l n="746" xml:id="l746">Et je veux… Mais quel Homme icy viens-je de voir ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-15" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="747" xml:id="l747" part="I">C’est Tomire, autrefois son Valet.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-16" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Va luy dire,</l>
            <l n="748" xml:id="l748" part="I">Que je veux luy parler, &amp; qu’il vienne.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III02-17" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Tomire</l>
            <l n="749" xml:id="l749" part="I">Viens, on veut te parler.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III03">
          <head>SCENE III.</head>
          <stage>CELIME, TOMIRE, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="III03-1" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">J’allois chez Fatiman,</l>
            <l n="750" xml:id="l750">Courir executer l’ordre &amp; l’<ref target="#empressement">empressement*</ref></l>
            <l n="751" xml:id="l751">Du <ref target="#brave">brave*</ref> D. Brusquin, qui demande audience,</l>
            <l n="752" xml:id="l752" part="I">Vous voyant, par respect, je retournois.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-2" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Avance</l>
            <l n="753" xml:id="l753">Vien. Autrefois Carlos étoit servy par toy ?</l>
            <l n="754" xml:id="l754" part="I">Parle.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-3" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Il n’a jamais eû d’autre Valet que moy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-4" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="755" xml:id="l755" part="I">Et tu l’aimes ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-5" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Autant qu’un Valet aime un Maître.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-6" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="756" xml:id="l756" part="I">Il est noble en Espagne ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-7" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Oüy, tout ce qu’on peut l’être.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-8" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="757" xml:id="l757">Quelle honte ! j’admire étant de qualité,</l>
            <l n="758" xml:id="l758">Comment par sa Famille il n’est pas racheté !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-9" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="759" xml:id="l759">En Europe souvent, quoy qu’ils soient en estimes,</l>
            <l n="760" xml:id="l760">Madame, noble &amp; gueux sont termes synonimes ;<pb n="Oij"/></l>
            <l n="761" xml:id="l761">Carlos auroit ces noms sans l’espoir <ref target="#singulier">singulier*</ref></l>
            <l n="762" xml:id="l762">D’un Oncle riche &amp; vieux dont il est heritier,</l>
            <l n="763" xml:id="l763" part="I">Dieu mercy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-10" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Mais ayant cet Oncle, est-il croyable</l>
            <l n="764" xml:id="l764" part="I">Qu’il l’abandonne ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-11" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Il est avare comme un Diable ;</l>
            <l n="765" xml:id="l765">Madame, &amp; nous verroit plûtôt <ref target="#crever">crever*</ref> tous deux,</l>
            <l n="766" xml:id="l766" part="I">Que de donner un soû.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-12" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Sa mort proche, étant vieux,</l>
            <l n="767" xml:id="l767">Enrichira Carlos d’une assez grande Somme.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-13" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="768" xml:id="l768">Il est vray qu’il est vieux, mais comme c’est un Hõme</l>
            <l n="769" xml:id="l769">Qui depuis le berceau pour nous faire <ref target="#enrager">enrager*</ref>,</l>
            <l n="770" xml:id="l770">Ne s’est fait, ny seigner, ny droguer, ny purger,</l>
            <l n="771" xml:id="l771">Et qu’il ne veut point voir de Medecins, je doute</l>
            <l n="772" xml:id="l772" part="I">Qu’il meure encor.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-14" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Parlons d’autres choses, écoute</l>
            <l n="773" xml:id="l773">Carlos t’ouvroit son <ref target="#coeur">cœur*</ref>, te connoissant prudent ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-15" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="774" xml:id="l774">J’ay toûjours, quoyqu’indigne, été son Confident.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-16" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="775" xml:id="l775" part="I">Conte-moy ses Amours ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-17" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Oh ! Ces Historiettes</l>
            <l n="776" xml:id="l776">De <ref target="#mystere">mysteres*</ref> galants, d’intrigues, d’amourettes,</l>
            <l n="777" xml:id="l777">Comme vous jugez bien sont de petits secrets,</l>
            <l n="778" xml:id="l778">Qu’un Valet bien discret, ne révéle jamais.</l>
            <l n="779" xml:id="l779">Ainsi, vous voulez bien me dispenser, Madame,</l>
            <l n="780" xml:id="l780">De découvrir icy le secret de sa <ref target="#flamme">flâme*</ref><note place="bottom">« La métaphore est constante pour désigner l’amour. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 58.</note>.</l>
            <l n="781" xml:id="l781">Ce Dom Carlos dont j’ay <ref target="#mesnager">ménagé*</ref> les Amours,</l>
            <l n="782" xml:id="l782">Fut mon Maître, &amp; je veux m’en souvenir toûjours.</l>
            <l n="783" xml:id="l783">Tel que vous me voyez, j’ay pour luy tant de zéle,</l>
            <l n="784" xml:id="l784">Que je veux être un jour cité comme modéle,</l>
            <l n="785" xml:id="l785">D’un Valet achevé, malheureux, mais nazard<note place="bottom">La plaisanterie porte sur le fait que, parmi les qualités du valet, est introduite la caractéristique ridicule de parler du nez (« nazard » est synonyme de <hi rend="i">nasillard</hi>). Curieusement, si le comédien Jodelet était célèbre pour sa voix nasillarde (meurt à Pâques 1660), aucun autre comédien jouant le rôle de valet ne s’est distingué par cette caractéristique. Mais il se pourrait que ce soit classique du valet de comédie depuis Jodelet.</note> ;</l>
            <l n="786" xml:id="l786">Et je ne haï<note place="bottom">Lire [e].</note> rien tant qu’un Valet <ref target="#babillard">babillard*</ref>,</l>
            <l n="787" xml:id="l787">Qui veut à tous venans, même sans les connoître,</l>
            <l n="788" xml:id="l788">Conter de <ref target="#but">but*</ref> en blanc les Amours de son Maître.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-18" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="789" xml:id="l789">Carlos est bienheureux que sa condition</l>
            <l n="790" xml:id="l790">Luy conserve un tel zéle ; &amp; ta discretion</l>
            <l n="791" xml:id="l791">Me paroît à la fois si rare, &amp; si loüable,</l>
            <l n="792" xml:id="l792">Que le plaisir que j’ay de t’en trouver capable,</l>
            <l n="793" xml:id="l793" part="I">Est payé de ce prix.</l>
            <stage>Elle luy donne une Bague.</stage>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-19" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="M">Oh ! C’est…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-20" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Prens, j’aime à voir</l>
            <l n="794" xml:id="l794">Que rien contre Carlos n’ébranle ton devoir.</l>
            <l n="795" xml:id="l795">Son interêt m’est cher : qu’à l’avenir ton zéle,</l>
            <l n="796" xml:id="l796">Ne démente jamais une <ref target="#ardeur">ardeur*</ref> si fidelle,</l>
            <l n="797" xml:id="l797">Tu sçais tous ses secrets, garde-toy d’en parler,</l>
            <l n="798" xml:id="l798">Et meurs plûtôt cent fois que de les reveler.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-21" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="799" xml:id="l799" part="I">Oh !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-22" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Quant à ses Amours qu’on auroit peine à croire,</l>
            <l n="800" xml:id="l800">Carlos m’en a conté tantôt toute l’Histoire.</l>
            <l n="801" xml:id="l801">Ce n’est plus à present un <ref target="#mystere">mystere*</ref> pour moy,</l>
            <l n="802" xml:id="l802" part="I">Il m’a dit qu’il aimoit Julie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-23" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Ah ! je le croy,</l>
            <l n="803" xml:id="l803" part="I">Cela n’est pas nouveau.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-24" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Qu’une <ref target="#ardeur">ardeur*</ref> mutuelle</l>
            <l n="804" xml:id="l804">Rendoit malgré leurs Fers leur Amour éternelle ;<pb n="Oiij"/></l>
            <l n="805" xml:id="l805">Par quel hazard ils ont perdu la liberté,</l>
            <l n="806" xml:id="l806" part="I">Leurs <ref target="#traverse">traverses*</ref>, leurs pleurs…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-25" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Il vous a donc conté</l>
            <l n="807" xml:id="l807">Comment il l’enleva du logis de sa Mere ;</l>
            <l n="808" xml:id="l808">La rencontre qu’il fit de ce Vaisseau Corsaire ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-26" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="809" xml:id="l809">Ouy, vôtre Embarquement, &amp; comment on vous prit.</l>
            <l n="810" xml:id="l810" part="I">Le desespoir qu’il eut.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-27" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Il vous aura donc dit,</l>
            <l n="811" xml:id="l811">Là… que la chose fut justement accomplie,</l>
            <l n="812" xml:id="l812">Dans le tems qu’on venoit de marier Julie,</l>
            <l n="813" xml:id="l813">Qui haïssoit à mort l’Epoux qu’on luy donnoit,</l>
            <l n="814" xml:id="l814">Que deux heures plus tard l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> se <ref target="#consommer">consommoit*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-28" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="815" xml:id="l815">Il m’a dit tout cela de point en point, Tomire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-29" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="816" xml:id="l816">Il faut que sur son <ref target="#coeur">cœur*</ref> vous ayez grand empire,</l>
            <l n="817" xml:id="l817">Pour s’être ouvert à vous ainsi, j’en suis surpris,</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-30" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="818" xml:id="l818" part="I">J’estime fort Carlos.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-31" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE</speaker>
            <l part="F">Et vous a-t’il appris</l>
            <l n="819" xml:id="l819">Que ce vieux Singe, à qui l’on maria Julie,</l>
            <l n="820" xml:id="l820">Est pour la rachetter dés hier en <ref target="#barbarie">Barbarie*</ref>,</l>
            <l n="821" xml:id="l821">Et qu’avec Fatiman il a fait son marché ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-32" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="822" xml:id="l822">Je le sçay, &amp; Carlos m’en paroît si touché,</l>
            <l n="823" xml:id="l823">Que <ref target="#sensible">sensible*</ref> à l’<ref target="#ennui">ennuy*</ref> qu’il m’en faisoit paroître…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-33" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="824" xml:id="l824">Hé bien ! voyez un peu le caprice d’un Maître,</l>
            <l n="825" xml:id="l825">Il l’a dit, il n’auroit point cessé de crier,</l>
            <l n="826" xml:id="l826">Si j’en avois ouvert la bouche le premier.</l>
            <l n="827" xml:id="l827" part="I">Le monde est ainsi fait.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-34" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Cette triste nouvelle,</l>
            <l n="828" xml:id="l828">Me donne pour Carlos, une douleur mortelle,</l>
            <l n="829" xml:id="l829">Car il perd sa Maîtresse<note place="bottom">Le mot « désigne couramment la femme qui aime et est aimée, sans nuance défavorable. « On le dit particulièrement d’une fille qu’on recherche en mariage », note Furetière. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 45.</note>, &amp; l’<ref target="#ennui">ennuy*</ref> qu’il en a…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-35" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="830" xml:id="l830">Ne vous affligez point, si ce n’est que cela ;</l>
            <l n="831" xml:id="l831">Depuis une heure ou deux tout a changé de face.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-36" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="832" xml:id="l832">Quoy ! ne me cache rien, dis-moy ce qui se passe.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-37" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="833" xml:id="l833">Je n’en suis pas encor tout-à-fait informé,</l>
            <l n="834" xml:id="l834">Mais je viens de laisser Carlos joyeux, charmé,</l>
            <l n="835" xml:id="l835">Parlant de se voir libre, &amp; vous nommant, Madame,</l>
            <l n="836" xml:id="l836">Avecque des <ref target="#transport">transports*</ref> qui découvrent son <ref target="#ame">ame*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-38" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="837" xml:id="l837">Vous m’en aviez, Zaïre, informée autrement.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-39" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="838" xml:id="l838">J’ay dit ce que j’ay vû, Madame, assûrément,</l>
            <l n="839" xml:id="l839">Carlos étoit chagrin &amp; triste en ma présence.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-40" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="840" xml:id="l840">C’est donc qu’il a voulu vous cacher ce qu’il pense ;</l>
            <l n="841" xml:id="l841">Car c’est un fin <ref target="#matois">matois*</ref>, à le dire entre nous,</l>
            <l n="842" xml:id="l842">Mais maintenant avec Julie, à ses genoux,</l>
            <l n="843" xml:id="l843">Sa bouche tendrement sur ses mains attachées,</l>
            <l n="844" xml:id="l844">Il les baise d’un <ref target="#air">air*</ref> dont vous seriez <ref target="#toucher">touchée*</ref> ;</l>
            <l n="845" xml:id="l845">Je m’en vais leur conter, Madame, avec <ref target="#ardeur">ardeur*</ref></l>
            <l n="846" xml:id="l846">Combien vous témoignez de joye à leur bonheur.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-41" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="847" xml:id="l847">Non, laisse-moy ce <ref target="#soin1">soin*</ref>, &amp; ne dis rien, Tomire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III03-42" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="848" xml:id="l848">Je me tairay, Madame, &amp; vous n’avez qu’à dire.<pb n="Oiiij"/></l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III04">
          <head>SCENE IV.</head>
          <stage>CELIME, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="III04-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="849" xml:id="l849">M’estes-vous infidelle, &amp; me tromperiez-vous,</l>
            <l n="850" xml:id="l850" part="I">Zaïre ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III04-2" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="M">Moy, Madame, ah !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III04-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Craignez mon <ref target="#courroux">courroux*</ref>.</l>
            <l n="851" xml:id="l851">Vous sçavez qui je suis ; malheur à qui m’offence.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III04-4" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="852" xml:id="l852">Et quel seroit le fruit de cette <ref target="#intelligence">intelligence*</ref> ?</l>
            <l n="853" xml:id="l853">Je retourne de prés les <ref target="#examiner">examiner*</ref> mieux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III04-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="854" xml:id="l854">Non, je n’en veux plus rien <ref target="#savoir">sçavoir*</ref> que par mes yeux.</l>
            <l n="855" xml:id="l855" part="I">Demeurez ; Mais qui vient me chagriner.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III05">
          <head>SCENE V.</head>
          <stage>CELIME, STAMORAT, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="III05-1" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l part="F">Madame,</l>
            <l n="856" xml:id="l856">Fatiman pénétré du bonheur de sa <ref target="#flamme">flâme*</ref> ;</l>
            <l n="857" xml:id="l857">Pour devancer l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> qui doit le rendre heureux,</l>
            <l n="858" xml:id="l858">Et répondre aux <ref target="#transport">transports*</ref> de son <ref target="#coeur">cœur*</ref> Amoureux,</l>
            <l n="859" xml:id="l859">Vous offre ce Coffret remply de Pierreries.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III05-2" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="860" xml:id="l860">Je suis bien obligée à ses galanteries.</l>
            <l n="861" xml:id="l861" part="I">Tenez, Zaïre, adieu.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III05-3" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l part="F">Dans ce même moment</l>
            <l n="862" xml:id="l862">Il vous fait préparer pour divertissement,</l>
            <l n="863" xml:id="l863">Un Opera<note place="bottom">« Spectacle public ; representation magnifique sur la scene, de quelque ouvrage dramatique, dont les vers se chantent, &amp; sont accompagnez de symphonie, de danses, de ballets, avec des habits &amp; des decorations superbes, &amp; des machines surprenantes. » <hi rend="sc">Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> chanté par Carlos, &amp; Julie ;</l>
            <l n="864" xml:id="l864">Mais il craint toutefois que ce chant vous <ref target="#ennuyer">ennuye*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III05-4" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="865" xml:id="l865">Non, non, j’ay des raisons pour m’y bien <ref target="#divertir">divertir*</ref></l>
            <l n="866" xml:id="l866">Si-tôt qu’il sera prêt, qu’on me fasse avertir.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III06">
          <head>SCENE VI.</head>
          <stage>FATIMAN, STAMORAT.</stage>
          <sp xml:id="III06-1" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="867" xml:id="l867">Elle n’est pas <ref target="#sensible">sensible*</ref> à l’Amour legitime.</l>
            <l n="868" xml:id="l868" part="I">J’ay peur que Fatiman… il vient.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III06-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Comment Celime</l>
            <l n="869" xml:id="l869" part="I">A-t’elle envisagé mon present ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III06-3" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l part="F">Froidement.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III06-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="870" xml:id="l870">Et que t’a-t’elle dit du divertissement ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III06-5" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="871" xml:id="l871">Avec beaucoup d’<ref target="#ardeur">ardeur*</ref> elle m’a fait connoître</l>
            <l n="872" xml:id="l872">Qu’il luy feroit plaisir, &amp; qu’elle y vouloit être :</l>
            <l n="873" xml:id="l873">Qu’elle avoit des raisons pour s’y bien <ref target="#divertir">divertir*</ref>,</l>
            <l n="874" xml:id="l874">Et quand il sera prêt, qu’on la fasse avertir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III06-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker><pb n="Ov"/>
            <l n="875" xml:id="l875">Elle y trouvera moins de plaisir qu’elle pense<note place="bottom">« <hi rend="i">Ne</hi> est omis dans une proposition dépendante : après le <hi rend="i">que</hi> comparatif, omission qui se rencontre encore à une époque postérieure au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 263.</note>,</l>
            <l n="876" xml:id="l876">Fais venir Dom Brusquin, qu’il vienne à l’Audience.</l>
            <l n="877" xml:id="l877">Je vais pour obliger Julie, &amp; Dom Carlos,</l>
            <l n="878" xml:id="l878">Contraindre ce <ref target="#magot">Magot*</ref><note place="bottom">« Se dit figurément des hommes difformes, laids, comme sont les singes, des gens mal bastis. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> de signer leur <ref target="#repos">repos*</ref>.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III07">
          <head>SCENE VII.</head>
          <stage>DOM BRUSQUIN, FATIMAN, STAMORAT.</stage>
          <sp xml:id="III07-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="879" xml:id="l879"><ref target="#ca">Ça*</ref>, Seigneur Fatiman, <ref target="#conclure">concluons*</ref> je vous prie,</l>
            <l n="880" xml:id="l880">Aussi bien<note place="bottom">Aussi-bien : D’ailleurs, dans le fait, au reste. Le sens n’est pas attesté dans les dictionnaires, mais on trouve de nombreux exemples.</note> je commence à voir que je m’<ref target="#ennuyer">ennuye*</ref> ;</l>
            <l n="881" xml:id="l881">J’ay demandé ma Femme, &amp; l’on m’a fait <ref target="#savoir">sçavoir*</ref></l>
            <l n="882" xml:id="l882">Que c’est de vôtre main, qu’il la faut recevoir,</l>
            <l n="883" xml:id="l883">Je veux partir, enfin ; en un mot, comme en douze<note place="bottom">« En un <hi rend="i">mot</hi>, est aussi adverbe, &amp; signifie, Pour conclusion. Je vous l’ay dit en un <hi rend="i">mot</hi>, autant comme en cent. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> L’emploi du nombre <hi rend="i">douze</hi> semble être dicté ici par la rime.</note> ;</l>
            <l n="884" xml:id="l884">J’ay livré mon Argent, livrez-moy mon Epouse.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="885" xml:id="l885">Elle est libre, &amp; de plus contre nôtre Traité,</l>
            <l n="886" xml:id="l886">Je <ref target="#pretendre">prétens*</ref> luy donner <hi rend="i">gratis</hi> la liberté.</l>
            <l n="887" xml:id="l887">La rendre sans Argent, &amp; qu’elle se retire…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="888" xml:id="l888">Quel excés de bonté ! Sans Argent, c’est à dire,</l>
            <l n="889" xml:id="l889">Que ce Drôle voyant qu’elle quittoit ce lieu,</l>
            <l n="890" xml:id="l890">S’est payé par ses mains en luy disant adieu.</l>
            <l n="891" xml:id="l891">De ses bontez pour nous voilà la récompense,</l>
            <l n="892" xml:id="l892">Et je vais sur mon <ref target="#front">front*</ref> en porter la Quittance.</l>
            <l n="893" xml:id="l893">Que feray-je à cela, passons ? Apparemment</l>
            <l n="894" xml:id="l894">Nous pouvons donc partir ; tréve de compliment,</l>
            <l n="895" xml:id="l895">Puis que vous voulez bien sans Argent me la rendre,</l>
            <l n="896" xml:id="l896">De peur de vous fâcher, je m’en vais la reprendre ;</l>
            <l n="897" xml:id="l897">Si vous venez chez nous, vous me ferez honneur,</l>
            <l n="898" xml:id="l898">Reste à vous dire adieu but à but<note place="bottom">« On dit adverbialement, <hi rend="i">But à but</hi>, pour dire, D’une maniere égale. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>, serviteur.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="899" xml:id="l899">Avant que de partir il faut qu’avec Julie,</l>
            <l n="900" xml:id="l900">Vous soyez le témoin d’une Cérémonie,</l>
            <l n="901" xml:id="l901">Et que vous me donniez icy quelques momens.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="902" xml:id="l902">C’est pour une autre fois, nous n’avons pas le temps,</l>
            <l n="903" xml:id="l903">A nous faire partir, vôtre honneur vous oblige.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="904" xml:id="l904">Vous ne sçauriez partir qu’après cela, vous dis-je,</l>
            <l n="905" xml:id="l905">Il faut qu’absolument vous y soyez tous deux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="906" xml:id="l906" part="I">Vous raillez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Il le faut, vous dis-je, &amp; je le veux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-9" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="907" xml:id="l907">Dites-moy donc quelle est cette Cérémonie,</l>
            <l n="908" xml:id="l908">Qui veut &amp; ma présence, &amp; celle de Julie,</l>
            <l n="909" xml:id="l909">Sans indiscretion peut-on vous en prier ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-10" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="910" xml:id="l910" part="I">C’est que je veux ce soir…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-11" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="M">Hé bien !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-12" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">La marier.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-13" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="911" xml:id="l911" part="I">Julie ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-14" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Elle.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-15" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F"><ref target="#expliquer">Expliquons*</ref> s’il vous plaît ce langage,</l>
            <l n="912" xml:id="l912">Est-ce qu’on doute icy de nôtre mariage.</l>
            <l n="913" xml:id="l913">Et que craignant en Mer pour son honnêteté</l>
            <l n="914" xml:id="l914">On veut nous marier pour plus de sûreté ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-16" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker><pb n="Ovj"/>
            <l n="915" xml:id="l915" part="I">Non.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-17" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="M">Non ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-18" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Non, je sçay bien que tu l’as épousée,</l>
            <l n="916" xml:id="l916">Que toûjours à ta <ref target="#flamme">flâme*</ref> elle s’est refusée,</l>
            <l n="917" xml:id="l917">Que rien ne vous unit, enfin, que quelques mots</l>
            <l n="918" xml:id="l918">Qui n’ont point eu d’effet ; Ainsi pour son <ref target="#repos">repos*</ref></l>
            <l n="919" xml:id="l919">Et même pour le tien, il vaut mieux, ce me semble,</l>
            <l n="920" xml:id="l920">Vous separer tous deux, que vous unir ensemble,</l>
            <l n="921" xml:id="l921">L’usage le permet icy, comme chez vous,</l>
            <l n="922" xml:id="l922">Et je luy vais ce soir donner un autre Epoux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-19" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="923" xml:id="l923" part="I">A ma Femme ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-20" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">A ta Femme : Et de plus….</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-21" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Quel <ref target="#negoce">Negoce*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-22" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="924" xml:id="l924">Ton Argent servira pour les frais de la Nôce.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-23" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="925" xml:id="l925">Nous nous entendons mal assurément tous deux.</l>
            <l n="926" xml:id="l926">Vous <ref target="#pretendre">prétendez*</ref> ce soir marier à mes yeux,</l>
            <l n="927" xml:id="l927" part="I">Qui, dites-vous, Julie ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-24" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Ouy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-25" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ma Femme : ah ! j’<ref target="#enrager">enrage*</ref>,</l>
            <l n="928" xml:id="l928">De quel droit, s’il vous plaît, rompre mon mariage ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-26" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="929" xml:id="l929">J’ay de deux <ref target="#marabout">Marabous*</ref><note place="bottom">« Terme de Relations, est un Prestre Mahometan qui dessert une Mosquée, particulierement en Afrique. » <hi rend="i">ibid.</hi></note> pouvoir pendant dix ans,</l>
            <l n="930" xml:id="l930">De démarier ceux qui ne sont pas contens.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-27" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="931" xml:id="l931">Vous ? Si cela se sçait, un jour il faut qu’il fonde,</l>
            <l n="932" xml:id="l932">Des Maris en ces lieux des quatre coins du monde.</l>
            <l n="933" xml:id="l933">Et si vous pouvez mettre à profit tout ce temps,</l>
            <l n="934" xml:id="l934">Cela vous vaudra mieux que vingt Gouvernemens.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-28" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="935" xml:id="l935">Sans doute, &amp; pour ne pas <ref target="#differer">differer*</ref> davantage,</l>
            <l n="936" xml:id="l936">J’en fais ce soir l’essay par ton démariage.</l>
            <l n="937" xml:id="l937">Vous y serez présent, vous en verrez le fruit.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-29" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="938" xml:id="l938">Moy ! Ciel ! à quel malheur me vois-je icy réduit !</l>
            <l n="939" xml:id="l939">Qui l’eût dit ? Quand chez moy je partis plein de <ref target="#flamme">flâme*</ref>,</l>
            <l n="940" xml:id="l940">Que c’étoit pour venir aux Nôces de ma Femme ;</l>
            <l n="941" xml:id="l941">Et que me souhaitant des aîles aux talons<note place="bottom">« Se dit proverbialement en ces phrases. On dit qu’un homme jouë de l’épée à deux <hi rend="i">talons</hi>, que la peur lui a mis des aîles aux <hi rend="i">talons</hi> ; pour dire, qu’il s’enfuit. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>,</l>
            <l n="942" xml:id="l942">Je viendrois de si loin payer les <ref target="#violons">violons*</ref> ;</l>
            <l n="943" xml:id="l943">Est-ce un Arrêt pour moy sans appel ; &amp; ma bourse</l>
            <l n="944" xml:id="l944" part="I">Ne peut-elle adoucir ?…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-30" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">L’affaire est sans ressource.</l>
            <l n="945" xml:id="l945">Je luy donne un Epoux malgré tous tes <ref target="#discours">discours*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-31" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="946" xml:id="l946" part="I">Sera-ce pour long-temps ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-32" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Ce sera pour toûjours.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-33" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="947" xml:id="l947" part="I">L’a-t’on dit à Julie ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-34" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Ouy, je luy<note place="bottom">« Le pronom de la 3<hi rend="sup">e</hi> pers. à l’accusatif (<hi rend="b">le, la, les</hi> et le neutre <hi rend="b">le</hi>) servant de complément direct, et précédant un autre pronom au datif (le plus souvent celui de la 3<hi rend="sup">e</hi> pers.), pouvait être omis dans l’ancienne langue, qui considérait le nom comme suffisamment présent à l’esprit. Cette ellipse est encore en usage chez tous les auteurs du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 5.</note> viens d’apprendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-35" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="948" xml:id="l948" part="I">Que dit-elle à cela ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-36" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Qu’elle est prête à se rendre,</l>
            <l n="949" xml:id="l949">Et qu’elle aimeroit mieux en te manquant de <ref target="#foy">foy*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">foi</hi> [...] désigne d’abord, conformément à son sens originel (<hi rend="i">fides</hi> en latin), la confiance que l’on accorde à un être et qui génère un engagement, une parole. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 24.</note>,</l>
            <l n="950" xml:id="l950">Estre aux Fers avec luy, que Reine avecque toy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-37" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="951" xml:id="l951">Ah ! me voilà donc veuf du vivant de ma Femme.</l>
            <l n="952" xml:id="l952">Et quel est ce beau Fils<note place="bottom">« On dit prov. d’Un jeune homme qui fait le beau, qu’<hi rend="i">Il fait le beau-fils</hi>. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> qui cause tant de <ref target="#flamme">flâme*</ref> ?</l>
            <l n="953" xml:id="l953">Est-ce un secret pour moy ? ne le puis-je <ref target="#savoir">sçavoir*</ref> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-38" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="954" xml:id="l954">Tu le sçauras tantôt, je te le feray voir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-39" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="955" xml:id="l955">Scelerat ! Est-ce ainsi que vous me percez l’ame ?</l>
            <l n="956" xml:id="l956">Vous me coupez la bourse<note place="bottom">« On dit fig. <hi rend="i">Couper la bourse à quelqu’un</hi>, pour dire, Tirer de l’argent d’une personne qui n’a pas beaucoup d’envie d’en donner. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>, &amp; me volez ma Femme.</l>
            <l n="957" xml:id="l957">Vous pouviez l’avoir fait, sans m’avoir attendu</l>
            <l n="958" xml:id="l958">Mais si j’y suis présent, je veux être pendu.</l>
            <l n="959" xml:id="l959">Je pars, &amp; vais, pleurant des malheurs incroyables,</l>
            <l n="960" xml:id="l960">Donner cent fois le jour les Turcs à tous les Diables.</l>
            <stage>Il s’en va.</stage>
          </sp>
          <sp xml:id="III07-40" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="961" xml:id="l961">Il a beau se hâter, il n’ira pas bien loin.</l>
            <l n="962" xml:id="l962">Suivez-le, Stamorat ; Allez, prenez-en soin.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III08">
          <head>SCENE VIII.</head>
          <stage>FATIMAN, CELIME.</stage>
          <sp xml:id="III08-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="963" xml:id="l963">Je ne voy rien encor préparé pour la Fête,</l>
            <l n="964" xml:id="l964">Qui<note place="bottom">« En fonction sujet, <hi rend="i">qui</hi> peut se rapporter aussi bien à des animés qu’à des inanimés tout au long du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 63.</note> retient le Concert, qu’est-ce qui vous arrête ?</l>
            <l n="965" xml:id="l965">Je ne croyois jamais être assez tôt icy,</l>
            <l n="966" xml:id="l966" part="I">Et je ne vois encor Personne.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III08-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Les voicy,</l>
            <l n="967" xml:id="l967" part="I">Madame.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III09">
          <head>SCENE IX.</head>
          <stage>FATIMAN, CELIME, CARLOS, JULIE.</stage>
          <sp xml:id="III09-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Qu’allez-vous, Carlos, nous faire entendre ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-2" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="968" xml:id="l968">De deux <ref target="#amant">Amans*</ref> heureux, une Scéne assez <ref target="#tendre">tendre*</ref>.</l>
            <stage>On chante.</stage>
            <lg>
              <l n="969" xml:id="l969">En vain l’on conspire</l>
              <l n="970" xml:id="l970">Pour séduire</l>
              <l n="971" xml:id="l971">Un <ref target="#coeur">cœur*</ref> amoureux,</l>
              <l n="972" xml:id="l972">Tout ce qu’on fait pour le surprendre</l>
              <l n="973" xml:id="l973">Ne sert qu’à le rendre</l>
              <l n="974" xml:id="l974">Plus fidele &amp; plus <ref target="#tendre">tendre*</ref>,</l>
              <l n="975" xml:id="l975">Pour ses premiers <ref target="#feu">feux*</ref>.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="976" xml:id="l976">Les présens, les <ref target="#faveur">faveurs*</ref></l>
              <l n="977" xml:id="l977">N’arrêtent pas toûjours les cœurs,</l>
              <l n="978" xml:id="l978">En amour il faut se contraindre,</l>
              <l n="979" xml:id="l979">Quand on a sçû <ref target="#charmer">charmer*</ref> ;</l>
              <l n="980" xml:id="l980">C’est un <ref target="#feu">feu*</ref> qu’il faut feindre<note place="bottom">« Signifie aussi, Craindre. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
              <l n="981" xml:id="l981">Et ce qu’on fait pour l’allumer,</l>
              <l n="982" xml:id="l982">Sert bien souvent à l’éteindre.</l>
              <l n="983" xml:id="l983">Les présens, les <ref target="#faveur">faveurs*</ref><note place="bottom">« La <hi rend="i">faveur</hi>, qui désigne, conformément à l’étymologie, les marques de prédilection, peut être accordée à l’être dont on a reconnu le service. Le mot employé au pluriel a une acception concrète et désigne les preuves d’amour que l’on donne. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 49.</note></l>
              <l n="984" xml:id="l984">N’arrêtent pas toûjours les cœurs ;</l>
              <l n="985" xml:id="l985">Mais je crois que l’Amour…</l>
            </lg>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-3" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">aprés qu’on a chanté.</hi></speaker>
            <l n="986" xml:id="l986">Taisez-vous, Dom Carlos, vôtre chant m’étourdit ;</l>
            <l n="987" xml:id="l987">Mais que fais-je, où m’emporte un trop juste dépit ;</l>
            <l n="988" xml:id="l988">Ils s’aiment, je ne puis l’ignorer. O vengeance,</l>
            <l n="989" xml:id="l989">Prête-moy tous tes traits, pour punir cette offence.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="990" xml:id="l990">Il paroît que ces Chants qui me semblent si doux,</l>
            <l n="991" xml:id="l991">Madame, ne font pas le même effet sur vous.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="992" xml:id="l992">Je ne sçay par quel Air leurs voix ont sçû vous plaire,</l>
            <l n="993" xml:id="l993">Je crains d’en pénétrer l’injurieux <ref target="#mystere">mystere*</ref> :</l>
            <l n="994" xml:id="l994">Et si je m’en croyois… Mais il vaut mieux sortir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="995" xml:id="l995">Et qui peut vous avoir causé ce déplaisir ?</l>
            <l n="996" xml:id="l996" part="I">Madame, <ref target="#expliquer">expliquez*</ref>-vous.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-7" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">J’aurois peur d’en trop dire,</l>
            <l n="997" xml:id="l997">Je ne suis pas assez à moy ; je me retire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="998" xml:id="l998">Je ne souffriray point que vous quittiez ces lieux</l>
            <l n="999" xml:id="l999">Sans que vôtre <ref target="#courroux">courroux*</ref> s’<ref target="#expliquer">explique*</ref>, &amp; qu’à vos yeux</l>
            <l n="1000" xml:id="l1000">Un châtiment soudain n’étouffe vôtre haine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-9" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1001" xml:id="l1001">Non, vous souffririez trop, je n’en vaux pas la peine ;</l>
            <l n="1002" xml:id="l1002">A l’affront qui m’est fait vous avez trop de part.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-10" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1003" xml:id="l1003" part="I">Je jure…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-11" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">A ces sermens prononcez au hazard,</l>
            <l n="1004" xml:id="l1004">Pour peu que vous vouliez que je donne croyance,</l>
            <l n="1005" xml:id="l1005">Il faut pour satisfaire à ma juste vengeance,</l>
            <l n="1006" xml:id="l1006">Que vous chargiez de Fers, sans aucune pitié,</l>
            <l n="1007" xml:id="l1007">Ces Esclaves <ref target="#objet">Objets*</ref> de mon inimitié,</l>
            <l n="1008" xml:id="l1008">Qu’en des lieux séparez, accablez de misere,</l>
            <l n="1009" xml:id="l1009">Ils sentent le malheur de m’avoir sçû déplaire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-12" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1010" xml:id="l1010" part="I">Madame…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III09-13" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Obéïssez, remplissez mes souhaits</l>
            <l n="1011" xml:id="l1011">Ou bien résolvez-vous à ne me voir jamais.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="III10">
          <head>SCENE X.</head>
          <stage>FATIMAN, JULIE, CARLOS, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="III10-1" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="1012" xml:id="l1012">Seigneur de ses <ref target="#fureur">fureurs*</ref> sauvez nôtre innocence.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="III10-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1013" xml:id="l1013">Je veux voir jusqu’où peut aller son insolence,</l>
            <l n="1014" xml:id="l1014">Et luy dresser un piége adroit, ingénieux :</l>
            <l n="1015" xml:id="l1015">Mais allons-en parler ailleurs que dans ces lieux,</l>
            <l n="1016" xml:id="l1016">Et toy cours la trouver, Zaïre, va luy dire</l>
            <l n="1017" xml:id="l1017">Que je vais accomplir tout ce qu’elle desire.</l>
            <p rend="center">Fin du troisiéme Acte.</p>
          </sp>
        </div>
      </div>
      <div xml:id="IV" type="act">
        <head>ACTE IV.</head>
        <div type="scene" xml:id="IV01">
          <head>SCENE PREMIERE.</head>
          <stage>CELIME, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="IV01-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1018" xml:id="l1018">Zaïre, je vous ay confié mon secret,</l>
            <l n="1019" xml:id="l1019">J’ay crû ne le pouvoir<note place="bottom">Comprendre : « ne le pouvoir confier »</note> dans un sein plus discret ;</l>
            <l n="1020" xml:id="l1020">Si je vous vois répondre à cette confiance,</l>
            <l n="1021" xml:id="l1021">Zaïre, attendez tout de ma reconnoissance ;</l>
            <l n="1022" xml:id="l1022">Mais si de me trahir vous cherchez le moment,</l>
            <l n="1023" xml:id="l1023">Zaïre, craignez tout de mon <ref target="#ressentiment">ressentiment*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-2" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1024" xml:id="l1024">J’entre dans vos secrets, Madame, sans contrainte,</l>
            <l n="1025" xml:id="l1025">Et de vôtre <ref target="#courroux">courroux*</ref> je ne crains point l’atteinte,</l>
            <l n="1026" xml:id="l1026">Si la peur maintenant se renferme en mon sein,</l>
            <l n="1027" xml:id="l1027">Si je tremble, ce n’est que pour vôtre dessein.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1028" xml:id="l1028">L’Amour qui l’entreprend guidera l’entreprise.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-4" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1029" xml:id="l1029">Et c’est de cet Amour, que mon <ref target="#ame">ame*</ref> est surprise,</l>
            <l n="1030" xml:id="l1030">Madame, est-il bien vray que vous aimiez Carlos ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1031" xml:id="l1031">Si je l’aime ! l’ingrat, que trop pour mon <ref target="#repos">repos*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-6" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1032" xml:id="l1032">Emprisonné, Madame, &amp; trahy par vous-même,</l>
            <l n="1033" xml:id="l1033">Vous le persecutez, est-ce là comme on aime ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-7" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1034" xml:id="l1034">As-tu vû ses <ref target="#tourment">tourmens*</ref>, sçais-tu son desespoir ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-8" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1035" xml:id="l1035">Dans l’abime profond du cachot le plus noir,</l>
            <l n="1036" xml:id="l1036">Mains, &amp; piés enchaînez, éloigné de Julie,</l>
            <l n="1037" xml:id="l1037" part="I">Il faut voir ses clameurs.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-9" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Que mon <ref target="#ame">ame*</ref> est <ref target="#ravir">ravie*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-10" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1038" xml:id="l1038" part="I">Je ne vous comprens pas.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-11" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Dans ses cruels <ref target="#ennui">ennuis*</ref></l>
            <l n="1039" xml:id="l1039">Il reconnoît sa faute, il voit ce que je puis,</l>
            <l n="1040" xml:id="l1040">Plus de son noir Cachot la rigueur est extrême,</l>
            <l n="1041" xml:id="l1041">Plus il sent qu’il n’en peut sortir que par moy-même,</l>
            <l n="1042" xml:id="l1042">Et de sa liberté redevable à mes <ref target="#soin1">soins*</ref>,</l>
            <l n="1043" xml:id="l1043">Il m’aimera, peut-être, il le feindra du moins.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-12" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1044" xml:id="l1044">Vous l’allez donc remettre en sa <ref target="#faveur">faveur*</ref> premiere ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-13" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1045" xml:id="l1045">Ouy, Fatiman rompra ses Fers à ma priere.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-14" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1046" xml:id="l1046">Mais ne craignez-vous point, l’en <ref target="#presser">pressant*</ref> trop souvent,</l>
            <l n="1047" xml:id="l1047">Que Fatiman ne sorte enfin d’aveuglement ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-15" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1048" xml:id="l1048">Fatiman veut ma main, il s’empresse à me plaire.</l>
            <l n="1049" xml:id="l1049">Il m’aime, j’en feray ce que j’en voudray faire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV01-16" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1050" xml:id="l1050" part="I">Il vient.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="IV02">
          <head>SCENE II.</head>
          <stage>FATIMAN, CELIME, ZAIRE, suite.</stage>
          <sp xml:id="IV02-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">He bien, Madame, est-ce aujourd’huy le jour</l>
            <l n="1051" xml:id="l1051">Où je verray l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> couronner mon amour :</l>
            <l n="1052" xml:id="l1052">Mon <ref target="#coeur">cœur*</ref> impatient d’en celebrer la Fête,</l>
            <l n="1053" xml:id="l1053">Remplit tous les devoirs dûs à vôtre conquête.</l>
            <l n="1054" xml:id="l1054">Allons, Madame, aux yeux d’Alger &amp; du <ref target="#divan">Divan*</ref><note place="bottom">« Terme de Relations. Lieu où on rend la justice, où on tient le Conseil dans les pays Orientaux. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note></l>
            <l n="1055" xml:id="l1055">Joindre à jamais Celime à l’heureux Fatiman.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-2" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1056" xml:id="l1056">Avant que d’achever cette Cerémonie,</l>
            <l n="1057" xml:id="l1057">Guerissez, s’il vous plaît, mes soupçons sur Julie.</l>
            <l n="1058" xml:id="l1058">Avez-vous accomply toutes mes volontez ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-3" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1059" xml:id="l1059">Vos ordres sont déja, Madame, executez.</l>
            <l n="1060" xml:id="l1060">Dans un cachot obscur gémissant sous la chaîne,</l>
            <l n="1061" xml:id="l1061">De vous avoir déplû, Carlos souffre la peine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-4" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1062" xml:id="l1062">Et Julie ? Avez-vous pas<note place="bottom">« Le sens négatif des adverbes <hi rend="i">pas</hi> ou <hi rend="i">point</hi> s’accentua peu à peu, si bien qu’ils finirent par exprimer à eux seuls la négation. Ils figurent ainsi : [...] dans l’<hi rend="i">interrogation directe</hi>, emploi très fréquent au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle et qui se rencontre encore chez les poètes de notre époque » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 252-253.</note> la même rigueur ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-5" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1063" xml:id="l1063" part="I">Non.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-6" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="M">Non !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-7" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Je l’avouëray, touché de son malheur,</l>
            <l n="1064" xml:id="l1064">Des graces, des beautez, comme vous le modele,</l>
            <l n="1065" xml:id="l1065">J’ay respecté les droits, de vôtre Sexe<note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">sexe</hi> renvoie toujours au beau sexe, c’est à dire à la femme. Il n’est pas marqué et s’emploie à tous les niveaux de la langue. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 35.</note> en elle,</l>
            <l n="1066" xml:id="l1066" part="I">Elle est libre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-8" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Ah ! voilà mes soupçons confirmez,</l>
            <l n="1067" xml:id="l1067">Vôtre <ref target="#coeur">cœur*</ref> m’est connu, perfide, vous l’aimez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-9" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1068" xml:id="l1068" part="I">Je l’aime !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-10" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="M">Vous.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-11" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Moy !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-12" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Vous. Enfin ma jalousie</l>
            <l n="1069" xml:id="l1069">Pour être moderée est trop bien éclaircie.</l>
            <l n="1070" xml:id="l1070">De ces Chants concertez je vois la verité.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-13" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1071" xml:id="l1071">Eh… quelle erreur, Madame, &amp; quelle pauvreté !</l>
            <l n="1072" xml:id="l1072">A mon Accusateur j’avois dequoy répondre ;</l>
            <l n="1073" xml:id="l1073">Mais mon <ref target="#coeur">cœur*</ref> l’entreprend, &amp; je veux vous confondre,</l>
            <l n="1074" xml:id="l1074">Pour gagner vôtre <ref target="#coeur">cœur*</ref>, pour avoir vôtre main,</l>
            <l n="1075" xml:id="l1075">Pour remplir vos desirs, que faut-il faire, enfin ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-14" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1076" xml:id="l1076">Non, non, je ne veux pas que pour moy l’on se <ref target="#gener">gêne*</ref>,</l>
            <l n="1077" xml:id="l1077">Et l’execution vous feroit trop de peine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-15" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1078" xml:id="l1078">Non, non, pour satisfaire à ce que vous voulez ;</l>
            <l n="1079" xml:id="l1079">Je ne conçois plus rien d’impossible, Parlez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-16" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1080" xml:id="l1080">Il faut à son Epoux que vous rendiez Julie,</l>
            <l n="1081" xml:id="l1081">La bannir de vos yeux pour toute vôtre vie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-17" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1082" xml:id="l1082">Hé bien ! tantôt, Madame, à vos yeux, devant vous,</l>
            <l n="1083" xml:id="l1083">Je remettray Julie aux mains de son Epoux,</l>
            <l n="1084" xml:id="l1084">Et je vay de ce pas répondre à vôtre attente.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-18" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1085" xml:id="l1085">Ce n’est pas tout, encor, pour me rendre contente,</l>
            <l n="1086" xml:id="l1086">Et me débarrasser d’un visage odieux,</l>
            <l n="1087" xml:id="l1087">Que pour jamais Carlos abandonne ces lieux,</l>
            <l n="1088" xml:id="l1088">Et qu’à peine sorty des Fers de l’esclavage,</l>
            <l n="1089" xml:id="l1089">Ce soir, avec la nuit, il quitte ce rivage.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-19" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1090" xml:id="l1090" part="I">Vous serez obeïe.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-20" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Avant que de partir</l>
            <l n="1091" xml:id="l1091">Que je luy parle, il faut, &amp; c’est tout mon desir,</l>
            <l n="1092" xml:id="l1092">Qu’il connoisse pour luy le fond de ma pensée,</l>
            <l n="1093" xml:id="l1093">Pour ne pas voir ma haine, il m’a trop offensée.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-21" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1094" xml:id="l1094">Que l’on fasse venir l’Esclave à ses genoux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-22" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1095" xml:id="l1095">Demain vous connoîtrez ce que je sens pour vous.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-23" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN <hi rend="i">à part en s’en allant</hi>.</speaker>
            <l n="1096" xml:id="l1096">Elle embrasse un dessein que je ne puis comprendre,</l>
            <l n="1097" xml:id="l1097">Observons-la de prés, cachons-nous pour l’entendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-24" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1098" xml:id="l1098">L’ay-je amené, Zaïre, au point où j’ay voulu ?</l>
            <l n="1099" xml:id="l1099">Je me sers assez bien du pouvoir absolu.</l>
            <l n="1100" xml:id="l1100">Dans les rusez détours d’une Œuvre mercenaire,</l>
            <l n="1101" xml:id="l1101">Fatiman est bon Turc, grand pilleur, franc Corsaire,</l>
            <l n="1102" xml:id="l1102">Mais dans ces tours d’esprit aux <ref target="#amant">Amans*</ref> destinez,</l>
            <l n="1103" xml:id="l1103">C’est un Homme à ne voir pas<note place="bottom">« Vaugelas (II, 126) conseille de placer la négation <hi rend="i">ne pas</hi> devant l’infinitif, sans intercaler ce dernier entre <hi rend="i">ne</hi> et <hi rend="i">pas</hi>, comme on le faisait au XVI<hi rend="sup">e</hi> siècle et généralement encore au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, bien que l’emploi moderne eût déjà commencé à se faire jour. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 426.</note> plus loin que son nez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-25" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1104" xml:id="l1104">Il est vray ; mais, Madame, ou j’ay peu de lumiere,</l>
            <l n="1105" xml:id="l1105">Ou je ne comprens pas ce que vous voulez faire.</l>
            <l n="1106" xml:id="l1106">L’infortuné Carlos est aimable à vos yeux,</l>
            <l n="1107" xml:id="l1107">Et vous voulez ce soir qu’il parte de ces lieux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-26" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1108" xml:id="l1108">Ouy ; mais de mes desseins acheve de t’instruire,</l>
            <l n="1109" xml:id="l1109">Toutes deux avec luy nous partirons, Zaïre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-27" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1110" xml:id="l1110" part="I">Nous !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-28" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">J’ay tout préparé, pour ce <ref target="#prochain">prochain*</ref> départ,</l>
            <l n="1111" xml:id="l1111">Un Bâtiment Anglois est gagné de ma part,</l>
            <l n="1112" xml:id="l1112">Mon <ref target="#bien">bien*</ref> est en Argent comptant ; dans ma retraite</l>
            <l n="1113" xml:id="l1113">Je ne laisseray rien icy que je regrette.</l>
            <l n="1114" xml:id="l1114">Il falloit pour sortir facilement du Port,</l>
            <l n="1115" xml:id="l1115">Du Seigneur Fatiman avoir un Passeport,</l>
            <l n="1116" xml:id="l1116">Sa bonté me l’accorde, &amp; par son entremise,</l>
            <l n="1117" xml:id="l1117">Demain de sa <ref target="#tendresse">tendresse*</ref> il verra la sottise.</l>
            <l n="1118" xml:id="l1118" part="I">Tu peux t’en assurer…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-29" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Et malgré ces apprêts,</l>
            <l n="1119" xml:id="l1119">Si Carlos est toûjours rebelle à vos souhaits ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-30" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1120" xml:id="l1120">A me plaire, Zaïre, il mettra son <ref target="#attache">attache*</ref>,</l>
            <l n="1121" xml:id="l1121">Il sçait ce qu’il en coûte, alors que l’on me fâche,</l>
            <l n="1122" xml:id="l1122">Et puis quand seul à seul, nous nous verrons sur Mer,</l>
            <l n="1123" xml:id="l1123">Quand il se verra loin de qui l’a sçû <ref target="#charmer">charmer*</ref>,</l>
            <l n="1124" xml:id="l1124">Faite comme je suis, il n’est pas impossible</l>
            <l n="1125" xml:id="l1125">Que son <ref target="#coeur">cœur*</ref> à mes <ref target="#feu">feux*</ref> ne devienne <ref target="#sensible">sensible*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV02-31" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1126" xml:id="l1126" part="I">Le voilà.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="IV03">
          <head>SCENE III.</head>
          <stage>ZAIRE, CELIME, CARLOS, FATIMAN caché.</stage>
          <sp xml:id="IV03-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Je le plains des maux qu’il a soufferts,</l>
            <l n="1127" xml:id="l1127">Zaïre approchez-vous, que l’on ôte ses Fers.</l>
            <l n="1128" xml:id="l1128">Qu’on me laisse. Restez, vous. Hé bien ! téméraire,</l>
            <l n="1129" xml:id="l1129">Tu vois quel est le fruit de m’avoir sçû déplaire ;</l>
            <l n="1130" xml:id="l1130">Je suis absolument maîtresse de ton Sort :</l>
            <l n="1131" xml:id="l1131">La plus aimable vie, ou la plus dure mort</l>
            <l n="1132" xml:id="l1132" part="I">Sont à ton choix.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV03-2" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="M">Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV03-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">En l’<ref target="#estat">état*</ref> déplorable,</l>
            <l n="1133" xml:id="l1133">Où Julie a réduit ton <ref target="#destin">destin*</ref> miserable,</l>
            <l n="1134" xml:id="l1134">S’arracher d’un <ref target="#objet">Objet*</ref> qu’on aime tendrement,</l>
            <l n="1135" xml:id="l1135">N’est pas, je le sçay trop, l’ouvrage d’un moment ;</l>
            <l n="1136" xml:id="l1136">Aussi, je laisse au temps à<note place="bottom">« <hi rend="i">A</hi> permet de construire le complément d’objet du verbe, là où le français moderne utilise d’autres constructions. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 2, p. 100. « <hi rend="i">A</hi> devant un infinitif marque le but comme <hi rend="i">pour</hi> dans la langue actuelle. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 231.</note> faire cet office ;</l>
            <l n="1137" xml:id="l1137">Mes <ref target="#soin1">soins*</ref> te forceront à me rendre justice.</l>
            <l n="1138" xml:id="l1138">Pour gage d’un Amour dont mon <ref target="#coeur">cœur*</ref> est garant,</l>
            <l n="1139" xml:id="l1139">Accepte ces essais de ma <ref target="#tendresse">tendresse*</ref>, prend.</l>
            <l n="1140" xml:id="l1140">Prens, dis je, je te laisse, écoute, &amp; crois Zaïre,</l>
            <l n="1141" xml:id="l1141">Elle connoît pour toy quel mouvement m’inspire.</l>
            <l n="1142" xml:id="l1142">Fais, voyant ce que peut mon <ref target="#courroux">courroux*</ref> dangereux,</l>
            <l n="1143" xml:id="l1143">Ce qu’elle te dira, si tu veux vivre heureux.</l>
            <l n="1144" xml:id="l1144" part="I">Adieu.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="IV04">
          <head>SCENE IV.</head>
          <stage>CARLOS, ZAIRE, FATIMAN.</stage>
          <sp xml:id="IV04-1" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l part="F">Ciel ! Je… Mais vous à ce qu’elle souhaite,</l>
            <l n="1145" xml:id="l1145" part="I">Prêteriez-vous les mains ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV04-2" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">M’en garde le Prophete.</l>
            <l n="1146" xml:id="l1146" part="I">Allons chez Fatiman luy…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV04-3" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">J’ay tout entendu</l>
            <l n="1147" xml:id="l1147">Au <ref target="#cabinet">Cabinet*</ref> <ref target="#prochain">prochain*</ref> ; <ref target="#estonner">étonné*</ref>, confondu,</l>
            <l n="1148" xml:id="l1148">De voir à quel excés elle poussoit l’outrage,</l>
            <l n="1149" xml:id="l1149">Indigné de l’affront, inspiré par la rage,</l>
            <l n="1150" xml:id="l1150">Je me suis vû tenté de la perdre à vos yeux,</l>
            <l n="1151" xml:id="l1151">Et je n’ay differé que pour la punir mieux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV04-4" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1152" xml:id="l1152">Je crois que d’un <ref target="#amant">Amant*</ref> la <ref target="#fureur">fureur*</ref> est extrême,</l>
            <l n="1153" xml:id="l1153">Quand il se voit trahy par la Dame qu’il aime.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV04-5" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1154" xml:id="l1154">Je l’aime ! Environné de <ref target="#soin2">soins*</ref>, sur mon <ref target="#retour">retour*</ref><note place="bottom">« On dit, <hi rend="i">Estre sur le retour</hi>, pour dire, Commencer à deschoir, à viellir, à decliner, à perdre de sa vigueur, de son esclat. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="1155" xml:id="l1155">Né dans le sein des Flots, suis-je fait pour l’Amour ?</l>
            <l n="1156" xml:id="l1156">Son <ref target="#bien">bien*</ref>, plus que ses yeux, me la rendent<note place="bottom">Le « bien », sujet morphologiquement singulier, dénote cependant une pluralité sémantique qui explique l’accord du verbe. « Au XVI<hi rend="sup">e</hi> siècle la syllepse du nombre est usuelle (voir Gougenheim, 1974, p. 250 ; <hi rend="i">HLF</hi>, II, 438-440). Au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, l’accord en nombre va continuer à jouir d’une grande liberté, tout en étant un des points les plus débattus par les grammairiens... » <hi rend="sc">N. Fournier</hi>, <hi rend="i">Grammaire du français classique</hi>, Paris, Belin, 1998, p. 25.</note> aimable.</l>
            <l n="1157" xml:id="l1157">Et je benis du Ciel le moment favorable,</l>
            <l n="1158" xml:id="l1158">Qui me montrant l’abîme où j’allois me plonger,</l>
            <l n="1159" xml:id="l1159">Me fournit les moyens encor de me vanger.</l>
            <l n="1160" xml:id="l1160">Voyons quel est l’essay de ses galanteries.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV04-6" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="1161" xml:id="l1161" part="I">Le voilà.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV04-7" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Ce Coffret. Comment, mes Pierreries !</l>
            <l n="1162" xml:id="l1162">L’usage qu’elle en fait m’inspire le dessein,</l>
            <l n="1163" xml:id="l1163">D’inventer des <ref target="#tourment">tourmens*</ref> qui perceront son sein.</l>
            <l n="1164" xml:id="l1164">Va la trouver, Zaïre, &amp; pour <ref target="#flatter2">flater*</ref> son <ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="1165" xml:id="l1165">Feins-luy que son <ref target="#amant">Amant*</ref> peut répondre à sa <ref target="#flamme">flâme*</ref>,</l>
            <l n="1166" xml:id="l1166">Qu’à la suivre déja tu l’as vû <ref target="#balancer">balancer*</ref>,</l>
            <l n="1167" xml:id="l1167">Le reste me regarde, &amp; je vais y penser.</l>
            <l n="1168" xml:id="l1168" part="I">Nous… Qu’est-ce ?<pb n="P"/></l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="IV05">
          <head>SCENE V.</head>
          <stage>TOMIRE, FATIMAN, ZAIRE, CARLOS.</stage>
          <sp xml:id="IV05-1" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Je venois, Seigneur, l’ame contente</l>
            <l n="1169" xml:id="l1169">Raconter à mon Maître une Histoire plaisante :</l>
            <l n="1170" xml:id="l1170" part="I">Mais…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV05-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Dis-moy ce que c’est.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV05-3" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">L’illustre D. Brusquin,</l>
            <l n="1171" xml:id="l1171">S’en alloit vers le Port fort outré de <ref target="#chagrin">chagrin*</ref> :</l>
            <l n="1172" xml:id="l1172">Donnant les Turcs au Diable, &amp; résolu sur l’heure</l>
            <l n="1173" xml:id="l1173">De se remettre en Mer, pour changer de demeure,</l>
            <l n="1174" xml:id="l1174">Lors que huit ou dix Turcs luy couppant le chemin,</l>
            <l n="1175" xml:id="l1175">Qu’il prenoit pour se voir maître de son <ref target="#destin">destin*</ref>,</l>
            <l n="1176" xml:id="l1176">En se moquant de luy, le traitant d’Excellence,</l>
            <l n="1177" xml:id="l1177">Ont fait en l’abordant chacun la reverence ;</l>
            <l n="1178" xml:id="l1178">Puis aprés un d’entr’eux faisant l’Ambassadeur,</l>
            <l n="1179" xml:id="l1179">L’a salüé fort bas, luy disant, Monseigneur,</l>
            <l n="1180" xml:id="l1180">Sçachant que de Julie un bonheur tres-<ref target="#insigne">insigne*</ref></l>
            <l n="1181" xml:id="l1181">Vous a fait, cy-devant le Mary tres-indigne,</l>
            <l n="1182" xml:id="l1182">Fatiman préposé pour <ref target="#pourvoir">pourvoir*</ref> aux abus,</l>
            <l n="1183" xml:id="l1183">Que des gens mal sensez commettent là-dessus ;</l>
            <l n="1184" xml:id="l1184">Pour vous démarier de bonne <ref target="#intelligence">intelligence</ref>,</l>
            <l n="1185" xml:id="l1185">Et la remarier, vous prie, avec instance,</l>
            <l n="1186" xml:id="l1186">De vouloir, terminant la chose avec éclat,</l>
            <l n="1187" xml:id="l1187">Assister à la Nôce, &amp; signer le Contrat.</l>
            <l n="1188" xml:id="l1188">Moy signer au Contrat ! Traître, qu’il aille au Diable ,</l>
            <l n="1189" xml:id="l1189">A-t’il dit, suis je icy pour luy servir de Fable ?</l>
            <l n="1190" xml:id="l1190">Qu’on me laisse partir, &amp; que ce <ref target="#suborneur">Suborneur*</ref>,</l>
            <l n="1191" xml:id="l1191">Se contente d’avoir… Mais, enfin, Monseigneur,</l>
            <l n="1192" xml:id="l1192">A dit d’un ton soûmis l’autre, vôtre Excellence,</l>
            <l n="1193" xml:id="l1193">Sçait que Fatiman prie, &amp; qu’un refus l’offence,</l>
            <l n="1194" xml:id="l1194">Et si de ce plaisir vous allez le priver,</l>
            <l n="1195" xml:id="l1195">Il aura du regret…. puisse-t’il en <ref target="#crever">crever*</ref>,</l>
            <l n="1196" xml:id="l1196">Le Scélérat qu’il est, a dit l’autre en colere.</l>
            <l n="1197" xml:id="l1197">Puisqu’il ne vous plaît pas, Monseigneur, d’en rien faire,</l>
            <l n="1198" xml:id="l1198">A dit le Turc, cherchant dessous son <ref target="#casaque">Casaquin*</ref><note place="bottom">« Petit casaque<hi rend="sup"></hi>. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
            <l n="1199" xml:id="l1199">Respectueusement trois quartiers de <ref target="#gourdin">Gourdin*</ref></l>
            <l n="1200" xml:id="l1200">Dont il s’étoit muny ; Voicy d’une racine,</l>
            <l n="1201" xml:id="l1201">Qui met à la raison l’ame la plus <ref target="#mutin">mutine*</ref>,</l>
            <l n="1202" xml:id="l1202">Vous en ferez l’essay, s’il vous plaît. A ces mots</l>
            <l n="1203" xml:id="l1203">Le Drôle de vingt coups a chamarré son dos.</l>
            <l n="1204" xml:id="l1204">Ah ! quartier, a-t’il dit, voulez-vous que je meure ?</l>
            <l n="1205" xml:id="l1205">Je suis prêt d’aller voir Fatiman tout à l’heure ;</l>
            <l n="1206" xml:id="l1206">Ne pouvant de vos coups me sauver qu’à ce prix.</l>
            <l n="1207" xml:id="l1207">Là-dessus ils ont pris le chemin du Logis,</l>
            <l n="1208" xml:id="l1208">Il demandoit venant, le desespoir dans l’ame,</l>
            <l n="1209" xml:id="l1209">Si l’on n’est pas content de luy voler sa Femme,</l>
            <l n="1210" xml:id="l1210">D’où vient que, malgré luy, l’on le rameine icy,</l>
            <l n="1211" xml:id="l1211">Et si ce Fatiman veut l’épouser aussi ?</l>
            <l n="1212" xml:id="l1212" part="I">On l’ameine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV05-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN <hi rend="i">à Carlos</hi>.</speaker>
            <l part="F">A ses yeux tu ne dois point paroître,</l>
            <l n="1213" xml:id="l1213">Que quand il sera tems de te faire connoître,</l>
            <l n="1214" xml:id="l1214" part="I">Laisse-moy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV05-5" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Le voilà plaisamment consterné.<pb n="Pij"/></l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="IV06">
          <head>SCENE VI.</head>
          <stage>DOM BRUSQUIN, FATIMAN, STAMORAT, suite.</stage>
          <sp xml:id="IV06-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1215" xml:id="l1215">Hé bien ! me trouvez-vous suffisamment berné ?</l>
            <l n="1216" xml:id="l1216">Ah Traitres ! à quoy bon avec vos Excellences</l>
            <l n="1217" xml:id="l1217">En me roüant de coups, toutes ces revérences ?</l>
            <l n="1218" xml:id="l1218">Non jamais un mortel, à parler Franchement</l>
            <l n="1219" xml:id="l1219">Ne s’est vû mieux battu, ny plus civilement.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-2" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1220" xml:id="l1220">Vous voyez Fatiman, vîte, la revérence,</l>
            <l n="1221" xml:id="l1221" part="I">A son aspect : Bas, bas, plus bas.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Quelle arrogance !</l>
            <l n="1222" xml:id="l1222">Le Traître de mes coups, rit, entre cuir &amp; chair<note place="bottom">« On dit figurément, Rire entre <hi rend="i">cuir</hi> &amp; chair, Jure entre <hi rend="i">cuir</hi> &amp; chair, pour dire, Rire, jurer en soy-même, sans en faire rien paroistre au dehors. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>,</l>
            <l n="1223" xml:id="l1223">Et pour comble de maux je n’ose m’en fâcher.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-4" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1224" xml:id="l1224">Le <ref target="#brave">brave*</ref> D. Brusquin de civile maniere,</l>
            <l n="1225" xml:id="l1225">Devant tes yeux, Seigneur, paroît à ta priere.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-5" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN <hi rend="i">à D. Brusquin</hi>.</speaker>
            <l n="1226" xml:id="l1226">Je vous suis obligé d’avoir tant eû d’égard</l>
            <l n="1227" xml:id="l1227">Pour les gens qui vous ont salüé de ma part.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-6" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1228" xml:id="l1228">Brisons là, ce n’est pas le fruit de leur Harangue ;</l>
            <l n="1229" xml:id="l1229">Et leurs coups de bâton ont plus fait que leur langue,</l>
            <l n="1230" xml:id="l1230">Ils m’ont roüé de coups, &amp; n’auroient pas <ref target="#cesse">cessé*</ref>…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-7" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1231" xml:id="l1231">Ils ont tort. Mais, enfin, oublions le passé.</l>
            <l n="1232" xml:id="l1232">Cela n’est rien, il faut qu’une amitié sincere…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-8" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1233" xml:id="l1233">Quoy que mal-aisément tout cecy se digére,</l>
            <l n="1234" xml:id="l1234">Puis qu’on fait à mon dos une necessité,</l>
            <l n="1235" xml:id="l1235">De vous rendre aujourd’huy le maître du Traité ;</l>
            <l n="1236" xml:id="l1236">Soyez-le, j’y consens, les beaux yeux de ma Femme</l>
            <l n="1237" xml:id="l1237">Ont mis, je le vois bien, du désordre en vôtre <ref target="#ame">ame*</ref>.</l>
            <l n="1238" xml:id="l1238">Vous voulez la garder, hé bien ! soit, gardez-la,</l>
            <l n="1239" xml:id="l1239">Faites-en… faites en tout ce qu’il vous plaira.</l>
            <l n="1240" xml:id="l1240">Vous n’y manquerez pas ; mais que l’on me renvoye,</l>
            <l n="1241" xml:id="l1241">Qu’on ne me rende point témoin de vôtre joye,</l>
            <l n="1242" xml:id="l1242">Je n’auray, sans mes yeux, que de trop bons Témoins ;</l>
            <l n="1243" xml:id="l1243">....................................................................................<note place="bottom">L’éditeur de 1739 propose le vers suivant : « Et pour ne le pas voir, il n’en sera pas moins. » Concernant l’ordre des mots dans la première proposition, « lorsqu’un pronom personnel construit avec <hi rend="i">ne pas</hi> est préposé à l’infinitif, on place les mots dans l’ordre suivant : 1° <hi rend="i">ne</hi>, 2° le pronom, 3° l’infinitif, 4° <hi rend="i">pas</hi> (<hi rend="i">pour ne vous ennuyer pas</hi>) et plus souvent encore : 1° <hi rend="i">ne</hi>, 2° le pronom, 3° <hi rend="i">pas</hi>, 4° l’infinitif (<hi rend="i">pour ne vous pas ennuyer</hi>). » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 426.</note></l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-9" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1244" xml:id="l1244">Hé bien ! puis que ton <ref target="#coeur">cœur*</ref> a tant de répugnance</l>
            <l n="1245" xml:id="l1245">A souffrir que l’<ref target="#hymen">Hymen*</ref> se fasse en ta présence,</l>
            <l n="1246" xml:id="l1246">Je veux bien t’obliger, &amp; t’accorder ce point ;</l>
            <l n="1247" xml:id="l1247">Je te feray partir, tu ne le verras point,</l>
            <l n="1248" xml:id="l1248" part="I">Mais à condition…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-10" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Quel est ce nouveau Pacte ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-11" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1249" xml:id="l1249">Qu’avant que de partir, on mettra dans un Acte,</l>
            <l n="1250" xml:id="l1250">Que te trouvant indigne, &amp; n’étant pas le <ref target="#fait">fait*</ref></l>
            <l n="1251" xml:id="l1251">De Julie, &amp; voyant qu’un <ref target="#hymen">Hymen*</ref> sans effet,</l>
            <l n="1252" xml:id="l1252">Te fit contre son gré l’Epoux de cette Belle,</l>
            <l n="1253" xml:id="l1253">Tu t’es démis du droit qu’on te donna sur elle.</l>
            <l n="1254" xml:id="l1254">Que volontairement vous consentez tous deux,</l>
            <l n="1255" xml:id="l1255">Que d’un pareil <ref target="#hymen">Hymen*</ref> quelqu’un brise les nœuds :</l>
            <l n="1256" xml:id="l1256">Que Julie en cecy consentit la derniere ;</l>
            <l n="1257" xml:id="l1257">Que c’est pour t’obliger, &amp; même à ta priere :</l>
            <l n="1258" xml:id="l1258">Qu’à cet effet pour toy sa bonté se résout,</l>
            <l n="1259" xml:id="l1259" part="I">Que même à tes dépens.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-12" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Le Papier souffre tout,</l>
            <l n="1260" xml:id="l1260">Que l’on y mette tout ce que l’on voudra mettre,</l>
            <l n="1261" xml:id="l1261">Pourrois-je l’empêcher ? Je veux bien m’en remettre</l>
            <l n="1262" xml:id="l1262">Sur les <ref target="#soin1">soins*</ref> que je crois que vous-même en aurez.<pb n="Piij"/></l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-13" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1263" xml:id="l1263">Il faudra le signer, &amp; puis vous partirez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-14" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1264" xml:id="l1264" part="I">Moy le signer.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-15" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Ouy toy, la chose étant écrite,</l>
            <l n="1265" xml:id="l1265" part="I">Il faudra bien signer.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-16" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ah le <ref target="#chien">chien*</ref> d’hypocrite !</l>
            <l n="1266" xml:id="l1266">Quoy, vouloir qu’en signant un pareil <ref target="#concordat">Concordat*</ref>,</l>
            <l n="1267" xml:id="l1267">Je passe pour un Sot sur mon <ref target="#certificat">Certificat*</ref> ;</l>
            <l n="1268" xml:id="l1268">Et que pour ma Moitié par écrit je <ref target="#convenir">convienne*</ref>,</l>
            <l n="1269" xml:id="l1269">Que je consens qu’un Turc en fasse icy la sienne :</l>
            <l n="1270" xml:id="l1270">Dûssay-je être témoin de tout ce qu’on voudra,</l>
            <l n="1271" xml:id="l1271">Je ne signeray rien de ce qu’on y mettra.</l>
            <l n="1272" xml:id="l1272">Ouy, je vous mets au pis<note place="bottom">« On dit aussi, <hi rend="i">Mettre quelqu’un au pis</hi> : &amp; cela se dit par maniere de deffi, &amp; pour marquer à un homme que quelque mauvaise volonté qu’il ait, on ne le craint point. <hi rend="i">Je vous mets au pis, à pis faire</hi>. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>, vous avez beau me dire,</l>
            <l n="1273" xml:id="l1273">Pour signer contre moy, je ne sçay point écrire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-17" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1274" xml:id="l1274">C’est t’emporter en vain, tu n’y veux pas signer ;</l>
            <l n="1275" xml:id="l1275">Hé bien ! soit, je consens à ne te point <ref target="#gener">gêner*</ref>.</l>
            <l n="1276" xml:id="l1276">Mais comme tout est prêt pour la Cérémonie,</l>
            <l n="1277" xml:id="l1277">On ne <ref target="#laisser">laissera*</ref> pas de marier Julie,</l>
            <l n="1278" xml:id="l1278">Tu verras pour cela ce qui s’est <ref target="#concerter">concerté*</ref>.</l>
            <l n="1279" xml:id="l1279">Et comme je luy veux donner la liberté,</l>
            <l n="1280" xml:id="l1280">Il faudra te résoudre, en souffrant qu’il se fasse,</l>
            <l n="1281" xml:id="l1281">A demeurer Esclave en échange à sa place ;</l>
            <l n="1282" xml:id="l1282">Jusqu’à ce que la mort finissant tes regrets,</l>
            <l n="1283" xml:id="l1283">Ait pris l’un de vous d’eux pour laisser l’autre en paix,</l>
            <l n="1284" xml:id="l1284" part="I">Quiconque restera…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-18" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Moy Captif ! &amp; le vôtre !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-19" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1285" xml:id="l1285">Ira porter chez luy les nouvelles de l’autre.</l>
            <l n="1286" xml:id="l1286">Tu feras cependant quelque voyage en Mer,</l>
            <l n="1287" xml:id="l1287">Par divertissement, pour t’apprendre à ramer.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-20" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1288" xml:id="l1288" part="I">Qui, moy, ramer !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-21" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="M">Toy-même.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-22" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Ah Ciel ! quel coup de foudre !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-23" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1289" xml:id="l1289">Souviens-toy que tu n’as qu’une heure à te résoudre.</l>
            <l n="1290" xml:id="l1290">S’il est passé ce tems, constant dans ses refus,</l>
            <l n="1291" xml:id="l1291">Qu’on le mette à la Chaîne, &amp; qu’on n’en parle plus.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-24" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1292" xml:id="l1292">Nous irons l’embarquer <ref target="#forcat">Forçat*</ref> sur les Galeres,</l>
            <l n="1293" xml:id="l1293">Qui des Côtes d’Alger partiront les premieres.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV06-25" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1294" xml:id="l1294">Justement. J’en sçauray tantôt le résultat.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="IV07">
          <head>SCENE VII.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, STAMORAT, Suite.</stage>
          <sp xml:id="IV07-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1295" xml:id="l1295">Ah ! Canaille maudite ! ah Traître ! moy <ref target="#forcat">Forçat*</ref> !</l>
            <l n="1296" xml:id="l1296">Quoy donc ? Il faut finir mes jours en <ref target="#barbarie">Barbarie*</ref>,</l>
            <l n="1297" xml:id="l1297">Ou la rame à la main, ou noté<note place="bottom">« Signifie aussi, donner quelque mauvaise marque à une personne, ou à quelque chose. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> d’infamie ?</l>
            <l n="1298" xml:id="l1298">Aux dépens de mes bras m’épargner un affront,</l>
            <l n="1299" xml:id="l1299">Ou bien les soulager aux dépens de mon <ref target="#front">front*</ref> ?</l>
            <l n="1300" xml:id="l1300">Ah ! Bourreaux qui sur moy faites ces violences !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV07-2" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1301" xml:id="l1301">Il faut aller plus loin faire tes doléances.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV07-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1302" xml:id="l1302">Croyez-vous que mon <ref target="#coeur">cœur*</ref> sans douleur souffrira ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="IV07-4" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1303" xml:id="l1303">Va, songe à te résoudre, &amp; l’on te répondra.</l>
            <p rend="center">Fin du quatriéme Acte.<pb n="Piiij"/></p>
          </sp>
        </div>
      </div>
      <div xml:id="V" type="act">
        <head>ACTE V.</head>
        <div type="scene" xml:id="V01">
          <head>SCENE PREMIERE.</head>
          <stage>TOMIRE, MARINE.</stage>
          <sp xml:id="V01-1" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="1304" xml:id="l1304">Il faut attendre icy Celime à son passage.</l>
            <l n="1305" xml:id="l1305">De la bouche, des yeux, du geste, &amp; du visage,</l>
            <l n="1306" xml:id="l1306">Songeons à suivre en tout l’ordre de Fatiman.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-2" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1307" xml:id="l1307">Que ne ferois-je point pour ce bon Musulman ?</l>
            <l n="1308" xml:id="l1308">Sur l’<ref target="#ardeur">ardeur*</ref> de mon zéle, il peut compter, Tomire ;</l>
            <l n="1309" xml:id="l1309">Mais de nôtre bonheur achéve de m’instruire.</l>
            <l n="1310" xml:id="l1310">Le Frere de Carlos vient d’arriver icy,</l>
            <l n="1311" xml:id="l1311" part="I">M’as-tu dit, &amp; son Oncle est mort ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-3" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Ouy, Dieu mercy.</l>
            <l n="1312" xml:id="l1312">Le bon Homme<note place="bottom">« On dit dans le discours familier,<hi rend="i"> Bon homme, bonne femme, &amp; bonnes gens</hi>, pour signifier, Un homme &amp; Une femme qui sont desja dans un âge avancé. <hi rend="i">Le bon homme se porte encore bien. la bonne femme n’en peut plus. les bonnes gens commencent à baisser</hi>. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> est défunt, &amp; pour longues années,</l>
            <l n="1313" xml:id="l1313">Nous allons voir bien-tôt changer nos <ref target="#destin">destinées*</ref><note place="bottom">« Le mot <hi rend="i">destinée</hi> est courant pour rendre compte [...] d’une force supérieure qui décide du devenir des hommes. » <hi rend="sc">A. Sancier-Château</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, vol. 1, p. 50.</note>.</l>
            <l n="1314" xml:id="l1314">Que diable ! pour mourir, qu’est-ce qu’il attendoit ?</l>
            <l n="1315" xml:id="l1315">Que la peste le <ref target="#crever">créve*</ref> en quelqu’endroit qu’il soit.</l>
            <l n="1316" xml:id="l1316" part="I">Le vieux Renard qu’il est.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-4" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Ton dépit me fait rire,</l>
            <l n="1317" xml:id="l1317" part="I">Pourquoy le maudis-tu ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-5" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Je le puis bien maudire.</l>
            <l n="1318" xml:id="l1318">Si quelques mois plûtôt ce Singe eût trépassé,</l>
            <l n="1319" xml:id="l1319">Mon gros Diable de Turc ne m’eût point tant <ref target="#rosser">rossé*</ref><note place="bottom">« L’ancienne langue, dans la phrase <hi rend="i">hypothétique irréelle</hi> se rapportant au passé, employait dans les deux propositions l’<hi rend="i">imparfait du subjonctif</hi> qui, dans son acception primitive, équivalait au <hi rend="i">plus-que-parfait</hi> du subjonctif moderne. Cet emploi subsista jusqu’au XIV<hi rend="sup">e</hi> siècle, où il commença à faire place à un autre, celui du <hi rend="i">plus-que-parfait du subjonctif</hi>, d’abord dans l’une des deux propositions, notamment dans la <hi rend="i">principale</hi>, ensuite dans la <hi rend="i">dépendante</hi>, enfin dans l’une et l’autre. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 159.</note>.</l>
            <l n="1320" xml:id="l1320">Il avoit force Argent, &amp; le Frere en apporte</l>
            <l n="1321" xml:id="l1321">Dequoy payer trois fois la rançon la plus forte.</l>
            <l n="1322" xml:id="l1322">Carlos l’a de ces Turcs tres-amplement instruit,</l>
            <l n="1323" xml:id="l1323">Et puis chez Fatiman il l’a d’<ref target="#abord">abord*</ref> conduit.</l>
            <l n="1324" xml:id="l1324">Et je ne doute point que cette conjoncture</l>
            <l n="1325" xml:id="l1325">Ne rende leur marché fort facile à <ref target="#conclure">conclure*</ref>.</l>
            <l n="1326" xml:id="l1326">Ainsi, comme tu vois, il ne faut plus songer</l>
            <l n="1327" xml:id="l1327">Qu’à nous bien réjoüir, &amp; bien-tôt déloger.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-6" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1328" xml:id="l1328">Celime ne vient point, Tomire, qui l’arrête ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-7" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="1329" xml:id="l1329">Tant mieux ; nous en aurons un plus long tête à tête,</l>
            <l n="1330" xml:id="l1330">Il s’offre rarement, tâchons d’en profiter.</l>
            <l n="1331" xml:id="l1331">Vois-tu, le <ref target="#coeur">cœur*</ref> m’en dit, &amp; je t’en veux conter<note place="bottom">« On dit aussi ... &amp; absolument, Il luy en <hi rend="i">conte</hi>, pour dire, Il luy en veut, il en est amoureux. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-8" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1332" xml:id="l1332">Toy ? quelle vision ! vraîment l’audace est belle,</l>
            <l n="1333" xml:id="l1333" part="I">M’en conter !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-9" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Ouy, comment est-ce chose nouvelle ?</l>
            <l n="1334" xml:id="l1334">Avant que ta Maîtresse eût eu son Sot Epoux,</l>
            <l n="1335" xml:id="l1335">Est-ce que je manquois jamais au rendez-vous ?</l>
            <l n="1336" xml:id="l1336">Et tandis que mon Maître <ref target="#entretenir">entretenoit*</ref> Julie,</l>
            <l n="1337" xml:id="l1337">N’allois-je pas les soirs <ref target="#dedans">dedans*</ref> la Gallerie,</l>
            <l n="1338" xml:id="l1338">Te faire bec à bec<note place="bottom">« On dit, <hi rend="i">Causer bec à bec</hi>, pour dire, Parler teste à teste. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note> mille petits <ref target="#rebus">Rébus*</ref>,</l>
            <l n="1339" xml:id="l1339">Entrelassez de la… tu ne t’en souviens plus ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-10" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1340" xml:id="l1340">Il m’en souvient que trop, mais depuis six mois, Traître,</l>
            <l n="1341" xml:id="l1341">Que nous sommes icy, que m’as-tu fait paroître,</l>
            <l n="1342" xml:id="l1342">Pour me faire la <ref target="#cour">cour*</ref>, qu’as-tu fait, qu’as-tu dit ?</l>
            <l n="1343" xml:id="l1343">Quelques mots en passant par maniere d’acquit<note place="bottom">« On dit, <hi rend="i">Faire quelque chose par maniere d’acquit</hi>, pour dire, Negligemment, &amp; seulement parce qu’on ne peut pas s’en dispenser. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>.</l>
            <l n="1344" xml:id="l1344" part="I">Quand on aime, on en parle.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-11" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">En étois-je capable ?</l>
            <l n="1345" xml:id="l1345">J’avois pour Directeur un <ref target="#coeur">cœur*</ref> impitoyable,<pb n="Pv"/></l>
            <l n="1346" xml:id="l1346">Qui depuis le matin jusqu’à minuit sonnant,</l>
            <l n="1347" xml:id="l1347">Querelle à lettre vûë<note place="bottom">« On dit, qu’<hi rend="i">Une lettre de change est payable à veuë</hi>, pour dire, que le Banquier est obligé de la payer dés qu’il l’aura veue. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>, &amp; <ref target="#rosser">rosse*</ref> argent comptant.</l>
            <l n="1348" xml:id="l1348">Il me roüoit de coups, &amp; pour ne te rien feindre,</l>
            <l n="1349" xml:id="l1349">Je n’avois que le tems qu’il falloit pour me plaindre.</l>
            <l n="1350" xml:id="l1350">Et je ne sçache rien, Marine, tout de bon,</l>
            <l n="1351" xml:id="l1351">Si contraire à l’Amour, que les coups de bâton ;</l>
            <l n="1352" xml:id="l1352">Mais, enfin, à présent qu’un rayon d’espérance</l>
            <l n="1353" xml:id="l1353">Nous flate, &amp; qu’on nous traite avec plus d’indulgence,</l>
            <l n="1354" xml:id="l1354">Comme jamais pour toy mon Amour n’a cessé,</l>
            <l n="1355" xml:id="l1355">Je veux récompenser un peu le temps passé,</l>
            <l n="1356" xml:id="l1356">Et folâtrer un peu sur nouveaux frais ; je meure<note place="bottom">« On dit fig. <hi rend="i">Recommencer sur nouveaux frais</hi>, pour dire, Recommencer de nouveau un travail. » <hi rend="i">ibid.</hi> « Dans les propositions principales exprimant la volonté, le désir, la prière, la supposition, la concession, l’ancien français employait le subjonctif sans <hi rend="i">que</hi> ; le français moderne, au contraire, l’amène régulièrement par <hi rend="i">que</hi>, et n’a conservé l’ancien usage que pour des cas exceptionnels. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 172.</note></l>
            <l n="1357" xml:id="l1357" part="I">Si mon <ref target="#coeur">cœur*</ref>…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-12" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Et demain, peut-être, ou dans une heure,</l>
            <l n="1358" xml:id="l1358">Si les coups de bâton surviennent là-dessus,</l>
            <l n="1359" xml:id="l1359">Tu ne me diras rien, ou ne m’aimeras plus.</l>
            <l n="1360" xml:id="l1360">Je prétens qu’un <ref target="#amant">Amant*</ref>, en pareille avanture,</l>
            <l n="1361" xml:id="l1361">Conserve un <ref target="#coeur">cœur*</ref> plus <ref target="#tendre">tendre*</ref> en une peau plus dure,</l>
            <l n="1362" xml:id="l1362">Et je me mocque, moy, de cet Amour poltron,</l>
            <l n="1363" xml:id="l1363">A qui la peur des coups fait faire le plongeon<note place="bottom">« On dit aussi d’Un homme qui s’evade, qui s’esquive par crainte, par foiblesse, qu’<hi rend="i">Il fait le plongeon</hi>. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
            <l n="1364" xml:id="l1364" part="I">Entens-tu ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-13" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Cependant, à regret je m’en vante ;</l>
            <l n="1365" xml:id="l1365">Mon amour n’est point ladre<note place="bottom">« Il signifie fig. Insensible, soit pour le corps, soit pour l’esprit. <hi rend="i">Il est ladre, il ne sent rien. je ne suis pas ladre. il faudroit estre ladre pour ne pas sentir cette injure</hi>. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>, &amp; la peur l’épouvante :</l>
            <l n="1366" xml:id="l1366">J’en <ref target="#convenir">conviens*</ref>, c’est pour moy, si tu veux, un malheur ;</l>
            <l n="1367" xml:id="l1367">Mais j’ay la peau fort tendre, aussi-bien que le <ref target="#coeur">cœur*</ref> ;</l>
            <l n="1368" xml:id="l1368">Enfin, pour abreger un <ref target="#discours">discours*</ref> qui t’<ref target="#ennuyer">ennuïe*</ref> ;</l>
            <l n="1369" xml:id="l1369">Et te faire ma cour, sçais-tu bien que Julie</l>
            <l n="1370" xml:id="l1370" part="I">M’a tantôt promis...</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-14" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="M">Quoy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-15" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Que nous serions unis.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-16" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1371" xml:id="l1371">Il vaudroit mieux pour toy que je te l’eus promis.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-17" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="1372" xml:id="l1372" part="I">Chut, Celime paroît</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V01-18" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="F">Elle parle à Zaïre.</l>
            <l n="1373" xml:id="l1373">Ecoutons, &amp; songeons à ce qu’il nous faut dire.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V02">
          <head>SCENE II.</head>
          <stage>CELIME, ZAIRE, TOMIRE, MARINE.</stage>
          <sp xml:id="V02-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1374" xml:id="l1374">Pour le départ, Zaïre, hé bien tout est-il prêt ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-2" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1375" xml:id="l1375">Avant que de partir, j’en ay vû tout l’apprêt.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1376" xml:id="l1376">As-tu de mes trésors chargé le Capitaine ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-4" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1377" xml:id="l1377">Ils sont en <ref target="#bonne-main">bonne main*</ref>, n’en soyez point en peine.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1378" xml:id="l1378" part="I">Et Carlos ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-6" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l part="F">Avec vous il s’apprête à partir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-7" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1379" xml:id="l1379">Dis-moy, son <ref target="#coeur">cœur*</ref> est-il touché de repentir ?</l>
            <l n="1380" xml:id="l1380">En luy parlant de moy, l’as-tu vû se confondre ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-8" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1381" xml:id="l1381">A vos desirs, Madame, il m’a paru répondre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-9" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1382" xml:id="l1382">Je viens de sa promesse avertir Fatiman.</l>
            <l n="1383" xml:id="l1383">Qu’il est temps qu’il réponde à mon <ref target="#empressement">empressement*</ref>,</l>
            <l n="1384" xml:id="l1384">Qu’avecque son Epoux je veux revoir Julie,<pb n="Pvj"/></l>
            <l n="1385" xml:id="l1385">Pendant que se fera cette Cérémonie.</l>
            <l n="1386" xml:id="l1386">Dans les cris, le tumulte, &amp; l’ombre de la nuit,</l>
            <l n="1387" xml:id="l1387">Moy, Dom Carlos, &amp; toy, nous partirons sans bruit.</l>
            <l n="1388" xml:id="l1388">Que voy-je ? quelle Fille icy s’offre à ma vuë ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-10" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1389" xml:id="l1389" part="I">Elle est à Julie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-11" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Ah ! m’auroit-elle entenduë ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-12" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1390" xml:id="l1390" part="I">Je ne crois pas, Madame, elle est trop loin.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-13" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Voilà</l>
            <l n="1391" xml:id="l1391">Le Valet de Carlos aussi ! Que fais-tu là ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-14" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="1392" xml:id="l1392">Sauf ce qui vous est dû, du meilleur de mon <ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="1393" xml:id="l1393">Je ris dans mon petit particulier<note place="bottom">« En mon <hi rend="i">particulier</hi>, signifie aussi, Quant à moy. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>, Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-15" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1394" xml:id="l1394" part="I">Quoy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-16" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l part="F">Marine est en place à<note place="bottom">Locution non attestée.</note> se désesperer.</l>
            <l n="1395" xml:id="l1395">Et mon petit Esprit rit de la voir pleurer.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-17" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1396" xml:id="l1396" part="I">Elle pleure ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-18" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l part="M">Ouy, Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-19" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Eh pourquoy ? qu’est-ce à dire ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-20" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1397" xml:id="l1397">Je pleure de dépit que j’ay de le voir rire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-21" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1398" xml:id="l1398">Ces contrarietez que vous me faites voir,</l>
            <l n="1399" xml:id="l1399">Ont d’autres fondemens ; &amp; je les veux <ref target="#savoir">sçavoir*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-22" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE</speaker>
            <l n="1400" xml:id="l1400">Madame, à dire vray pour moy, c’est que mon Maître,</l>
            <l n="1401" xml:id="l1401">Joyeux, charmé, ravy, tout ce qu’on sçauroit l’être,</l>
            <l n="1402" xml:id="l1402">M’a dit que nous étions tous deux en liberté,</l>
            <l n="1403" xml:id="l1403">Que rien n’étoit égal à sa felicité ;</l>
            <l n="1404" xml:id="l1404">Et depuis ce moment je ris, ne vous déplaise,</l>
            <l n="1405" xml:id="l1405">A gorge déployée, &amp; ne me sens pas d’aise<note place="bottom">« Il signifie joye, contentement, plaisir, repos. Je suis ravi d’<hi rend="i">aise</hi>. Je ne me sens pas d’<hi rend="i">aise</hi>. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-23" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">à Zaïre bas</hi>.</speaker>
            <l n="1406" xml:id="l1406">Zaïre, il est enfin <ref target="#sensible">sensible*</ref> à mes <ref target="#ardeur">ardeurs*</ref>.</l>
            <l n="1407" xml:id="l1407">Et toy, parle, quelle est la source de tes pleurs.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-24" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1408" xml:id="l1408">Un chagrin qui ne peut finir qu’avec ma vie.</l>
            <l n="1409" xml:id="l1409">Aux <ref target="#voeu">vœux*</ref> de D. Brusquin, Fatiman rend Julie.</l>
            <l n="1410" xml:id="l1410">Cet <ref target="#hymen">Hymen*</ref> renoüé produit à nos regrets</l>
            <l n="1411" xml:id="l1411">Une source de pleurs à ne tarir jamais.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-25" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">bas à Zaïre</hi>.</speaker>
            <l n="1412" xml:id="l1412">Quel plaisir, de pouvoir tourmenter sa Rivale !</l>
            <l n="1413" xml:id="l1413">Zaïre, ç’en est un pour moy, que rien n’égale.</l>
            <l n="1414" xml:id="l1414">Mais qui vous fait venir, dans mon Appartement</l>
            <l n="1415" xml:id="l1415">Donner chacun l’essort à son temperamment.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-26" who="tomire">
            <speaker>TOMIRE.</speaker>
            <l n="1416" xml:id="l1416">Mon Maître dans ces lieux m’ordonne de l’attendre</l>
            <l n="1417" xml:id="l1417">Pour un fait d’importance il doit venir s’y rendre,</l>
            <l n="1418" xml:id="l1418">Il m’a recommandé que cecy fût secret.</l>
            <l n="1419" xml:id="l1419">Madame, vous sçavez comme je suis discret ;</l>
            <l n="1420" xml:id="l1420">Ma langue est morte, &amp; j’ay cadenacé ma bouche.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-27" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">bas à Zaïre</hi>.</speaker>
            <l n="1421" xml:id="l1421">Carlos se rend, Zaïre, &amp; mon amour le touche.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-28" who="marine">
            <speaker>MARINE.</speaker>
            <l n="1422" xml:id="l1422">Et moy je viens icy, Madame, à vos genoux ;</l>
            <l n="1423" xml:id="l1423">Vous prier d’empêcher que ce vilain Epoux,</l>
            <l n="1424" xml:id="l1424">A l’amour de Carlos n’arrache ma Maîtresse.</l>
            <l n="1425" xml:id="l1425">Elle mourroit, ayez pitié de sa <ref target="#tendresse">tendresse*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-29" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1426" xml:id="l1426">De cette impertinence osez-vous me prier ?</l>
            <l n="1427" xml:id="l1427">Moy ! que j’aide Julie à se démarier ?</l>
            <l n="1428" xml:id="l1428">Sortez, à mon <ref target="#courroux">courroux*</ref> dérobez vôtre vie.</l>
            <l n="1429" xml:id="l1429">Zaïre, en ce moment que mon <ref target="#ame">ame*</ref> est <ref target="#ravir">ravie*</ref> !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V02-30" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1430" xml:id="l1430" part="I">Tout va bien.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V03">
          <head>SCENE III.</head>
          <stage>CELIME, FATIMAN, ZAIRE, TOMIRE, MARINE.</stage>
          <sp xml:id="V03-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN, <hi rend="i">montrant Tomire aux Turcs</hi>.</speaker>
            <l part="F">Le voilà, que l’on le mette aux Fers.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V03-2" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1431" xml:id="l1431" part="I">Dans mon Appartement ? devant moy ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V03-3" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE. </speaker>
            <l part="F">Quels revers ?</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V04">
          <head>SCENE IV.</head>
          <stage>FATIMAN, CELIME, ZAIRE.</stage>
          <sp xml:id="V04-1" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">bas</hi>.</speaker>
            <l n="1432" xml:id="l1432" part="I">Helas !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Par des ingrats je suis trahy, Madame.</l>
            <l n="1433" xml:id="l1433">Malgré tous mes bienfaits, pleins d’une noirceur d’ame,</l>
            <l n="1434" xml:id="l1434">N’écoutant qu’un esprit au crime abandonné,</l>
            <l n="1435" xml:id="l1435">Pas un endroit <ref target="#sensible">sensible*</ref> ils m’ont assassiné.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-3" who="celime">
            <speaker>CELIME <hi rend="i">bas</hi>.</speaker>
            <l n="1436" xml:id="l1436">Me voilà découverte. O rigueur inhumaine !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1437" xml:id="l1437">Mais Carlos le premier en va porter la peine.</l>
            <l n="1438" xml:id="l1438">Sous les <ref target="#tourment">tourmens*</ref> divers que j’ay fait préparer,</l>
            <l n="1439" xml:id="l1439">Venez le voir, Madame, à vos yeux expirer.</l>
            <l n="1440" xml:id="l1440" part="I">Suivez moy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="M">Juste Ciel !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Vous semblez chancelante,</l>
            <l n="1441" xml:id="l1441" part="I">Venez le voir mourir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-7" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">De son crime ignorante</l>
            <l n="1442" xml:id="l1442">Je cherche en mon esprit, confus, embarrassé,</l>
            <l n="1443" xml:id="l1443">Par quel endroit il peut vous avoir offensé.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1444" xml:id="l1444">Ce seul témoin suffit pour convaincre vôtre <ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="1445" xml:id="l1445">On l’a trouvé saisi de ce Coffret, Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-9" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1446" xml:id="l1446" part="I">Hé bien !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-10" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Ces Diamans entre ses mains tombez,</l>
            <l n="1447" xml:id="l1447">Prouvent qu’il vous les a sûrement dérobez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-11" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1448" xml:id="l1448" part="I">Luy, dérobez !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-12" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Comment puis-je ne le pas croire ?</l>
            <l n="1449" xml:id="l1449">Prendrois-je des soupçons honteux à vôtre gloire ?</l>
            <l n="1450" xml:id="l1450">Les auroit-il reçûs de vôtre main ? Parlez ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-13" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1451" xml:id="l1451">Vous a-t’il confessé qu’il les avoit volez ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-14" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1452" xml:id="l1452">De frivoles raisons il vouloit se défendre ;</l>
            <l n="1453" xml:id="l1453">Mais mon juste <ref target="#courroux">courroux*</ref> n’a pas voulu l’entendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-15" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1454" xml:id="l1454">Zaïre, ce que c’est que d’être malheureux !</l>
            <l n="1455" xml:id="l1455">Un Homme qui se trouve en cet <ref target="#estat">état*</ref> affreux,</l>
            <l n="1456" xml:id="l1456">Est soupçonné de tout, tout ce qu’il fait offence,</l>
            <l n="1457" xml:id="l1457">On le croit criminel, même dans l’innocence.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-16" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1458" xml:id="l1458" part="I">Qu’entendez-vous par là ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-17" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Dom Carlos en fait foy<note place="bottom">« Signifie aussi, Témoignage, assurance. » <hi rend="sc">Academie Française</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi> Cette phrase signifierait donc « Ce qui est arrivé à Carlos prouve la vérité de ce que je viens de dire. »</note>.</l>
            <l n="1459" xml:id="l1459">Tu sçais que ces bijoux luy sont donnez par moy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-18" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1460" xml:id="l1460" part="I">Ouy, Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-19" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Il les tient de vous? Qu’osez vous dire ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-20" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1461" xml:id="l1461">Et tu n’ignores pas à quel dessein Zaïre ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-21" who="zaire">
            <speaker>ZAIRE.</speaker>
            <l n="1462" xml:id="l1462" part="I">Non, Madame.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-22" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">Et tu vois comment il est traité ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-23" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1463" xml:id="l1463">Madame, où poussez-vous ma curiosité ?</l>
            <l n="1464" xml:id="l1464">De ce dessein, de <ref target="#grace2">grace*</ref>, <ref target="#expliquer">expliquez*</ref> la manœuvre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-24" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1465" xml:id="l1465">Voyant ces Diamans assez mal mis en œuvre<note place="bottom">« Se dit aussi au propre, en parlant des pierreries. <hi rend="i">Voilà un diamant qui est bien mis en œuvre</hi>. » <hi rend="i">ibid.</hi></note>,</l>
            <l n="1466" xml:id="l1466">Desirant les voir mieux ; de Carlos j’ay fait choix,</l>
            <l n="1467" xml:id="l1467">Pour les porter à ce <ref target="#lapidaire">Lapidaire*</ref> François ;</l>
            <l n="1468" xml:id="l1468">Qui de tout vôtre Alger s’est attiré l’estime.</l>
            <l n="1469" xml:id="l1469">Il est de ses Amis, Seigneur, voilà son crime.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-25" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1470" xml:id="l1470">Mais pourquoy le vouloir charger de cet employ ?</l>
            <l n="1471" xml:id="l1471">Vous pouvez vous servir de vos gens ou de moy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-26" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1472" xml:id="l1472">Me servant de mes gens on auroit pû l’apprendre,</l>
            <l n="1473" xml:id="l1473">Et je vous l’avouëray, je voulois vous surprendre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-27" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1474" xml:id="l1474">Vous vouliez me surprendre, &amp; vous m’avez surpris :</l>
            <l n="1475" xml:id="l1475">Mais bien-tôt vos bontez en recevront le prix.</l>
            <l n="1476" xml:id="l1476">Dans un moment Carlos alloit cesser de vivre :</l>
            <l n="1477" xml:id="l1477">Mais étant innocent ; courez, qu’on le délivre.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V04-28" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1478" xml:id="l1478">Ayant presque causé, moy-même, son trépas,</l>
            <l n="1479" xml:id="l1479">J’y veux moy-même aller, &amp; reviens sur mes pas.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V05">
          <head>SCENE V.</head>
          <stage>FATIMAN, ZAIRE, suite.</stage>
          <sp xml:id="V05-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1480" xml:id="l1480">Plus loin &amp; plus long-tems peut-on pousser l’audace !</l>
            <l n="1481" xml:id="l1481">Mais je seray vangé, tout va changer de face :</l>
            <l n="1482" xml:id="l1482">Elle va recevoir le prix de sa noirceur,</l>
            <l n="1483" xml:id="l1483">Et d’avance déja j’en goûte la douceur.</l>
            <l n="1484" xml:id="l1484">Dom Brusquin vient, ses cris le font assez connoître.</l>
            <l n="1485" xml:id="l1485">Ecoutons ses <ref target="#discours">discours*</ref>, avant que de paroître.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V06">
          <head>SCENE VI.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, STAMORAT, FATIMAN, suite.</stage>
          <sp xml:id="V06-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1486" xml:id="l1486">Messieurs, que faites-vous, je suis prêt à signer,</l>
            <l n="1487" xml:id="l1487" part="I">L’heure n’est pas sonnée ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-2" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l part="F">Elle vient de sonner.</l>
            <l n="1488" xml:id="l1488">Et c’est ta faute, au lieu d’aller au necessaire,</l>
            <l n="1489" xml:id="l1489">Tu veux moraliser, ou tu ne fais que braire,</l>
            <l n="1490" xml:id="l1490">Tu crois qu’on soit payé pour t’entendre crier.</l>
            <l n="1491" xml:id="l1491">Je te l’ay déja dit vingt fois ; point de quartier.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1492" xml:id="l1492">Eh de <ref target="#grace2">grace*</ref> ! Monsieur, en pareille matiere,</l>
            <l n="1493" xml:id="l1493">Un moment plus ou moins ne fait rien à l’affaire,</l>
            <l n="1494" xml:id="l1494">Au nom de Belzebut, vôtre digne Patron,</l>
            <l n="1495" xml:id="l1495">Voyez Fatiman, vous, ou vôtre Compagnon,</l>
            <l n="1496" xml:id="l1496">Dites-luy, que soûmis à la loy qu’il m’imppose,</l>
            <l n="1497" xml:id="l1497">Je luy donne ma Femme à Bail <ref target="#emphyteose">emphithéose*</ref><note place="bottom">« Bail d’heritages à longues années. » <hi rend="sc">A. Furetiere</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>.</l>
            <l n="1498" xml:id="l1498">Et que s’il veut du sang, je signeray du mien,</l>
            <l n="1499" xml:id="l1499">Que de cent ans &amp; plus je ne demande rien.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-4" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1500" xml:id="l1500">Il n’est plus tems, te dis je, &amp; l’heure est expirée.</l>
            <l n="1501" xml:id="l1501">Nôtre ordre est <ref target="#positif">positif*</ref> &amp; ta priere usée.</l>
            <l n="1502" xml:id="l1502">Il ne revient jamais, quand il a décidé.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1503" xml:id="l1503">Ah <ref target="#chien">Chien*</ref> d’honneur, pourquoy m’as-tu tant obsedé ?</l>
            <l n="1504" xml:id="l1504">N’importe, par pitié, des peines que j’endure,</l>
            <l n="1505" xml:id="l1505">Parlez à Fatiman, allez, je vous conjure,</l>
            <l n="1506" xml:id="l1506">Dites-luy que d’<ref target="#abord">abord*</ref> j’avois pris mon party.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-6" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1507" xml:id="l1507">Ne verra-t’il pas bien que nous aurons<note place="bottom">« Au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, ainsi que dans la langue ancienne, le verbe d’une proposition complétive introduite par <hi rend="i">que</hi> se mettait souvent au <hi rend="i">futur</hi> ou au <hi rend="i">conditionnel</hi>, parce que le verbe de la principale était au futur ou au conditionnel. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 163.</note> menty ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1508" xml:id="l1508">N’importe, donnez-moy cette derniere joye.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-8" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1509" xml:id="l1509" part="I">Il va me renvoyer.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-9" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Eh bien, s’il vous renvoye,</l>
            <l n="1510" xml:id="l1510">Vous ferez lors<note place="bottom">« <hi rend="i">Lors</hi> n’est supplanté par <hi rend="i">alors</hi> qu’au XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle, et tous les auteurs de cette époque, surtout ceux du commencement, s’en servent souvent. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op.cit.</hi>, p. 230.</note> de moy tout ce qu’il vous plaira :</l>
            <l n="1511" xml:id="l1511">Voyons de quel secours mon Argent me sera.</l>
            <l n="1512" xml:id="l1512">Tenez, prenez cecy, pour vous donner courage.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V06-10" who="stamorat">
            <speaker>STAMORAT.</speaker>
            <l n="1513" xml:id="l1513">Attendez, je vay voir ; mais s’il vient, soyez sage.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V07">
          <head>SCENE VII.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, suite de Turcs.</stage>
          <sp xml:id="V07-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1514" xml:id="l1514">Helas ! à mes dépens je connois, mais trop tard,</l>
            <l n="1515" xml:id="l1515">Qu’un Homme est un grand Sot quand un coup du hazard,</l>
            <l n="1516" xml:id="l1516">Le défait d’une Femme un peu Coquette &amp; belle,</l>
            <l n="1517" xml:id="l1517">D’aller passer les Mers pour courir aprés elle.</l>
            <l n="1518" xml:id="l1518">Ah ! que je vois par tout de gens mal satisfaits,</l>
            <l n="1519" xml:id="l1519">Qui rendroient <ref target="#grace1">grace*</ref> au Ciel d’en être ainsi défaits !</l>
            <l n="1520" xml:id="l1520">Quelqu’un vient, je crains fort, &amp; je ne m’en puis taire,</l>
            <l n="1521" xml:id="l1521">Que mon retardement ne m’ait fait quelque affaire.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V08">
          <head>SCENE VIII.</head>
          <stage>D. BRUSQUIN, FATIMAN, STAMORAT, suite.</stage>
          <l n="1522" xml:id="l1522">.......................................................................<note place="bottom">L’édition de 1739 rétablit ce vers ; STAMORAT <hi rend="i">à Fatiman</hi> : « Il est prêt à signer tout ce que l’on voudra. ».</note></l>
          <sp xml:id="V08-1" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1523" xml:id="l1523">Me voilà ! je feray tout ce qu’il vous plaira,</l>
            <l n="1524" xml:id="l1524">Et signeray, plûtôt que<note place="bottom">« La langue du XVII<hi rend="sup">e</hi> siècle omet très souvent, contrairement à l’usage actuel, la préposition <hi rend="i">de</hi> devant un infinitif construit avec le <hi rend="i">que</hi> comparatif. » <hi rend="sc">A. Haase</hi>, <hi rend="i">op.cit.</hi>, p. 203.</note> vous mettre en colere ;</l>
            <l n="1525" xml:id="l1525">Pour moy, pour mon Ayeul, &amp; pour défunt mon Pere,</l>
            <l n="1526" xml:id="l1526">Que nous avons été des Sots de Pere en Fils,</l>
            <l n="1527" xml:id="l1527">Et même si l’on veut pour tous mes bons Amis,</l>
            <l n="1528" xml:id="l1528">Je laisse le champ libre à qui voudra m’en croire.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1529" xml:id="l1529">C’est quelque chose ; Mais si j’ay bonne memoire</l>
            <l n="1530" xml:id="l1530">Je ne t’avois donné pour régler ton départ,</l>
            <l n="1531" xml:id="l1531">Qu’une heure, &amp; ce choix vient, ce me semble un peu tard.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1532" xml:id="l1532">C’est que j’ay quelque tems, parlant de vôtre <ref target="#flamme">flâme*</ref>,</l>
            <l n="1533" xml:id="l1533"><ref target="#entretenir">Entretenu*</ref> vos gens du bonheur de ma Femme,</l>
            <l n="1534" xml:id="l1534">Du plaisir que j’avois à vous trouver d’humeur,</l>
            <l n="1535" xml:id="l1535">De vouloir consentir… de me faire l’honneur,</l>
            <l n="1536" xml:id="l1536">D’en recevoir tantôt, sans qu’elle y soit forcée,</l>
            <l n="1537" xml:id="l1537">Ce qu’elle… ils m’écoutoient, &amp; l’heure s’est passée.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1538" xml:id="l1538">Ainsi, tu signeras ce qui t’est ordonné ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1539" xml:id="l1539">Qu’on me fasse partir, je donne un <ref target="#blanc-signe">blanc signé*</ref>.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1540" xml:id="l1540">Outre ce <ref target="#blanc-signe">blanc signé*</ref>, ton amitié s’<ref target="#engager">engage*</ref></l>
            <l n="1541" xml:id="l1541">A payer, sans <ref target="#chagrin">chagrin*</ref>, les frais du Mariage.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1542" xml:id="l1542">Si j’en ay, je sçauray ne le point faire voir.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1543" xml:id="l1543">Que tu seras présent à leurs Nôces ce soir,</l>
            <l n="1544" xml:id="l1544">Et qu’à table auprés d’eux tes <ref target="#discours">discours*</ref> ordinaires ;</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-9" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1545" xml:id="l1545" part="I">Pour cela décomptez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-10" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Décomptez ! aux Galeres.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-11" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1546" xml:id="l1546">Quartier, Messieurs, s’il faut cela pour m’en sauver,</l>
            <l n="1547" xml:id="l1547">Je boiray leur santé<note place="bottom">L’expression est attestée dans les dictionnaires de l’époque.</note>, quand j’en devrois <ref target="#crever">crever*</ref>.</l>
            <l n="1548" xml:id="l1548">Je vous en laisseray possesseur fort tranquille.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-12" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1549" xml:id="l1549">Comme pour ton <ref target="#repos">repos*</ref> cet <ref target="#hymen">Hymen*</ref> est utile,</l>
            <l n="1550" xml:id="l1550">Et que l’Epoux, enfin, que je luy veux donner ;</l>
            <l n="1551" xml:id="l1551">Peut avoir, quelque peine à se déterminer.</l>
            <l n="1552" xml:id="l1552">A moins que ton <ref target="#aveu">aveu*</ref> ne seconde sa <ref target="#flamme">flâme*</ref>,</l>
            <l n="1553" xml:id="l1553">Il faudra le prier d’avoir <ref target="#soin1">soin*</ref> de ta Femme ;</l>
            <l n="1554" xml:id="l1554">Et de la recevoir de ta main, autrement…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-13" who="brusquin">
            <speaker>D  BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1555" xml:id="l1555">Ah ! faites-moy credit d’un si sot compliment,</l>
            <l n="1556" xml:id="l1556">De quel <ref target="#air">air*</ref> voulez vous que pour le satisfaire...</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-14" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1557" xml:id="l1557" part="I">Quoy, cela te fait peine<note place="bottom">L’expression n’est pas attestée dans les dictionnaires de l’époque mais « la formation de locutions verbales de type <hi rend="i">V Ø N</hi>, avec un verbe opérateur et un déterminant zéro, est massivement attestée en français. Le français classique se caractérise par une grande vitalité de ces formations, avec une grande variété de verbes supports et de noms prédicatifs. » <hi rend="sc">N. Fournier</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi>, p. 155.</note> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-15" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="M">Ouy, sans doute.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-16" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">En Galere,</l>
            <l n="1558" xml:id="l1558">Allez, c’est trop vouloir marchander avec moy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-17" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1559" xml:id="l1559">Je suis soûmis à tout, &amp; vous donne ma <ref target="#foy">foy*</ref></l>
            <l n="1560" xml:id="l1560">De faire exactement sur chaque circonstance,</l>
            <l n="1561" xml:id="l1561">Ce qu’on exigera de mon obéïssance.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V08-18" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1562" xml:id="l1562">Qu’on luy fasse signer tout ce qu’il me promet.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V09">
          <head>SCENE IX.</head>
          <stage>FATIMAN, JULIE, D. BRUSQUIN, STAMORAT, suite.</stage>
          <sp xml:id="V09-1" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1563" xml:id="l1563">Venez remercier D. Brusquin, s’il vous plaît,</l>
            <l n="1564" xml:id="l1564">Belle Julie, enfin, d’une indulgence extrême,</l>
            <l n="1565" xml:id="l1565">Il renonce à ses droits, &amp; vous rend à vous-même.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-2" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="1566" xml:id="l1566">En faisant cet effort sur son <ref target="#coeur">cœur*</ref> aujourd’huy,</l>
            <l n="1567" xml:id="l1567">Il fait beaucoup pour moy ; mais encor plus pour luy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1568" xml:id="l1568">Ouy, c’est beaucoup pour moy que d’abaisser mon <ref target="#ame">ame*</ref>,</l>
            <l n="1569" xml:id="l1569">A signer le Contrat du Mary de ma Femme,</l>
            <l n="1570" xml:id="l1570">Quel honteux personnage on me fait joüer là !</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1571" xml:id="l1571">Je t’entens murmurer, que veut dire cela ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1572" xml:id="l1572">Non, j’ay signé, tout est à vos ordres conforme ;</l>
            <l n="1573" xml:id="l1573">Jamais Homme ne fut Sot en meilleure forme.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1574" xml:id="l1574">Maintenant qu’à mes <ref target="#voeu">vœux*</ref>, tu veux bien consentir,</l>
            <l n="1575" xml:id="l1575">Je vais pour t’obliger, &amp; te faire partir,</l>
            <l n="1576" xml:id="l1576">Te faire voir l’Epoux que je donne à ta Femme.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1577" xml:id="l1577" part="I">Comment, ce n’est pas vous ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Non, sans doute, &amp; sa <ref target="#flamme">flâme*</ref></l>
            <l n="1578" xml:id="l1578">N’ayant pû se cacher, son <ref target="#coeur">cœur*</ref> s’est declaré</l>
            <l n="1579" xml:id="l1579">En <ref target="#faveur">faveur*</ref> de celuy qu’elle t’a préferé :</l>
            <l n="1580" xml:id="l1580">Et touché d’une <ref target="#ardeur">ardeur*</ref> si <ref target="#tendre">tendre*</ref> &amp; si fidelle,</l>
            <l n="1581" xml:id="l1581">J’ay voulu les unir par amitié pour elle.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V09-9" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1582" xml:id="l1582">J’entens bien ; &amp; pour prix d’une telle <ref target="#faveur">faveur*</ref>,</l>
            <l n="1583" xml:id="l1583">Vous ne vous réservez que le droit du Seigneur,</l>
            <l n="1584" xml:id="l1584">Mon <ref target="#front">front*</ref> est à l’enchere, &amp; ma Femme au pillage.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V10">
          <head>SCENE X.</head>
          <stage>FATIMAN, DOM BRUSQUIN, CELIME, CARLOS, JULIE, MARINE, TOMIRE, &amp;c.</stage>
          <sp xml:id="V10-1" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1585" xml:id="l1585">Il est temps désormais d’achever vôtre Ouvrage.</l>
            <l n="1586" xml:id="l1586">Pour le voir accomplir, je rameine Carlos.</l>
            <l n="1587" xml:id="l1587">A tant d’infortunez assurez le <ref target="#repos">repos*</ref>,</l>
            <l n="1588" xml:id="l1588">Qu’il soit libre, rendez un Epoux à Julie,</l>
            <l n="1589" xml:id="l1589">Et qu’ils prennent congé tous de la Compagnie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1590" xml:id="l1590">Ainsi dit, ainsi fait, Julie approchez-vous,</l>
            <l n="1591" xml:id="l1591">Recevez de ma main Carlos pour vôtre Epoux.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-3" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1592" xml:id="l1592" part="I">Quoy, Carlos ! est-ce ainsi que mes ordres…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Perfide,</l>
            <l n="1593" xml:id="l1593">De l’odieux amour qui vous <ref target="#charmer">charme*</ref> &amp; vous guide,</l>
            <l n="1594" xml:id="l1594">Grace à mes bons <ref target="#destin">destins*</ref> le projet m’est connu,</l>
            <l n="1595" xml:id="l1595">Mais de vous en punir le moment est venu,</l>
            <l n="1596" xml:id="l1596" part="I">Ingrate, rougissez.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-5" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l part="F">O Ciel ! je suis trahie.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-6" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1597" xml:id="l1597">Qui vous portoit Cruelle, à cette perfidie ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-7" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1598" xml:id="l1598">Peux-tu<note place="bottom">Célime passe du vouvoiement au tutoiement pour s’adresser à Fatiman dans cette réplique.</note> le demander, je l’aimois, je te hais !</l>
            <l n="1599" xml:id="l1599">Aprés mon procedé contre tous mes souhaits,</l>
            <l n="1600" xml:id="l1600">D’être unie à Carlos je n’ay plus l’espérance ;</l>
            <l n="1601" xml:id="l1601">Mais ne crois pas me voir briguer ton alliance,</l>
            <l n="1602" xml:id="l1602">Je vais sortir d’Alger, pour ne te voir jamais.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-8" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1603" xml:id="l1603">Non, devant le Divan instruit de vos forfaits,</l>
            <l n="1604" xml:id="l1604">Il faut qu’auparavant, vous soyez confonduë,</l>
            <l n="1605" xml:id="l1605">Qu’on l’ôte de ces lieux, elle blesse ma vûë.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V10-9" who="celime">
            <speaker>CELIME.</speaker>
            <l n="1606" xml:id="l1606">Ils blessent tous la mienne, allons, sortons d’icy.</l>
          </sp>
        </div>
        <div type="scene" xml:id="V11">
          <head>SCENE DERNIERE.</head>
          <stage>FATIMAN, JULIE, CARLOS, STAMORAT, MARINE, TOMIRE, D. BRUSQUIN, suite.</stage>
          <sp xml:id="V11-1" who="carlos">
            <speaker>CARLOS.</speaker>
            <l n="1607" xml:id="l1607" part="I">Seigneur en faveur…</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V11-2" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l part="F">Non, n’ayez nul <ref target="#soucy">soucy*</ref><note place="bottom">L’adjectif possessif <hi rend="i">sa</hi> a sûrement été omis dans ce vers auquel il manque une syllabe : « Seigneur en [sa] faveur... » L’édition de 1739 propose « aucun soucy ».</note>.</l>
            <l n="1608" xml:id="l1608">Aprés tous les <ref target="#travail">travaux*</ref> d’une longue constance,</l>
            <l n="1609" xml:id="l1609">Venez de vôtre amour cüeillir la récompense,</l>
            <l n="1610" xml:id="l1610">Vous êtes à Carlos, &amp; Julie est à vous.</l>
            <l n="1611" xml:id="l1611" part="I">D. Brusquin y consent.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V11-3" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l part="F">Quoy ! c’est là cet Epoux ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V11-4" who="fatiman">
            <speaker>FATIMAN.</speaker>
            <l n="1612" xml:id="l1612">Ouy, c’est luy, qui charmé des beaux yeux de Julie</l>
            <l n="1613" xml:id="l1613">L’enleva de tes bras, c’est luy qu’en <ref target="#barbarie">Barbarie*</ref>,</l>
            <l n="1614" xml:id="l1614">L’Amour pour te l’ôter fit Esclave, &amp; c’est luy,</l>
            <l n="1615" xml:id="l1615">Qu’on va faire à tes yeux son Epoux aujourd’huy.</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V11-5" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN.</speaker>
            <l n="1616" xml:id="l1616">Quoy ! c’est là le Paris, de cette belle Heleine<note place="bottom">Référence à l’enlèvement d’Hélène, princesse légendaire de Sparte, par Pâris, prince troyen.</note> ?</l>
          </sp>
          <sp xml:id="V11-6" who="julie">
            <speaker>JULIE.</speaker>
            <l n="1617" xml:id="l1617">On me livra sans peine à l’<ref target="#objet">objet*</ref> de ma haine,</l>
            <l n="1618" xml:id="l1618">Il vous plût de souffrir qu’on en usât ainsi,</l>
            <l n="1619" xml:id="l1619">On vous force à me rendre, &amp; je le souffre aussi.</l>
            <stage>On chante.</stage>
            <lg>
              <l n="1620" xml:id="l1620">O Giornata</l>
              <l n="1621" xml:id="l1621">Fortunata !</l>
              <l n="1622" xml:id="l1622">Ringrasciar Mahometa,</l>
              <l n="1623" xml:id="l1623">Mi donnar la libertà,</l>
              <l n="1624" xml:id="l1624">Di tonar in Patria</l>
              <l n="1625" xml:id="l1625">Allegria.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="1626" xml:id="l1626">Hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà,</l>
              <l n="1627" xml:id="l1627">Hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà, hà,</l>
              <l n="1628" xml:id="l1628">Mi rompir Catena,</l>
              <l n="1629" xml:id="l1629">Ti donar Femina,</l>
              <l n="1630" xml:id="l1630">Allegria.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="1631" xml:id="l1631">Hà, hà, &amp;c. Libertà.</l>
              <l n="1632" xml:id="l1632">Voglio casciar d’amar vaga belta</l>
              <l n="1633" xml:id="l1633">L’amore fa penar</l>
              <l n="1634" xml:id="l1634">E tropo sospirar</l>
              <l n="1635" xml:id="l1635">La crudeltà.</l>
              <l n="1636" xml:id="l1636">Libertà, libertà, &amp;c<note place="bottom">Proposition de traduction : « Oh journée heureuse ! Remercier Mahomet, Me donner la liberté, De retourner dans la patrie Allégresse. Ah, Ah, Ah... Me rompre les chaînes, Te donner une femme, Allégresse. Ah, Ah, Ah... Liberté. Je veux cesser d’aimer une lointaine L’amour fait de la peine Et trop soupirer La cruauté. Liberté, liberté... »</note>.</l>
            </lg>
            <stage>Air pour les Turcs.</stage>
            <lg>
              <l n="1637" xml:id="l1637">O le bon Païs que la Turquie,</l>
              <l n="1638" xml:id="l1638">Si l’on y bûvoit du Vin<note place="bottom">« L’<hi rend="i">abstinence du vin</hi> est encore un des préceptes de l’alcoran. » <hi rend="sc">L. Moreri</hi>, <hi rend="i">op. cit.</hi></note>,</l>
              <l n="1639" xml:id="l1639">Si-tôt qu’une Femme <ref target="#ennuyer">ennuïe*</ref>,</l>
              <l n="1640" xml:id="l1640">Sans autre cérémonie,</l>
              <l n="1641" xml:id="l1641">On la donne à son Voisin.</l>
              <l n="1642" xml:id="l1642">O le bon, &amp;c.</l>
            </lg>
            <lg>
              <l n="1643" xml:id="l1643">S’il ne falloit que passer la Mer,</l>
              <l n="1644" xml:id="l1644">Et se rendre en Alger,</l>
              <l n="1645" xml:id="l1645">Pour rompre un Mariage,</l>
              <l n="1646" xml:id="l1646">Plus de la moitié des Maris</l>
              <l n="1647" xml:id="l1647">Qui sont aujourd’huy dans Paris,</l>
              <l n="1648" xml:id="l1648">Feroient dés demain le voyage.</l>
            </lg>
          </sp>
          <sp xml:id="V11-7" who="brusquin">
            <speaker>D. BRUSQUIN, <hi rend="i">aprés qu’on a dansé.</hi></speaker>
            <l n="1649" xml:id="l1649">Helas, tous mes Amis se moquant de ma <ref target="#flamme">flâme*</ref>,</l>
            <l n="1650" xml:id="l1650">Ne m’appelleront plus que le Mary sans Femme ;</l>
            <l n="1651" xml:id="l1651">Mais que ferois-je, enfin, il faut s’en consoler ;</l>
            <l n="1652" xml:id="l1652">Bien des gens que je vois, voudroient me ressembler.</l>
            <l n="1653" xml:id="l1653">On reprend icy le même divertissement.</l>
            <p rend="center">FIN.</p>
          </sp>
        </div>
      </div>
    </body>
    <back>
      <div>
        <head>Glossaire</head>
        <entryFree xml:id="abord">
          <form>Abord (d’)</form>
          <def>« Du commencement, de la premiere veüe. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l263">263</ref>, <ref target="#l437">437</ref>, <ref target="#l503">503</ref>, <ref target="#l1323">1323</ref>, <ref target="#l1506">1506</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="adorer">
          <form>Adorer</form>
          <def>« Signifie aussi hyperboliquement, Avoir beaucoup d’amour ou d’admiration pour quelqu’un. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l20">20</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="agrement">
          <form>Agrément</form>
          <def>« Signifie aussi, Ratification, consentement. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l670">670</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="air">
          <form>Air</form>
          <def>« Signifie encore, Maniere d’agir, de parler, de vivre, soit en bonne, ou en mauvaise part. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l172">172</ref>, <ref target="#l538">538</ref>, <ref target="#l691">691</ref>, <ref target="#l844">844</ref>, <ref target="#l1556">1556</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="amant">
          <form>Amant, ante</form>
          <def>« Qui aime et est aimé. » (Rich.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l15">15</ref>, <ref target="#l277">277</ref>, <ref target="#l701">701</ref>, <ref target="#l968">968</ref>, <ref target="#l1102">1102</ref>, <ref target="#l1152">1152</ref>, <ref target="#l1165">1165</ref>, <ref target="#l1360">1360</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ame">
          <form>Ame</form>
          <def>« Forme substantielle qui rend les corps vivants. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l248">248</ref>, <ref target="#l387">387</ref>, <ref target="#l563">563</ref>, <ref target="#l591">591</ref>, <ref target="#l600">600</ref>, <ref target="#l615">615</ref>, <ref target="#l719">719</ref>, <ref target="#l731">731</ref>, <ref target="#l836">836</ref>, <ref target="#l955">955</ref>, <ref target="#l1029">1029</ref>, <ref target="#l1037">1037</ref>, <ref target="#l1164">1164</ref>, <ref target="#l1168">1168</ref>, <ref target="#l1201">1201</ref>, <ref target="#l1208">1208</ref>, <ref target="#l1237">1237</ref>, <ref target="#l1392">1392</ref>, <ref target="#l1429">1429</ref>, <ref target="#l1433">1433</ref>, <ref target="#l1444">1444</ref>, <ref target="#l1568">1568</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ardeur">
          <form>Ardeur</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale, &amp; signifie, Passion, vivacité, emportement, fougue. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l211">211</ref>, <ref target="#l249">249</ref>, <ref target="#l298">298</ref>, <ref target="#l708">708</ref>, <ref target="#l734">734</ref>, <ref target="#l796">796</ref>, <ref target="#l803">803</ref>, <ref target="#l845">845</ref>, <ref target="#l871">871</ref>, <ref target="#l1308">1308</ref>, <ref target="#l1406">1406</ref>, <ref target="#l1580">1580</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="art">
          <form>Art</form>
          <def>« Tout ce qui se fait par l’adresse &amp; par l’industrie de l’homme. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l223">223</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="assujettir">
          <form>Assujettir</form>
          <def>« Vaincre, mettre sous le joug, sous la sujettion. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l75">75</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="assurance">
          <form>Assurance</form>
          <def>« se dit aussi des verités qu’on donne pour certaines &amp; infaillibles. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l90">90</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="attache">
          <form>Attache</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale de l’engagement qu’on a à quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1120">1120</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="avance">
          <form>Avance</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale, pour dire, Estre le premier à faire des propositions, des recherches d’amitié, des civilités. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l258">258</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="avantage">
          <form>Avantage</form>
          <def>« Ce qui fait preferer quelque chose à une autre, ce qui la met au dessus. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l281">281</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="aveu">
          <form>Aveu</form>
          <def>« Signifie aussi, Protection, approbation ; ordre, ou consentement donné. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l145">145</ref>, <ref target="#l251">251</ref>, <ref target="#l640">640</ref>, <ref target="#l1552">1552</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="babillard">
          <form>Babillard</form>
          <def>« Qui parle continuellement, &amp; qui ne dit que des choses de néant. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l786">786</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="balancer">
          <form>Balancer</form>
          <def>« Se dit figurément de l’examen qu’on fait dans son esprit des raisons qui le tiennent en suspens, &amp; qui le font incliner de part &amp; d’autre. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1166">1166</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="barbare">
          <form>Barbare</form>
          <def>« Estranger qui est  d’un pays fort éloigné, sauvage, mal poli, cruel, &amp; qui a des mœurs forts differentes des nostres. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l285">285</ref>, <ref target="#l667">667</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="barbarie">
          <form>Barbarie</form>
          <def>« Signifie aussi, Ignorance, grossiereté. La Grece où regnoient autrefois la science &amp; la politesse, est presentement plongée dans une affreuse <hi rend="i">barbarie</hi>. La France a été long temps un païs de <hi rend="i">barbarie</hi>. Et en ce sens il se dit tant des mœurs que du langage. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l329">329</ref>, <ref target="#l820">820</ref>, <ref target="#l1296">1296</ref>, <ref target="#l1613">1613</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="beaute">
          <form>Beaute</form>
          <def>« On appelle aussi absolument <hi rend="i">Beauté</hi>, la personne qui est belle. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l74">74</ref>, <ref target="#l255">255</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="bien">
          <form>Bien</form>
          <def>« En termes de Jurisprudence, signifie, Toutes sortes de possessions &amp; de richesses. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l95">95</ref>, <ref target="#l731">731</ref>, <ref target="#l1112">1112</ref>, <ref target="#l1156">1156</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="blanc-signe">
          <form>Blanc signé</form>
          <def>« Un papier, ou un parchemin, que l’on donne à quelqu’un pour le remplir à sa volonté. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1539">1539</ref>, <ref target="#l1540">1540</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="bourru">
          <form>Bourru, ue</form>
          <def>« Bizarre, qui ne veut point voir le monde, qui a des maximes extravagantes. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l130">130</ref>, <ref target="#l376">376</ref>, <ref target="#l700">700</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="brave">
          <form>Brave</form>
          <def>« Excellent en sa profession. On dit, un <hi rend="i">brave</hi> homme. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l311">311</ref>, <ref target="#l692">692</ref>, <ref target="#l751">751</ref>, <ref target="#l1224">1224</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="braver">
          <form>Braver</form>
          <def>« Choquer, mépriser quelqu’un, le traitter de haut en bas. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l189">189</ref>, <ref target="#l682">682</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="but">
          <form>But (de [...] en blanc)</form>
          <def>« Adv. fig./burl. Inconsidérément, à l’étourdi. » (Rich.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l788">788</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="butte">
          <form>Butte</form>
          <def>« On dit figurément, Estre en <hi rend="i">butte</hi> à l’envie, à la médisance, pour dire, Estre exposé aux traits de l’envie, de la médisance. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l132">132</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ca">
          <form>Ça</form>
          <def>« Çà est quelquefois une interjection pour exciter &amp; encourager à faire quelque chose. <hi rend="i">Çà, travaillons.</hi> » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l38">38</ref>, <ref target="#l879">879</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="cabinet">
          <form>Cabinet</form>
          <def>« Le lieu le plus retiré dans le plus bel appartement des Palais, des grandes maisons. Un appartement royal consiste en sale, antichambre, chambre, &amp; <hi rend="i">cabinet</hi> avec une galerie à costé. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l242">242</ref>, <ref target="#l638">638</ref>, <ref target="#l1147">1147</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="casaque">
          <form>Casaque</form>
          <def>« Manteau qu’on met par dessus son habit, &amp; qui a des manches où on fourre les bras. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1198">1198</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="cavalier">
          <form>Cavalier</form>
          <def>« Se dit aussi d’un galant qui courtise, qui mene une Dame. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l266">266</ref>, <ref target="#l272">272</ref>, <ref target="#l275">275</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="certificat">
          <form>Certificat</form>
          <def>« Témoignage qu’on donne par écrit, pour faire connoistre en Justice la verité de quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1267">1267</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="cesse">
          <form>Cesse</form>
          <def>« Qui se dit toûjours avec la negative, &amp; signifie alors, Continuation. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l50">50</ref>, <ref target="#l1230">1230</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="chagrin">
          <form>Chagrin</form>
          <def>« Melancolie, ennuy ; fascheuse, mauvaise humeur » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l2">2</ref>, <ref target="#l6">6</ref>, <ref target="#l23">23</ref>, <ref target="#l128">128</ref>, <ref target="#l132">132</ref>, <ref target="#l143">143</ref>, <ref target="#l149">149</ref>, <ref target="#l159">159</ref>, <ref target="#l167">167</ref>, <ref target="#l372">372</ref>, <ref target="#l1171">1171</ref>, <ref target="#l1541">1541</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="charmant">
          <form>Charmant, ante</form>
          <def>« Qui plaist extraordinairement, qui ravit en admiration. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l251">251</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="charme">
          <form>Charme</form>
          <def>« Se dit figurément de ce qui plaist extraordinairement, qui nous ravit en admiration. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l248">248</ref>, <ref target="#l392">392</ref>, <ref target="#l735">735</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="charmer">
          <form>Charmer</form>
          <def>« Signifie aussi, Dire ou faire quelque chose de merveilleux, de surprenant, plaire extraordinairement. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l742">742</ref>, <ref target="#l979">979</ref>, <ref target="#l1123">1123</ref>, <ref target="#l1593">1593</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="chien">
          <form>Chien</form>
          <def>« Se dit aussi par injure, &amp; pour reprocher à quelqu’un ses defauts. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l50">50</ref>, <ref target="#l54">54</ref>, <ref target="#l114">114</ref>, <ref target="#l594">594</ref>, <ref target="#l1265">1265</ref>, <ref target="#l1503">1503</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="coeur">
          <form>Cœur</form>
          <def>« Se dit figurément en choses spirituelles &amp; morales, &amp; signifie l’ame, &amp; ses principales fonctions, parce que quelques Medecins, &amp; entre autres Fernel, ont crû que les principales parties de nôtre esprit residoient au <hi rend="i">cœur</hi>, comme l’entendement, la volonté, la memoire. [...] se dit aussi des passions de l’ame. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l31">31</ref>, <ref target="#l96">96</ref>, <ref target="#l160">160</ref>, <ref target="#l190">190</ref>, <ref target="#l244">244</ref>, <ref target="#l263">263</ref>, <ref target="#l270">270</ref>, <ref target="#l272">272</ref>, <ref target="#l418">418</ref>, <ref target="#l450">450</ref>, <ref target="#l451">451</ref>, <ref target="#l617">617</ref>, <ref target="#l674">674</ref>, <ref target="#l738">738</ref>, <ref target="#l773">773</ref>, <ref target="#l816">816</ref>, <ref target="#l858">858</ref>, <ref target="#l971">971</ref>, <ref target="#l977">977</ref>, <ref target="#l984">984</ref>, <ref target="#l1052">1052</ref>, <ref target="#l1067">1067</ref>, <ref target="#l1073">1073</ref>, <ref target="#l1074">1074</ref>, <ref target="#l1125">1125</ref>, <ref target="#l1138">1138</ref>, <ref target="#l1244">1244</ref>, <ref target="#l1302">1302</ref>, <ref target="#l1331">1331</ref>, <ref target="#l1345">1345</ref>, <ref target="#l1357">1357</ref>, <ref target="#l1361">1361</ref>, <ref target="#l1367">1367</ref>, <ref target="#l1379">1379</ref>, <ref target="#l1566">1566</ref>, <ref target="#l1577">1577</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="commettre">
          <form>Commettre</form>
          <def>« Signifie aussi, Confier quelque chose à la prudence, à la fidelité de quelcun. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l648">648</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="concerter">
          <form>Concerter</form>
          <def>« Se dit figurément en choses morales, en parlant des assemblées de gens qui font dans un même interest, pour adviser aux moyens de faire reüssir quelque affaire. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l155">155</ref>, <ref target="#l1278">1278</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="conclure">
          <form>Conclurre</form>
          <def>« Signifie encore, Arrester une chose, la resoudre, promettre de l’accomplir. Ce mariage a été <hi rend="i">conclu</hi>, mais il ne sera executé que dans un an. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l156">156</ref>, <ref target="#l334">334</ref>, <ref target="#l427">427</ref>, <ref target="#l439">439</ref>, <ref target="#l446">446</ref>, <ref target="#l515">515</ref>, <ref target="#l595">595</ref>, <ref target="#l690">690</ref>, <ref target="#l879">879</ref>, <ref target="#l1325">1325</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="concordat">
          <form>Concordat</form>
          <def>« Convention qui se fait en matiere beneficiale sur quelque resignation ou permutation, &amp; generalementsur toutes les matieres Ecclesiastiques, contentieuses ou obligatoires. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1266">1266</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="conduite">
          <form>Conduitte</form>
          <def>« Commandement, direction ; action de celui qui conduit. [...] Il s’employe principalement dans un sens moral. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l648">648</ref>, <ref target="#l723">723</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="convenir">
          <form>Convenir</form>
          <def>« Advouër, être du même sentiment. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l43">43</ref>, <ref target="#l1268">1268</ref>, <ref target="#l1366">1366</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="conscience">
          <form>Conscience</form>
          <def>« Témoignage, ou jugement secret de l’ame raisonnable, qui donne l’approbation aux actions qu’elle fait qui sont naturellement bonnes, &amp; qui luy fait un reproche ou qui luy donne un repentir des mauvaises. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l114">114</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="consommer">
          <form>Consommer</form>
          <def>« signifie aussi, Venir au dernier but du mariage. Un mariage n’est point parfait, jusqu’à ce qu’il soit <hi rend="i">consommé</hi>. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l47">47</ref>, <ref target="#l814">814</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="contester">
          <form>Contester</form>
          <def>« Quereller, plaider, disputer. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l140">140</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="controler">
          <form>Controller</form>
          <def>« Signifie aussi, Examiner les actions d’autruy, les critiquer, y trouver à redire. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l542">542</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="coquin">
          <form>Coquin, ine</form>
          <def>« Terme injurieux qu’on dit à toutes sortes de petites gens qui menent une vie libertine, frippone, faineante, qui n’ont aucun sentiment d’honnesteté. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l80">80</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="cour">
          <form>Cour</form>
          <def>« se dit aussi à l’égard des Grands Seigneurs ou Superieurs, à qui on rend des visites frequentes, des respects, des assiduitez. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l3">3</ref>, <ref target="#l1342">1342</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="courroux">
          <form>Courroux</form>
          <def>« Mouvement impetueux de colere. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l135">135</ref>, <ref target="#l850">850</ref>, <ref target="#l999">999</ref>, <ref target="#l1025">1025</ref>, <ref target="#l1142">1142</ref>, <ref target="#l1428">1428</ref>, <ref target="#l1453">1453</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="courtier">
          <form>Courtier, iere</form>
          <def>« On disoit autrefois <hi rend="i">couratier</hi>, qui s’entremet pour faire des ventes, des prests d’argent. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l57">57</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="crever">
          <form>Crever</form>
          <def>« Se prend aussi quelquefois pour Mourir de quelque mort violente, ou simplement pour mourir. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l6">6</ref>, <ref target="#l765">765</ref>, <ref target="#l1195">1195</ref>, <ref target="#l1315">1315</ref>, <ref target="#l1547">1547</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="dedans">
          <form>Dedans</form>
          <def>« Adv. &amp; preposition de lieu &amp; de temps, qui signifie la même chose que <hi rend="i">dans</hi>. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l40">40</ref>, <ref target="#l466">466</ref>, <ref target="#l477">477</ref>, <ref target="#l480">480</ref>, <ref target="#l1337">1337</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="deffiance">
          <form>Deffiance</form>
          <def>« Crainte d’estre trompé, ou de ne pouvoir pas reüssir dans ses desseins. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l195">195</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="dehors">
          <form>Dehors</form>
          <def>« Adverbe de lieu relatif, opposé à <hi rend="i">dedans</hi>. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l40">40</ref>, <ref target="#l477">477</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="demon">
          <form>Demon</form>
          <def>« Les Anciens ont appelé ainsi certains Esprits ou Genies qui apparoissent aux hommes, tantost pour leur servir, tantost pour leur nuire. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l105">105</ref>, <ref target="#l370">370</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="destin">
          <form>Destin ou Destinee</form>
          <def>« Disposition ou enchaisnement de causes secondes ordonné par la Providence, qui emporte une necessité de l’évenement. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l75">75</ref>, <ref target="#l189">189</ref>, <ref target="#l307">307</ref>, <ref target="#l629">629</ref>, <ref target="#l1133">1133</ref>, <ref target="#l1175">1175</ref>, <ref target="#l1313">1313</ref>, <ref target="#l1594">1594</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="destiner">
          <form>Destiner</form>
          <def>« Projetter de faire quelque chose, en disposer dans sa pensée. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l317">317</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="diantre">
          <form>Diantre</form>
          <def>« Terme populaire dont se servent ceux qui font scrupule de nommer le Diable. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l108">108</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="differer">
          <form>Differer</form>
          <def>« Gagner du temps, remettre à une autrefois. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l158">158</ref>, <ref target="#l935">935</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="discours">
          <form>Discours</form>
          <def>« Expression faite de vive voix de ses pensées sur quelques points, sur quelques matieres qu’on veut faire entendre à plusieurs personnes. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l172">172</ref>, <ref target="#l173">173</ref>, <ref target="#l535">535</ref>, <ref target="#l547">547</ref>, <ref target="#l625">625</ref>, <ref target="#l652">652</ref>, <ref target="#l724">724</ref>, <ref target="#l945">945</ref>, <ref target="#l1368">1368</ref>, <ref target="#l1485">1485</ref>, <ref target="#l1544">1544</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="discretion">
          <form>Discretion</form>
          <def>« On dit que <hi rend="i">Les sol</hi>d<hi rend="i">ats vivent à discretion</hi>, pour dire, qu’Ils vivent chez leurs Hostes sans discipline &amp; sans autre regle que leur volonté. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l377">377</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="distance">
          <form>Distance</form>
          <def>« Esloignement d’une chose à l’égard d’une autre, soit pour le temps, soit pour le lieu ou la qualité. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l257">257</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="divan">
          <form>Divan</form>
          <def>« Terme de Relations. Lieu où on rend la justice, où on tient le Conseil dans les pays Orientaux. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1054">1054</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="divertir">
          <form>Divertir</form>
          <def>« Destourner, distraire. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l3">3</ref>, <ref target="#l73">73</ref>, <ref target="#l76">76</ref>, <ref target="#l163">163</ref>, <ref target="#l166">166</ref>, <ref target="#l865">865</ref>, <ref target="#l873">873</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="domter">
          <form>Domter</form>
          <def>« Subjuguer, se rendre maistre. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l191">191</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="eclaircir">
          <form>Éclaircir (s’)</form>
          <def>« S’informer, s’instruire » (Hug.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l196">196</ref>, <ref target="#l325">325</ref>, <ref target="#l332">332</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="egrillard">
          <form>Egrillard</form>
          <def>« Vif, éveillé, gaillard. [...] On l’emploie aussi substantivement. <hi rend="i">C’est un égrillard.</hi> Il est du style familier. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l537">537</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="emphyteose">
          <form>Emphytéose</form>
          <def>« Bail d’heritages à longues années. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1497">1497</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="empressement">
          <form>Empressement</form>
          <def>« Témoignage d’ardeur, d’affection, de diligence qu’on a pour quelque chose, pour achever quelque besogne. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l147">147</ref>, <ref target="#l664">664</ref>, <ref target="#l750">750</ref>, <ref target="#l1383">1383</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="encan">
          <form>Encan</form>
          <def>« Vente publique de meubles qui se fait par autorité de Justice, &amp; par un Sergent qui les adjuge au plus offrant &amp; dernier encherisseur. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l418">418</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="enchanter">
          <form>Enchanter</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale, de ceux qui se servent de paroles douces ou artificieuses pour plaire à quelqu’un, ou pour en tirer quelque avantage, ou pour se faire admirer. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l233">233</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="enjouement">
          <form>Enjouement</form>
          <def>« Belle humeur, gayeté qui paroist sur le visage ou dans les actions d’une personne, qui réjouït une compagnie. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l133">133</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="engager">
          <form>Engager</form>
          <def>« Avec le pronom personnel, signifie aussi, S’endetter, ou s’obliger à faire quelque chose, ou cautionner quelcun ; s’embarrasser. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l115">115</ref>, <ref target="#l1540">1540</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="enoncer">
          <form>Énoncer</form>
          <def>« Parler pour faire entendre sa pensée. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l262">262</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ennui">
          <form>Ennui</form>
          <def>« Il signifie aussi generalement, Fascherie, chagrin, deplaisir, souci. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l6">6</ref>, <ref target="#l8">8</ref>, <ref target="#l179">179</ref>, <ref target="#l314">314</ref>, <ref target="#l351">351</ref>, <ref target="#l722">722</ref>, <ref target="#l823">823</ref>, <ref target="#l829">829</ref>, <ref target="#l1038">1038</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ennuyer">
          <form>Ennuyer</form>
          <def>« Ouir, ou faire, ou souffrir quelque chose avec chagrin, avec desplaisir, causer de l’ennuy. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l237">237</ref>, <ref target="#l613">613</ref>, <ref target="#l864">864</ref>, <ref target="#l880">880</ref>, <ref target="#l1368">1368</ref>, <ref target="#l1639">1639</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="enrager">
          <form>Enrager</form>
          <def>« Se dit figurément en choses morales, des passions violentes qui vont presque jusqu’à la fureur. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l40">40</ref>, <ref target="#l769">769</ref>, <ref target="#l927">927</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="entretenir">
          <form>Entretenir</form>
          <def>« signifie aussi, Discourir avec une ou plusieurs personnes. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l170">170</ref>, <ref target="#l1336">1336</ref>,  </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="entretien">
          <form>Entretien</form>
          <def>« Se dit aussi de la conversation. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l184">184</ref>, <ref target="#l585">585</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="envie">
          <form>Envie</form>
          <def>« Signifie aussi la passion, le desir qu’on a d’avoir ou de faire quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l106">106</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="envisager">
          <form>Envisager</form>
          <def>« Regarder quelqu’un au visage. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l280">280</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="environner">
          <form>Environner</form>
          <def>« Enfermer tout autour, estre aux environs. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l324">324</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="esperance">
          <form>Esperance</form>
          <def>« Est aussi une pretention mondaine qui nous fait attendre un bien que nous desirons. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l89">89</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="estat">
          <form>Estat</form>
          <def>« Signifie aussi la qualité, la nature &amp; la constitution presente de quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l24">24</ref>, <ref target="#l68">68</ref>, <ref target="#l99">99</ref>, <ref target="#l183">183</ref>, <ref target="#l277">277</ref>, <ref target="#l719">719</ref>, <ref target="#l1132">1132</ref>, <ref target="#l1455">1455</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="estonner">
          <form>Estonner</form>
          <def>« Il signifie fig. Esbranler, faire trembler par quelque grande, par quelque violente commotion. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1147">1147</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="examiner">
          <form>Examiner</form>
          <def>« Faire une exacte perquisition ou recherche de quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l38">38</ref>, <ref target="#l323">323</ref>, <ref target="#l343">343</ref>, <ref target="#l375">375</ref>, <ref target="#l853">853</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="expliquer">
          <form>Expliquer</form>
          <def>« Signifie aussi, Esclaircir, declarer nettement sa volonté. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l174">174</ref>, <ref target="#l261">261</ref>, <ref target="#l282">282</ref>, <ref target="#l506">506</ref>, <ref target="#l911">911</ref>, <ref target="#l996">996</ref>, <ref target="#l999">999</ref>, <ref target="#l1464">1464</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="exposer">
          <form>Exposer</form>
          <def>« Signifie aussi, Courir le danger. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l9">9</ref>, <ref target="#l296">296</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="extravagance">
          <form>Extravagance</form>
          <def>« Chose dite ou faite mal à propos, follement. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l293">293</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="facon">
          <form>Façon</form>
          <def>« Se dit aussi de ces ceremonies, compliments &amp; grimaces incommodes qu’on fait avec des gens qui ne nous sont point familiers. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l82">82</ref>, <ref target="#l111">111</ref>, <ref target="#l545">545</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="fait">
          <form>Fait</form>
          <def>« Signifie encore, Ce qui est propre &amp; convenable à quelqu’un. <hi rend="i">Cette maison-là, cette Charge-là seroit bien le fait d’un tel. ce n’est pas mon fait. c’est justement votre fait. j’ay trouvé son fait</hi>. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1250">1250</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="fantasque">
          <form>Fantasque</form>
          <def>« Capricieux, bouru, qui a des manieres ou des humeurs extra-ordinaires. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l312">312</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="faveur">
          <form>Faveur</form>
          <def>« Signifie aussi la bienveillance d’un puissant, d’un superieur, le credit qu’on a sur son esprit. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l284">284</ref>, <ref target="#l976">976</ref>, <ref target="#l983">983</ref>, <ref target="#l1044">1044</ref>, <ref target="#l1579">1579</ref>, <ref target="#l1582">1582</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="feu">
          <form>Feu</form>
          <def>« se dit figurément en choses spirituelles &amp; morales de la vivacité de l’esprit, de l’ardeur des passions. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l141">141</ref>, <ref target="#l155">155</ref>, <ref target="#l276">276</ref>, <ref target="#l311">311</ref>, <ref target="#l530">530</ref>, <ref target="#l603">603</ref>, <ref target="#l609">609</ref>, <ref target="#l639">639</ref>, <ref target="#l975">975</ref>, <ref target="#l980">980</ref>, <ref target="#l1125">1125</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="flamme">
          <form>Flamme</form>
          <def>« Il se dit communément de l’amour prophane, Cet amant brusle d’une <hi rend="i">flamme</hi> innocente pour cette fille. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l780">780</ref>, <ref target="#l856">856</ref>, <ref target="#l916">916</ref>, <ref target="#l939">939</ref>, <ref target="#l952">952</ref>, <ref target="#l1165">1165</ref>, <ref target="#l1532">1532</ref>, <ref target="#l1552">1552</ref>, <ref target="#l1577">1577</ref>, <ref target="#l1649">1649</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree>
          <form>Flatter</form>
          <def xml:id="flatter1">« Signifie encore, Deguiser une verité qui seroit desagreable à celuy qui y est interessé, luy donner meilleure opinion d’une chose qu’il n’en doit avoir. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l97">97</ref>, <ref target="#l327">327</ref>, <ref target="#l553">553</ref> </xr>
          <def xml:id="flatter2">« Attribuer à une personne de bonnes qualitez qu’elle n’a pas, l’en loüer, l’en feliciter. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l139">139</ref>, <ref target="#l433">433</ref>, <ref target="#l1164">1164</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="foy">
          <form>Foy</form>
          <def>« Signifie encore, Serment, parole qu’on donne de faire quelque chose, &amp; qu’on promet d’executer. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l949">949</ref>, <ref target="#l1559">1559</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="forcat">
          <form>Forçat</form>
          <def>« Galerien, homme condamné aux galeres, qui tire sa rame par force. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1292">1292</ref>, <ref target="#l1295">1295</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="fortune">
          <form>Fortune</form>
          <def>« Se prend aussi pour Tout ce qui peut arriver de bien ou de mal à un homme. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l483">483</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="froid">
          <form>Froid</form>
          <def>« Se dit figurément de ce qui a peu de mouvement, qui est pesant, posé, serieux. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l141">141</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="front">
          <form>Front</form>
          <def>« Le haut du visage, la partie qui est au dessus des yeux. [...] Ce mot vient du Latin <hi rend="i">frons</hi>, du Grec <hi rend="i">phronein, sentire</hi>, de <hi rend="i">phren, mens, esprit, pensée</hi>. Martinius pour expliquer cette étymologie, dit que l’on voit sur le <hi rend="i">front</hi> des personnes ce qu’elles sont capables de faire, qu’on y découvre ce qu’elles sont, &amp; quoy elles pensent. Du Laurens le derive de <hi rend="i">ferre</hi>, parce qu’il porte des marques de ce que nous avons dans l’ame. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l281">281</ref>, <ref target="#l368">368</ref>, <ref target="#l418">418</ref>, <ref target="#l522">522</ref>, <ref target="#l526">526</ref>, <ref target="#l689">689</ref>, <ref target="#l892">892</ref>, <ref target="#l1299">1299</ref>, <ref target="#l1584">1584</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="funeste">
          <form>Funeste</form>
          <def>« Qui cause la mort, ou qui en menace, ou quelque autre accident fascheux, quelque perte considerable. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l27">27</ref>, <ref target="#l277">277</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="fureur">
          <form>Fureur</form>
          <def>« Se dit aussi de toutes les passions qui nous font agir avec de grands emportements. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l278">278</ref>, <ref target="#l1012">1012</ref>, <ref target="#l1152">1152</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="gambade">
          <form>Gambade</form>
          <def>« Saut ou posture qui se fait dans l’ardeur de la jeunesse par gayeté &amp; emportement. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l360">360</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="garder">
          <form>Garder de (se)</form>
          <def>« S’empêcher de » (Hug.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l152">152</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="geler">
          <form>Geler</form>
          <def>« Se dit figurément d’un froid accueil. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l141">141</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="gener">
          <form>Gener</form>
          <def>« Signifie plus communément, Tourmenter le corps ou l’esprit. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1076">1076</ref>, <ref target="#l1275">1275</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree>
          <form>Gentilhomme</form>
          <def>« Homme noble d’extraction, qui ne doit point sa Noblesse ni à sa charge, ni aux lettres du Princes. » (Fur.)</def>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="gesticuler">
          <form>Gesticuler</form>
          <def>« Faire des gestes indecens, mal à propos, &amp; en trop grand nombre. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l177">177</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="gourdin">
          <form>Gourdin</form>
          <def>« Gros baston &amp; court. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l82">82</ref>, <ref target="#l1199">1199</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="gouverneur">
          <form>Gouverneur</form>
          <def>« Officier du Roi qui commande dans une Province, dans une place. Un <hi rend="i">Gouverneur</hi> autrefois étoit obligé de soutenir trois assauts avant que de se rendre. Un <hi rend="i">Gouverneur</hi> represente le Roi dans une place, &amp; commande non seulement à la garnison, mais aussi aux bourgeois, &amp; à toutes les trouppes qui entrent dans sa place. » (Fur.)`</def>
          <xr>V. <ref target="#l116">116</ref>, <ref target="#l349">349</ref>, <ref target="#l498">498</ref>, <ref target="#l500">500</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="guignon">
          <form>Guignon</form>
          <def>« Malheur, accident dont on ne peut sçavoir la cause, ni à qui s’en prendre. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l50">50</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree>
          <form>Grace</form>
          <def xml:id="grace1">« Signifie aussi, Remerciement, &amp; se dit plus souvent au pluriel. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l129">129</ref>, <ref target="#l1519">1519</ref> </xr>
          <def xml:id="grace2">« Faveur qu’un Superieur fait à un inferieur sans qu’il l’ait meritée. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l166">166</ref>, <ref target="#l247">247</ref>, <ref target="#l1464">1464</ref>, <ref target="#l1492">1492</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="horreur">
          <form>Horreur</form>
          <def>« Se dit aussi de la forte haine ou aversion qu’on a pour certaines choses. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l32">32</ref>, <ref target="#l297">297</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="horrible">
          <form>Horrible</form>
          <def>« Se dit aussi d’une chose excessive soit en bien, soit en mal. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l2">2</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="huitieme">
          <form>Huitiéme</form>
          <def>« On appelle <hi rend="i">Droit de huitiesme</hi>, un certain droit d’Ayde qui se prend sur celuy qui vend du vin au détail. » (Acad.) cf. v. 502</def>
          <xr>V. <ref target="#l540">540</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="hymen">
          <form>Hymen</form>
          <def>« Signifie aussi poëtiquement, le mariage. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l22">22</ref>, <ref target="#l32">32</ref>, <ref target="#l47">47</ref>, <ref target="#l155">155</ref>, <ref target="#l518">518</ref>, <ref target="#l597">597</ref>, <ref target="#l603">603</ref>, <ref target="#l618">618</ref>, <ref target="#l628">628</ref>, <ref target="#l814">814</ref>, <ref target="#l857">857</ref>, <ref target="#l1051">1051</ref>, <ref target="#l1245">1245</ref>, <ref target="#l1251">1251</ref>, <ref target="#l1255">1255</ref>, <ref target="#l1410">1410</ref>, <ref target="#l1549">1549</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="indolent">
          <form>Indolent, ente</form>
          <def>« Qui n’est point touché des afflictions ordinaires. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l125">125</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="industrie">
          <form>Industrie</form>
          <def>« Dextérité, invention ; adresse à faire reüssir quelque chose, quelque dessein, quelque travail. » (Fur.)</def>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="industrieux">
          <form>Industrieuse</form>
          <def>« Qui a de l’industrie, ou qui est fait avec industrie. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l237">237</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="insigne">
          <form>Insigne</form>
          <def>« Remarquable, excellent, qui se fait distinguer de ses semblables. Il se dit tant en bonne qu’en mauvaise part. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1180">1180</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="insipide">
          <form>Insipide</form>
          <def>« Qui n’a rien de picquant, ou d’acide qui chatouille le goust, qui fasse quelque impression sur luy. [...] se dit aussi de la personne, &amp; de la partie où se fait l’impression de ce sentiment. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l728">728</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="intelligence">
          <form>Intelligence</form>
          <def>« Il signifie aussi, Correspondance, communication entre des personnes qui s’entendent l’une avec l’autre. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l852">852</ref>, <ref target="#l1184">1184</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="interdire">
          <form>Interdire</form>
          <def>« Se dit aussi de ceux qui se troublent, qui s’estonnent, &amp; qui ne sçauroient parler raisonnablement. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l646">646</ref>, <ref target="#l727">727</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="interesse">
          <form>Interesse, ee</form>
          <def>« On appelle un homme <hi rend="i">Interessé</hi>, celuy qui est avare, qui ne relâche aucune chose de ses Interests, qu’on peut gagner, corrompre aisement par argent. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l57">57</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="intrigant">
          <form>Intrigant, ante</form>
          <def>« Qui a des connoissances, qui se fourre par tout, &amp; qui avec son adresse fait les affaires d’autruy, &amp; les sciennes. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l57">57</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="intrigue">
          <form>Intrigue</form>
          <def>« Se dit aussi de cette cabale de gens qui par leurs advis, leurs connoissances, leurs adresses ; sçavent ombrouiller ou debarasser les affaires, &amp; en tirer du profit. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l59">59</ref>, <ref target="#l61">61</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="importer">
          <form>Importer</form>
          <def>« Estre de consideration. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l239">239</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="laidir">
          <form>Laidir</form>
          <def>« Enlaidir » (Hug.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l167">167</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="laisser">
          <form>Laisser (ne pas)</form>
          <def>« Signifie aussi, Estre, demeurer malgré quelque obstacle. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1277">1277</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="langoureux">
          <form>Langoureux</form>
          <def>« Infirme, valetudinaire, qui languit, qui a de la peine de guerir d’une maladie. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l127">127</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="lapidaire">
          <form>Lapidaire</form>
          <def>« Ouvrier qui taille les pierres précieuses, Marchand qui les debite, ou celuy qui est expert à les connoistre. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1467">1467</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="lie">
          <form>Lie</form>
          <def>« La partie la plus crasse, la plus grossiere du vin, de l’huile, &amp; des autres liqueurs. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l228">228</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="main">
          <form>Main</form>
          <def>« Se dit aussi de la part, du costé d’où vient quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l286">286</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="bonne-main">
          <form>En bonne main</form>
          <def>« On dit encore, qu’une affaire est en <hi rend="i">bonne main</hi>, pour dire, qu’elle est sous la conduite d’un homme qui la sçaura faire reüssir. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1377">1377</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="magot">
          <form>Magot</form>
          <def>« Se dit figurément des hommes difformes, laids, comme sont les singes, des gens mal bastis. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l878">878</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="malepeste">
          <form>Malepeste</form>
          <def>« Imprecation qu’on fait contre quelque chose, &amp; quelque fois avec admiration. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l362">362</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="marabout">
          <form>Marabout</form>
          <def>« Terme de Relations, est un Prestre Mahometan qui dessert une Mosquée, particulierement en Afrique. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l929">929</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="maraud">
          <form>Maraud</form>
          <def>« Terme injurieux qui se dit des gueux, des coquins qui n’ont ni bien ni honneur, qui sont capables de faire toutes sortes de laschetez. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l423">423</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="matois">
          <form>Matois</form>
          <def>« Rusé, difficile à estre trompé, adroit à tromper les autres. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l841">841</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="mesnager">
          <form>Mesnager</form>
          <def>« Signifie encore fig. Conduire, manier avec addresse. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l213">213</ref>, <ref target="#l781">781</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="moyen">
          <form>Moyen</form>
          <def>« Se dit aussi des adresses, des inventions, ou facilitez dont on se sert pour parvenir à ses fines. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l44">44</ref>, <ref target="#l103">103</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="muid">
          <form>Muid</form>
          <def>« Grande mesure de choses liquides. Le <hi rend="i">muid</hi> de vin de Paris contient deux cent quatrevingt pintes, selon le Reglement de Louis XIII. &amp; suivant les Ordonnances de Henri IV. de trois cents pintes. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l227">227</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="mutin">
          <form>Mutin, ine</form>
          <def>« Qui se revolte contre l’autorité legitime. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l339">339</ref>, <ref target="#l1201">1201</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="mystere">
          <form>Mystere</form>
          <def>« Se dit aussi de ce qu’on tient caché, qu’on ne veut pas descouvrir. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l58">58</ref>, <ref target="#l222">222</ref>, <ref target="#l776">776</ref>, <ref target="#l801">801</ref>, <ref target="#l993">993</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="necessaire">
          <form>Necessaire</form>
          <def>« On s’en sert aussi au substantif... On dit aussi d’un domestique, qu’il fait le <hi rend="i">necessaire</hi>, qu’il s’est rendu <hi rend="i">necessaire</hi>, quand il s’est mis en tel estat, qu’on a de la peine à se passer de luy. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l137">137</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="negative">
          <form>Negative</form>
          <def>« Action de nier, négation » (Hug.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l380">380</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="negoce">
          <form>Negoce</form>
          <def>« Trafic, ou commerce, soit en argent, soit en marchandises. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l923">923</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="noeud-gordien">
          <form>Nœud gordien</form>
          <def>«  Est un proverbe Grec, qui se dit d’un <hi rend="i">nœud</hi> qu’on ne sçauroit desnoüer : &amp; figurément, d’une difficulté qu’on ne peut resoudre. Il vient d’un <hi rend="i">nœud</hi> de courroyes indissoluble, que Gordius Roy de Phrygie mit dans un temple d’Apollon, en memoire de ce qu’il avoit esté salué Roy, parce qu’il estoit entré le premier dans ce temple, quoy qu’il fust d’ailleurs de race roturiere. Alexandre le couppa avec son espée, parcequ’il ne le pût desnoüer, &amp; que l’Oracle avoit predit que celuy qui le desnoüeroit seroit le vainqueur de l’Asie. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l512">512</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="objet">
          <form>Objet</form>
          <def>« Ce qui est opposé à nostre veuë, ou qui frappe nos autres sens, ou qui se represente à nostre imagination » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l30">30</ref>, <ref target="#l276">276</ref>, <ref target="#l1007">1007</ref>, <ref target="#l1134">1134</ref>, <ref target="#l1617">1617</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="oeillade">
          <form>Œuillade</form>
          <def>« Regard, action de veuë. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l309">309</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="passer">
          <form>Passer (se)</form>
          <def>« Signifie aussi, Se contenter. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l534">534</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="passion">
          <form>Passion</form>
          <def>« En Morale, se dit des différentes agitations de l’ame selon les divers objets qui se presentent à ses sens. [...] se dit par excellence de l’amour. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l14">14</ref>, <ref target="#l145">145</ref>, <ref target="#l233">233</ref>, <ref target="#l267">267</ref>, <ref target="#l644">644</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="pecher">
          <form>Pécher</form>
          <def>« Ce mot au figuré veut dire manquer. » (Rich.) L’expression « Pécher en mine » n’est pas attestée dans les dictionnaires, mais « Il signifie aussi, Faillir contre quelqu’autre regle que ce soit. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l376">376</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="peste">
          <form>Peste</form>
          <def>« Se dit quelquefois par admiration, ou par imprecation, ou serment. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l537">537</ref>, <ref target="#l567">567</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="pester">
          <form>Pester</form>
          <def>« S’emporter contre quelque chose, invectiver contre quelqu’un. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l40">40</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="positif">
          <form>Positif, ive</form>
          <def>« Qui est certain &amp; effectif, qu’on met en fait comme une chose constante &amp; assûrée. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1501">1501</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="pourvoir">
          <form>Pourvoir</form>
          <def>« Donner ordre à quelque chose. <hi rend="i">Voylà bien du desordre, il faut y pourvoir. on y a pourveu. pourvoyez à cette affaire. si les hommes n’y pourvoyent, Dieu y pourvoyra. il a pourveu à tous nos besoins</hi>. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1182">1182</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="pretendre">
          <form>Pretendre</form>
          <def>« Aspirer à quelque chose, avoir esperance de l’obtenir. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l241">241</ref>, <ref target="#l544">544</ref>, <ref target="#l699">699</ref>, <ref target="#l886">886</ref>, <ref target="#l926">926</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="presser">
          <form>Presser</form>
          <def>« Signifie aussi, Poursuivre vivement, tant au combat, qu’à la dispute. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l35">35</ref>, <ref target="#l733">733</ref>, <ref target="#l1046">1046</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="premice">
          <form>Premice</form>
          <def>« Se dit aussi par extension en Morale, du commencement des choses. » (<hi rend="sc">Fur.</hi>)</def>
          <xr>V. <ref target="#l28">28</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="prochain">
          <form>Prochain, aine</form>
          <def>« Qui n’est pas loin. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l122">122</ref>, <ref target="#l242">242</ref>, <ref target="#l264">264</ref>, <ref target="#l638">638</ref>, <ref target="#l1110">1110</ref>, <ref target="#l1147">1147</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="rapport">
          <form>Rapport</form>
          <def>« Se dit aussi de la relation de ce qu’a veu, ouy, ou connu celuy qu’on a commis pour s’informer de quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l319">319</ref>, <ref target="#l527">527</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ravage">
          <form>Ravage</form>
          <def>« Grand desordre qui se fait par violence. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l475">475</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ravir">
          <form>Ravir</form>
          <def>« Emporter quelque chose violemment. [...] se dit aussi en choses spirituelles et morales. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l577">577</ref>, <ref target="#l1037">1037</ref>, <ref target="#l1429">1429</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="rebus">
          <form>Rebus</form>
          <def>« Jeu d’esprits mediocres ou populaires qui font des equivoques sur des mots couppez, ou joints ensemble, ou sur quelques peintures qui les representent. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1338">1338</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="remettre">
          <form>Remettre (se)</form>
          <def>« On dit encore, <hi rend="i">Se remettre quelque chose</hi>, pour dire, En rappeller l’idée, le souvenir. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l369">369</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="renegat">
          <form>Renegat</form>
          <def>« Qui a renoncé à la Foy de <hi rend="sc">Jesus</hi>-<hi rend="sc">Christ</hi> pour embrasser une autre Religion. On le dit proprement de ceux qui se rendent Mahometans. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l100">100</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="repos">
          <form>Repos</form>
          <def>« Se dit aussi d’une quietude d’esprit &amp; de corps qui les met hors de trouble, de crainte &amp; de soins. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l69">69</ref>, <ref target="#l239">239</ref>, <ref target="#l291">291</ref>, <ref target="#l401">401</ref>, <ref target="#l658">658</ref>, <ref target="#l878">878</ref>, <ref target="#l918">918</ref>, <ref target="#l1031">1031</ref>, <ref target="#l1549">1549</ref>, <ref target="#l1587">1587</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="ressentiment">
          <form>Ressentiment</form>
          <def>« Il signifie aussi, le souvenir qu’on garde des bienfaits, ou des injures. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l13">13</ref>, <ref target="#l1023">1023</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="retour">
          <form>Retour</form>
          <def>« On dit, <hi rend="i">Estre sur le retour</hi>, pour dire, Commencer à deschoir, à viellir, à decliner, à perdre de sa vigueur, de son esclat. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1154">1154</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="rosser">
          <form>Rosser</form>
          <def>« Terme populaire. Bastonner rudement quelqu’un, le traitter en rosse ; &amp; se dit par extension de toutes sortes de mauvais traittements. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1319">1319</ref>, <ref target="#l1347">1347</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="sauf-conduit">
          <form>Sauf-conduit</form>
          <def>« Assûrance qu’on donne par écrit à quelqu’un de la seureté de sa personne pour aller &amp; venir en liberté. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l404">404</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="savoir">
          <form>Sçavoir</form>
          <def>« Connoistre, avoir connoissances de. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1">1</ref>, <ref target="#l159">159</ref>, <ref target="#l197">197</ref>, <ref target="#l271">271</ref>, <ref target="#l427">427</ref>, <ref target="#l458">458</ref>, <ref target="#l516">516</ref>, <ref target="#l647">647</ref>, <ref target="#l714">714</ref>, <ref target="#l745">745</ref>, <ref target="#l854">854</ref>, <ref target="#l881">881</ref>, <ref target="#l953">953</ref>, <ref target="#l1399">1399</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="sensible">
          <form>Sensible</form>
          <def>« Se dit figurément en choses morales, &amp; en parlant de l’émotion de l’ame &amp; des passions. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l15">15</ref>, <ref target="#l823">823</ref>, <ref target="#l867">867</ref>, <ref target="#l1125">1125</ref>, <ref target="#l1406">1406</ref>, <ref target="#l1435">1435</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="serrail">
          <form>Serrail</form>
          <def>« On le dit par excellence du Palais où habite le Grand Seigneur à Constantinople, où il tient la cour, où logent ses Concubines. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l505">505</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="singulier">
          <form>Singulier</form>
          <def>« Qui est seul ; unique ; hors de comparaison ; rare ; excellent. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l761">761</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree>
          <form>Soin</form>
          <def xml:id="soin1">« Diligence qu’on apporte à faire reüssir une chose, à la garder &amp; à la conserver, à la perfectionner. » […]</def>
          <xr>V. <ref target="#l118">118</ref>, <ref target="#l187">187</ref>, <ref target="#l196">196</ref>, <ref target="#l361">361</ref>, <ref target="#l421">421</ref>, <ref target="#l441">441</ref>, <ref target="#l601">601</ref>, <ref target="#l623">623</ref>, <ref target="#l648">648</ref>, <ref target="#l725">725</ref>, <ref target="#l847">847</ref>, <ref target="#l962">962</ref>, <ref target="#l1042">1042</ref>, <ref target="#l1137">1137</ref>, <ref target="#l1262">1262</ref>, <ref target="#l1553">1553</ref> </xr>
          <def xml:id="soin2">« Se dit des soucis, des inquietudes qui émeuvent, qui troublent l’ame. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1154">1154</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="soucy">
          <form>Soucy</form>
          <def>« Signifie aussi, Chagrin, inquietude d’esprit, peut-être à cause qu’il fait devenir jaune. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l107">107</ref>, <ref target="#l1607">1607</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="stupide">
          <form>Stupide</form>
          <def>« Qui n’a point d’esprit, dont l’ame paroit immobile &amp; sans sentiment. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l727">727</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="suborneur">
          <form>Suborneur</form>
          <def>« Qui suborne, qui corrompt, qui desbauche. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1190">1190</ref></xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="tant">
          <form>Tant</form>
          <def>« Adv. qui se dit des nombres, soit precis, soit indefinis. » (Fur.)</def>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="tendre">
          <form>Tendre</form>
          <def>« Signifie aussi fig. Sensible à l’amitié, à la compassion, &amp; plus particulièrement à l’amour. » (Acad.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l193">193</ref>, <ref target="#l230">230</ref>, <ref target="#l395">395</ref>, <ref target="#l608">608</ref>, <ref target="#l968">968</ref>, <ref target="#l974">974</ref>, <ref target="#l1361">1361</ref>, <ref target="#l1580">1580</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="tendresse">
          <form>Tendresse</form>
          <def>« Sensibilité du cœur &amp; de l’ame. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l289">289</ref>, <ref target="#l1117">1117</ref>, <ref target="#l1139">1139</ref>, <ref target="#l1425">1425</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="tenir">
          <form>Tenir</form>
          <def>« Signifie encore, Faire executer quelque chose. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l103">103</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="teste-a-teste">
          <form>Teste a teste</form>
          <def>« L’un devant l’autre. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l557">557</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="toucher">
          <form>Toucher</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale, en parlant des passions. Cet homme est fort amoureux, il est bien <hi rend="i">touché</hi>, cette beauté a <hi rend="i">touché</hi> son cœur. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l844">844</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="tourment">
          <form>Tourment</form>
          <def>« Douleur violente que souffre le corps, soit par une cause intestine, soit estrangere. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1034">1034</ref>, <ref target="#l1163">1163</ref>, <ref target="#l1438">1438</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="transport">
          <form>Transport</form>
          <def>« Se dit aussi figurément en choses morales, du trouble ou de l’agitation de l’ame par la violence des passions. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l259">259</ref>, <ref target="#l630">630</ref>, <ref target="#l717">717</ref>, <ref target="#l836">836</ref>, <ref target="#l858">858</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="travail">
          <form>Travail</form>
          <def>« Il a <hi rend="i">travaux</hi> au pluriel. Occupation, application à quelque exercice penible, fatigant, ou qui demande de la dexterité. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l1608">1608</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="traverse">
          <form>Traverse</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale, &amp; signifie un obstacle à la reüssite des affaires qu’on entreprend. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l806">806</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="trouble">
          <form>Trouble</form>
          <def>« Se dit figurément en Morale des desordres de l’ame causés par les passions. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l160">160</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="truchement">
          <form>Truchement</form>
          <def>« On dit aussi de celui qui parle, qui negotie par l’organe d’autrui, que c’est un tel qui est son <hi rend="i">trucheman</hi>. Il se dit aussi au figuré, Ses regards, <hi rend="i">truchemens</hi> de l’ardeur qui la touche. <hi rend="sc">La Fon.</hi> » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l263">263</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="violons">
          <form>Violons (payer les)</form>
          <def>« Se dit proverbialement en ces phrases. Il paye les <hi rend="i">violons</hi>, &amp; les autres dansent, pour dire, Il fait les frais, il a toute la peine d’une chose, &amp; les autres le plaisir. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l942">942</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="vivat">
          <form>Vivat</form>
          <def>« Exclamation, cry de joie par où l’on témoigne que l’on souhaite à quelqu’un une longue vie, ou de la gloire. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l526">526</ref> </xr>
        </entryFree>
        <entryFree xml:id="voeu">
          <form>Vœu</form>
          <def>« Signifie aussi, Souhait, priere, serment, suffrage. » (Fur.)</def>
          <xr>V. <ref target="#l275">275</ref>, <ref target="#l287">287</ref>, <ref target="#l561">561</ref>, <ref target="#l1409">1409</ref>, <ref target="#l1574">1574</ref> </xr>
        </entryFree>
      </div>
      <div>
        <head>Ordre chronologique des pièces de théâtre de M. de Montfleury.</head>
        <p><hi rend="i">Le Mariage de Rien</hi>, Comédie en vers de huit syllabes, en un Acte, 1660.</p>
        <p><hi rend="i">Les Bêtes raisonnables</hi>, Comédie en vers, en un Acte, 1661.</p>
        <p><hi rend="i">Le Mari sans Femme</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1663.</p>
        <p><hi rend="i">L’Impromptu de l’Hôtel de Condé</hi>, Comédie en vers, en un Acte, 1663.</p>
        <p><hi rend="i">Trasibule</hi>, Tragi-Comédie, 1663.</p>
        <p><hi rend="i">L’École des jaloux, ou le Cocu Volontaire</hi>, Comédie en vers, en trois Actes, 1664.</p>
        <p><hi rend="i">L’ École des Filles</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1666.</p>
        <p><hi rend="i">La Femme Juge et Partie</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1669.</p>
        <p><hi rend="i">Le Procès de la Femme Juge et Partie</hi>, Comédie en vers, en un Acte, 1669.</p>
        <p><hi rend="i">Le Gentil-Homme de Beauce</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1670.</p>
        <p><hi rend="i">La Fille Capitaine</hi>, Comédie en vers &amp; en cinq Actes, 1672.</p>
        <p><hi rend="i">L’Ambigu Comique, ou Les Amours de Didon et d’Énée</hi>, Tragédie en trois Actes, en vers, mêlée de trois Intermédes comiques, 1673.</p>
        <p><hi rend="i">Le Comédien Poete</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, de moitié avec M. Corneille de l’Isle, 1673.</p>
        <p><hi rend="i">Trigandin ou Martin-Braillard</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1674.</p>
        <p><hi rend="i">Crispin, Gentilhomme</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1677.</p>
        <p><hi rend="i">La Dame Médecin</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, 1678.</p>
        <p><hi rend="i">La Dupe de soi-même</hi>, Comédie en vers, en cinq Actes, sans date &amp; peut-être non représentée.</p>
        <table>
          <row>
            <cell cols="3">Édition 1705</cell>
            <cell cols="2">Manuscrit et remarques</cell>
          </row>
          <row>
            <cell>Acte I</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : La scène se passe à Alger. Zaïre, la servante de Célime, demande à des esclaves de venir pour divertir sa maîtresse.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Les esclaves en question, Julie et Carlos, se lamentent, ainsi que leurs valets respectifs, Marine et Tomire, chacun faisant peser la responsabilité de leur situation à un tiers. Finalement, Marine apprend à tous la possibilité d’être sauvés par Dom Brusquin, le mari trompé de Julie, grâce à une lettre qu’elle lui a envoyée. Reproches de Carlos.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Zaïre reparaît pour annoncer la venue imminente de Célime et les met en garde contre l’humeur maussade de sa maîtresse.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Zaïre souhaite la conclusion du mariage de Célime avec Fatiman car l’union lui rendra sa liberté.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Avant de voir les esclaves, Célime interroge sa servante sur le comportement des deux amants, Julie et Carlos.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Concert sur la manière d’aimer des européens. Célime demande à Carlos de rester et lui apprend qu’elle l’aime et entend partager cet amour.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Embarras de Carlos.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : Tomire informe son maître que Dom Brusquin vient de débarquer au port d’Alger avec l’intention de récupérer sa femme. Carlos est désespéré et entraîne Tomire pour s’assurer des dires de son valet.</cell>
                </row>
              </table>
            </cell>
            <cell cols="2">Acte I</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : La scène se passe à Alger. Tomire, esclave de Fatiman mais ancien valet de Tomire, prévient les autres esclaves qu’ils vont bientôt pouvoir se présenter devant Célime. Zaïre confirme l’avis de Tomire.</cell>
                  <cell>Didascalie : « Six Violons esclaves ».</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Les esclaves en question, Julie et Carlos, se lamentent, ainsi que leurs valets respectifs, Marine et Tomire, chacun faisant peser la responsabilité de leur situation à un tiers. Finalement, Marine apprend à tous la possibilité d’être sauvés par Dom Brusquin, le mari trompé de Julie, grâce à une lettre qu’elle lui a envoyée. Reproches de Carlos. Tomire annonce l’arrivée de Zaïre.</cell>
                  <cell>Remarque burlesque de Marine : « Ne pleure donc plus tant car tu me feras rire ». <lb/>Emploi suggestif de « la nuit ». <lb/>Détails sur le concert. <lb/>Renouvellement de l’appréhension de Julie à revoir Dom Brusquin ; insistance sur le rôle d’intrigante de Marine ; méfiance de Tomire à l’égard de Zaïre.
                    </cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Zaïre reparaît pour annoncer la venue imminente de Célime et les met en garde contre l’humeur maussade de sa maîtresse. Zaïre souhaite la conclusion du mariage de Célime avec Fatiman car l’union rendra la liberté.</cell>
                  <cell>Insistance sur la taille de Zaïre.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Zaïre expose son plan d’espionner sa maîtresse.</cell>
                  <cell>Sérail paraît rempli de regards.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Avant de voir les esclaves, Célime interroge sa servante sur le comportement des deux amants, Julie et Carlos.</cell>
                  <cell>Zaïre renouvelle ses compliments sur les chants des amants.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Plainte de Célime qui avoue aimer Carlos et veut le voir pour juger de son amour pour Julie.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 :Concert sur l’amour plus fort que l’esclavage. Célime demande à Carlos de rester. Zaïre se cache pour les entendre.</cell>
                  <cell>Concert plus long et qui change de thème.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : Célime apprend à Carlos qu’elle l’aime et entend partager cet amour. Zaïre a tout entendu.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 9 : Embarras de Carlos.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 10 : Tomire informe son maître que Dom Brusquin vient de débarquer au port d’Alger avec l’intention de récupérer sa femme. Carlos est désespéré et entraîne Tomire pour s’assurer des dires de son valet.</cell>
                  <cell/>
                </row>
              </table>
            </cell>
          </row>
          <row>
            <cell>Acte II</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Dom Brusquin, maussade, lit la lettre de Marine. Son valet, Gusman, lui demande de s’expliquer. Dom Brusquin lui fait part de ses peurs de cocuage mais avoue aussi sa passion pour Julie qu’il veut récupérer contre rançon. Il souhaite tout de même s’assurer de la fidélité de sa femme auprès de Marine.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Tomire amène Marine.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Joie de Marine. Dom Brusquin lui assure une récompense mais veut d’abord une explication de l’enlèvement et une assurance de la fidélité de Julie. Arrivée de Fatiman, sortie de Julie.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Fatiman, accompagné de Stamorat, réclame 5000 ducats pour rendre Julie. Marchandage infructueux de Dom Brusquin. Fatiman sort voir Célime avec des souhaits de mariage.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Célime déclare à Fatiman que l’amour l’amène : Carlos en est la cause et pour le remercier elle demande à Fatiman de lui rendre la liberté.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Restée seule avec Fatiman, Zaïre annonce la trahison de Célime : cette dernière aime Carlos bien que l’esclave soit insensible à ses avances. Zaïre est chargée de surveiller Célime et assure d’autant mieux sa liberté.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Julie cherche Carlos pour le prévenir de l’arrivée de Dom Brusquin et lui demander d’intercéder auprès de Célime. Carlos annonce à Julie qu’ils sont perdus puisque Célime est amoureuse de lui.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : Arrivée de Dom Brusquin qui fait partir Carlos.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 9 : Julie part aussi.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 10 : Dom Brusquin se repent de son amour.</cell>
                </row>
              </table>
            </cell>
            <cell cols="2">Acte II</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Dom Brusquin, maussade, lit la lettre de Marine. Son valet, Gusman, lui demande de s’expliquer. Dom Brusquin lui fait part de ses peurs de cocuage mais avoue aussi sa passion pour Julie qu’il veut récupérer contre rançon. Il souhaite tout de même s’assurer de la fidélité de sa femme auprès de Marine.</cell>
                  <cell>Didascalie : il lit. <lb/>Annonce du lieu où se passe la scène : Alger.
                    </cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Tomire amène Marine.</cell>
                  <cell>Didascalie : bas.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Joie de Marine. Dom Brusquin lui assure une récompense mais veut d’abord une explication de l’enlèvement et une assurance de la fidélité de Julie. Avant d’aller voir Fatiman, Dom Brusquin fait part de la récompense qu’il accorde à Marine : un mari qui ne lui convient pas. Arrivée de Fatiman, sortie de Julie.</cell>
                  <cell>Grande fantaisie verbale.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Fatiman, accompagné de Stamorat, réclame 5000 ducats pour rendre Julie. Marchandage infructueux de Dom Brusquin.</cell>
                  <cell>Fatiman revient sur une image « positive » de la femme. Il vouvoie Dom Brusquin.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Fatiman sort voir Célime avec des souhaits de mariage.</cell>
                  <cell>Sérail rempli de regards.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Zaïre se fait porte parole de sa maîtresse qui souhaite entendre chanter les esclaves pour adoucir sa peine. Fatiman veut connaître les raisons du chagrin de Célime et pourquoi elle diffère toujours le mariage. Zaïre demande le tête à tête pour partager un secret.</cell>
                  <cell>Portée thérapeutique du chant.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Zaïre avoue à Fatiman que sa maîtresse aime l’esclave Carlos et que ce dernier reste insensible à ses avances. Fatiman veut prendre sur le fait la traîtresse et prend congé.</cell>
                  <cell/>
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                <row>
                  <cell>Scène 8 : Zaïre annonce l’arrivée de Carlos.</cell>
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                <row>
                  <cell>Scène 9 : Zaïre apprend à Carlos qu’il doit se présenter devant Célime avec Julie. Ce dernier aperçoit justement la belle.</cell>
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                <row>
                  <cell>Scène 10 : Carlos, resté seul avec Julie, partage ses inquiétudes et son désespoir. Arrivée de Dom Brusquin.</cell>
                  <cell>Dialogue digne d’une tragédie.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 11 : Dom Brusquin surprend Julie avec Carlos et les prévient de leur séparation prochaine. Julie prend congé.</cell>
                  <cell>Propos grivois : vers 815 à 819 « Cependant vous pouvez faire vostre pacquet/Car je me trompe fort enfin pour parler net/Si bien tost bec a bec l’hymen ne nous regale/D’un giste ou nostre teint naura pas peur du hasle ».
                    </cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 12 : Dom Brusquin se repent de son amour.</cell>
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              </table>
            </cell>
          </row>
          <row>
            <cell>Acte III</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Stamorat prévient Fatiman que Dom Brusquin, en possession de la rançon, désire le voir pour récupérer sa femme. Fatiman diffère la rencontre et avertit Zaïre qu’il veut démarier Julie en faveur de Carlos et punir Célime par des chants qui la blessent.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Célime, impatiente, vient à la rencontre de sa servante qui lui apprend que Carlos a montré stupeur et tristesse à  l’annonce de sa libération par Célime et qu’il semble bien amoureux de Julie. Célime demande à Zaïre d’aller chercher Tomire, qui est en vue, pour s’éclaircir sur cet amour.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Alors qu’il allait annoncer la venue de Dom Brusquin à Fatiman, Tomire est interrogé sur son maître. Célime lui donne une bague et se dit au fait des aventures de Carlos que Tomire développe alors longuement : sa qualité de noble en Espagne, héritier potentiel d’un riche oncle, avare mais à la santé solide ; son amour pour Julie et leur aventure. En contradiction avec le précédent discours de Zaïre, Tomire conte la joie récente de Carlos, due à la promesse de sa libération. Tomire veut informer son maître du contentement de Célime mais elle s’y oppose, assurant qu’elle s’en chargera elle-même.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Remontrances de Célime à Zaïre.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Stamorat se présente et offre un coffret de pierreries à Célime de la part de son maître. Célime reçoit le cadeau froidement mais s’enchante à l’annonce d’un prochain concert des amants.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Stamorat rapporte à son maître les réactions de Célime aux deux présents. Fatiman fait venir Dom Brusquin.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Dom Brusquin demande sa femme contre son argent mais Fatiman lui annonce que leur marché a changé : Julie est libre et va prendre un nouvel époux ; la rançon de Dom Brusquin servira pour la noce. Jérémiades de Dom Brusquin qui finit par s’en aller. Stamorat est chargé par Fatiman de le surveiller.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : Arrivée de Célime qui s’inquiète de ne rien voir installé pour le concert promis. Fatiman l’informe de la venue des chanteurs.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 9 : Le concert déplaît fortement à Célime qui veut s’en venger. Fatiman feint de s’inquiéter de la réaction de Célime et promet de châtier les personnes qui l’offensent : ce sont Julie et Carlos, qu’elle veut les voir séparés et punis.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 10 : Julie implore la grâce de Fatiman. Ce dernier propose la mise en place d’un stratagème mais Zaïre doit continuer à duper sa maîtresse.</cell>
                </row>
              </table>
            </cell>
            <cell cols="2">Acte III</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Célime fait part à Zaïre de sa déception face à l’insensibilité de Carlos. Célime aperçoit Tomire.</cell>
                  <cell>Satire générale du caractère des femmes par Zaïre.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Tomire est arrêté et interrogé sur son maître. Célime lui donne une bague et se dit au fait des aventures de Carlos que Tomire développe alors longuement : sa qualité de noble en Espagne, héritier potentiel d’un riche oncle, avare mais à la santé solide ; son amour pour Julie et leur aventure. En contradiction avec le précédent discours de Zaïre, Tomire conte la joie récente de Carlos, due à la promesse de sa libération. Tomire veut informer son maître du contentement de Célime mais elle s’y oppose, disant qu’elle feindra de tout ignorer.</cell>
                  <cell>Didascalie. Célime se montre très peinée. Double discours ironique. Pas de didascalie sur la bague.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Célime révèle à Zaïre son désir de se venger des deux amants. Elle les entend chanter.</cell>
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                <row>
                  <cell>Scène 4 : Célime surprend les amants en répétition et demande à ce qu’ils poursuivent le concert. À la fin du concert, Célime se retire.</cell>
                  <cell>Concert de deux amants dont la séparation est avortée in extremis.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Dom Brusquin surprend à nouveau les deux amants et demande à Carlos de partir.</cell>
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                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Dom Brusquin expose son intention de pardonner à Julie son infidélité si elle le suit. Refus de Julie qui prétend être liée à un autre. Dom Brusquin dit à Julie de partir.</cell>
                  <cell>Thème du cocuage.</cell>
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                  <cell>Scène 7 : Resté seul, Dom Brusquin s’étonne du comportement de Julie mais s’empresse d’aller conclure son marché avec Fatiman.</cell>
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                <row>
                  <cell>Scène 8 : Fatiman expose son projet à Carlos et Stamorat avant l’arrivée de Dom Brusquin. Dom Brusquin demande sa femme contre son argent mais Fatiman lui apprend que leur marché a changé : Julie est libre et va prendre un nouvel époux, la rançon de Dom Brusquin servira pour la noce. Jérémiades de Dom Brusquin qui finit par s’en aller.</cell>
                  <cell>Adresse de Fatiman aux personnages, au public. <lb/>Renouvellement de propos grivois de Dom Brusquin.
                    </cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 9 : Fatiman rassure Carlos sur le fait que Dom Brusquin sera suivi et propose d’aller rendre compte de la chose à Julie.</cell>
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            </cell>
          </row>
          <row>
            <cell>Acte IV</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Zaïre assure à sa maîtresse son entière fidélité et demande des explications : Célime souhaite mettre Carlos dans une situation si inconfortable, qu’en désespoir de cause il cèdera à ses avances ; suffisamment dupe, Fatiman rompra ensuite ses fers.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Fatiman se félicite, en présence de Célime, de voir enfin leur mariage se conclure mais cette dernière veut d’abord savoir si sa vengeance a été exécutée : Fatiman lui apprend le triste sort de Carlos et avoue aussi qu’il n’a pas eu la même rigueur pour Julie, voyant en elle un double de Célime. Célime feint alors la jalousie et accuse Fatiman d’aimer l’esclave. Pour prouver son innocence, Fatiman devra chasser Julie en la rendant à son époux et bannir Carlos d’Alger en le faisant prendre la mer. Avant toute exécution, Célime demande un entretien particulier avec l’esclave. Sceptique, Fatiman se cache pour comprendre les manigances de Célime. Restée avec Zaïre, elle l’avise qu’un navire anglais est prêt à leur faire quitter le port d’Alger le soir même et que, dans la situation à venir, Carlos finira bien par répondre à son amour.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Carlos est amené à Célime : celle-ci lui démontre sa toute puissance, lui fait un présent et lui demande, avant de partir, de suivre dorénavant les ordres de Zaïre s’il veut être sauvé.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Resté seul avec Zaïre, Carlos s’inquiète de l’aide que celle-ci offre à Célime. C’est alors que Fatiman sort de sa cachette et promet de se venger. De plus, il voit que Célime a offert à Carlos son présent... Sa fureur augmente et le cadeau lui inspire aussi un stratagème... Pour le moment, Zaïre doit donner toute espérance à Célime quant à l’amour de Carlos.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Tomire arrive pour raconter les malheurs de Dom Brusquin qui s’est fait battre par la suite de Turcs et avertit de sa venue. Fatiman prévient Carlos qu’il doit rester caché.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Jérémiades de Dom Brusquin que Stamorat amène à Fatiman. Dom Brusquin refuse toujours d’être présent au mariage de sa femme. Fatiman envisage son absence à condition qu’il signe un contrat de divorce dont il serait l’instigateur. Dom Brusquin refuse. Fatiman lui laisse alors une heure pour se résoudre, au-delà de ce délai, il sera condamné à l’esclavage et aux galères.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Jérémiades de Dom Brusquin en présence de Stamorat.</cell>
                </row>
              </table>
            </cell>
            <cell cols="2">Acte IV</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Fatiman demande à Célime les raisons qui lui font différer leur mariage. La dame fait part de ses jaloux soupçons : elle veut que Julie s’en aille mais ne s’engage pas pour autant à conclure le mariage.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Fatiman fait part à Stamorat de ses vœux de vengeance. Des gens arrivent.</cell>
                  <cell>Explication psychologique à la perte d’amour soudaine de Fatiman. Davantage de vraisemblance.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Stamorat annonce la venue de Marine et Tomire mais Fatiman est déjà parti. Stamorat le suit.</cell>
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                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Tomire reparle de son amour. Marine le rabroue, arguant qu’elle n’a plus reçu de marques de tendresse depuis leur capture. Carlos explique son insensibilité par ses rudes conditions de vie mais ses sentiments n’ont jamais changé et Julie a même consenti au mariage des deux valets... Julie arrive.</cell>
                  <cell>Paroles « basses » de Tomire.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Carlos expose à Julie le discours qui a fait fléchir Fatiman en leur faveur. Julie se montre plus sceptique quant à la possibilité de leur mariage. Carlos la rassure.</cell>
                  <cell>Cruauté des turcs mise en avant. Discours de Julie sur la bienséance qui empêche le mariage. Question de l’invraisemblance abordée.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Tomire arrive pour raconter les malheurs de Dom Brusquin qui s’est fait battre par la suite de Turcs et annonce sa venue. Julie part et Carlos va prévenir Fatiman.</cell>
                  <cell>Bouffonnerie de la pièce revendiquée par Tomire. Didascalie « en riant ».</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Jérémiades de Dom Brusquin que Stamorat amène à Fatiman.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : Dom Brusquin refuse toujours d’être présent au mariage de sa femme. Fatiman envisage son absence à condition qu’il signe un contrat de divorce dont il serait l’instigateur. Dom Brusquin refuse de signer. Fatiman lui laisse une heure pour se résoudre avant de le condamner à l’esclavage et aux galères.</cell>
                  <cell>Discours de Dom Brusquin sur sa mauvaise grâce appuyé.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène dernière : Jérémiades de Dom Brusquin en présence de Stamorat.</cell>
                  <cell>Didascalie « le chassant ».</cell>
                </row>
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            </cell>
          </row>
          <row>
            <cell>Acte V</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Retrouvailles de Marine et Tomire qui, pour mener à bien le plan de Fatiman, attendent Célime. Tomire a appris à Marine que l’oncle de Carlos est mort et que le frère de ce dernier vient payer leur rançon. Tomire profite aussi de l’attente pour reparler de son amour. Marine le rabroue, arguant qu’elle n’a plus reçu de marques de tendresse depuis leur capture. Carlos explique son insensibilité par ses rudes conditions de vie mais ses sentiments n’ont jamais changé et Julie a même consenti au mariage des deux valets... Célime apparaît, conversant avec Zaïre.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Célime s’inquiète des préparatifs du départ auprès de Zaïre qui la rassure. Elle voit Marine et Tomire qui feignent de se disputer au sujet de l’avenir de leurs maîtres : Carlos se verrait libre alors que Julie serait à nouveau livrée à Dom Brusquin. Célime jubile et s’emporte à la demande de Marine de la voir intervenir en faveur de sa maîtresse.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Fatiman arrête Carlos devant Célime, dans son appartement.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : Fatiman menace Carlos de mort et Célime en demande la raison : l’esclave a été retrouvé en possession du coffret de pierreries, présent du gouverneur à Célime. La Dame prend sa servante à témoin pour expliquer qu’elle avait confié les diamants à Carlos afin qu’il les remette à un lapidaire pour les mettre en œuvre. Elle voulait ainsi faire une surprise à Fatiman en ne passant pas par son intermédiaire. Fatiman gracie donc l’esclave et Célime court le délivrer.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Agacement de Fatiman. Il entend venir Dom Brusquin.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Dom Brusquin accepte de signer mais Stamorat lui apprend que sa résolution vient trop tard car l’heure est passée. Dom Brusquin parlemente et Stamorat se résout à aller voir son maître.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Dom Brusquin se repent de sa conduite.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : En présence de Fatiman, Dom Brusquin s’engage à signer ce qu’on lui demande, à régler les frais du mariage, à être présent à la noce et à offrir, de sa main, sa femme à son futur époux.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 9 : Fatiman engage Julie à présenter ses remerciements à Dom Brusquin et s’apprête à présenter le futur mari de Julie.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 10 : Célime amène Carlos et invite Fatiman à rendre son époux à Julie avant qu’ils ne partent. Fatiman offre alors la main de Julie à Carlos. Fatiman accuse Célime de traîtrise et la condamne à paraître devant le divan.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène dernière : Dom Brusquin s’étonne du mari que l’on donne à Julie mais Fatiman rappelle leur amour fidèle. Concert finale et dernières jérémiades de Dom Brusquin.</cell>
                </row>
              </table>
            </cell>
            <cell cols="2">Acte V</cell>
            <cell>
              <table>
                <row>
                  <cell>Scène 1 : Tomire apprend à Marine que l’oncle de Carlos est mort et que son frère vient payer sa rançon. Tomire annonce le dénouement prochain et renouvelle ses vœux de mariage à Marine. Marine entend venir Dom Brusquin et propose de se cacher pour en apprendre davantage sur l’avenir de leur maître.</cell>
                  <cell>Peur du cocuage qui s’est propagée à Tomire.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 2 : Dom Brusquin accepte de signer mais Stamorat lui apprend que sa résolution vient trop tard car l’heure est passée. Dom Brusquin parlemente et Stamorat se résout à aller voir son maître.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 3 : Dom Brusquin se repent de sa conduite.</cell>
                  <cell>Abdala ???</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 4 : En présence de Fatiman, Dom Brusquin s’engage à signer ce qu’on lui demande, à régler les frais du mariage, à être présent à la noce et à offrir, de sa main, sa femme à son futur époux.</cell>
                  <cell>Abdala ??? <lb/>Dom Brusquin demande à quitter Alger le lendemain matin de la noce. Fatiman accepte et le confie à Carlos.
                    </cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 5 : Fatiman s’interroge sur la réaction de Célime et la voit venir.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 6 : Célime interroge Fatiman sur le sort de Julie : il lui apprend qu’il répond à son désir d’éloigner l’esclave et va jusqu’à la marier pour calmer ses soupçons. Colère de Célime quand elle apprend que l’époux destiné à Julie est Carlos et non Dom Brusquin. Célime refuse alors de s’unir à Fatiman sous prétexte du peu de cas qu’il fait du mariage.</cell>
                  <cell>Discours à double entente tenu par Fatiman.</cell>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 7 : Fatiman indique à Stamorat qu’il voit clair dans le jeu de Célime.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène 8 : Dom Brusquin se rend à toutes les volontés de Fatiman et celui-ci s’apprête à présenter les mariés.</cell>
                  <cell/>
                </row>
                <row>
                  <cell>Scène dernière : Dom Brusquin s’étonne du mari que l’on donne à Julie mais Fatiman rappelle leur amour fidèle. Tomire en profite pour demander à célébrer son mariage avec Marine. Concert sur les exigences de l’amour.</cell>
                  <cell>Ajout du mariage de Marine et Tomire. Concert est changé. Indication didascalique : « Six esclaves turcs, six lutteurs mores et six gladiateurs feront leurs entrées, puis chantera Julie ».</cell>
                </row>
              </table>
            </cell>
          </row>
        </table>
      </div>
      <div>
        <head>Bibliographie</head>
        <div>
          <head>Sources</head>
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              <head>Œuvres postérieures à 1660</head>
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    </back>
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